A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V W X Y Z

    
QS. m. (Gram.) c'est la dix-septieme lettre & la treizieme consonne de notre alphabet. Comme elle est toujours suivie d'un u, si ce n'est dans un petit nombre de mots, comme coq, cinq, laqs, nous terminons par cette voyelle le nom de la consonne q, & nous la nommons cu. Le systême naturel de l'épellation veut que nous la nommions que ou ke. Cette lettre répond au des Grecs & au des Hébreux.

L'articulation représentée par cette lettre est la même que celle du k, ou du c devant a, o, u, (voyez K & C). C'est une articulation linguale, dentale & forte, dont la foible répond au des Grecs, au des Hébreux : la pointe de la langue s'appuie contre les dents inférieures, & la racine s'éleve pour présenter à l'air l'obstacle qui doit en procurer l'explosion. C'est pourquoi ces deux articulations paroissent retentir au fond de la bouche & dans la trachée artere ; d'où vient que la plûpart des grammairiens les regardent comme gutturales, surtout les Allemands : gutturales appello, dit Wachter, quae in regione gutturis formantur. (Glossar. germ. proleg. sect. ij. §. 20.) Mais comme l'instrument qui opere ces articulations est la langue appuyée contre les dents inférieures ; je crois qu'il vaut mieux caractériser l'explosion par ce méchanisme que par le lieu où elle s'opere. Elle a en outre d'autres liaisons d'affinité avec les autres articulations linguales & dentales ; & je les ai détaillées ailleurs. Voyez LINGUALE.

Comme articulation linguale, elle est analogue & commuable avec les autres de la même classe ; mais comme dentale, elle a encore plus d'analogie avec les dentales, & plus avec la foible qu'avec toutes les autres.

Comme lettre, c'est un meuble qui seroit absolument inutile dans notre alphabet, s'il étoit raisonné & destiné à peindre les élémens de la voix de la maniere la plus simple ; & ce vice est commun au q & au k. Priscien en a fait la remarque il y a longtems ; quoique j'aie déja rapporté ailleurs ses paroles à ce sujet, je le citerai encore ici. K & Q, dit-il, quamvis figurâ & nomine videantur aliquam habere differentiam cum C, tamen eandem tàm in sono quàm in metro continent potestatem ; & k quidem penitùs supervacua est. Lib. II. Priscien ne se déclare que contre l'inutilité de la lettre k, quoiqu'au fond le q ne soit pas plus nécessaire ; ce grammairien apparemment étoit de ceux qui jugeoient le q nécessaire pour indiquer que la lettre u formoit une diphtongue avec la voyelle suivante, au lieu qu'on employoit le c lorsque les deux voyelles faisoient deux syllabes ; aussi voyons-nous encore qui monosyllabe au nominatif, & cui dissyllabe au datif.

Il faisoit très-bien de s'en tenir à l'usage de sa langue ; mais en y obéissant, il auroit pu & dû l'apprécier. Si l'on avoit fait usage de la diérese, qu'on eût écrit cui au nominatif & cui au datif ; on ne seroit pas tombé dans l'inconvénient réel de représenter la même articulation par deux signes différens. Si donc Varron & Licinius Calvus sont répréhensibles pour avoir rejetté le q, ce n'est pas, comme le dit D. Lancelot dans sa méthode latine (traité des lettres, ch. xix. §. 1.), parce qu'elle devoit être retenue à cause de cette distinction ; mais parce qu'ils contredisoient dans leur pratique, l'usage dont aucun particulier n'a droit de s'écarter, mais que tout homme de lettres peut discuter & juger.

" On doit observer, dit M. Duclos (rem. sur le ch. ij. de la I. part. de la gram. gén.), que le son du q est plus ou moins fort dans des mots différens : il est plus fort dans banqueroute que dans banquet... Le g (gue) est aussi plus ou moins fort : il est plus fort dans guenon que dans gueule ". J'avoue que je n'avois jamais apperçu, & que je n'apperçois point encore cette différence ; & je suis à cet égard organisé comme M. Harduin, secrétaire perpétuel de l'académie d'Arras, dont je viens d'emprunter les termes (rem. div. sur la prononc. p. 123.) je serois même tenté de croire que ce qui trompe ici la sagacité de l'illustre secrétaire de l'acad. Françoise, c'est la différence même des sons qui suivent l'une ou l'autre de ces consonnes, ou la différente quantité du même son.

L'abbé Danet, dans son dictionnaire françois-latin, dit que le q est une lettre double ; car sa figure, dit-il, est composée d'un c & d'un v renversé (en cette maniere ) joints ensemble, qui font le même son. S'il faut prendre cette preuve à la lettre, elle est plaisante ; parce que les traits de la figure ne font rien à la signification : si l'auteur a voulu dire autre chose que ce que présente la lettre, il s'est très-mal expliqué. Il devoit du moins s'étayer de ce que quelques anciens ont écrit q pour cu, comme qi, qae, qid, pour qui, quae, quid. Mais on lui auroit répliqué ce que l'auteur de la méthode latine répond à ceux qui employent cet argument : 1°. que les anciens s'abstenoient d'écrire u après q, a après k, e après d, &c. parce que le nom épellatif de la lettre avertissoit assez de la voyelle suivante, quand elle devoit être la même que celle de l'épellation alphabétique ; ce qui, pour le dire en passant, donne lieu de présumer que la méthode de Masclef pour lire l'hébreu pourroit bien n'être pas si éloignée qu'on l'imagine de l'ancienne maniere de lire. Voyez POINT. 2°. Que quand les anciens écrivoient qis, qae, qid, peut-être prononçoient-ils de même, selon la remarque de Quintilien ; fortassè etiam sicut scribebant, ita & loquebantur.

Q, comme lettre numérale, valoit 500 ; & surmonté d'une petite barre, valoit 500000.

Dans les noms propres des Romains, Q signifioit Quintus ou Quintius.

Sur nos monnoies cette lettre indique qu'elles ont été frappées à Perpignan. (B. E. R. M.)

Q q q, (Ecriture) dans la coulée & la ronde c'est un 0 & la partie médiale d'un f. Dans l'italienne c'est la 8, 1, 2, 3, 4, & 7 partie d'o, & le milieu d'un f. Ils se forment tous trois du mouvement mixte des doigts & du poignet, dans leur premiere partie, & le poignet vient au secours des doigts dans la seconde partie. Voyez le volume des Pl. à la table de l'écriture. Pl. des alphabets.


QUACERNES(Géog. anc.) Quacerni, ancien peuple d'Espagne tarragonoise, selon Ptolémée, l. II. ch. vj. Ils avoient chez eux des eaux minérales accompagnées d'un bourg. Ptolémée ne parle que du peuple & des eaux, & Antonin en fait un lieu, qu'il nomme Aquae Querquennae. Il étoit sur la route de Braguez à Astorga, à cinquante-trois mille pas de la premiere. (D.J.)


QUACHILTOS. m. (Ornithol. Hist. nat.) nom d'un des beaux oiseaux du Brésil, & qui est du genre des poules d'eau ; nos naturalistes l'appellent en latin porphyrio americanus. Il est d'un très-beau pourpre foncé, marqueté de blanc. Son bec, d'abord blanc, devient rouge avec le tems, & est semblable de forme à celui de la poule d'eau, mais ses jambes sont d'un verd jaune ; il vit autour des eaux, & se nourrit de poisson. Voyez MARGGRAVE, histor. Brasil. (D.J.)


QUADES(Géog. anc.) ancien peuple de la Germanie, qui étoit venu avec les Marcomans s'établir sur le Marus. Le pays des Quades, dont les Marovinghi de Ptolémée faisoient partie, est appellé aujourd'hui en allemand Mahrenland, & Marowia en esclavon. Il est visible qu'il a pris ce nom de celui de Marus, ou Mahrer.

Le royaume des Quades avoit été partagé en deux, les Quades occidentaux ou proprement dits, & les Quades orientaux ou Sueves du regnum Vannianum, ainsi que Pline les nomme, quoique de son tems il ne fût plus question de Vannius leur roi. Domitien marcha contre les Quades & les Marcomans, à qui il fit la guerre ; il fut mis en fuite, & conclut une paix honteuse avec ces peuples.

Cette nation entra dans la grande ligue que les Barbares firent contre l'empire romain sous Marc-Aurele, l'an 166. Il y a apparence que les Quades avoient passé le Danube, & fait des progrès dans la Pannonie, puisque cet empereur les en chassa quatre ans après, & les força eux & les Marcomans à repasser le fleuve avec perte. Les Quades s'étendoient alors jusqu'au Grau. Il ne se contenta pas de les avoir chassés au-delà des bords du Danube ; il mit encore vingt mille hommes chez les Marcomans, & chez eux ; ces troupes, toujours en mouvement, empêchoient ces peuples de labourer, de mener leurs troupeaux aux champs, faisoient des prisonniers, ôtoient toute sorte de liberté & de commerce.

Les Quades s'en trouverent si fort incommodés, qu'ils résolurent de quitter leur pays, & de se retirer dans les terres des Semnons. Marc-Aurele, qui ne vouloit que les harceler, leur coupa le chemin. Il se soucioit peu de leur pays, & son dessein n'étoit pas qu'ils le quittassent. Ils lui envoyerent des députés. Ils lui ramenerent tous les transfuges avec treize mille prisonniers, & promirent de rendre tous les autres qu'ils pouvoient encore avoir. Ils obtinrent la paix, mais non pas le pouvoir de trafiquer sur les terres de l'empire, ni d'habiter à deux lieues près du Danube.

Ce traité ne dura guere. Les Quades au lieu d'exécuter leurs promesses, assisterent les Jazyges, & les Marcomans qui étoient encore en armes. Ils chasserent leur roi Furtius, & mirent en sa place un certain Ariogese. Marc-Aurele, qui prétendoit que c'étoit à lui à donner des rois aux Quades, fut indigné de leur choix, & proscrivit leur nouveau roi, loin de confirmer la paix avec eux, quoiqu'ils offrissent de lui rendre encore 50 mille prisonniers. Ariogese fut pris, & Marc-Aurele le rélegua à Alexandrie. Les Quades firent la paix avec son fils Commode.

L'histoire de ce peuple est fort obscure depuis cette époque jusqu'au regne de Caracalla, qui se vantoit d'avoir tué Gaiobamar, roi des Quades. Sous l'empire de Valerien, Probus, qu'il avoit fait tribun, passa le Danube contre les Sarmates & les Quades, & tira des mains de ceux-ci Valerius Flaccus, jeune homme de naissance, & parent de Valerien. Sous Galien, eux & les Sarmates pillerent la Pannonie, & enfin une médaille de Numérien parle d'un triomphe sur les Quades. (D.J.)


QUADIM(Géog. mod.) village de la haute-Egypte, sur la rive occidentale du Nil. Paul Lucas fait une magnifique description des antiquités égyptiennes, colomnes, temples, palais, obélisques, sphinx, & autres merveilles qu'il dit y avoir vues ; mais toute la belle relation de ce voyageur n'a encore été confirmée par personne. (D.J.)

QUADRA, s. m. (Architect. rom.) ce mot latin signifie tantôt le filet, tantôt le petit quarré d'une moulure. Il est appellé quadra, parce que c'est un membre quarré qui sert comme de plinthe à la base du piédestal.

QUADRA, (Littérat.) ce terme désignoit chez les Romains, 1°. une assiette de bois, dans laquelle le petit peuple alloit recevoir son pain aux distributions publiques ; & cette assiette étoit la marque (tessera), à laquelle on reconnoissoit ceux qui devoient avoir part à cette distribution. 2°. Quadra étoit encore ce que les Romains appelloient en deux mots, quadratum panem ; & les Grecs , un pain, , habentem incisuras, comme parle Athénée, c'est-à-dire un pain partagé en petits pains marqués par des lignes qu'on tiroit dessus en quarré. (D.J.)


QUADRAGENAIREadj. (Gramm.) nombre composé de quarante unités. Le nombre quadragenaire est mystérieux selon S. Augustin. On dit une femme, un homme quadragenaire, ou qui a quarante ans.


QUADRAGÉSIMALJEUNE, (Théolog.) c'est-à-dire jeûne du carême, ainsi nommé parce qu'il dure quarante jours, du latin quadragesimus, quarantieme. Voyez CAREME.


QUADRAGÉSIMALESOFFRANDES, (Théol.) quadragesimalia ; nom qu'on donnoit en Angleterre à des dons ou offrandes qu'on faisoit vers le tems de la mi-carême. Voyez OFFRANDE.

C'étoit autrefois l'usage dans ce royaume que le quatrieme dimanche de carême, le peuple allât en procession à la cathédrale, & fit des offrandes au maître-autel. On faisoit la même chose dans la semaine de la Pentecôte ; mais comme ces dernieres oblations furent converties en une contribution de deniers appellés pentecostaux, les oblations de la mi-carême le furent aussi en quadragésimales, ou en deniers quadragésimaux. On les appelloit encore laetare Jerusalem des premiers mots de l'introïte de la messe qu'on chante ce dimanche là. Voyez PENTECOSTALES.


QUADRAGÉSIMEDIMANCHE DE LA (Hist. ecclésiast.) c'est le premier dimanche de carême, ainsi nommé parce qu'il est environ le quarantieme jour avant Pâques. Par la même raison on nomme les dimanches qui le précedent, quinquagésime, sexagésime, septuagésime. Voyez QUINQUAGESIME, &c.


QUADRANS. m. (Bijout.) les Lapidaires appellent ainsi un instrument dont ils se servent pour tenir les pierres fines sur la roue lorsqu'ils les taillent. Ce nom lui a été donné parce qu'il est composé de plusieurs pieces qui quadrent ensemble, & se meuvent avec des vis, qui faisant tourner le bâton, forment régulierement les différentes figures qu'on veut donner à la pierre.

QUADRAN-SOLAIRE, (Gnomon antiq.) solarium. Voyez CADRAN-SOLAIRE.

Je ne veux que nommer ici les divers cadrans solaires de l'antiquité, parce que la connoissance de leurs noms bisarres est nécessaire aux modernes pour entendre les écrits des anciens.

L'hémicycle faisoit le plus célebre de leurs cadrans solaires. Il étoit creusé dans un quarré, & coupé en inclinaison comme l'équinoxial. On en donnoit l'invention à Bérose chaldéen. Il est vraisemblable que ce cadran de Bérose étoit un plinthe coupé en hémicycle, ou demi-cercle concave, au bout d'en-haut qui regarde le septentrion. Il y avoit un style sortant du milieu de l'hémicycle, dont la pointe répondant au centre de l'hémicycle, représentoit le centre de la terre ; & son ombre tombant sur la concavité de l'hémicycle, qui représentoit l'espace qu'il y a d'un tropique à l'autre, marquoit non-seulement les déclinaisons du soleil, c'est-à-dire les jours des mois, mais aussi les heures de chaque jour. Cela se pouvoit faire en divisant la ligne de chaque jour en douze parties ; ce qui doit s'entendre des jours qui sont depuis l'équinoxe d'automne jusques à celui du printems. Il étoit nécessaire d'augmenter l'hémicycle aux autres jours, qui ont plus de douze heures équinoxiales.

L'hémisphere du cadran d'Aristarchus, samien, étoit un cadran horisontal, dont les bords étoient un peu rehaussés, pour remédier à l'inconvénient de celui dont le stile étoit droit & élevé perpendiculairement sur l'horison ; car ces bords ainsi rehaussés, empêchent que les ombres ne s'étendent trop loin.

L'astronome Eudoxus trouva le cadran-solaire nommé l'araignée. Apollonius passoit pour avoir inventé le plinthe ou quarreau qui fut posé dans le cirque de Flaminius.

Scopas syracusain, avoit fait celui qu'on appella prostahistoroumena, nom qui lui fut donné, parce que les figures des signes y étoient peintes.

Parménion étoit l'inventeur du prosparhma, c'est-à-dire du cadran qui pouvoit servir à tous les climats de la terre.

Théodose & Andréas Patroclés trouverent le pelécinon, qui étoit un cadran fait en hache, où les lignes transversales qui marquoient les signes & les mois, étoient serrées vers le milieu, & élargis vers les côtés ; ce qui leur donnoit la forme d'une hache à deux côtés.

Enfin Dionysiodorus fit le cône, & Apollonius le carquois. Les cadrans en cône & en carquois, sont apparemment les verticaux.

Au reste si vous aimez autant les Lacédémoniens que la Gnomonique, vous apprendrez avec plaisir, que ce fut à Lacédémone qu'on vit pour la premiere fois les fruits de cette science ingénieuse, qui a trouvé la proportion des ombres pour la construction des cadrans solaires. Diogene de Laerce dit dans la vie d'Anaximandre, que ce fameux philosophe, à qui les Mathématiques doivent tant de belles découvertes, inventa les cadrans solaires, & fit le premier de sa propre main à Lacédémone. Pline demeure bien d'accord que ce cadran fut fait à Lacédémone, mais il en attribue la construction au philosophe Anaximene. En ce tems-là, les Philosophes étoient mathématiciens. Anaximandre avoit 64 ans la seconde année de la cinquante-huitieme olympiade ; c'est-à-dire l'an 547 avant la naissance de Jesus-Christ. Anaximene naquit 528 ans avant l'ere chrétienne. Pétau dispute à Diogene Laerce, la connoissance du tems de sa mort.

Les cadrans solaires passerent de la Grece en Sicile, d'où Valerius Messala, consul en 491, apporta à Rome le cadran de Catane, qui servit près de cent ans, jusqu'à ce que Quintus Marcius, consul en 567, en eut fait au même lieu un autre adapté au climat de Rome. Cependant on reconnut bien-tôt que le soleil avec le cadran le plus parfait, n'étoit d'aucun secours pendant la nuit, ni même pendant le jour, lorsque le tems étoit couvert. Scipion Nasica, consul en 591 & 598, s'avisa le premier d'y substituer une horloge hydraulique, qui fût également utile la nuit & le jour. Enfin Ctésibius, qui fleurissoit vers l'an 613 de Rome, inventa une horloge, où les rouages furent employés selon la description de Vitruve, savamment expliquée par M. Perrault. (D.J.)


QUADRANGLES. m. terme de Géométrie, autrefois usité par les anciens auteurs pour signifier une figure qui a quatre côtés ou quatre angles. Voyez QUADRILATERE.

Le quarré, le parallélogramme, le trapese, le rhombe & le rhomboïde, sont des quadrangles ou des figures quadrangulaires. Voyez QUARRE, PARALLELOGRAMME, RHOMBE, &c.

Le quarré est un quadrangle régulier ; le trapese en est un irrégulier. Voyez TRAPESE. Chambers. (E)


QUADRANGULAIREadj. (Géométrie) se dit d'une figure qui a quatre angles. Voyez QUADRANGLE.


QUADRANSS. m. (Monn. rom.) c'étoit chez les Romains la plus petite monnoie de cuivre, excepté le sextans ; mais parce que le mot quadrans signifie proprement & premierement, la quatrieme partie de quelque chose, il est certain que la piece qui se nommoit quadrans s'appelloit ainsi, parce qu'elle étoit la quatrieme d'une plus haute monnoie. Donc le quadrans du tems de la république, étoit la quatrieme partie de l'as ; mais je ne voudrois pas nier que sous les derniers empereurs, diverses petites pieces de cuivre n'aient eu le nom de quadrans, dont l'une étoit moindre que l'autre en poids & en valeur. Quant au poids du quadrans, quoiqu'il ait varié, nous en pouvons dire quelque chose avec certitude, parce que tous les auteurs qui ont parlé de l'as, sont d'accord que du commencement, il pesoit une livre romaine, c'est-à-dire douze onces romaines ; donc il s'ensuit qu'alors le quadrans étoit du poids de trois onces, & par cette raison s'appelloit triuncis, comme Pline le rapporte, lib. XXXIII.

Mais nous apprenons du même auteur, que du tems de la premiere guerre punique, la république ne pouvant fournir aux excessives dépenses qu'il lui falloit soutenir, fit battre des as du poids de deux onces, dont elle paya ses dettes, parce qu'elle y gagnoit les cinq sixiemes ; alors donc il est évident que le quadrans pesoit demi-once, c'est-à-dire quatre drachmes.

Les mêmes Romains ayant été vaincus par Annibal, l'année que Fabius Maximus fut dictateur, ils diminuerent encore de la moitié le poids des as, & les firent du poids d'une once seulement ; desorte qu'alors le quadrans ne pesoit qu'un quart d'once, c'est-à-dire deux drachmes.

Enfin peu de tems après, ajoute Pline, les as furent faits du poids de demi-once par la loi papiria, & par conséquent le quadrans fut réduit au poids d'une seule drachme.

Il y avoit à Rome sous Auguste, des bains publics, où le petit peuple étoit reçu pour un quadrans ; c'est pourquoi Séneque les appelle rem quadrantariam, ou comme nous dirions les bains d'un sol. Juvenal y fait allusion quand il dit :

Nec pueri credunt, nisi qui nondum aere lavantur.

" Les enfans même ne le croyent pas ; il n'y a que ceux qui ne payent rien pour leurs bains qui donnent créance à de telles chimeres. " (D.J.)


QUADRANTALS. m. (Mesure rom.) Le quadrantal ou l'amphore capitoline, étoit une mesure fixe d'un pié cubique, & qui pouvoit comprendre autant de vin qu'il en falloit pour faire le poids de quatre-vingt livres. Voyez les notes du P. Rouillé sur l'Histoire romaine, liv. XXIV. p. 500. Il faut distinguer le quadrantal, ou l'amphore capitoline, de l'amphore ordinaire, qui étoit une mesure indéterminée, tantôt plus grande, & tantôt plus petite, & dans laquelle les Romains avoient coutume de conserver leur vin. (D.J.)


QUADRATadj. (Astr.) quadrat aspect, c'est un aspect de planetes distantes l'une de l'autre de la quatrieme partie du Zodiaque, c'est-à-dire, de 90 degrés. L'aspect quadrat s'appelle aussi quadrature. Voyez ASPECT, ADRATURETURE. On marque ainsi le quadrat aspect . (E)

QUADRAT, s. m. piece de fonte de caractere d'Imprimerie, dont chaque sorte de fonte, ou corps de caractere est assorti. Ces pieces, qui sont plus basses de quatre lignes que la lettre, & de différente grandeur pour la justification des lignes, remplissent celles dont les mots n'en contiennent qu'une partie, & dont le restant paroît vuide à l'impression, elles forment de même les alinea, le blanc des titres, & ceux qu'occasionnent assez fréquemment les ouvrages en vers. Voyez table des caracteres.


QUADRATAE(Géog. anc.) ancien lieu d'Italie sur la route de Milan à Vienne, ville des Gaules, entre Rigomagnum & Taurinos. On croit que c'est présentement Crescentino, dans le marquisat d'Yvrée, au Piémont. (D.J.)


QUADRATARIUSS. m. (Littérat.) La signification ordinaire de quadratarius est, un ouvrier qui équarrit de la pierre ou du marbre. Les lapicidae ou quadratarii sont mis dans la même classe, loi premiere, au code de excusationibus artificum ; mais en fait de pierre ou de marbre quarré, il s'en tailloit pour beaucoup d'autres ouvrages, que pour le corps solide des bâtimens. On en scioit de diverses couleurs, & l'on en formoit des quarrés plus ou moins grands, dont on revêtoit les murs, & dont on embellissoit par compartimens les pavés des temples & d'autres édifices publics & particuliers.

L'art de tailler & d'employer ainsi ces pierres, étoit un métier tout autre que celui d'équarrisseur ordinaire, & s'appelloit ars quadrataria. Ce terme est employé dans une légende très-ancienne des quatre couronnés, qui furent martyrisés sous Dioclétien : dum Diocletianus omnes metallicos congregaret, invenit Claudium, Castorium, Symphorianum & Nicostratum, mirificos in arte quadrataria. Les ouvriers qui en faisoient profession, s'appelloient quadratarii, & leur ouvrage opus quadratarium. (D.J.)


QUADRATINS. m. piece de fonte de caractere d'Imprimerie. Chaque corps de caractere a ses quadratins ; ils sont, ainsi que les quadrats & espaces, plus bas de quatre lignes que les lettres. Les quadratins sont exactement quarrés, & d'usage au commencement d'un article, après un alinea, & très-fréquens dans les ouvrages où les chiffres dominent, comme ceux d'algebre ou d'arithmétique. Le quadratin est régulier dans son épaisseur ; deux chiffres ensemble font celle d'un quadratin. Il y a en outre des demi quadratins de l'épaisseur d'un chiffre pour la plus grande commodité de l'art. Voyez table des caracteres.


QUADRATIQUEadj. (Algebre) équation quadratique, qu'on appelle plus communément équation du second degré, c'est une équation où la quantité inconnue monte à deux dimensions, c'est-à-dire une équation qui renferme le quarré de la racine ou du nombre cherché : telle est l'équation x2 = a + b2 Voyez EQUATION.

Les équations quadratiques sont de deux especes ; les unes sont pures ou simples, & les autres sont affectées.

Les équations quadratiques simples sont celles où le quarré de la racine inconnue se trouve seul, & est égal à un nombre donné ou à une quantité connue ; comme dans les équations x x = 36 : y y = 133225 ; x x = a a + b b.

La résolution de ces équations est fort aisée ; car il est évident qu'il ne s'agit que d'extraire la racine quarrée du nombre ou de la quantité connue. Voyez RACINE.

Ainsi dans la premiere équation, la valeur de x est égale à 6 ; dans la seconde, y = 365.

Les équations quadratiques affectées sont celles qui renferment quelque puissance intermédiaire du nombre inconnu, outre la plus haute puissance de ce nombre, & le nombre absolu donné ; telle que l'équation x x + 2 b x = 100.

Toutes les équations de cet ordre sont représentées par l'une ou l'autre des formes suivantes, x x + e x = R. x x - e x = R. e x - x x = R.

Il y a différentes méthodes d'extraire les racines des équations quadratiques affectées ; la plus commode est celle-ci : supposons que x2 + a x = b2, on rendra x2 + a x un quarré parfait, en y ajoûtant , afin d'avoir x x + a x + , qui est le quarré de : après quoi, la racine quarrée peut s'extraire de la maniere suivante :

Voyez au reste des remarques importantes sur ces formules, au mot EQUATION ; & sur la construction des équations quadratiques, voyez CONSTRUCTION.

Au lieu des caracteres + & -, quelques auteurs ont fait usage de points, ainsi qu'on peut le voir dans les équations suivantes.

Remarquez qu'on tire la double racine positive & négative de b2 + 1/4 a a, & qu'on ne tire que la simple racine x + 1/2 a du premier membre, quoiqu'on pût tirer encore la racine - x - 1/2 a. Mais si on faisoit + x + 1/2 a = + , cela ne produiroit jamais que deux valeurs de x, quelque combinaison que l'on fît des signes. Voilà pourquoi on se contente d'extraire la double racine d'un des membres. On pourroit faire + x + a/2 = ; & cela donneroit les mêmes valeurs de x. (O)


QUADRATRICES. f. en Géométrie, est une courbe méchanique, par le moyen de laquelle on peut trouver des rectangles ou quarrés égaux à des portions de cercle, ou en général à des portions d'espaces curvilignes. Voyez CERCLE, QUADRATURE, &c.

Pour parler plus exactement, la quadratrice d'une courbe est une courbe transcendante décrite sur le même axe, dont les demi-ordonnées étant connues, servent à trouver la quadrature des espaces qui leur correspondent dans l'autre courbe. Voyez COURBE.

Par exemple, on peut appeller quadratrice de la parabole A M C, la courbe A N D (Pl. analys. fig. 21), dans laquelle les ordonnées P N, sont telles que celle dans laquelle A P M A = P N2, ou A P M A = A P P N, ou enfin celle dans laquelle A P M A = P N, multiplié par une constante a. Voilà donc trois especes de quadratrices de la parabole.

Les plus célebres des quadratrices, sont celles de Dinostrate & de M. Tschirnhausen pour le cercle.

La quadratrice de Dinostrate est une courbe A M m m (Pl. analys. fig. 22.), par le moyen de laquelle on trouve la quadrature du cercle, non point géométriquement, mais d'une maniere méchanique. Elle est ainsi appellée de Dinostrate, qui en est l'inventeur.

Voici sa génération. Divisez le quart de cercle A N B, en tel nombre de parties égales que vous voudrez, en N, n, &c. Divisez de même le rayon A C, en un égal nombre de parties aux points P, p, &c. menez les rayons C N, c n, &c. enfin sur les points P, p, &c. élevez les perpendiculaires P M, p m, &c. Joignez ces lignes, & vous aurez autant de points M, m, que vous aurez fait de divisions ; on peut engendrer la quadratrice de Dinostrate par un mouvement continu, en supposant que le rayon C N décrive uniformément par son extrêmité N l'arc A B, & que pendant ce tems une regle mobile P M, demeurant toujours parallele à elle-même, se meuve uniformément le long de A C ; ensorte que la regle P M, arrive en C, lorsque le rayon C A tombe en C B, l'intersection continuelle M du rayon C N, & de la regle P M, décrira la quadratrice A M D.

Par la construction, A N B : A N : : A c : A P ; c'est pourquoi si A N B = a, A c = b, A N = x, A P = y ; on aura a x = b y. Voyez QUADRATURE.

La quadratrice de Tschirnhausen, est une courbe transcendante A M m m B (fig. 23.), par le moyen de laquelle on trouve également la quadrature du cercle. M. Tschirnhausen l'a inventée à l'imitation de celle de Dinostrate.

Voici sa formation. Divisez le quart de cercle A N B, & son rayon A c, en un égal nombre de parties, comme dans les premiers cas ; des points P, p &c. menez les lignes droites P M, p m, &c. paralleles à C B ; & des points N n, les lignes N M, n m, paralleles à A c ; joignez les points A, M, m, & vous aurez la quadratrice, dans laquelle A N B : A N : : A C : A P.

Puisque A N B : A N : : A C : A P ; si A N B = a, A c = b, A N = x, & A P = y ; a x = b y. Voyez QUADRATURE. On peut décrire cette courbe par un mouvement continu, en supposant deux regles, N M, P M, perpendiculaires l'une à l'autre, qui se meuvent toujours uniformément & parallelement à elles-mêmes, l'une sur le quart de cercle A C, l'autre sur le rayon.


QUADRATUM(Géog. anc.) La notice de l'empire nomme deux lieux de ce nom ; l'un dans la premiere Pannonie ou la Norique Ripense, & ce lieu paroît être aujourd'hui Wisselbourg ; l'autre Quadratum étoit dans la basse Pannonie, & se nomme aujourd'hui Gurckfeld. (D.J.)


QUADRATURES. f. terme de Géométrie ; maniere de quarrer ou de réduire une figure en un quarré, ou de trouver un quarré égal à une figure proposée.

Ainsi la quadrature d'un cercle, d'une parabole, d'une ellipse, d'un triangle, ou autre figure semblable, consiste à faire un quarré égal en surface à l'une ou à l'autre de ces figures. Voyez CERCLE. &c.

La quadrature des figures rectilignes est du ressort de la Géométrie élémentaire ; il ne s'agit que de trouver leurs aires ou superficie, & de la transformer en un parallelogramme rectangle.

Il est facile ensuite d'avoir un quarré égal à ce rectangle, puisqu'il ne faut pour cela que trouver une moyenne proportionnelle entre les deux côtés du rectangle. Voyez AIRE, QUARRE. Voyez aussi les méthodes particulieres de trouver les superficies de ces figures aux mots TRIANGLE, PARALLELOGRAMME, TRAPESE, &c.

La quadrature des courbes, c'est-à-dire la maniere de mesurer leur surface, ou de trouver un espace rectiligne égal à un espace curviligne, est une matiere d'une spéculation plus profonde, & qui fait partie de la Géométrie sublime. Archimede paroît être le premier qui ait donné la quadrature d'un espace curviligne, en trouvant la quadrature de la parabole.

Quoique la quadrature des figures, sur-tout celle du cercle, ait été l'objet de l'application des plus fameux mathématiciens de l'antiquité, on peut dire qu'on n'a rien fait de considérable sur cette matiere, que vers le milieu du dernier siecle ; savoir en 1657, que MM. Neil & Brounker, & après eux M. Christophle Wren, ont trouvé les moyens de démontrer géométriquement l'égalité de quelques espaces curvilignes courbes, avec des espaces rectilignes.

Quelques tems après, plusieurs géomêtres, tant anglois que des autres nations, firent les mêmes tentatives sur d'autres courbes, & réduisirent le problême au calcul analytique. Mercator en publia pour la premiere fois l'essai en 1688, dans une démonstration de la quadrature de l'hyperbole de milord Brounker, dans laquelle il se servit de la méthode de Wallis pour réduire une fraction en une suite infinie par le moyen de la division.

Il paroît cependant, pour le dire en passant, que M. Newton avoit déja découvert le moyen de trouver la quadrature des courbes par sa méthode des fluxions, avant l'année 1668. Voyez FLUXION.

Messieurs Christophe Wren & Huyghens se disputent la gloire d'avoir découvert la quadrature d'une portion de la cycloïde. M. Leibnitz découvrit ensuite celle d'une autre portion ; & en 1699. M. Bernoulli découvrit celle d'une infinité de segmens & de secteurs de cycloïde. Voyez les mém. de l'acad. de 1699.

QUADRATURE DU CERCLE, est la maniere de trouver un quarré égal à un cercle donné. Ce problême a occupé inutilement les mathématiciens de tous les siecles. Voyez CERCLE.

Il se réduit à déterminer le rapport du diamêtre à la circonférence, ce qu'on n'a pu faire encore jusqu'ici avec précision.

Si ce rapport étoit connu, on auroit aisément la quadrature du cercle, puisqu'il est démontré que sa surface est égale à celle d'un triangle rectangle qui a pour hauteur le rayon du cercle, & pour base une ligne égale à sa circonférence. Il n'est donc besoin pour quarrer le cercle que de le rectifier. Voyez CIRCONFERENCE & RECTIFICATION.

Le problême de la quadrature du cercle consiste proprement dans l'alternative de trouver cette quadrature ou de la démontrer impossible. La plûpart des géomêtres n'entendent par quadrature du cercle que la premiere partie de cette alternative ; cependant la seconde resoudroit parfaitement le problême. M. Newton a déja démontré dans le premier livre de ses principes mathématiques, sect. VI. tom. XXVIII. que la quadrature indéfinie du cercle, & en général de toute courbe ovale, étoit impossible, c'est-à-dire qu'on ne pouvoit trouver une méthode pour quarrer à volonté une portion quelconque de l'aire du cercle ; mais il n'est pas encore prouvé qu'on ne puisse avoir la quadrature absolue du cercle entier. Si on avoit le rapport du diamêtre à la circonférence, on auroit, comme on l'a déja dit, la quadrature du cercle, d'où il suit que pour quarrer le cercle il suffit de le rectifier, ou plutôt que l'un ne peut se faire sans l'autre. Il n'y a point de courbe qui réellement & en elle-même ne soit égale à quelque ligne droite, car il n'y en a point que l'on ne puisse concevoir exactement enveloppée d'un fil, & puis développée ; mais il faut pour les géomêtres que ce qu'ils connoissent de la nature de la courbe puisse leur servir à trouver cette ligne droite, ou ce qui revient au même, il faut que cette ligne soit renfermée dans des rapports connus, de maniere à pouvoir elle-même être exactement connue. Or quoiqu'elle y soit toujours renfermée, elle ne l'est pas toujours de la maniere dont nous aurions besoin ; au-delà d'un certain point, qui n'est pas même fort éloigné, nos lumieres nous abandonnent & aboutissent à des ténebres.

Ceux qui desireront un plus grand détail sur la quadrature du cercle, peuvent avoir recours à l'ouvrage que M. Montucla a publié en 1754. sur ce sujet, sous le titre d'histoire des recherches sur la quadrature du cercle. Ils y trouveront un recit fidele, savant & raisonné des travaux des plus grands géomêtres sur cette matiere, & ils y apprendront à se prémunir contre les promesses, les jactances & les inepties des quadrateurs. Une de leurs principales prétentions est de croire que le problême de la quadrature du cercle est fort important pour les longitudes ; en quoi ils se trompent grossierement, ces deux problêmes n'ayant aucun rapport.

Plusieurs géometres ont approché fort près de ce rapport. Archimede paroît avoir été un des premiers qui ont tenté de le découvrir, & a trouvé par le moyen des polygones réguliers de 96 côtés inscrits & circonscrits au cercle, que ce rapport est comme 7 à 22. Voyez POLYGONE.

Quelques-uns des modernes ont approché beaucoup plus près, sur-tout Ludolphe de Ceulen qui a trouvé après des calculs infinis, qu'en supposant que ce diamêtre soit 1, la circonférence est plus petite que 3. 14159265358979323846264338387950 ; mais plus grande que ce même nombre en mettant l'unité pour dernier chiffre.

Les géometres ont encore eu recours à d'autres moyens, sur-tout à des especes de courbes particulieres qu'on appelle quadratrices ; mais comme ces courbes sont méchaniques ou transcendantes, & non point géométriques, elle ne satisfait point exactement à la solution du problême. Voyez TRANSCENDANT, MECHANISME & QUADRATRICE.

On a donc employé à l'analyse, & tenté de resoudre ce problême par plusieurs méthodes différentes, & principalement en employant certaines séries qui donnent la quadrature approchée du cercle par une progression de termes. Voyez SERIE ou SUITE.

En cherchant par exemple une ligne droite égale à la circonférence d'un cercle, on trouve en supposant pour le diamêtre, que la circonférence doit être 4/1 - 4/3 + 4/5 - 4/7 + 4/9 &c. qui forment une suite infinie de fractions dont le numérateur est toujours 4, & dont les dénominateurs sont dans la suite naturelle des nombres inégaux ; & tous ces termes sont alternativement trop grands & trop petits.

Si l'on pouvoit trouver la somme de cette suite, on auroit la quadrature du cercle ; mais on ne l'a point encore trouvée, & il y a même apparence qu'on ne la découvrira de long-tems. On n'a point cependant démontré que la chose soit impossible, ni par conséquent que la quadrature du cercle le soit aussi.

D'ailleurs comme on peut exprimer la même grandeur par différentes séries, il peut se faire aussi que l'on puisse exprimer la circonférence d'un cercle par quelque autre série dont on puisse trouver la somme. Nous avons deux suites infinies qui expriment la raison de la circonférence au diamêtre, quoique d'une maniere indéfinie. La premiere a été découverte par M. Newton, qui a trouvé, en supposant pour le rayon, que le quart de la circonférence est 1 - 1/6 - 1/40 - 1/112, &c. La seconde est de M. Leibnitz, qui trouve de même que le rayon étant l'arc de 45 degrés, est la moitié de 1 - 1/3 + 1/5 - 1/7 + 1/9, &c. Voici la maniere de trouver chacune de ces séries par le calcul intégral ; on la doit à M. Newton.

Quadrature du cercle par M. Newton. Soit le rayon du cercle A C = 1 (Planch. d'anal. fig. 24.) C P = x, y = (1 - x2), & (1 - x2) = 1 - 1/2 x2 - 1/8 x4 - 1/16 x6 - 5/128 x8 - 7/256 x10, &c. à l'infini. Voyez BINOME. Donc P p m M ou y d x = d x - 1/2 x2 d x - 1/8 x4 d x - 1/16 x6 d x - 5/128 - x8 d x - 7/256 - x10 d x - &c. à l'infini.

Et s y d x = x - 1/6 x3 - 2/40 x5 - 1/112 x5 - 5/1152 x9 - 3/2816 x11 à l'infini.

Lorsque x devient égal au rayon C A, l'espace D C P M se change en un quart de cercle. Substituant donc 1 à x, le quart de cercle sera 1 - 1/6 - 1/40 - 1/112 - 5/1152 - 7/2816, &c. à l'infini. Cette même série peut servir à mesurer la surface entiere du cercle, en supposant son diamêtre = 1.

Quadrature du cercle par M. Leibnitz. Soit la tangente K B (Pl. d'analyse fig. 25.) = x, B C = 1 ; la secante A C infiniment proche de C K ; décrivez avec le rayon C K le petit arc K L : vous aurez A K = d x, K C = (1 + x2). Maintenant puisque les angles B & L sont droits, & l'angle B K C = K A C, à cause de la petitesse infinie de l'angle K C L, nous aurons

K C : B C : : K A K L, c'est-à-dire

(1 + x2) : 1 : : d x :

De plus, C K : K L : : C M : m M ; c'est-à-dire

(1 + x2) : : : 1 :

Donc le secteur C M m = 1/2 d x : (1 + x2) = 1/2 (d x - x2 d x + x4 d x - x6 d x + x8 d x - x10 &c.) & l'on trouve, par le calcul intégral, le secteur B C M (dont la tangente K B est x) 1/2 + 1/6 x3 + 1/10 x5 - 1/14 x7 + 1/18 x9 - 1/22 x11 &c. & ainsi à l'infini. C'est pourquoi si B M est la huitieme partie du cercle ou un arc de 45d. le secteur sera 1/2 - 6/1 + 1/10 - 1/14 &c. à l'infini. Donc le double de cette série 1 - 1/3 + 1/5 - 1/7 + 1/6 - 1/11 &c. à l'infini, est le quart de cercle.

Quadrature des lunules. Quoiqu'on n'ait point encore trouvé jusqu'ici la quadrature parfaite du cercle entier, on a cependant découvert les moyens de quarrer plusieurs de ses portions. Hippocrate de Chio est le premier qui ait quarré une portion du cercle à qui sa figure a fait donner le nom de lunule. Voyez LUNULE.

Cette quadrature ne dépend point de celle du cercle ; mais aussi ne s'étend-elle que sur la lunule entiere ou sur sa moitié.

Quelques géomêtres modernes ont cependant trouvé la quadrature d'une portion de la lunule à volonté, indépendamment de celle du cercle ; mais elle est toujours sujette à certaine restriction, qui empêche que la quadrature ne soit parfaite, ou, pour me servir du langage des Géomêtres, absolue & indéfinie.

M. le Marquis de l'Hôpital a donné en 1701 une nouvelle maniere de quarrer les parties de la lunule prises en différentes manieres & sous différentes conditions : mais elle est sujette aux mêmes imperfections que les autres.

Quadrature de l'ellipse. L'ellipse est une courbe dont on n'a point encore trouvé la quadrature exacte ; ce qui oblige d'avoir recours à une série.

Soit AC (Planc. anal. fig. 26.) = a, G C = C, P C = x, on aura



mais (a2 - x2) = a - . à l'infini. Donc y d x = e d x - - - <5dx8cx/128a8> - <7cx10dx/256a10>, &c. à l'infini.

Si l'on substitue a au lieu de x, le quart de l'ellipse sera a c - 1/6 a c - 1/40 a c - 5/112 a c - 5/1152 a c - 7/2816 a c, &c. à l'infini.

Il suit de là 1°. que si on fait a c = 1, l'aire de l'ellipse sera = 1 - 1/6 - 1/40 - 1/112 - 5/1152 - 7/2816, &c. à l'infini. D'où il est évident qu'une ellipse est égale à un cercle dont le diamêtre est moyen proportionnel entre les axes conjugués de cette même ellipse. 2°. Qu'une ellipse est à un cercle dont le diamêtre est égal au grand axe, comme a c à a2 ; c'est-à-dire comme c à a, ou comme le petit axe est au grand. D'où il suit que la quadrature du cercle donne celle de l'ellipse ; & au contraire.

Quadrature de la parabole. Soit a x = y2 l'équation de la parabole, donc y = a x = a1/2 x 1/2 : donc y d x = a1 : 2 x1 : 2 d x. Donc s y d x = 2/3 a1 : 2 x3 : 2 = 2/3 .

D'où il suit que l'espace parabolique est au rectangle de la demi-ordonnée par l'abscisse comme 2/3 x y à x y, c'est-à-dire comme 2 à 3.

Si la courbe n'étoit point décrite, & que l'on n'eût que son équation, ensorte que l'on ne sût point où l'on doit fixer l'origine de x, on feroit x = 0 dans l'intégrale ; & effaçant tout ce qui est multiplié par x, on ajouteroit le restant, supposé qu'il y en eût, avec un signe contraire, & l'on auroit la quadrature cherchée. Mais cela demanderoit un détail trop profond pour appartenir à cet ouvrage : on en verra un exemple à la fin de cet article.

Quadrature de l'hyperbole. Mercator de Holstein, l'inventeur des suites infinies, est le premier qui en ait donné la quadrature analytique : il trouvoit sa suite par la division ; mais MM. Newton & Leibnitz ont perfectionné sa méthode.

Maniere de quarrer l'hyperbole entre ses asymptotes, suivant la méthode de Mercator. Puisque dans une hyperbole entre ses asymptotes, a2 = b y + x y ; si a = b = 1, ce que l'on peut supposer, puisque la détermination de b est arbitraire, on aura

,

c'est-à-dire (en faisant actuellement la division)

à l'infini.

Quadrature de la cycloïde. On a dans cette courbe (Pl. anal. fig. 27.) A Q : Q P : : M S : m S.

Soit donc A Q = x, A B = 1, on aura P Q = (x - x x) & m S = d x (x - x x) : x. Mais il est démontré que (x - x x) = x1 : 2 - 1/2 x3 : 2 - 1/8 x5 : 2 - 1/16 x7 : 9 &c. à l'infini. Donc d x (x - x x) : x = les numérateurs des exposans étant diminués d'une unité dans la division par x) x - 1 : 2 d x -1/2 : x1 : 2 d x - 1/8 x3 : 2 d x - 1/16 x5 : 2 d x &c. à l'infini. Donc la somme 2 x1 : 2 - 1/3 x 3 : 2 - 1/20 x 5 : 2 - 1/36 x 7 : 2 &c. à l'infini, est la demi-ordonnée de la cycloïde Q M comparée à l'axe A P. D'où il suit que A M Q ou l'élément Q M S q de l'espace cycloïdal A M Q = 2 x1 : 2 d x - 1/3 x3 : 2 d x - 1/20 x5 : 2 d x - 1/56 x7 : 2 d x &c. à l'infini. Donc la somme = 4/3 x3 : 2 - 2/15 x5 : 2 - 1/70 x7 : 2 - 1/252 x9 : 2 &c. à l'infini, exprime le segment de la cycloïde A M Q.

Si l'on multiplie m S = d x (x - x x) : x par G M = A Q = x, on aura l'élément de l'aire A M G = d x (x - x x) qui étant le même que l'élément du segment de cercle A P Q, l'espace A M G sera égal au segment de cercle A P Q, & par conséquent l'aire A D C égale au demi-cercle A P B.

Puis donc que C B est égal à la moitié de la circonférence du cercle, si l'on suppose celle-ci = p & A B = a, le rectangle B C D A sera = a p ; & le demi-cercle A P B, & par conséquent l'espace cycloïdal externe A D C = 1/4 a p. Donc l'aire de la moitié de la cycloïde A C B = 3/4 a p, & A M C B P A = 1/2

a p. D'où il suit que l'aire de la cycloïde est triple du cercle générateur.

Quadrature de la logarithmique. Soit la soutangente P T (Pl. anal. fig. 28.) a, P M = x, = P p = d x, on aura

Donc l'espace indéterminé H P M I est égal au rectangle de P M par P T. Soit 1°. Q s = z pour-lors l'espace 1 S Q H = a z (& par conséquent S M P Q = a y - a z = a (y - z) ; c'est-à-dire que l'espace compris entre deux ordonnées est égal au rectangle de la soutangente, par la différence de ces ordonnées. 2°. Donc l'espace B A P M est à l'espace P M S Q comme la différence des ordonnées A B & P M est à celle des ordonnées P M & S Q.

Quadrature de la courbe de Descartes, exprimée par l'équation b2 : x2 : : b - x : y.

Quadrature de toutes les courbes comprises sous l'équation générale y m (x + a).

Pour rendre l'élément intégrable, supposons

s y d x = = (x + a) (x + a) soit x = 0 : le restant a a. Donc l'aire de la courbe (x + a) (x + a) - .

Cette derniere opération est fondée sur deux principes. 1°. que l'aire de la courbe doit être nulle quand x = 0.2°. Il faut que l'aire de la courbe soit telle que sa différence soit d x. (x + a)1 : m. Or en ajoutant le constant - , avec un signe contraire, on satisfait à ces deux conditions, comme il est facile de s'en assûrer.

Comme les méthodes pour la quadrature des courbes sont presque toutes fondées ou sur les suites, ou sur le calcul intégral, il s'ensuit que pour se mettre au fait de cette matiere, il faut se rendre familier l'usage des suites & les méthodes du calcul intégral. Voyez SUITE & CALCUL INTEGRAL. (O).

QUADRATURE DE LA LUNE, en Astronomie, est l'aspect ou la situation de la lune, lorsque sa distance au soleil est de 90 degrés. Voyez LUNE.

La quadrature de la lune arrive lorsqu'elle est dans un point de son orbite également distant des points de conjonction & d'opposition ; ce qui arrive deux fois dans chacune de ses révolutions, savoir au premier & troisieme quartier. Voyez ORBITE, OPPOSITION, NJONCTIONTION.

Quand la lune est en quadrature on ne voit que la moitié de son disque ; on dit alors qu'elle est dichotome, comme qui diroit coupée en deux. Voyez PHASE & DICHOTOMIE.

Lorsqu'elle avance des sysygies à la quadrature, sa gravitation vers la terre est d'abord diminuée par l'action du soleil, & son mouvement est retardé par la même raison, ensuite la gravitation de la lune est augmentée jusqu'à ce qu'elle arrive aux quadratures. Voyez GRAVITATION.

A mesure qu'elle s'éloigne de ses quadratures en avançant vers les sysygies, sa gravitation vers la terre est d'abord augmentée, puis diminuée. Voyez SYSYGIES.

C'est ce qui fait, selon M. Newton, que l'orbite de la lune est plus convexe, toutes choses d'ailleurs égales, à ses quadratures qu'à ses sysygies ; c'est aussi ce qui fait que la lune est moins distante de la terre aux sysygies, & l'est plus aux quadratures toutes choses égales. Voyez ORBITE.

Lorsque la lune est aux quadratures, ou qu'elle n'en est pas fort éloignée, les apsides de son orbite sont rétrogrades ; mais elles sont progressives aux sysygies. Voyez APSIDES.

L'orbite de la lune souffre plusieurs altérations pendant le cours de chacune de ses révolutions. Son excentricité est la plus grande quand la ligne des apsides est aux sysygies ; & la moindre lorsque cette ligne est aux quadratures. Voyez EXCENTRICITE.

Toutes ces inégalités viennent de l'action du soleil sur la lune, comme l'a fait voir M. Newton dans les coroll. de la prop. 66. du premier livre de ses principes de la philosophie naturelle. Voyez LUNE. (O)

QUADRATURE, terme d'Horlogerie, voyez CADRATURE.


    
    
QUADRATUS(Mythol.) épithete donnée à Mercure, parce qu'anciennement on le représentoit sous la figure d'une pierre quarrée, ou d'un Hermès. (D.J.)


QUADREen Architecture, se dit de bordures ou de chassis quarrés qui entourent un bas-relief, un panneau, une peinture, ou tout autre ouvrage.

On se sert aussi de ce mot abusivement, pour exprimer une bordure qui n'est pas quarrée, telle que la ronde, l'ovale, &c. Voyez BORDURE.


QUADRIBURGIUM(Géog. anc.) ancienne ville des Pays-bas, dont parle Ammien Marcellin, & qui faisoit le commencement du pays des Bataves. (D.J.)


QUADRIENNALadj. (Jurisprud.) se dit d'un office qui ne s'exerce que de 4 en 4 ans. Exercice quadriennal, est l'année où s'exerce cet office.

La plûpart des offices alternatifs, triennaux & quadriennaux, ont été réunis aux anciens offices, & sont exercés par le même titulaire. (A)


QUADRIGAS. m. terme de Chirurgie, espece de bandage décrit dans Galien, pour les luxations ou les fractures des côtes, des vertebres, des clavicules, du sternum. Le nom de quadriga signifie un char à quatre chevaux. Les circonvolutions de la bande, se croisent dans ce bandage, comme les brides de ces chevaux. On l'appelle aussi cataphracta, mot qui chez les Grecs signifioit cuirasse, parce que ce bandage couvre la poitrine, comme les lames de fer des anciens soldats armés de toutes pieces. Voyez CATAPHRACTE. (Hist. anc.)

On ne se sert guere de ce bandage dans les cas prescrits par les anciens, car le bandage du corps suffit dans les fractures ou luxations du sternum, des côtes & des vertebres. La capeline ou le spica, pour la fracture ou la luxation des clavicules. Le quadriga se pratique dans le premier appareil de l'amputation d'une mammelle cancéreuse, en faisant des circulaires en doloire autour de la poitrine, & quelques croisés sur le sternum ; derriere le dos & sur les épaules, & finir par des circulaires. Il faut avoir soin de mettre sous les aisselles des compresses plates & assez épaisses, pour empêcher que les tours de bande n'y fassent des impressions incommodes & douloureuses. (Y)


QUADRIGATI(Monnoie de Rome) c'est ainsi qu'on nomma les premiers deniers d'argent qui furent faits à Rome, l'an 485 de sa fondation, qu'on commença d'y fabriquer de la monnoie d'argent. Ces premiers deniers d'argent valoient dix as de cuivre, & furent d'abord du poids d'une once ; leur empreinte étoit une tête de femme coëffée d'un casque, auquel étoit attachée une aîle de chaque côté ; cette tête représentoit la ville de Rome, ou une victoire menant un char attelé de deux ou quatre chevaux de front ; ce qui fit appeller ces pieces lorsqu'il y avoit deux chevaux de front, bigati, & lorsqu'il y en avoit quatre, quadrigati. Sur le revers de ces pieces étoit la figure de Castor & de Pollux.


QUADRIGES. m. ou f. (Agonistique) char à quatre chevaux, avec lequel on disputoit le prix aux jeux de la Grece & de Rome. On trouve la form des quadriges sur les monumens antiques & sur les médailles. On voit sur un médaillon de Marc Aurele, un quadrige avec un Jupiter foudroyant, & aux piés des chevaux une figure d'homme à-demi renversé. M. Vaillant pense que c'est le roi des Quades, dont l'armée fut maltraitée par une grande grêle accompagnée de tonnerres. Dans Lucius Verus il y a au revers quatre chevaux qui tirent un char où sont trois figures. Le cachet de Pline représentoit un quadrige. Entrons dans d'autres particularités.

Le quadrige étoit une espece de char en coquille montée sur deux roues, avec un timon fort court, auquel on atteloit quatre chevaux choisis entre tous ceux qui étoient les plus en réputation de vîtesse, rangés de front tous quatre ; à la différence de nos attelages, où quatre & six chevaux rangés bout à bout sur deux lignes, se gênent, s'embarrassent, en un mot se nuisent nécessairement les uns aux autres ; au-lieu que de front ils déployent leurs mouvemens avec beaucoup plus d'ardeur & de liberté. La seule vûe de ces quadriges suffit pour faire sentir qu'il n'y avoit rien de si léger, de si mobile, & que quatre chevaux devoient les emporter avec une rapidité prodigieuse. Aussi les Poëtes, quand ils ont voulu nous donner l'idée d'une impétuosité extrême, ont-ils tiré leur comparaison d'un char à quatre chevaux, qui couroit dans la lice.

Ut cum carceribus sese effudêre quadrigae,

Addunt se in spatium, & frustra retinacula tendens

Fertur equis auriga, neque audit currus habenas.

Une pierre lancée avec une fronde, un trait d'arbalete n'alloit pas plus vîte ; ce sont les similitudes qu'employe Sidonius Apollinaris. Et les Romains qui avoient pris des Grecs cet exercice, tout accoutumés qu'ils étoient à voir ces courses insensées, admiroient encore Ericthonius comme un héros plein d'audace & de courage, parce qu'il avoit osé le premier atteler quatre chevaux à ces sortes de chars.

Primus Ericthonius currus & quatuor ausus

Jungere equos, rapidisque rotis insistere victor.

On comprend en effet, que des courses de cette nature ne pouvoient pas manquer d'être périlleuses. Tantôt un cheval s'abattoit, & le char qui avoit peu de volume, peu de poids, recevoit une sécousse capable de faire trébucher l'écuyer, qui tout droit pour l'ordinaire, avoit à peine le dos appuyé. Tantôt les quatre chevaux poussés à toutes brides, s'emportoient & prenoient le mors-aux-dents, avec le risque ordinaire en ces occasions : fertur equis auriga, neque audit currus habenas. Tantôt enfin un essieu rompoit, & le conducteur venant à tomber, se trouvoit heureux s'il n'étoit pas foulé aux piés de ses chevaux. Homere & les tragiques grecs, nous fournissent des exemples de tous ces accidens. Mais c'étoit bien pis encore à la rencontre d'un autre char que l'on vouloit devancer ; car alors on faisoit tout ce que l'on pouvoit pour l'accrocher, pour le renverser, au hasard de tout ce qui en pouvoit arriver. Silius Italicus nous fait une peinture assez vive de cette espece de choc, dont les suites étoient presque toujours funestes à l'un ou à l'autre.

Donec confisus primaevae flore juventae

Durius obliquum conversis pronus habenis

Opposuit currum, atque eversum propulit axem

Athlantis senio invalidi.

Voilà l'un des combattans accroché, qu'en arrive-t-il ? vous l'allez voir.

Perfracto volvitur axe

Cernuus, ac pariter fusi, miserabile, campo

Discordes sternuntur equi.

L'écuyer & les chevaux tombent ensemble. La multitude des chars qui couroient en même-tems étoit ce qui faisoit le danger de ces courses. A Rome dans le grand cirque, on donnoit en un jour le spectacle de cent quadriges :

Centum quadrijugos agitabo ad flumina currus.

C'est Virgile qui le dit, & l'on en faisoit partir de la barriere jusqu'à ving-cinq à la fois : c'est ce que les Latins appelloient missus, emissio, & les Grecs . Nous ignorons combien de chars à quatre chevaux l'on assembloit à la barriere d'Olympie. J'ai peine à croire que le nombre en fût aussi grand qu'à Rome, sur-tout sous les premiers empereurs.

Mais quand nous supposerions qu'il n'y avoit pas plus de vingt ou trente quadriges aux jeux olympiques, toujours est-il certain que ces chars ayant à courir ensemble dans une lice qui n'étoit pas extrêmement large, & obligés de prendre à-peu-près le même chemin pour aller gagner la borne, devoient naturellement se croiser, se traverser, se heurter, se briser les uns les autres ; & l'émotion que causoient ces événemens, faisoit le plaisir des spectateurs. (D.J.)


QUADRIJUMEAUXS. m. terme d'Anatomie, c'est un muscle, ou plutôt l'assemblage de quatre muscles, qui servent à tourner la cuisse en-dehors. Voyez CUISSE.

Le premier des muscles qui composent le quadrijumeaux, est le pyriforme, le second & le troisieme les jumeaux, & le quatrieme le quarré de la cuisse. Voyez chacun de ces muscles en leur article, PYRIFORME, JUMEAUX, &c.


QUADRILATERES. f. terme de Géométrie, on appelle ainsi une figure comprise entre quatre lignes droites, qui forment quatre angles ; ce qui fait qu'on l'appelle encore figure quadrangulaire. Voyez QUADRANGULAIRE.

Si les quatre côtés sont égaux, & tous les angles droits, c'est un quarré. Voyez QUARRE.

Si les quatre côtés sont égaux, & les angles opposés aussi égaux, mais non droits, c'est un rhombe ou losange. Voyez RHOMBE.

Si tous les côtés ne sont pas égaux, mais tous les angles droits, c'est un rectangle. Voyez RECTANGLE.

Si les côtés opposés seulement sont égaux, & les angles opposés aussi égaux, mais non droits, cette figure est un rhomboïde. Voyez RHOMBOÏDE.

Tout autre quadrilatere, dont les côtés opposés ne sont ni paralleles, ni égaux, s'appelle un trapeze. Voyez TRAPEZE.

Les angles opposés d'un quadrilatere inscrit dans un cercle, valent deux angles droits, puisqu'ils ont pour mesure la moitié de la circonférence, ou 180 degrés. Chambers. (E)


QUADRILLES. f. (Fête galante) petite troupe de gens à cheval, superbement montés & habillés, pour exécuter des fêtes galantes, accompagnées de joutes & de prix. Quand il n'y a qu'un quadrille, c'est proprement un tournois ou course. Les joutes demandent deux partis opposés. Le carrousel en doit avoir au moins quatre, & le quadrille doit être composé au moins de huit ou douze personnes. Les quadrilles se distinguent par la forme des habits, ou par la diversité des couleurs. Le dernier divertissement de ce genre qu'on ait vu dans ce royaume, est celui que donna Louis XIV. en 1662, vis-à-vis les Tuileries, dans l'enceinte qui en a retenu le nom de la place du carrousel. Il y eut cinq quadrilles. Le roi étoit à la tête des Romains ; son frere des Persans ; le prince de Condé des Turcs ; le duc d'Enguien son fils des Indiens ; le duc de Guise si singulier en tout, des Américains. La reine-mere, la reine regnante, la reine d'Angleterre veuve de Charles II. étoient sous un dais à ce spectacle. Le comte de Sault, fils du duc de Lesdiguieres, remporta le prix, & le reçut des mains de la reine-mere. (D.J.)

QUADRILLE, (Jeu) Le quadrille à trois est un jeu sans agrément, qui ne peut être goûté par ceux qui possedent le jeu de l'hombre. Il est cependant propre à donner une idée du quadrille à ceux qui sont bien-aises de l'apprendre. La maniere de jouer est disgracieuse pour l'hombre, qui a toujours deux adversaires à combattre. C'est un jeu qui n'est jamais joué qu'au défaut d'un quatrieme pour le quadrille, dont on suit en tout les lois, à l'exception des suivantes, qui lui sont particulieres. Pour jouer ce jeu il ne faut que trente cartes ; il faut donc ôter une couleur rouge toute entiere ; que ce soit coeur ou carreau, n'importe. On jouera avec dix cartes comme au quadrille ; & celui qui jouera, soit en appellant, soit sans prendre, doit faire six mains pour gagner : s'il n'en fait que quatre ou moins, elle est codille ; & s'il en fait cinq, elle n'est que remise.

Le jeu se marque & se paie comme au quadrille, mais la bête est de quatorze, encore qu'elle soit faite sur treize jettons seulement. Celui qui joue en appellant, après avoir nommé sa couleur, demande un roi tel qu'il le juge convenable à son jeu. Celui de ses deux adversaires qui l'a est obligé de le lui donner, & de recevoir en échange telle fausse qu'il lui plaît de lui donner, & que le tiers est en droit de voir, moyennant quoi il doit faire les six mains pour gagner.

Il n'est point permis de jouer en la couleur qui est ôtée, parce qu'avec spadille seul, & des cartes qui fussent rois, on feroit la vole sans qu'on pût s'y opposer.

Le jeu de quadrille. Ce jeu n'est à-proprement parler que l'hombre à quatre, qui n'a pas à la vérité la beauté, ni ne demande une si grande attention que l'hombre à trois ; mais aussi faut-il convenir qu'il est plus amusant & plus récréatif, soit parce que l'on joue à tout coup, soit que cela provienne du génie de notre nation, qui ne prête pas volontiers toute son attention à un jeu, particulierement le beau sexe, qui rend cet hombre mitigé avec plaisir, & qui en fait son plus grand amusement. Ce jeu perd beaucoup de son agrément, si les joueurs n'observent un silence exact entr'eux. Cette loi s'étend même sur les spectateurs, qui doivent avoir la discrétion de ne point parler en aucune façon.

Le jeu de cartes dont on se sert pour jouer au quadrille, est composé de quarante cartes, dont celles de la couleur noire conservent leur valeur naturelle quand elles ne sont point triomphes, comme le roi, la dame, le valet, le sept, le six, le cinq, le quatre, le trois, le deux. Quant à l'as de ces deux couleurs, il est à-tout de quelque couleur que soit la triomphe (voyez SPADILLE & BASTE) ; & quand la triomphe est en noir, en treffle, par exemple, l'as de pique, qui est à-tout par-tout, est la premiere, le deux de treffle la seconde, l'as de treffle la troisieme, & les autres selon leur ordre ordinaire. Et de même en pique, l'as de pique, le deux & l'as de treffle étant les trois premieres cartes du jeu. La couleur rouge n'étant point triomphe, suit cet ordre : le roi, la dame, le valet, l'as, le deux, le trois, le quatre, le cinq, le six, le sept ; quand l'une de ces couleurs est triomphe, le sept est la premiere carte après spadille, & l'as la quatrieme après baste ; quant aux autres cartes, elles gardent l'ordre marqué ci-dessus. Par cette idée de la valeur des cartes, on voit qu'il y a douze à-tous en rouge, & onze en noir seulement, & que le sept, qui est la derniere carte en rouge quand ce n'est pas la triomphe, est la seconde quand elle est triomphe. Après que l'on a tiré les places, & vu à qui à mêler, convenu de la valeur du jeu, & réglé les tours qui se jouent ordinairement au nombre de dix, & qui se marquent en écornant une carte, celui qui mêle ayant fait couper à sa gauche, donne à chacun dix cartes par deux fois trois & une fois quatre, & non par une ou deux, comme certains joueurs l'ont prétendu mal-à-propos. S'il se trouvoit plus ou moins de cartes, le coup seroit nul, & il faudroit refaire, de même que s'il y avoit deux cartes de même espece, pourvu qu'on s'en apperçût avant que le coup fût achevé de jouer ; car si toutes les cartes étoient jouées, que l'on eût payé, & que l'on eût déja coupé pour le coup suivant, le coup seroit bon, de même que les précédens. Il faudroit aussi refaire s'il y avoit une carte retournée, quelle qu'elle pût être. Il n'y a point d'autre peine pour ceux qui donnent mal, que de refaire.

Après que chacun a reçu ses dix cartes, celui qui est à droite de celui qui a donné ayant vu son jeu, demande si on joue, s'il a jeu à jouer, ou passe, s'il n'a pas beau jeu ; & ainsi du second, du troisieme & du dernier. Tous les quatre peuvent passer ; mais comme il n'est pas de coup qui ne doive être joué, celui qui a spadille, après l'avoir montré ou accusé, est obligé de jouer en appellant un roi.

Que le coup soit joué de cette maniere, ou que ce soit l'un des joueurs qui ait demandé permission, personne ne voulant jouer sans appeller après qu'il a nommé la couleur & le roi qu'il appelle par leur nom propre, le coup commence à être joué par celui qui est à jouer le premier. Celui qui prend la levée, jette une autre carte, & ainsi des autres, jusqu'à ce que le jeu soit gagné ou fini ; après quoi l'on compte les levées que chacun a. Si celui qui fait jouer gagne six mains en comptant celles que celui qui a le roi appellé a faites, ils ont gagné, & on leur paie le jeu, la consolation, & les matadors s'ils en ont, & ils partagent ce qui se trouve au-devant du jeu, & les bêtes, s'il y en va. Que s'ils ne font que cinq mains, elle est remise, & ils font la bête de ce qui est au jeu & au-devant, & ils payent à chacun la consolation & les matadors, s'ils les ont, par égale part, & font la bête en commun ; & s'ils ne faisoient à tous deux que cinq mains, ou moins, ils perdroient codille, & payeroient en ce cas à leurs adversaires ce qu'ils leur auroient payé s'ils eussent gagné, c'est-à-dire le jeu, la consolation, & les matadors, s'ils les avoient, & feroient la bête de ce qui seroit au jeu. Ceux qui gagnent codille partagent entr'eux ce qui est au jeu ; la bête, & tout ce qui est à payer, se paye par moitié entre le joueur & le roi appellé, tant au cas de codille que de remise, à-moins que celui qui appelle ne fît pas trois mains, auquel cas celui qui est appellé non-seulement est exempt de payer la moitié de la bête, mais encore de payer le jeu, la consolation, & les matadors, s'il y en a ; que l'hombre qui ne fait pas trois mains paie seul, tant en cas de remise que de codille, afin d'obliger les joueurs à ne jouer que des jeux raisonnables. Il y a même des maisons où il faut faire quatre mains pour ne point faire la bête seul ; mais lorsqu'on joue avec spadille forcé, & que tous les joueurs ont passé, l'hombre ne fît-il qu'une main, ne fait point la bête seule : il ne seroit pas juste qu'on l'obligeât de faire trois ou quatre mains sans jeu ; & le roi appellé est toujours de moitié du gain, comme de la perte. Celui qui joue avec spadille doit dire je passe, avant que de nommer ; car s'il n'eût pas passé, quoiqu'il eût mauvais jeu, il suivroit en tout les lois de ceux qui ont joué de leur plein gré. Celui qui a une fois passé, ne peut plus être reçu à jouer, & celui qui a demandé à jouer n'est pas le maître de ne pas jouer, à-moins que quelqu'un ne veuille jouer sans appeller. Celui qui a les quatre rois peut appeller la dame d'un de ses quatre rois, excepté de celui qui est triomphe. Celui qui a un ou plusieurs rois, peut appeller un des rois qu'il a, & il est obligé de faire six mains seul, & il perd ou gagne seul. L'on ne peut point appeller le roi de la couleur en laquelle on joue : l'on ne doit jouer qu'à son rang ; mais l'on ne fait point la bête pour cela. Celui qui n'étant pas premier à jouer, & auroit le roi appellé, joueroit à tout, de spadille, manille ou baste, ou même le roi appellé, pour faire connoître qu'il est ami, ayant encore plusieurs autres rois qu'il craindroit que l'hombre ne lui coupât, ne le connoissant pas, ne pourroit entreprendre la vole. Il seroit même condamné à faire la bête, si l'on connoissoit de la mauvaise foi dans son procédé. Il n'est point permis de montrer son jeu que le coup ne soit gagné, pas même si l'on avoit déja codille, devant jouer jusqu'à la fin, pour voir si l'hombre ne fera pas la bête seul.

Si l'hombre ou le roi appellé montroient leur jeu avant d'avoir leurs six mains complete s, en comptant avoir gagné, & qu'il pût se trouver une maniere d'empêcher leurs six mains, les personnes qui joueront avec eux pourront les contraindre de jouer leurs cartes de telle maniere qu'ils voudront. Pour jouer sans appeller, on n'a qu'à nommer sa couleur simplement : dans ce cas il faut faire six mains seul pour gagner ; car toutes les mains que les autres joueurs font, sont réunies contre lui, & ses adversaires doivent travailler à le faire perdre de concert.

Celui qui veut jouer sans appeller, a la préférence dans le jeu sur celui qui demande à jouer en appellant ; cependant si celui qui a demandé veut jouer sans appeller, il est préféré à l'autre : ce sont deux manieres de jouer sans appeller que l'on appelle forcées. Celui qui joue sans appeller ne partageant avec personne quand il gagne, paye aussi tout seul lorsqu'il perd. S'il la perd remise, il fait la bête, & paye à chacun de ses trois adversaires la consolation & les matadors, s'il y en a ; & s'il perd codille, il fait également la bête, & paye à chacun tout autant que chacun lui auroit payé s'il avoit gagné. Ceux qui gagnent codille partagent entr'eux ce qui se trouve ; & s'il y a quelques jettons de reste, ce sera pour celui qui le coup suivant aura spadille ou la plus forte triomphe. Il en est de même de celui qui ayant demandé à jouer appelle un roi qu'il a, il gagne ou perd seul, à l'exception du sans appeller qu'il ne paye point s'il perd, & qui ne lui est point payé s'il gagne, quoiqu'il joue seul.

Celui qui joue sans appeller, encore qu'il ait jeu sûr, est obligé de nommer sa couleur ; & si sans la nommer il baissoit son jeu, il seroit permis à un autre joueur de nommer une autre couleur : & pour lors celui qui auroit voulu jouer sans appeller, seroit tenu de jouer dans la couleur qui lui auroit été nommée, quoiqu'il n'eût pas une triomphe de cette couleur. Celui qui a demandé à jouer ne peut jouer sans appeller, à-moins qu'on ne le force ; alors il joue par préférence à celui qui l'a forcé.

L'on n'est point obligé de couper lorsque l'on n'a point de la couleur jouée, ni de mettre au-dessus quand on le pourroit, cela étant libre au joueur, même étant dernier à jouer, la main appartenant à l'hombre ; mais il faut qu'il fournisse tant qu'il a de la couleur jouée, sans quoi il renonceroit. Celui qui a tiré une carte de son jeu, & l'a présenté à découvert pour la jouer, est obligé de le faire, si étant conservée elle peut préjudicier au jeu, ou en donner connoissance à l'ami, sur-tout si c'est un matador.

Celui qui joue sans prendre n'est point du-tout sujet à cette loi, non plus que celui qui joue seul s'étant appellé ; celui qui au lieu de tourner les levées qui sont devant un joueur, tourne & voit son jeu, ou le fait voir à d'autres, fait la bête de moitié avec celui à qui appartiennent les cartes retournées. Qui renonce fait la bête autant de fois qu'on l'en fait appercevoir. Il faut pour avoir renoncé que la levée soit pliée, ou que celui qui a renoncé ait joué sa carte pour le coup suivant. Si l'on s'apperçoit de la renonce avant que le coup soit achevé, il faut reprendre ses cartes, & recommencer à jouer de la levée où la renonce a été faite ; cependant si toutes les cartes sont jouées, la bête n'en est pas moins faite, & on ne reprend point ses cartes, à-moins qu'il n'y eût plusieurs renonces sur un même coup, auquel cas on pourroit reprendre le jeu, pourvu que les cartes ne fussent pas brouillées. Plusieurs bêtes faites sur le même coup doivent aller ensemble, à-moins que l'on ne convienne autrement avant que de commencer le coup. Les plus grosses bêtes passent toujours les premieres ; lorsqu'il y en a plusieurs, la vole ne gagne que ce que l'on est convenu, tirant simplement ce qui est au-devant, n'ayant rien à demander des bêtes qui ne vont pas. La vole est entreprise, soit en jouant sans prendre, ou avec un roi appellé, lorsque l'on a jetté la carte ayant les six premieres mains ; & si l'on ne la fait pas, on paye ce qu'on auroit reçu si on l'avoit faite. Quand celui qui a entrepris la vole ne la fait pas, les autres tirent le devant & se font payer le jeu, la consolation, le sans-prendre & les matadors, s'ils les ont. Quoique la vole soit entreprise, il n'est pas permis de voir le jeu de son ami. La vole ne sauroit être entreprise que le roi appellé n'ait paru.

Celui qui a été obligé de jouer avec spadille, ne peut point prétendre à la vole ; il n'est point permis de rien dire ou faire ou faire connoître qui puisse engager l'ami à entreprendre la vole ou à s'en désister ; il faut attendre que celui qui est à jouer l'ait fait ou abattu son jeu.

Le jeu est marqué par celui qui mêle, & qui met une fiche au devant : chacun fait outre cela au jeu un jetton pour chaque coup qui se paye à ceux qui gagnent avec la consolation, & ces quatre jettons sont comptés aux bêtes qui se font. S'il y a une bête, elle va avec ce qui est au-devant & le jeu que chacun doit, sans que pour cela celui qui mêle cesse de mettre la fiche du jeu au-devant : ce qui fait que la premiere bête étant de quatorze, la seconde doit être de quarante-deux, la troisieme de cinquante-six ; une bête faite sur une autre bête ne pouvant être plus forte que des quatorze marques dont le jeu augmente, savoir dix pour la fiche que met celui qui mêle, & quatre pour le jetton que chacun fait au jeu. A-moins que le jeu n'ait doublé, comme il arrive lorsque la premiere bête est faite par remise, la seconde est de quarante-deux, &c. si le coup sur lequel la premiere bête est faite est tiré par codille, la seconde bête ne sera que de vingt-huit, attendu que les quatorze que le codille a tirés ne doivent point être compris, ne pouvant point au jeu perdre plus que l'on ne peut gagner. Si l'on joue le jeu double, les bêtes augmentent à-proportion.

Quadrille avec le médiateur sans couleur favorite. Alors l'on marque & l'on paye le jeu comme au quadrille ordinaire, à la réserve que l'on donne une fiche de plus à celui qui joue avec le médiateur, & celui qui joue sans prendre, c'est-à-dire qui gagne sans médiateur. Il reçoit treize jettons de chacun, & les leur paye s'il perd codille ; au lieu qu'il n'en donne que 12 si elle n'est que remise. Celui qui gagne sans prendre doit recevoir dix-sept jettons de chacun ; s'il perd par remise il en donne seize à chacun, & dix-sept par codille. La vole avec le médiateur ne se paye qu'une fiche ; les bêtes se payent comme au quadrille ordinaire.


QUADRILLIONS. m. (Arithmét.) ou mille fois mille trillions ; c'est un nombre où l'on compte jusqu'à mille, mille, mille, mille, mille, mille, mille fois mille : il est composé de huit classes & d'une place, ou de vingt-cinq places d'unité, dont la derniere est marquée de quatre points. Dans cet exemple, , 543, 51, 234, 56, 890, 98, 664, 321. La vingt-cinquieme place, 6 indique par les unités combien tout ce nombre contient de quadrillions Irson. (D.J.)


QUADRIPARTITIONS. f. (Matth.) c'est le partage d'une chose en quatre. Voyez DIVISION, &c. ce mot est peu usité. (E)


QUADRUGÉEquadrugecta terrae, (Jurisprud.) dans quelques anciens titres signifie autant de terre que quatre chevaux en peuvent labourer en un jour.


QUADRUou QUADRATUM, (Hist. nat.) nom donné par Caesalpin & quelques autres auteurs, à une espece de grais composé de particules fines, & propre à être taillé pour les bâtimens.


QUADRUPEDES. m. (Hist. nat.) c'est par ce nom que l'on distingue les animaux à 4 piés des autres animaux qui n'ont que 2 piés, comme les oiseaux, ou qui n'ont point de piés, comme les poissons & les reptiles, ou qui ont plus de deux piés, comme les insectes. Les quadrupedes sont les moins nombreux, car il y a plus d'insectes que de poissons, plus de poissons que d'oiseaux, & plus d'oiseaux que de quadrupedes. Cependant on en a déja compté jusqu'à deux cent soixante-une especes ; c'est assez pour qu'il y ait de la difficulté à les distinguer, à les caractériser & à les nommer chacune en particulier : aussi a-t-on employé une sorte d'art pour faciliter la connoissance des caracteres qui peuvent faire reconnoître chaque espece de quadrupede, & de tout autre production de la nature. Voyez METHODE. En réunissant plusieurs especes dans un seul genre, ou plusieurs genres dans une seule classe par un caractere commun, il semble que l'on diminue le nombre des choses que l'on veut connoître : au-moins il est plus facile de les retenir de mémoire.

Dès le tems d'Aristote on avoit fait trois classes d'animaux quadrupedes. Ce grand naturaliste donne le nom de solipedes à ceux qui ont les piés terminés par une corne d'une seule piece ; il désigne par la dénomination de piés fourchus les animaux qui ont deux cornes à chaque pié, & il appelle fissipedes ceux qui ont les piés divisés en plusieurs doigts. Aristote n'est entré dans aucun détail de distribution méthodique en ordres, genres, &c. s'il a reconnu des genres, ç'a été comme le vulgaire qui donne le même nom à toutes les choses qui paroissent de même nature. Il rejette toutes sousdivisions de genres, & principalement celles qui sont fondées sur des caracteres négatifs, parce que l'on ne doit pas établir une différence sur une idée de privation, & que ce qui n'est pas ne peut pas avoir des especes : leur rapport, à ce genre, seroit chimérique, puisque le fondement de la relation seroit purement négatif. De part. anim. lib. I. cap. iij.

On a fait plusieurs divisions méthodiques des animaux quadrupedes en classes, ordres, genres, especes. Gesner, Aldrovande, Jonston, & presque tous les naturalistes ont adopté la premiere division d'Aristote dans leurs méthodes que nous ne détaillerons pas ici ; il suffira de commencer par celle de Rai, qui fut publiée sur la fin du siecle dernier.

" Cet auteur change la division des animaux quadrupedes en solipedes, piés fourchus & fissipedes, & n'en fait que deux classes générales, dont la premiere comprend les animaux qui ont l'extrêmité des doigts enveloppée dans une matiere de corne sur laquelle ils marchent, animalia ungulata ; la seconde classe renferme ceux qui ont un ongle qui tient à l'extrêmité de chaque doigt, & qui laisse à nud la partie qui porte sur la terre, animalia unguiculata.

L'auteur sousdivise les animaux qui ont de la corne aux piés en solipedes, qui sont le cheval, l'âne & le zebre, en piés fourchus, tels que le taureau, le bélier, le bouc, &c. & en animaux qui ont les piés divisés en quatre parties, comme sont le rhinocéros & l'hippopotame. Il rapporte à cette classe quelques animaux étrangers qu'il donne comme anomaux, parce qu'ils different un peu des deux précédens. Il y a deux sortes d'animaux à piés fourchus, les uns ne ruminent pas, tels sont le cochon, le sanglier, le cochon de Guinée, le babyroussa, le tajacu, &c. les autres ruminent. Il y a trois genres de ruminans à piés fourchus qui ont des cornes creuses & qui ne les quittent jamais ; le premier porte le nom de boeuf, bovinum genus, & comprend le taureau, l'orocs, le bison, le bufle, &c. le nom du second est dérivé de celui des brebis, ovinum genus, & renferme le bélier, les brebis d'Arabie, de Crete, d'Afrique, de Guinée ou d'Angola, &c. & la dénomination du troisieme genre vient du nom de la chevre, caprinum genus, ses especes sont le bouc, le bouquetin, le chamois, les gazelles, &c. Rai fait un quatrieme genre des animaux ruminans à piés fourchus, dont les cornes sont solides & branchues, & tombent chaque année ; le nom de ce genre est tiré de celui du cerf, cervinum genus ; l'auteur y rapporte le cerf, le daim, l'élan, le renne, le chevreuil, la giraffe, &c.

Parmi les animaux qui sont armés d'ongles, il s'en trouve qui les ont larges & qui ressemblent plus à l'homme que les autres bêtes, ce sont les singes. Les animaux qui ont les ongles étroits & pointus pour la plûpart sont distingués par leurs piés, les uns ont le pié fourchu & n'ont que deux ongles, comme le chameau qui est un ruminant ; les animaux de ce même genre sont le dromadaire, le mouton du Pérou & le paco ; les autres animaux qui ont des ongles sont fissipedes. Rai donne l'éléphant comme anomale en ce genre, parce que ses doigts sont réunis & recouverts par la peau, &c.

Les animaux fissipedes sont divisés en deux classes ; la premiere comprend ceux qui l'auteur appelle analogues, c'est-à-dire ceux qui se ressemblent, sur-tout par rapport aux dents, soit pour leur forme, soit pour leur situation. Les animaux fissipedes de la seconde classe sont désignés par le nom d'anomaux, parce qu'ils different des autres, ou ils n'ont point de dents, ou celles qu'ils ont sont différentes des dents des autres animaux, soit pour la forme, soit pour l'arrangement.

Les animaux fissipedes analogues ont plus de deux dents incisives dans chaque mâchoire, comme le lion, le chien, &c. ou n'en ont seulement que deux, comme le castor, le lievre, le lapin, &c. & tous ceux qui se nourrissent des plantes....

Les animaux carnassiers sont distingués par leur grandeur ; il y en a de grands & petits : les grands sont de deux sortes ; les uns ont la tête arrondie & le museau court, comme le chat, c'est pourquoi on appelle le genre sous lequel ils sont rassemblés, genre des chats, felinum genus, il comprend le lion, le tigre, le léopard, le loup-cervier, le chat, l'ours, &c. les autres ont la tête & le museau allongé, comme le chien, d'où vient le nom de canin que l'on a donné à ce genre, genus caninum ; ses especes sont le loup, le chien, le renard, la civette, le coati-mondi, le blaireau ou taisson, la loutre, le veau-de-mer, l'hippopotame ou cheval-marin, la vache-marine, &c. Les petits animaux carnassiers ne different pas seulement des grands par leur volume, mais encore parce qu'ils ont la tête plus petite, les pattes plus courtes & le corps plus effilé, ce qui leur donne de la facilité pour se glisser, comme des vers, dans des endroits fort étroits ; aussi le nom générique de ces animaux a-t-il été dérivé de celui de ver ou vermine, genus vermineum, on l'appelle aussi genus mustellinum, parce que la belette, mustella, est l'animal le plus connu de ce genre, qui renferme aussi l'hermine, le furet, le putois, la marte, la fouine & la marte-zibeline, &c.

Les animaux fissipedes analogues qui n'ont que deux dents incisives à chaque mâchoire sont le lievre, le lapin, le cochon d'Inde, le porc-épic, le castor, les écureuils, le rat, le rat-musqué, le rat-d'eau, la souris, le mulot, le loir, le lérot, la marmotte, &c.

Les animaux fissipedes anomaux sont le hérisson, le tatou, la taupe, la musaraigne, le tamandua, la chauve-souris & le paresseux : les cinq premiers ont le museau allongé comme les chiens ou les belettes ; mais ils en different par la forme & l'arrangement des dents ; le tamandua n'en a point ; la chauve-souris & le paresseux ont le museau court. " Hist. nat. gen. & part. tom. IV. pag. 153 & suiv.

M. Klein, quadrup. dispositio brevisque hist. natur. divise les quadrupedes en deux ordres, dont le premier contient les quadrupedes qui ont le pié terminé par un ou par plusieurs sabots ; & le second, ceux qui ont des doigts : chacun de ces ordres est sousdivisé en cinq familles.

Premier ordre. Premiere famille. Les quadrupedes qui n'ont qu'un sabot à chaque pié : ce sont les solipedes. Premier genre du cheval, second genre de l'âne.

Seconde famille. Les quadrupedes qui ont deux sabots à chaque pié : ce sont les animaux à pié fourchu. Premier genre du taureau, second genre du belier, troisieme genre du bouc, quatrieme genre du cerf, cinquieme genre du porc.

Troisieme famille : le rhinocéros, parce qu'il a trois sabots à chaque pié.

Quatrieme famille : l'hippopotame, parce qu'il a quatre sabots à chaque pié.

Cinquieme famille : l'élephant, parce qu'il a cinq sabots à chaque pié.

Premiere famille du second ordre : les quadrupedes qui ont deux doigts à chaque pié. Premier genre du chameau, second genre de l'aï.

Seconde famille : les quadrupedes qui ont trois doigts aux piés de devant. Premier genre du paresseux, second genre du tamandua.

Troisieme famille : les quadrupedes qui ont quatre doigts aux piés de devant. Premier genre du tatou, second genre du cavia.

Quatrieme famille : les quadrupedes qui ont quatre doigts aux piés de devant. Premier genre du lievre, second genre du sorex : ce genre est sousdivisé ; il renferme ceux de l'écureuil, des rats-dormeurs, du rat, de la taupe & de la chauve-souris, troisieme genre de la belette, quatrieme genre de l'acanthion ; ce genre comprend les hérissons & les porc-épics ; cinquieme genre du chien, sixieme genre du loup, septieme genre du renard, huitieme genre du coati, neuvieme genre nommé felis : ce genre est sousdivisé ; il renferme les chats, les lynx, les léopards, les tigres & le lion ; dixieme genre de l'ours, onzieme genre du glouton, douzieme genre du satire : ce genre est sousdivisé en deux autres genres, dont l'un renferme les singes qui n'ont point de queue, ou qui n'en ont qu'une très-courte ; l'autre genre comprend les singes à longue queue.

Cinquieme famille : les quadrupedes qui ont cinq doigts conformés d'une maniere extraordinaire ; les doigts de ces animaux ne sont pas séparés les uns des autres. Premier genre de la loutre, second genre du castor, troisieme genre du rosmarus ou odobenus, quatrieme genre du phoca ou veau marin, cinquieme genre du manatus ou manati.

M. Brisson, dans son livre intitulé le regne animal, divisé en neuf classes &c. a distribué les animaux quadrupedes en dix-huit ordres.

Ordre I. Les quadrupedes qui n'ont point de dents. Section premiere, ceux qui ont le corps couvert de poil, premier genre du fourmilier. Section 2. Les quadrupedes qui ont le corps couvert d'écailles, second genre du pholidote.

Ordre II. Les quadrupedes qui n'ont que des dents molaires. Section 1. Ceux qui ont le corps couvert de poil, troisieme genre du paresseux. Section 2. Les quadrupedes qui ont le corps couvert d'un test osseux, quatrieme genre de l'armadille.

Ordre III. Les quadrupedes qui n'ont point de dents incisives, mais qui en ont des canines ou des molaires, cinquieme genre de l'élephant, sixieme genre de la vache marine.

Ordre IV. Les quadrupedes qui n'ont point de dents incisives à la mâchoire supérieure, & qui en ont six à l'inférieure, septieme genre du chameau.

Ordre V. Les quadrupedes qui n'ont point de dents incisives à la mâchoire supérieure, & qui en ont huit à l'inférieure, & le pié fourchu. Section 1. Ceux qui ont des cornes simples, huitieme genre de la giraffe, neuvieme genre du bouc, dixieme genre du belier, onzieme genre des boeufs. Section 2. Les quadrupedes qui ont des cornes branchues, douzieme genre des cerfs. Section 3. Les quadrupedes qui n'ont point de cornes, treizieme genre du chevrotain.

Ordre VI. Les quadrupedes qui ont des dents incisives aux deux mâchoires, & la corne du pié d'une seule piece, quatorzieme genre du cheval.

Ordre VII. Les quadrupedes qui ont des dents incisives aux deux mâchoires & le pié fourchu, quinzieme genre du cochon.

Ordres VIII. Les quadrupedes qui ont des dents incisives aux deux mâchoires, & trois doigts onguiculés à chaque pié, seizieme genre du rhinoceros.

Ordre IX. Les quadrupedes qui ont deux dents incisives à chaque mâchoire, quatre doigts onguiculés aux piés de devant, & trois à ceux de derriere ; dix-septieme genre du cabiai.

Ordre X. Les quadrupedes qui ont dix dents incisives à chaque mâchoire, quatre doigts onguiculés aux piés de devant, & trois à ceux de derriere ; dixhuitieme genre du tapirs ou manipouris.

Ordre XI. Les quadrupedes qui ont des dents incisives aux deux mâchoires, & quatre doigts ongulés à chaque pié, dix-neuvieme genre de l'hippopotame.

Ordre XII. Les quadrupedes qui ont deux dents incisives à chaque mâchoire, & les doigts onguiculés. Section 1. Ceux qui n'ont point de dents canines, & qui ont des piquans sur le corps, vingtieme genre du porc-épic. Section 2. Les quadrupedes qui n'ont ni dents canines ni piquans sur le corps, vingt-unieme genre du castor, vingt-deuxieme genre du lievre, vingt-troisieme genre du lapin, vingt-quatrieme genre de l'écureuil, vingt-cinquieme genre du loir, vingt-sixieme genre du rat. Section 3. Les quadrupedes qui ont des dents canines, & qui n'ont point de piquans sur le corps, vingt-septieme genre de la musaraigne. Section 4. Les quadrupedes qui ont des dents canines, & le corps couvert de piquans, vingt-huitieme genre du hérisson.

Ordre XIII. Les quadrupedes qui ont quatre dents incisives à chaque mâchoire, & les doigts onguiculés. Section 1. Ceux dont tous les doigts sont séparés les uns des autres, vingt-neuvieme genre du singe ; ce genre est sousdivisé en cinq races. Voyez SINGE. Section 2. Les quadrupedes dont les doigts des piés de devant sont joints ensemble par une membrane étendue en aîle, trentieme genre de la roussette.

Ordre XIV. Les quadrupedes qui ont quatre dents incisives à la mâchoire supérieure, & six à l'inférieure, & les doigts onguiculés. Section 1. Ceux dont tous les doigts sont séparés les uns des autres, trente-unieme genre du maski. Section 2. Les quadrupedes dont les doigts des piés de devant sont joints ensemble par une membrane étendue en ailes, trente-deuxieme genre de la chauve-souris.

Ordre XV. Les quadrupedes qui ont six dents incisives à la mâchoire supérieure, & quatre à l'inférieure, & les doigts onguiculés, trente-troisieme genre du phocas.

Ordre XVI. Les quadrupedes qui ont six dents incisives à chaque mâchoire, & les doigts onguiculés. Section 1. Ceux dont les doigts sont séparés les uns des autres, trente-quatrieme genre de l'hyene, trente-cinquieme genre du chien, trente-sixieme genre de la belette, trente-septieme genre du blaireau, trente-huitieme genre de l'ours, trente-neuvieme genre du chat. Section 2. Les quadrupedes dont les doigts sont joints ensemble par des membranes, quarantieme genre de la loutre.

Ordre XVII. Les quadrupedes qui ont six dents incisives à la mâchoire supérieure & huit à l'inférieure, & les doigts onguiculés, quarante-unieme genre de la taupe.

Ordre XVIII. Les quadrupedes qui ont dix dents incisives à la mâchoire supérieure, huit à l'inférieure, & les doigts onguiculés, quarante-deuxieme genre du philandre.

M. Linnaeus, systema naturae, edit. decima, met les animaux quadrupedes avec les cétacées dans une même classe, & il les désigne par la dénomination de mammalia, animaux qui ont des mamelles : cette classe est divisée en sept ordres.

Ordre I. Primates. Les animaux de cet ordre ont quatre dents au devant de la mâchoire supérieure, & deux mamelles sur la poitrine : ce premier ordre est divisé en quatre genres, 1°. l'homme, Voyez METHODE. 2°. le singe, 3°. le lemur, 4°. la chauvesouris.

Ordre II. Bruta. Les animaux de cet ordre n'ont point de dents au-devant des mâchoires ; ils se rapportent à cinq genres, 1°. l'élephant, 2°. trichecus ou manati, 3°. bradipus ou paresseux, 4°. myrmecophaga ou tamandua, 5°. manis ou lézard écailleux.

Ordre III. Ferae. Les animaux de cet ordre ont au-devant de la mâchoire supérieure six dents pointuës, & une seule dent canine de chaque côté des mâchoires. Les genres sont au nombre de six : 1°. le phocas, 2°. le chien, 3°. le chat, 4°. le furet, 5°. la belette, 6°. l'ours.

Ordre IV. Bestiae. Les animaux de cet ordre ont plus d'une dent canine de chaque côté des mâchoires ; le nombre des dents de devant n'est pas le même dans tous les genres ; le nez est saillant au devant de la bouche. Il y a six genres ; 1°. le cochon, 2°. dasypus ou tatou, 3°. le hérisson, 4°. la taupe, 5°. la musaraigne, 6°. didelphis ou phylandre.

Ordre V. Glires. Les animaux de cet ordre ont au-devant de chaque mâchoire deux dents qui sont éloignées des molaires : il n'y a point de dents canines. Les genres sont au nombre de six : 1°. le rhinoceros, 2°. le porc-épic, 3°. le lievre, 4°. le castor, 5°. le rat, 6°. l'écureuil.

Ordre VI. Pecora. Les animaux de cet ordre ont au-devant de la mâchoire inférieure six ou huit dents fort éloignées des molaires ; il n'y a point de dents au-devant de la mâchoire supérieure ; les piés sont terminés par des sabots ; les mamelles se trouvent aux aines. Les genres sont au nombre de six : 1°. le chameau, 2°. l'animal du musc, 3°. le cerf, 4°. la chevre, 5°. la brebis, 6°. le boeuf.

Ordre VII. Belluae. Animaux qui ont au devant des mâchoires des dents obtuses & tronquées : il y a deux mamelles aux aines. Cet ordre ne comprend que deux genres : 1°. le cheval, 2°. l'hippopotame.

Ordre VIII. Cette. Cet ordre comprend les cétacées divisés en quatre genres.

QUADRUPEDE ailé, (Hist. nat.) Il faut mettre au rang des fables de l'histoire naturelle, les contes de quadrupedes ailés, du griffon, du dragon quadrupede, des basilics, des lamies, & autres semblables qui n'ont jamais existé que dans l'imagination.

Cependant, quoique toutes les histoires de quadrupedes ailés soient fausses, il ne faut pas nier absolument que la nature ait refusé à tous sans exception une espece de vol. Il y a dans les Indes orientales & occidentales des animaux qui ont les piés de devant attachés par une espece de membrane qui leur tient en quelque maniere lieu d'ailes. Tel est l'animal qu'on nomme le dragon volant, & que Pison, ainsi que Bontius rangent parmi les quadrupedes. Ces sortes d'animaux peuvent pendant quelque tems se mouvoir & se suspendre dans l'air. C'est ainsi que l'écureuil volant peut se soutenir par une membrane étendue qui l'empêche de tomber dans les sauts qu'il fait d'un arbre à l'autre. Il ne faut donc pas regarder les mots volant & ailé comme synonymes ; il n'y a point de quadrupedes ailés ; mais il y en a un qui vole sans avoir des ailes, & c'est la seule chauvesouris. Certaines especes de lézards & d'écureuils sont dits voler improprement ; car ils ne peuvent se soutenir dans l'air que pendant des momens, au moyen des peaux qui sont attachées à leurs pattes, & qui leur servent à se suspendre dans les sauts qu'ils font d'un endroit un peu plus élevé à un plus bas. (D.J.)


QUADRUPLATORS. f. (Hist. rom.) ce mot qu'on trouve dans Cicéron, signifie un délateur, pour des crimes qui concernoient la république ; on le nommoit quadruplator, parce qu'on lui donnoit la quatrieme partie du bien de ceux qui sur sa délation, avoit été confisqué. Plaute a forgé le verbe quadruplari, pour signifier, faire la profession de délateur. (D.J.)


QUADRUPLES. m. (Monnoie) monnoie d'or qui vaut quatre fois autant que l'espece dont elle est une des augmentations. La quadruple de la pistole d'Espagne s'appelle aussi piece de quatre pistoles, qui sur le pié d'onze livres la pistole d'Espagne, vaut quarante-quatre livres monnoie de France.

Le quadruple louis est une piece d'or fabriquée sous le regne de Louis XIII. en 1641 ; elle a d'un côté pour légende, Christus vincit, regnat, imperat ; & de ce même côté il y a au milieu de cette espece, une croix couronnée de quatre couronnes, & cantonnée de quatre fleurs de lys. Elle a de l'autre côté pour légende, Ludovicus decimus tertius Dei gratiâ Francorum rex, avec la tête de Louis XIII.

Le quadruple pese 10 deniers 12 grains trébuchans, & valoit sous Louis XIII. vingt livres. (D.J.)

QUADRUPLE-CROCHE, s. f. en italien quatri-croma, est une note de musique qui ne vaut que le quart d'une croche, ou la moitié d'une double croche. Il faut soixante-quatre quadruples-croches pour une mesure à quatre tems : mais on n'employe guere cette espece de notes. Voyez VALEUR des notes.

La quadruple-croche est presque toujours liée avec d'autres notes de pareille ou de différente valeur, & se figure ainsi ou Elle tire son nom du quadruple crochet par lequel on la désigne. (S)


QUAESTORIANENSIS(Géog. anc.) siége épiscopal d'Afrique, dans la Byzacène ; la notice épiscopale d'Afrique nomme cette province Victorianus quaestorianensis. Entre les évêques qui souscrivirent la lettre qu'écrivirent ceux de la Byzacène qui étoient au concile de Latran, tenu sous le pape Martin, on trouve ces paroles, spes in Deo, episcopus sanctae ecclesiae Quaestorianensis. (D.J.)


QUAI(Hist. nat. Bot.) c'est un cyprès du Japon, rempli d'un suc gras, visqueux, aromatique, de l'odeur du genévrier : son fruit est de la grosseur d'un pois, avec un tubercule. Notre cyprès commun, qui croît aussi au Japon y jette par ses feuilles une odeur balsamique ; & son fruit contient cinq semences, semblables au grain du froment.

QUAI, vulgairement JENS & QUAI-KAKU, (Hist. nat. Bot.) c'est un arbre du Japon, dont le tronc est extrêmement gros ; ses feuilles sont garnies de quatre lobes, & ses gousses articulées. Kaempfer juge que c'est le tamarin ; mais il est étranger, rare, & presque stérile au Japon.

QUAI ou QUAY, s. m. (Archit. hydraul.) c'est un gros mur en talut, fondé sur pilotis, & élevé au bord d'une riviere, pour retenir les terres des berges trop hautes, & empêcher les débordemens. Voyez l'Architecture hydraulique de M. Bélidor. (D.J.)


QUAIAGES. m. (Jurisprud.) est un droit qui se perçoit sur les marchandises que l'on décharge sur les quais ; ce droit en Normandie est appellé caisse & havre. (A)


QUAICHES. m. (Marine) petit bâtiment qui a un pont, & qui est mâté en heu ; voyez MATE EN HEU ; il est depuis trente jusqu'à quatre-vingt tonneaux ; on s'en sert pour le commerce le long des côtes de la Manche.


QUAIRESS. f. (Marine) terme de galere, ce sont des voiles qui servent à aller lentement.


QUAKENBRUGGE(Géog. mod.) petite ville d'Allemagne, au cercle de Westphalie, dans l'évêché d'Osnabruck : elle est sur la riviere de Hase, à huit lieues N. O. d'Osnabruck, 14 S. O. de Brème. Long. 25. 44. latit. 52. 45. (D.J.)


QUAKERS. m. (Hist. des sect. mod.) ce mot anglois veut dire trembleur ; c'est le sobriquet odieux qu'on s'est avisé de donner à une secte pacifique, dont la religion théorique a été cent fois tournée en ridicule, & dont on a été forcé de respecter la morale. Cette secte ne ressemble point pour les dogmes, & encore moins pour la conduite, à ces anabaptistes d'Allemagne du seizieme siecle, ramas d'hommes rustiques & féroces, qui pousserent leur fanatisme sauvage aussi loin que peut aller la nature humaine abandonnée à ses emportemens.

Les Quakers dont nous parlons, s'éleverent en Angleterre au milieu des guerres civiles du regne de Charles I. Georges Fox né dans un village du comté de Leicester, & fils d'un simple artisan, touché des malheurs de sa patrie, prêcha sans étude la morale, la charité mutuelle, l'amour de Dieu, un culte simple, & la nécessité de l'inspiration du Saint-Esprit, pour mériter le salut. Il blâma les vues intéressées des ministres anglicans ; condamna la guerre comme une fureur, & le serment comme un outrage fait à Dieu. Cromwel le fit arrêter avec sa femme ; mais cette persécution multiplia ses disciples & ses sectateurs ; on les maltraita, on sévit contr'eux, on les joua sur le théâtre ; ils mépriserent les mauvais traitemens, les prisons, & les satyres.

La secte fit les progrès les plus rapides ; Cromwel fut obligé de la craindre & de la respecter. Voyant que leur nombre augmentoit sans-cesse, il leur fit offrir de l'argent, pour les attirer à son parti ; mais ils furent incorruptibles ; & il dit un jour, que cette religion étoit la seule contre laquelle il n'avoit pû prévaloir avec des guinées.

Ils établirent pour premier principe de la morale religieuse, la frugalité, la tempérance, la modestie, le recueillement. 2°. Des pasteurs qui seroient nommés par l'assemblée des fideles. 3°. Ils embrasserent l'opinion des Anabaptistes sur le baptême & les sacremens. 4°. Ils établirent que tous les hommes sont égaux par leur nature. 5°. Qu'ils ont tous des lumieres suffisantes pour obtenir le salut par une bonne conduite. 6°. Qu'on sera justifié auprès de Dieu par sa propre justice. 7°. Que l'esprit de Dieu habite en tout homme qui ne l'éteindra pas. 8°. Enfin, pour se mettre en garde contre tout indigne commerce de mensonges & de flatteries, ils jugerent qu'on devoit également tutoyer les rois & les charbonniers en leur parlant ; n'avoir pour les hommes que de la charité & du respect pour les lois.

Voilà les principaux dogmes de cette secte : après cela qu'on range tant qu'on voudra les Quakers parmi les fanatiques ; ce sont toujours des fanatiques bien estimables. Je ne puis m'empêcher de déclarer, que je les estime un peuple vraiment grand, vertueux, plein d'industrie, d'intelligence, & de sagesse. Ce sont des gens animés des principes les plus étendus de bénéficence, qu'il y ait jamais eu sur la terre. Leur charité se porte sur toute la race du genre humain, ne refusant à personne les miséricordes des dieux. Ils reconnoissent publiquement que la liberté universelle est due à tout le monde. Ils condamnent les impôts, & néanmoins ils les payent, & s'y soumettent sans murmure. Enfin, c'est peut-être le seul parti chez les Chrétiens, dont la pratique du corps entier, réponde constamment à ses principes. Je n'ai point de honte d'avouer que j'ai lu & relu avec un plaisir singulier l'apologie du Quakérisme par Robert Barclay ; il m'a convaincu que c'est, tout calculé, le système le plus raisonnable & le plus parfait qu'on ait encore imaginé.

Barclay mit au jour son ouvrage en 1675 ; l'épître dédicatoire à Charles II. contient non des basses adulations, mais des vérités hardies, & des conseils justes. " Tu as goûté, dit-il à Charles à la fin de cette épître, de la douceur & de l'amertume, de la prospérité & des grands malheurs : tu as été chassé des pays où tu regnes ; tu as senti le poids de l'oppression, & tu dois savoir combien l'oppresseur est détestable devant Dieu & devant les hommes : que si après tant d'épreuves & de bénédictions, ton coeur s'endurcissoit & oublioit le Dieu qui s'est souvenu de toi dans les disgraces, ton crime en seroit plus grand, & la condamnation plus terrible : au lieu donc d'écouter les flatteurs de ta cour, écoute la voix de ta conscience, qui ne te flattera jamais. Je suis ton fidel ami & sujet, Barclay ".

Environ ce tems-là, parut l'illustre Guillaume Penn, qui établit la puissance des Quakers en Amérique, & qui les auroit rendus respectables en Europe, si les hommes pouvoient respecter la vertu sous des apparences ridicules. Il étoit fils unique du chevalier Penn, vice-amiral d'Angleterre, & favori du duc d'Yorck, depuis Jacques II. Il naquit à Londres en 1644, & fut élevé avec soin dans l'université d'Oxford ; il y étudia avec un jeune quaker, qui en fit un partisan des plus zélés du Quakérisme.

De retour chez le vice-amiral son pere, au lieu de se mettre à genoux devant lui, & de lui demander sa bénédiction, selon l'usage des Anglois, il l'aborda le chapeau sur la tête, & lui dit : je suis fort aise, mon cher pere de te voir en bonne santé. Le vice-amiral crut que son fils étoit devenu fou ; il apperçut bientôt qu'il étoit quaker. Il mit en usage tous les moyens que la prudence humaine peut employer, pour l'engager à vivre comme un autre ; le jeune homme ne répondit à son pere qu'en l'exhortant à se faire quaker lui-même. Enfin, le pere se relâcha à ne lui demander autre chose, sinon qu'il allât voir le roi & le duc d'Yorck le chapeau sous le bras, & qu'il ne les tutoyât point ; Guillaume répondit que sa conscience ne le lui permettoit pas, & qu'il valoit mieux obéir à Dieu qu'aux hommes. Le pere au desespoir, le chassa de sa maison. Le jeune Penn remercia Dieu de ce qu'il souffroit déja pour sa cause ; il alla prêcher dans la cité ; il y fit beaucoup de prosélytes. Comme il étoit beau, bien fait, vif, & naturellement éloquent, les femmes de tout rang accouroient dévotement pour l'entendre. Sur sa réputation, Georges Fox vint du fond de l'Angleterre le voir à Londres. Tous deux s'embarquerent pour la Hollande & l'Allemagne en 1677, afin de gagner des prosélytes au Quakérisme.

Leurs travaux eurent un heureux succès à Amsterdam ; mais, ce qui leur fit plus d'honneur, & ce qui mit le plus leur humilité en danger, fut la réception que leur fit la princesse Palatine Elisabeth, tante de George I. roi d'Angleterre, femme illustre par son esprit & par son savoir, & à qui Descartes avoit dédié son roman de Philosophie.

Elle étoit retirée à la Haye, où elle vit les Amis ; car c'est ainsi que l'on appelloit alors les Quakers en Hollande. Elle eut plusieurs conférences avec eux ; ils prêcherent souvent chez elle ; & s'ils ne firent pas d'elle une parfaite quakeresse, ils avouerent au-moins qu'elle n'étoit pas loin du royaume des cieux. Les Amis semerent aussi en Allemagne, mais ils y recueillirent peu ; on ne goûta pas la mode de tutoyer dans un pays, où il faut prononcer toujours les termes d'altesse & d'excellence.

Penn repassa bientôt en Angleterre, sur la nouvelle de la maladie de son pere, qui se reconcilia avec lui, le reçut avec tendresse, & finit ses jours entre ses bras. Il en hérita de grands biens, parmi lesquels il se trouvoit des dettes de la couronne, pour des avances faites par le vice-amiral, dans des expéditions maritimes. Le gouvernement donna à Guillaume Penn en 1681, au lieu d'argent, tant pour lui que pour ses successeurs, la propriété & la souveraineté d'une province de l'Amérique septentrionale, bornée au nord par les Iroquois, à l'orient par le nouveau Jersey, au midi par le Mariland, & à l'orient par le pays des Oniasontkes. Voilà un quaker devenu souverain.

Il partit pour ses nouveaux états, avec deux vaisseaux chargés de quakers, qui le suivirent. On appella dès lors le pays Pensylvania, du nom de Penn ; il y fonda la ville de Philadelphie, qui est aujourd'hui très-florissante. Il commença par faire une ligue avec les Amériquains ses voisins ; c'est le seul traité entre ces peuples & les Chrétiens, qui n'ait point été juré, & qui n'ait point été rompu. Le nouveau souverain fut aussi le législateur de la Pensylvanie ; il donna des lois très sages, dont aucune n'a été changée depuis lui. La premiere, est de ne maltraiter personne au sujet de la religion, & de regarder comme freres tous ceux qui croyent un Dieu.

A peine eut-il établi son gouvernement, que plusieurs négocians de l'Amérique vinrent peupler cette colonie. Les naturels du pays, au lieu de fuir dans les forêts, s'accoutumerent insensiblement avec les pacifiques Quakers. Autant ils détestoient les autres chrétiens, conquérans & destructeurs de l'Amérique, autant ils aimoient ces nouveaux venus. En peu de tems, ces prétendus sauvages, charmés des Quakers, vinrent en foule demander à Guillaume Penn, de les recevoir au nombre de ses vassaux. C'étoit un spectacle bien nouveau, qu'un souverain que tout le monde tutoyoit, & à qui on parloit le chapeau sur la tête, un gouvernement sans prêtres, un peuple sans armes, des citoyens tous égaux, à la magistrature près, & des voisins sans jalousie. Guillaume Penn pouvoit se vanter d'avoir apporté sur la terre l'âge d'or, dont on parle tant, & qui n'a vraisemblablement existé qu'en Pensylvanie.

Il revint en Angleterre pour les affaires de son nouveau pays, après la mort de Charles II. Le roi Jacques, qui avoit aimé son pere, eut la même affection pour le fils, & ne le considéra plus comme un sectaire obscur, mais comme un très-grand homme. La politique du roi s'accordoit en cela avec son goût. Il avoit envie de flatter les Quakers, en abolissant les lois contre les non-conformistes, afin de pouvoir introduire la religion catholique à la faveur de cette liberté. Toutes les sectes d'Angleterre virent le piége, & ne s'y laisserent pas prendre ; mais elles reçurent de Guillaume III. & de son parlement, cette même liberté qu'elles n'avoient pas voulu tenir des mains du roi Jacques. Ce fut alors que les Quakers commencerent à jouir, par la force des lois, de tous les priviléges dont ils sont en possession aujourd'hui. Penn, après avoir vu enfin sa secte établie sans contradiction dans le pays de sa naissance, alla faire un tour dans la Pensylvanie en 1700, avec sa femme & sa famille.

Les siens & les Amériquains le reçurent avec des larmes de joie, comme un pere qui revenoit voir ses enfans. Toutes ses lois avoient été religieusement observées pendant son absence ; ce qui n'étoit arrivé qu'au seul Lycurgue avant lui. Il ne resta qu'un couple d'années à Philadelphie ; & cependant n'en partit que malgré lui, pour aller solliciter à Londres des avantages nouveaux en faveur du commerce des Pensylvains. Il ne les revit plus ; la reine Anne le reçut avec beaucoup de considération, & voulut souvent l'avoir à sa cour ; mais l'air de Londres étant contraire à sa santé, il se retira en 1710 dans la province de Buckingham, où il finit ses jours en 1718, à l'âge de 74 ans.

Ce fondateur & législateur des Quakers en Amérique, & leur principal soutien en Europe, a la gloire d'avoir formé un peuple, où la probité paroît aussi naturelle que la bravoure chez les Spartiates. M. Penn est un véritable Lycurgue ; & quoique le premier ait eu la paix pour objet, comme l'autre a eu la guerre, ils se ressemblent dans la voie singuliere où ils ont mis leurs peuples, dans l'ascendant qu'ils ont eu sur des hommes libres, dans les préjugés qu'ils ont vaincus, dans les passions qu'ils ont soumises.

Le Quakérisme se soutient toujours en Pensylvanie, quoiqu'il soit vrai qu'il dépérit beaucoup à Londres. M. de Voltaire, qui m'a fourni la plus grande partie de cet article, remarque judicieusement, que par tout pays, la religion dominante, quand elle ne persécute point, engloutit à la longue toutes les autres. Les Quakers ne peuvent pas jouir des honneurs de distinction ; avoir part aux graces militaires, être membres du parlement, ni posséder aucun office, parce qu'ils condamnent la guerre, parce qu'il faudroit prêter serment, & qu'ils pensent qu'on ne doit point jurer ; ils sont donc réduits au seul commerce ; leurs enfans enrichis par l'industrie de leurs peres, veulent jouir, avoir des honneurs, des places, des emplois ; ils sont honteux d'être appellés quakers, & se font protestans pour être à la mode, & satisfaire leur ambition. (D.J.)


QUALIFICATEURS. m. terme de Droit canon, est un théologien, préposé pour qualifier ou déclarer la qualité des propositions qui ont été déférées à quelque tribunal ecclésiastique, & singulierement à celui de l'inquisition.

Les qualificateurs ne sont point juges, ils ne font que dire leur sentiment sur les propositions qu'on leur a donné à examiner ; ce sont les inquisiteurs qui jugent. Voyez INQUISITION.

QUALIFICATEURS DU SAINT OFFICE, (Hist. mod.) nom qu'on donne dans les pays où l'inquisition est établie à quelques membres ecclésiastiques de ce tribunal.

Les qualificateurs sont des Théologiens, qui prononcent sur les discours ou les écrits de ceux qui ont été déférés à l'inquisition, & décident si ces discours ou ces écrits sont hérétiques, ou approchent de l'hérésie, si les propositions qu'ils contiennent sont fausses, erronées, schismatiques, blasphématoires, impies, séditieuses, offensives des oreilles pieuses, &c. Les qualificateurs jugent aussi si la défense de l'accusé est valable & solide, ou si elle n'a pas ces qualités. Lorsque les inquisiteurs hésitent s'ils doivent faire emprisonner une personne ; ils consultent les qualificateurs qui donnent leurs réponses par écrit, afin qu'elles puissent être jointes aux autres pieces de la procédure & leur servir de base. Au reste, ces avis des qualificateurs ne sont que de simples consultations, que les inquisiteurs ne sont point obligés de suivre, Limbork, histor. inquisit.


QUALITÉTALENT, (Synon.) les qualités forment le caractere de la personne ; les talens en font l'ornement. Les premieres rendent bon ou mauvais, & influent fortement sur l'habitude des moeurs. Les seconds rendent utile ou amusant, & ont grande part au cas qu'on fait des gens.

On peut se servir du mot de qualité en bien & en mal ; mais on ne prend qu'en bonne part celui de talent.

L'homme est un mêlange de bonnes & de mauvaises qualités, quelquefois bizarre, jusqu'à rassembler en lui les extrêmes ; il y a des gens à talent sujets à se faire valoir, & dont il faut souffrir pour en jouir : il vaut encore mieux essuyer le caprice du renchéri, que la fatigue de l'ennuyeux.

Les qualités du coeur sont les plus essentielles ; celles de l'esprit sont les plus brillantes. Les talens qui servent aux besoins sont les plus nécessaires, ceux qui servent aux plaisirs sont les mieux récompensés.

On se fait aimer ou haïr par ses qualités ; on se fait rechercher par ses talens.

Des qualités excellentes jointes à de rares talens, font le parfait mérite. Girard. (D.J.)

QUALITE, (Métaphysiq.) ce mot exprime toute détermination intrinséque de l'être, qui peut être comprise par elle-même, & sans recourir à la voie de comparaison ; c'est ce qui distingue les qualités de la quantité. La quantité existe dans le sujet, mais elle ne sauroit être exprimée par la seule description ; pour rendre sa notion communicable, il faut chercher quelque quantité homogène déterminée, que vous prenez pour une unité & sur laquelle vous mesurez la premiere ; c'est un grand homme, dites-vous. Jusques-là la grandeur n'est qu'une qualité ; mais en voulez-vous déterminer la quantité, vous ne le ferez qu'en disant, il a tant de piés & de pouces. Au lieu que si vous parlez d'une étoffe rouge, d'une pierre chaude, &c. la simple dénomination de ces qualités en excite l'idée.

Toute détermination intrinséque de l'être, est qualité ou quantité, & par conséquent tout ce qui n'est pas quantité est qualité ; prenez une boule de bois. Qu'y a-t-il à observer dans ce sujet ? Des quantités ; savoir, la grandeur de la boule, & de son diametre, la multitude déterminable de ses parties, & la quantité de son poids. Des qualités ; savoir, sa figure, l'espece de sa matiere, sa pesanteur, sa couleur, &c. voilà tout ce que ce sujet, & quelqu'autre que ce soit peuvent fournir.

Les déterminations essentielles, les attributs, les possibilités & les modes mêmes, en tant qu'on en sépare l'idée de quantité, sont les qualités de l'être ; il y en a de primitives, qui n'en reconnoissent point d'autres où elles aient leur raison ; il y en a de dérivatives, dont la raison suffisante, tant d'actualité, que de possibilité se trouve dans d'autres antérieures.

Les qualités dérivatives sont, ou nécessaires, ou contingentes. Les premieres ont la raison suffisante de leur actualité dans les primitives : les autres n'y ont qu'une raison prochaine, ou même éloignée de leur possibilité. Ainsi les qualités dérivatives nécessaires sont la même chose que les attributs ; & les qualités dérivatives contingentes coïncident avec les modes.

Les qualités servent à distinguer les choses ; celles qui sont constantes, comme les qualités primitives, & les dérivatives nécessaires distinguent les objets en tout tems ; mais les contingentes ne peuvent servir à cet usage que dans un tems donné. Les choses semblables ont les mêmes qualités, & celles qui ont les mêmes qualités sont semblables.

La doctrine des qualités a fort occupé les scholastiques qui l'ont embarrassée de leurs subtilités, & qui aux qualités réelles avoient joint une foule de qualités occultes, qu'ils employoient pour l'explication des phénomenes, & que la saine philosophie n'a peut-être pas encore entierement extirpées.

Aristote s'en est tenu à la notion confuse du vulgaire sur ce sujet, en définissant la qualité, ce que nous répondons à la question, qu'elle est une telle chose ? Quelques scholastiques ont fait leurs efforts pour rendre cette notion plus distincte, en indiquant les marques qui dénotent les qualités dans les sujets ; mais leur esclavage n'a pas permis qu'ils fissent de grands progrès dans cette analyse. Cependant cette notion confuse adoptée par l'école, n'est point en contradiction avec la notion distincte que notre définition en donne ; & toutes les qualités que nous comprenons sous cette définition, peuvent servir de réponse à la question, quel est ce sujet ? Tout ce qu'il y a, c'est que la voie vulgaire ne sert qu'à distinguer confusément les objets dans la pratique ; au lieu que la route philosophique en enseigne les distinctions à priori.

QUALITE, en Physique est proprement une force ou action qui part d'un ou de plusieurs points, & de-là se répand dans un certain espace.

Quelqu'ignorans que nous soyons sur la nature des qualités, & sur la maniere dont elles operent, nous connoissons cependant les lois qui reglent leur plus ou moins d'intensité. Le docteur Keill démontre que toute qualité qui se propage en rond, c'est-à-dire du centre à la circonférence, comme la lumiere, la chaleur, le froid, l'odeur, &c. augmente ou diminue d'efficacité en raison doublée des distances du centre de sa radiation, c'est-à-dire du point d'où elle part.

Soit, par exemple (Pl. géométr. fig. 80.), la lettre A, le centre d'où quelque qualité se propage aux environs, selon la direction des lignes A e, A f, &c. l'efficacité de cette qualité, soit chaleur, soit froid, soit odeur, &c. sera à égale distance du point A, comme l'épaisseur ou la densité des rayons A b, A c, A d. Mais les rayons bornés à la circonférence interne, ou la surface sphérique b c d H venant à s'étendre jusqu'à la surface sphérique e f g K ; ils sont à cette derniere surface beaucoup moins pressés les uns contre les autres ; & cela en raison de l'étendue de cette surface ; c'est-à-dire que si la grande surface est double de la petite, les rayons seront une fois moins pressés. Ainsi les surfaces sphériques étant comme les quarrés de leurs rayons, l'efficacité de la qualité à la surface interne, sera à l'efficacité de cette même qualité à la surface externe, comme le quarré de A e est au quarré de A b.

Il faut cependant remarquer (& cette observation est très-importante) que la proposition précédente n'a lieu que pour les qualités qui se propagent par émission de particules, & non par pression dans un fluide. Pour éclaircir ceci, soit par exemple A un point lumineux qui envoye des rayons suivant A e, A f, A g, &c. lesquels rayons soient composés de particules émanées du corpuscule A. Il est certain que l'intensité de la lumiere de ce corps sera par la proposition précédente en raison inverse du quarré de la distance. Mais si la lumiere du corps A ne se propageoit que par pression, desorte que A e, A f, &c. marquassent seulement les directions suivant lesquelles le point A presse le fluide, il est constant par les lois de l'hydrostatique & par la nature des fluides, que la pression sur chaque portion de la surface e k est égale à la pression sur chaque portion égale de la surface b H ; desorte que la lumiere devroit ne point diminuer à mesure qu'on s'en éloigne, si elle se propageoit par pression. Ce qui peut fournir un nouvel argument en faveur du système de l'émission des corpuscules lumineux. Voyez LUMIERE & EMISSION.

Au reste pour prouver que l'action d'une qualité est en raison inverse du quarré de la distance, il faut supposer que cette qualité se propage par des corpuscules qui partent d'un centre ; autrement la prétendue démonstration est illusoire. C'est donc une absurdité que de vouloir démontrer de cette maniere la loi de l'attraction. Il faut uniquement la démontrer par les phénomenes ; surquoi voyez mes élémens de Philosophie, pag. 237 & 238. (O)

M. Newton avance comme une regle infaillible en Physique, que les qualités des corps qui ne sont point susceptibles d'augmentation ou de diminution d'intensité, & qui se trouvent dans tous les corps où on en a fait l'expérience, doivent être censées des qualités générales de tous les corps. Voyez PHYSIQUE.

QUALITES COSMIQUES, (Philosophie) M. Boyle entend par ce mot les qualités qui dépendent de l'action des corps qui composent le système de l'univers.

Cet illustre philosophe prétend 1°. que ces qualités dépendent en partie de l'influence des agens extérieurs, autant que des affections primitives de la matiere ; ensorte qu'il y a plusieurs corps, qui en certains cas n'agissent point, à moins que d'autres n'agissent sur eux ; & quelques-uns agissent seuls ou principalement, selon que ces agens universels & inconnus agissent sur eux. 2°. Qu'il y a des corps subtils répandus dans l'univers, prêts à s'insinuer dans les pores de tout corps disposé à recevoir leurs impressions, ou qui agissent sur lui de quelqu'autre maniere, surtout si d'autres causes inconnues, & les lois établies dans l'univers, concourent avec eux. 3°. Qu'un corps par le changement méchanique de sa contexture, peut acquérir ou perdre la disposition de recevoir l'impression de ces agens inconnus, comme aussi de diversifier leurs opérations par la diversité de sa contexture.

Boyle propose quelques conjectures sur ce sujet : par exemple, 1°. qu'outre ces corpuscules nombreux & uniformes dont l'éther est composé, selon quelques philosophes modernes, il y a peut-être d'autres especes de corpuscules propres à produire de grands effets, lorsqu'ils trouvent des corps sur lesquels ils puissent agir. 2°. Il rapporte que plusieurs personnes ont cru remarquer des écoulemens de parties pestilentielles dans l'air avant qu'elles agissent comme telles sur les corps. 3°. Il soupçonne que des changemens considérables quoique lents, dans les parties intérieures de la terre, peuvent produire des variations dans la boussole. 4°. Il suppose que le flux & le reflux de la mer, & d'autres phénomenes semblables, sont produits par quelque loi générale de la nature ; ou que le tourbillon planétaire du soleil & de la lune n'y a pas peu de part. 5°. Que toutes les maladies épidémiques doivent peut-être leur origine à l'influence de ces globes qui roulent autour de nous, & à celle des écoulemens terrestres de notre globe. 6°. Il doute que ce qu'on regarde comme les lois générales des phénomenes, & qui supposent une constitution constamment uniforme, & un cours réglé dans les choses ; il doute, dis-je, que ces lois soient aussi uniformes qu'on le croit. 7°. Il conjecture d'un autre côté que ce que nous regardons souvent comme des irrégularités hors du cours établi de la nature, se trouveroient peut-être, si on observoit exactement, des phénomenes réglés qui ont leur retour après de grands intervalles. Mais parce que les hommes n'ont ni assez d'habileté ni assez de curiosité pour les observer, & qu'ils ne vivent pas assez longtems pour faire un assez grand nombre d'observations sur ces phénomenes rares, ils en concluent trop promtement que ce sont des irrégularités, qui ne doivent leur origine à aucune cause fixe & durable. Tout cela paroît fort censé. (D.J.)

QUALITE, (Jurisprud.) est un titre personnel qui rend habile à exercer quelque droit.

Pour intenter une action, il faut avoir qualité, c'est-à-dire avoir droit de le faire.

On prend qualité dans une succession en se portant héritier ou légataire, ou donataire ou douairier.

Il y a des qualités qui sont incompatibles entr'elles, comme celles d'héritier & de légataire dans la coutume de Paris. Voyez HERITIER.

Qualités d'une sentence ou d'un arrêt, sont les noms des parties plaidantes avec leurs demandes & défenses que l'on énonce avant le vû & le dispositif du jugement.

Le procureur qui veut lever un jugement d'audience, fait signifier à son confrere des qualités ; si celui auquel il les signifie y trouve quelque chose à réformer, il peut former opposition aux qualités, & alors on plaide sur cet incident avant que le greffier expédie le jugement. Voyez ARRET, SENTENCE, GREFFIER, DISPOSITIF. (A)

QUALITE, en terme de Commerce ; se dit de la nature bonne ou mauvaise d'une marchandise, ou de la perfection ou du défaut d'une étoffe. Ce vin, cette étoffe, ce drap sont d'une excellente qualité, ou ne sont pas d'une bonne qualité. Dict. de commerce.

QUALITE, signifie encore ce qui distingue une chose d'avec une autre, parce qu'elles ne sont pas de même nature, ou qu'elles ont quelque apprêt qui les différencie ; comme l'or, l'argent, ou les autres métaux en lingots ne sont pas réputés de même qualité, ni entr'eux, ni avec les mêmes métaux ouvrés. Id. ibid.


QUAMS. m. (Hist. nat.) oiseau du Mexique & de la nouvelle Espagne ; il est de la grosseur d'un coq d'Inde, dont il a le bec. Son plumage est d'un brun noirâtre ; il vit dans les bois, & sa chair est très-bonne à manger.


QUAMDIUQUAMDIU

Cette clause, par exemple, est exprimée dans les lettres que le roi d'Angleterre donne aux barons de l'échiquier : elles portent expressément qu'ils jouiront de leur office aussi long-tems qu'ils se conduiront bien, ce qui s'entend simplement des devoirs de leur charge, & ne signifie autre chose, sinon qu'elle leur est donnée pour la vie, s'ils continuent jusqu'à la fin de s'en bien acquiter.

Ainsi pour l'ordinaire, une concession où se trouve cette clause est une concession à vie.


QUAMOCLITS. m. (Hist. nat. Botan.) genre de plante à fleur monopétale, en forme d'entonnoir & profondément découpée ; le pistil sort du calice ; il est attaché comme un clou à la partie inférieure de la fleur, & il devient dans la suite un fruit arrondi qui renferme des semences le plus souvent oblongues. Tournefort, inst. rei herb. Voyez PLANTE.

Tournefort compte sept especes de ce genre de plantes, qui sont toutes américaines, & qui ne different du liseron que par la figure de la fleur, qui est un tuyau évasé en entonnoir à pavillon découpé en plusieurs quartiers ; quand cette fleur est passée il lui succede un fruit oblong, qui renferme quatre semences oblongues, dures, noires, & du goût du poivre. Cette plante monte, & se soutient comme le liseron autour des perches ou des autres plantes voisines, jettant des rameaux d'un rouge obscur ; ses feuilles sont assez larges, découpées, menues & disposées en ailes. On cultive cette plante dans les jardins pour l'ornement ; elle rend du lait, & n'a point d'usage en médecine. (D.J.)


QUAN-TONou plutôt QUANG-TUNG, (Géog. mod.) province de la Chine, la douzieme de l'empire, & l'une des principales & des plus riches. Elle est bornée au nord-ouest par le Quangsi, au vrai nord par le Huquang, au nord-est par le Kiangs & le Fokieng, au midi par l'Océan, & au couchant par le Tonquin. On y jouit d'une grande température. Les moissons s'y font deux fois l'an. Le commerce y est très-vif en toutes sortes de marchandises, en or, en diamant, en perles, soie, fer, étain, cuivre, &c. L'abbé de Choisi dit qu'on y voit trois choses extraordinaires, un ciel sans nuage, des arbres toujours verds, & des hommes qui crachent le sang, parce qu'ils mâchent sans-cesse des feuilles de bétel, qui teint leur salive en rouge. Cette province contient dix métropoles. Quang-cheu est sa capitale ; c'est la même ville que les François nomment mal-à-propos Quanton ou Canton. Voyez QUANG-CHEU. (D.J.)


QUANDLORSQUE, (Synonymes) ce sont deux mots de l'ordre de ceux que la Grammaire nomme conjonctions, établis pour marquer de certaines dépendances & circonstances dans les événemens qu'ils joignent. Mais quand paroît plus propre pour marquer la circonstance du tems, & lorsque semble mieux convenir pour marquer celle de l'occasion. Ainsi, M. l'abbé Girard estime qu'on devroit dire, il faut travailler quand on est jeune ; il faut être docile lorsqu'on nous reprend à propos. On ne fait jamais tant de folies que quand on aime ; on se fait aimer d'ordinaire lorsqu'on cherche véritablement à plaire. Le chanoine va à l'église quand la cloche l'avertit d'y aller ; il fait son devoir lorsqu'il assiste aux offices. (D.J.)


QUANDROSS. m. (Hist. nat.) nom donné par quelques auteurs à une pierre qui se trouve, dit-on, dans la tête du vautour, & à laquelle on attribue un grand nombre de vertus fabuleuses & absurdes.


QUANG-CHEU(Géog. mod.) quelques missionnaires jésuites écrivent Canton, d'autres Quanton, & d'autres Quangtung ; grande ville de la Chine, capitale de la province de Quanton, avec un port. Elle est dans un pays fertile, sur la riviere de Ta, & compte quinze autres villes dans son département. Les lettres édifiantes vous en donneront de grands détails. Je n'ose vous assurer qu'ils soient vrais. Long. 130. 43. lat. 23. 8.


QUANG-SI(Géog. mod.) province de la Chine dans sa partie méridionale. Elle est bornée au nord par la province de Quiechen & d'Huquiang ; & par la province d'Huquiang & celle de Quanton ; sud par la même & par le Tonquin ; ouest par la province d'Iunnan. Elle est arrosée d'un grand nombre de rivieres qui la rendent fertile. Elle appartient en partie au Tunquin, & comprend onze cités. Longit. de Quiechu, capitale de cette province, 127. 16. lat. 25. 54. (D.J.)


QUANIES. f. (Lang. franç.) vieux mot qui veut dire chemise, habit de chambre.

Femme est plus couste, & plus mignote,

En sa quanie qu'en sa cotte ;

La quanie qui est blanche

Senefie que douce & franche

étoit celle qui la vestoit.

Roman de la Rose. Borel. (D.J.)


QUANou KUWANA, (Géog. mod.) grande ville du Japon, & la premiere de la province d'Owari. Elle est située sur une baie spacieuse de la mer du Midi, & est composée de trois différentes parties, qui sont comme autant de villes. Kaempfer, Histoire du Japon, liv. V. ch. x.


QUANTPOUR, (Synonymes) ces deux mots sont très-synonymes. Pour paroit cependant avoir meilleure grace dans le discours lorsqu'il s'agit de la personne ou de la chose qui régit le verbe suivant. Quant semble y mieux figurer, lorsqu'il s'agit de ce qui est régi par le verbe. On peut donc dire : pour moi je ne me mêle d'aucune affaire étrangere ; quant à moi tout m'est indifférent.

La religion des personnes éclairées consiste dans une morale pure, & dans une conduite vertueuse. Pour celle du peuple, elle consiste dans une crédulité aveugle, & dans les pratiques extérieures, autorisées par l'éducation & affermies par l'habitude. Quant à celle des gens d'église, on ne la connoîtra bien que quand on en aura séparé les intérêts temporels. L'abbé Girard. (D.J.)


QUANTIEMES. m. (Gramm.) il se dit du mois, de la lune ; c'en est le jour. Ainsi demander le quantieme du mois, c'est demander à quel jour on en est ; ainsi de la lune.


QUANTITÉS. f. (Philosophie) se dit de tout ce qui est susceptible de mesure, ou qui comparé avec une chose de même espece peut être dit ou plus grand ou plus petit, ou égal ou inégal. Voyez MESURE & GRANDEUR.

Les Mathématiques sont la science de la quantité. Voyez MATHEMATIQUES & GRANDEURS.

La quantité est un attribut général qui s'applique à différentes choses dans des sens tout-à-fait différens ; ce qui fait qu'il est très-difficile d'en donner une définition exacte.

La quantité s'applique également & aux choses & aux modes ; & cela au singulier, quand elle ne s'applique qu'à un, ou au pluriel, quand elle s'applique à plusieurs. Dans le premier cas elle s'appelle grandeur, dans l'autre multitude. Voyez GRANDEUR, &c.

Plusieurs philosophes définissent en général la quantité la différence interne des choses semblables, ou ce en quoi les semblables peuvent différer, sans que leur ressemblance en souffre.

Les anciens faisoient de la quantité un genre, sous lequel ils renfermoient deux especes, le nombre & la grandeur. Ils nommoient le nombre quantité discrette, parce que ses parties sont actuellement discrettes ou séparées, & qu'en prenant une de ces parties pour une unité, elle est actuellement déterminée. La grandeur au contraire portoit le nom de quantité continue, parce que ses parties ne sont pas actuellement séparées, & qu'on peut diviser en différentes manieres le tout qu'elle compose. Les mathématiciens modernes, en adoptant ces notions, ont remarqué de plus que le nombre & les grandeurs avoient une propriété commune, savoir de souffrir augmentation ou diminution ; ainsi ils ont défini en général la quantité, ce qui peut être augmenté ou diminué.

La quantité existe dans tout être fini, & s'exprime par un nombre indéterminé, mais elle ne peut être connue & comprise que par voie de comparaison, & en la rapportant à une autre quantité homogene.

Nous nous représentons, par une notion abstraite, la quantité comme une substance, & les accroissemens ou diminutions comme des modifications, mais il n'y a rien de réel dans cette notion. La quantité n'est point un sujet susceptible de diverses déterminations, les unes constantes, les autres variables, ce qui caractérise les substances. Il faut à la quantité un sujet dans lequel elle réside, & hors duquel elle n'est qu'une pure abstraction.

Toute quantité qui ne sauroit être assignée, passe pour zéro dans la pratique commune ; & dans celle des Mathématiciens, les nombres servent à faire comprendre distinctement les quantités. Elles peuvent aussi être représentées par des lignes droites, & leurs relations mutuelles se représentent par les relations de ces lignes droites.

Nous venons de dire que toute quantité inassignable passe pour zéro dans l'usage commun. Ainsi la division des poids, des mesures, des monnoies, va jusqu'à certaines bornes, au-delà desquelles on néglige ce qui reste, comme s'il n'étoit point ; c'est ainsi que le gros va jusqu'aux grains, le pié jusqu'aux lignes ou aux points, &c.

Pour les Mathématiciens, sans parler des pratiques du toisé, de l'arpentage, de l'architecture, &c. qui sont analogues aux mesures communes, il suffit de faire attention aux opérations des Astronomes. Non-seulement ils divisent les instrumens dont ils se servent pour leurs observations jusqu'à un terme fixe, ne tenant point compte de ce qui est au-dessous, mais encore leur calcul est rempli de pareilles suppositions ; dans l'astronomie sphérique, par exemple, ils comptent le demi-diamêtre de la terre, comparé à la différence des étoiles fixes, pour zéro, & supposent l'oeil de l'observateur placé au centre de la terre quoiqu'il soit à la superficie. Le même demi-diamêtre de la terre ne se compte pas non-plus en Gnomonique, eu égard à la distance du soleil, & il ne résulte de cette omission aucune erreur sensible dans la construction des cadrans solaires. M. Formey.

La quantité peut être réduite à quatre classes, savoir ;

La quantité morale qui dépend d'usages & de déterminations arbitraires, comme le poids & la valeur des choses, les degrés de dignité & de pouvoir, les récompenses & les châtimens, &c.

La quantité intellectuelle, qui a sa source & sa détermination dans l'entendement seul ; comme le plus ou le moins d'étendue dans l'esprit ou dans ses conceptions ; en logique les universaux, les prédicamens, &c.

La quantité physique ou naturelle est de deux sortes ; 1°. celle de la matiere même & de son étendue, voyez CORPS, MATIERE, ÉTENDUE ; 2°. celle des facultés & des propriétés des corps naturels, comme la pesanteur, le mouvement, la lumiere, la chaleur, le froid, la rareté, la densité, &c. Voyez MOUVEMENT, PESANTEUR, &c.

On distingue aussi communément la quantité en continue & discrette.

La quantité continue est de deux sortes, la successive & impropre qui est le tems. Voyez TEMS.

Et la permanente ou propre qui est l'espace. Voyez ESPACE.

Quelques philosophes veulent que l'idée de la quantité continue & la distinction qu'on en fait d'avec la quantité directe ne sont fondées sur rien. M. Machin regarde cette quantité mathématique, ou ce qui est la même chose, toute quantité qui s'exprime par un symbole, comme n'étant autre chose que le nombre par rapport à quelque mesure considérée comme unité ; car ce n'est que par le nombre que nous pouvons concevoir la mesure d'une chose. La notion d'une quantité, sans égard à aucune mesure, n'est qu'une idée confuse & indéterminée ; & quoi qu'il y ait quelques-unes de ces quantités, qui considérées physiquement, peuvent être décrites par le mouvement, comme les lignes par le mouvement des points, & les surfaces par les mouvemens des lignes ; cependant, dit M. Machin, les grandeurs ou quantités mathématiques ne se déterminent point par le mouvement, mais par le nombre relatif à quelque mesure. Voyez philos. Trans. n°. 447. pag. 228.

La quantité permanente se distingue encore en longueur, largeur, & profondeur. Voyez LIGNE, SURFACE & SOLIDE.

M. Wolf nous donne une autre notion des quantités mathématiques & de la division qu'on en fait en discrette & continue. Tout ce qui se rapporte, dit-il, à l'unité, comme une ligne droite ou une autre ligne, est ce que nous appellons quantité ou nombre en général. Voyez NOMBRE.

Ce qui se rapporte à une unité donnée, comme 2 ou 3, &c. s'appelle nombre déterminé ; ce qui se rapporte à l'unité en général s'appelle quantité, laquelle n'est en ce cas autre chose qu'un nombre.

Ainsi, par exemple, la largeur d'une riviere est une quantité : mais veut-on savoir combien elle est large pour se former une idée distincte de cette quantité, on prend quelque unité, telle qu'on le veut, avec laquelle on compare cette largeur, & selon qu'il a fallu que cette unité fût répétée plus ou moins de fois pour égaler cette largeur, ou à un nombre déterminé plus ou moins grand.

La largeur de la riviere est donc une quantité considérée relativement à une unité indéterminée ou une unité en général ; mais prise relativement à telle ou telle unité déterminée en particulier, c'est un nombre déterminé.

La quantité de mouvement dans les méchaniques est de deux sortes ; celle du mouvement momentané & celle du mouvement successif.

Les Cartésiens définissent celle-ci comme on a coutume de définir le mouvement momentané, par le résultat de la masse & de la vîtesse. Mais comme le mouvement est quelque chose de successif, dont les parties ne sont point co-existantes ; quelques-uns prétendent que sa quantité ne doit être estimée que par la collection de ses parties successives, ce qui est vrai à plusieurs égards, sur-tout dans le mouvement non-uniforme.

La quantité du mouvement momentané est le produit de la vîtesse par la masse ; ainsi la quantité de mouvement d'un corps entier est la collection des quantités de mouvement de toutes ses parties. Voyez MOUVEMENT.

Donc dans un corps deux fois aussi grand qu'un autre, mu avec la même vîtesse, il y a une fois plus de mouvement que dans celui qui est une fois plus petit ; & si la vîtesse est double, il y aura quatre fois plus de mouvement.

La quantité de mouvement momentané est proportionelle à l'impulsion qui fait mouvoir le corps. Voyez IMPULSION.

Dans le choc des corps, la quantité de mouvement momentané qui se trouve dans chacun, en prenant la somme des mouvemens qui tendent au même point, ou leurs différences s'ils ont des directions contraires, n'est point-du-tout changée par leur choc. Voyez PERCUSSION.

La quantité de matiere dans un corps est le produit de sa densité par son volume. Voyez MATIERE & DENSITE.

Si donc un corps est une fois plus dense qu'un autre, & occupe une fois plus d'espace ou de volume, sa quantité de matiere sera quatre fois plus grande.

Le poids absolu d'un corps est ce qui fait connoître le mieux sa quantité de matiere. Voyez MASSE, POIDS, &c.

Quantité infinie. Quoique l'idée d'une grandeur infinie, ou qui excede toute quantité finie, emporte avec soi l'exclusion de limites, il ne laisse pas d'y avoir, à plusieurs égards, selon quelques philosophes, des différences entre les infinis ; car outre les longueurs infinies, les largeurs infinies, il y a aussi trois sortes de solides infinis, différentes les unes des autres. Voyez INFINI. Voici ce que disent à ce sujet les philosophes dont nous parlons.

" On peut considérer la longueur infinie ou la ligne infiniment longue, ou comme commençant à un point, & n'étant par conséquent étendue infiniment que d'une part, ou comme s'étendant infiniment de part & d'autre de ce point en direction contraire ; la premiere de ces deux lignes infinies, c'est-à-dire celle qui commence par un premier point n'est que la moitié d'une ligne entiere qui contiendroit les deux moitiés, l'une antérieure, l'autre postérieure, & seroit en cela analogue à l'éternité, dans laquelle il y a perpétuellement autant de tems à venir qu'il y en a d'écoulé, voyez ÉTERNITE ; & ce qu'on ajouteroit ou qu'on ôteroit à cette durée infinie ne la rendroit ni plus longue ni plus courte, parce que la durée qu'on ajouteroit ou qu'on retrancheroit ne seroit point une partie quelconque de la durée infinie.

Quant à la surface ou aire infinie, une ligne étendue à l'infini, à parte ante & à parte post, tirée sur ce plan infini, le partageroit en deux parties égales, l'une à droite & l'autre à gauche de cette ligne. Mais si d'un point de ce plan partoient deux lignes droites prolongées à l'infini, & s'écartant l'une de l'autre ensorte qu'elles formassent un angle, l'aire infinie comprise entre les deux lignes, seroit à la surface totale comme un arc de cercle décrit entre ces deux lignes, du point de concours comme centre, seroit à la circonférence entiere du cercle, ou comme le nombre de degrés de l'angle que forment les deux lignes seroit aux 360 degrés du cercle entier.

Par exemple, deux lignes droites infinies se rencontrant à angles droits sur un plan infini, enferment un quart de la surface totale. Si l'on suppose deux lignes paralleles tirées sur un pareil plan infini, l'aire comprise entre deux sera pareillement infinie ; mais en même tems on peut dire en quelque sorte qu'elle sera infiniment moindre que l'espace compris entre deux lignes inclinées l'une sur l'autre, quelque petit que soit l'angle qu'elles formeront, parce que dans l'un des deux cas la distance finie donnée des deux paralleles, les borne à n'être infinies que dans un sens ou une dimension, au-lieu que dans l'espace renfermé par l'angle il y a infinité en deux dimensions.

De cette même considération naissent trois différentes sortes de solides infinis ; car le parallelépipede, ou le cylindre infiniment long est plus grand qu'aucun solide fini, quelque grand qu'il soit ; mais ce parallelépipede ou ce cylindre n'est infini qu'en longueur, & fini dans le sens des autres dimensions. De même si on compare ensemble plusieurs espaces compris entre deux plans paralleles étendus à l'infini, mais infiniment distans l'un de l'autre, c'est-à-dire qui soient d'une longueur & d'une largeur infinie, mais d'une épaisseur finie, tous ces solides seront en même raison les uns avec les autres que leurs dimensions finies.

Mais ces quantités, quoiqu'infiniment plus grandes que d'autres, sont en même tems infiniment plus petites que celles en qui les trois dimensions sont infinies. Tels sont les espaces compris entre deux plans inclinés infiniment étendus ; l'espace compris dans la surface d'un cône ou les côtés d'une pyramide, aussi prolongés à l'infini ; & il n'est pas difficile d'assigner quelles sont les proportions de ces différens solides les uns aux autres, ou au , ou espace infini qui est le lieu de tout ce qui est & qui peut être, ou à la triale dimension prise dans tous les sens ; car l'espace compris entre deux plans est à l'espace total ou infini en tout sens comme l'angle compris dans ces deux plans est aux 360 degrés du cercle entier. Quant aux cônes & aux pyramides, ils sont à l'espace total comme les portions de surface sphérique qu'on y peut décrire du sommet comme centre, sont à la surface entiere de la sphere. Ces trois sortes de quantités infinies sont analogues à la ligne, à la surface & au solide, & ne peuvent, non plus que ces trois derniers, être mises en comparaison ni en proportion les unes avec les autres ".

Il y a sans-doute du vrai dans ces observations ; mais l'idée d'un infini plus grand qu'un autre a toujours en soi quelque chose qui répugne ; il est certain qu'un espace peut n'avoir qu'une de ses dimensions infinies, & les deux autres finies ; mais il est certain aussi que ce même espace sera toujours plus grand que tout espace fini, & qu'à cet égard il ne sera pas plus petit qu'un autre espace qui seroit infini dans les trois dimensions. La seule idée que nous ayons de la quantité infinie, est celle d'une quantité qui surpasse toute grandeur finie, & il suit de-là que tous les infinis que nous pouvons imaginer n'auront jamais, par rapport à notre maniere de concevoir, d'autre propriété commune par celle-là ; donc on ne peut pas dire proprement que l'un est plus grand que l'autre : en effet, pour dire que l'un est plus grand que l'autre il faudroit les pouvoir comparer : or toute comparaison suppose perception, & nous n'avons point de perception de la quantité infinie. Quand nous croyons comparer deux infinis entr'eux, faisons réflexion à l'opération de notre ame, & nous verrons que nous ne comparons jamais que des quantités finies indéterminées, que nous croyons supposer infinies, parce que nous les supposons indéterminées. Voyez INFINI. (O)

QUANTITES, en termes d'Algebre, sont des nombres indéterminés, ou que l'on rapporte à l'unité en général, voyez NOMBRE.

Les quantités sont proprement le sujet de l'algebre, qui roule entierement sur leur calcul, voyez ALGEBRE & CALCUL.

On marque ordinairement les quantités connues par les premieres lettres de l'alphabet, a, b, c, d, &c. & les quantités inconnues par les dernieres, z, y, &c.

Les quantités algébriques sont ou positives ou négatives.

On appelle quantité positive celle qui est au-dessus de zéro, & qui est précédée, ou que l'on suppose être précédée du signe +, voyez POSITIF.

Quantités négatives sont celles qui sont regardées comme moindres que rien, & qui sont précédées du signe -, voyez NEGATIF.

Puis donc que + est le signe de l'addition, & - celui de la soustraction, il s'ensuit qu'il ne faut pour produire une quantité positive, qu'ajouter une quantité réelle à rien ; par exemple 0 + 3 = + 3 ; & 0 + a = + a. De même pour produire une quantité négative il ne faut que retrancher une quantité réelle de 0 ; par exemple 0 - 3 = - 3 ; & 0 - a = - a.

Eclaircissons ceci par un exemple. Supposez que vous n'ayez point d'argent, & que quelqu'un vous donne cent écus ; vous aurez alors cent écus plus que rien, & ce sont ces cent écus qui constituent une quantité positive.

Si au contraire vous n'avez point d'argent, & que vous deviez cent écus, vous aurez alors cent écus moins que rien ; car vous devez payer ces cent écus pour être dans la condition d'un homme qui n'a rien & qui ne doit rien : cette dette est une quantité négative.

De même dans le mouvement local, le progrès peut être appellé une quantité positive, & le retour une quantité négative ; à cause que le premier augmente & le second diminue le chemin qu'on peut avoir déja fait.

Si l'on regarde en géométrie une ligne tirée vers quelque côté que ce soit comme une quantité positive, celle que l'on menera du côté opposé sera une quantité négative. Voyez COURBE.

Selon quelques auteurs, les quantités négatives sont les défauts des positives.

Selon ces mêmes auteurs, puisqu'un défaut peut excéder un autre (car, par exemple, le défaut de 7 est plus grand que celui de 3) ; une quantité négative prise un certain nombre de fois, peut être plus grande qu'une autre.

D'où il suit que les quantités négatives sont homogenes entr'elles.

Mais, ajoutent-ils, puisque le défaut d'une quantité positive prise tel nombre de fois que l'on voudra, ne peut jamais surpasser la quantité positive, & qu'elle devient toujours plus défective : les quantités négatives sont hétérogenes aux positives ; d'où ils concluent que les quantités négatives étant hétérogenes aux positives, & homogenes aux négatives, il ne peut y avoir de rapport entre une quantité positive & une négative, mais il peut s'en trouver entre deux négatives. Par exemple, - 3 a : - 3 a : : 3 : 5. Le rapport est ici le même que si les quantités étoient positives. Mais ils prétendent observer qu'entre 1 & - 1, & entre - 1 & 1, la raison est tout-à-fait différente. Il est vrai pourtant d'un autre côté que 1 : - 1 : : - 1 : 1, puisque le produit des extrêmités est égal au produit des moyens ; ainsi la notion que donnent les auteurs des quantités négatives n'est pas parfaitement exacte. Voyez NEGATIF.

Addition des quantités. 1°. Si les quantités exprimées par la même lettre ont aussi le même signe, on ajoutera les nombres dont elles sont précédées, comme dans l'arithmétique ordinaire.

2°. Si elles ont différens signes, l'addition devient une soustraction, & l'on ajoute au restant le signe de la plus grande quantité.

3°. On ajoute les quantités exprimées par différentes lettres par le moyen du signe +, comme dans l'exemple suivant :

Soustraction des quantités, voyez SOUSTRACTION.

Multiplication & division des quantités, voyez MULTIPLICATION ou DIVISION.

Continuation des quantités, voyez COMBINAISON, PERMUTATION, &c.

Lorsqu'on multiplie ou qu'on divise deux quantités positives l'une par l'autre, il en résulte une quantité positive.

2°. Quand on multiplie ou qu'on divise une quantité négative par une positive, le produit & le quotient sont négatifs.

3°. En multipliant ou divisant deux quantités négatives l'une par l'autre, il en résulte une quantité positive.

4°. Lorsqu'on multiplie ou qu'on divise une quantité positive par une négative, ce qui en vient est une quantité négative. Chambers. (E)

QUANTITE, s. f. (Gramm.) par quantité l'on entend, en Grammaire, la mesure de la durée du son dans chaque syllabe de chaque mot. " On mesure les syllabes, dit M. l'abbé d'Olivet, prosod. franc. p. 53. non pas relativement à la lenteur ou à la vîtesse accidentelle de la prononciation, mais relativement aux proportions immuables qui les rendent ou longues ou breves. Ainsi ces deux médecins de Moliere, l'Amour médecin, act. II. scene 5. l'un qui allonge excessivement ses mots, & l'autre qui bredouille, ne laissent pas d'observer également la quantité ; car quoique le bredouilleur ait plus vîte prononcé une longue que son camarade une breve, tous les deux ne laissent pas de faire exactement breves celles qui sont breves, & longues celles qui sont longues ; avec cette différence seulement, qu'il faut à l'un sept ou huit fois plus de tems qu'à l'autre pour articuler ".

La quantité des sons dans chaque syllabe, ne consiste donc point dans un rapport déterminé de la durée du son, à quelqu'une des parties du tems que nous assignons par nos montres, à une minute, par exemple, à une seconde, &c. Elle consiste dans une proportion invariable entre les sons, qui peut être caractérisée par des nombres : ensorte qu'une syllabe n'est longue ou breve dans un mot que par relation à une autre syllabe qui n'a pas la même quantité. Mais quelle est cette proportion ?

Longam esse duorum temporum, brevem unius, etiam pueri sciunt. Quintil. IX. jv. 5. " Un tems, dit M. l'abbé d'Olivet, pag. 49. est ici ce qu'est le point dans la Géométrie, & l'unité dans les nombres ". c'est-à-dire, que ce tems n'est un, que relativement à un autre qui en est le double, & qui est par conséquent comme deux ; que le même tems qui est un dans cette hypothese, pourroit être considéré comme deux dans une autre supposition, où il seroit comparé avec un autre tems qui n'en seroit que la moitié. C'est en effet de cette maniere qu'il faut calculer l'appréciation des tems syllabiques, si l'on veut pouvoir concilier tout ce que l'on en dit.

On distingue généralement les syllabes en longues & breves, & on assigne, dit M. d'Olivet, un tems à la breve, & deux tems à la longue, ibid. " Mais cette premiere division des syllabes ne suffit pas, ajoute-t-il un peu plus loin : car il y a des longues plus longues, & des breves plus breves les unes que les autres ". Il indique les preuves de cette assertion, dans le traité de l'arrangement des mots par Denys d'Halicarnasse, ch. xv. & dans l'ouvrage de G. J. Vossius de arte grammaticâ, II. xij. où il a, dit-on, oublié ce passage formel de Quintilien : & longis longiores, & brevibus sunt breviores syllabae. IX. jv.

Que suit-il de-là ? Le moins qu'on puisse donner à la plus breve, c'est un tems, de l'aveu du savant prosodiste françois. J'en conclus qu'il juge donc lui-même ce tems indivisible, puisque sans cela on pourroit donner moins à la plus breve : donc le moins qu'on puisse donner de plus à la moins breve, sera un autre tems ; la longue aura donc au moins trois tems, & la plus longue qui aura au-dela de trois tems, en aura au moins quatre. Dans ce cas que devient la maxime de Quintilien, reçue par M. d'Olivet, longam esse duorum temporum, brevem unius ?

Mais notre prosodiste augmente encore la difficulté. " Je dis sans hésiter, c'est lui qui parle, pag. 51. que nous avons nos breves & nos plus breves ; nos longues & nos plus longues. Outre cela nous avons notre syllabe féminine plus breve que la plus breve des masculines : je veux dire celle où entre l'e muet ; soit qu'il fasse la syllabe entiere, comme il fait la derniere du mot armée ; soit qu'il accompagne une consonne, comme dans les deux premieres du mot revenir. Quoiqu'on l'appelle muet, il ne l'est point ; car il se fait entendre. Ainsi à parler exactement, nous aurions cinq tems syllabiques, puisqu'on peut diviser nos syllabes en muettes, breves, moins breves, longues & plus longues ". Par conséquent le moindre tems syllabique étant envisagé comme indivisible par l'auteur, la moindre différence qu'il puisse y avoir d'un de nos tems syllabiques à l'autre, est cet élément indivisible ; & ils seront entr'eux dans la progression des nombres naturels 1, 2, 3, 4, 5.

Notre illustre académicien répondra peut-être, que je lui prête des conséquences qu'il n'a point avouées : qu'il a dit positivement que la plus breve auroit un tems ; que la moins breve auroit un peu au-delà d'un tems ; mais sans pouvoir emporter deux tems entiers ; qu'ainsi la longue auroit justement deux tems, & la plus longue un peu au de-là. Je conviens que tel est le système de la prosodie françoise : mais je réponds, 1°. qu'il est inconséquent, puisque l'auteur commence par poser que le moins qu'on puisse donner à la plus breve, c'est un tems ; ce qui est déclarer ce moins un élément indivisible, quoiqu'on le divise ensuite pour fixer la gradation de nos tems syllabiques sans excéder les deux tems élémentaires : 2°. que cette inconséquence même n'est pas encore suffisante pour renfermer le système de la quantité dans l'espace de deux tems élémentaires, puisqu'on est forcé de laisser aller la plus longue de nos syllabes un peu au-delà des deux tems ; & que par conséquent il reste toujours à concilier les deux principes de Quintilien, que la breve est d'un tems & la longue de deux, & que cependant il y a des syllabes plus ou moins longues, ainsi que des breves plus ou moins breves : 3°. que dans ce système on n'a pas encore compris nos syllabes muettes, plus breves que nos plus breves masculines ; ce qui reculeroit encore les bornes des deux tems élémentaires : 4°. enfin que, sans avoir admis explicitement les conséquences du principe de l'indivisibilité du premier tems syllabique, on doit cependant les admettre dans le besoin, puisqu'elles suivent nécessairement du principe ; & qu'au reste c'est peut-être le parti le plus sûr pour graduer d'une maniere raisonnable les différences de quantité qui distinguent les syllabes.

Pour ce qui concerne la conciliation de ce calcul avec le principe, connu des enfans mêmes, que l'art métrique, en grec & en latin, ne connoît que des longues & des breves ; il ne s'agit que de distinguer la quantité naturelle & la quantité artificielle.

La quantité naturelle est la juste mesure de la durée du son dans chaque syllabe de chaque mot, que nous prononçons, conformément aux lois du méchanisme de la parole & de l'usage national.

La quantité artificielle est l'appréciation conventionnelle de la durée du son dans chaque syllabe de chaque mot, relativement au méchanisme artificiel de la versification métrique & du rythme oratoire.

Dans la quantité naturelle, on peut remarquer des durées qui soient entr'elles comme les nombres 1, 2, 3, 4, 5, ou même dans une autre progression : & ceux qui parlent le mieux une langue, sont ceux qui se conforment le plus exactement à toutes les nuances de cette progression quelconque. Les femmes du grand monde sont ordinairement les plus exactes en ce point, sans y mettre du pédantisme. Ciceron (de Orat. III. 21.) en a fait la remarque sur les dames romaines, dont il attribue le succès à la retraite où elles vivoient. Mais si l'on peut dire que la retraite conserve plus sûrement les impressions d'une bonne éducation ; on peut dire aussi qu'elle fait obstacle aux impressions de l'usage, qui est dans l'art de parler le maître le plus sûr, ou même l'unique qu'il faille suivre : nous voyons en effet que des savans très-profonds s'expriment sans exactitude & sans grace, parce que continuellement retenus par leurs études dans le silence de leur cabinet, ils n'ont avec le monde aucun commerce qui puisse rectifier leur langage ; & d'ailleurs les succès de nos dames en ce genre ne peuvent plus être attribués à la même cause que ceux des dames romaines, puisque leur maniere de vivre est si différente. La bonne raison est celle qu'allegue M. l'abbé d'Olivet, pag. 99. c'est qu'elles ont, d'une part, les organes plus délicats que nous, & par conséquent plus sensibles, plus susceptibles des moindres différences ; & de l'autre, plus d'habitude & plus d'inclination à discerner & à suivre ce qui plaît. A peine distinguons-nous dans les sons toutes les différences appréciables ; nos dames y démêlent toutes les nuances sensibles : nous voulons plaire, mais sans trop de frais ; & rien ne coûte aux dames, pourvu qu'elles puissent plaire.

S'il avoit fallu tenir un compte rigoureux de tous les degrés sensibles ou même appréciables de quantité, dans la versification métrique, ou dans les combinaisons harmoniques du rythme oratoire ; les difficultés de l'art, excessives ou même insurmontables, l'auroient fait abandonner avec justice, parce qu'elles auroient été sans un juste dédommagement : les chefs-d'oeuvres des Homeres, des Pindares, des Virgiles, des Horaces, des Démosthènes, des Cicerons, ne seroient jamais nés ; & les noms illustres, ensevelis dans les ténebres de l'oubli qui est dû aux hommes vulgaires, n'enrichiroient pas aujourd'hui les fastes littéraires. Il a donc fallu que l'art vînt mettre la nature à notre portée, en réduisant à la simple distinction de longues & de breves toutes les syllabes qui composent nos mots. Ainsi la quantité artificielle regarde indistinctement comme longues toutes les syllabes longues, & comme breves toutes les syllabes breves, quoique les unes soient peut-être plus ou moins longues, & les autres plus ou moins breves. Cette maniere d'envisager la durée des sons n'est point contraire à la maniere dont les produit la nature ; elle lui est seulement inférieure en précision, parce que plus de précision seroit inutile ou nuisible à l'art.

Les syllabes des mots sont longues ou breves, ou par nature ou par usage.

1°. Une syllabe d'un mot est longue ou breve par nature, quand le son qui la constitue dépend de quelque mouvement organique que le méchanisme doit exécuter avec aisance ou avec célérité, selon les lois physiques qui le dirigent.

C'est par nature que de deux voyelles consécutives dans un même mot, l'une des deux est breve, & sur-tout la premiere ; que toute diphtongue est longue, soit qu'elle soit usuelle ou qu'elle soit factice ; que si par licence on décompose une diphtongue, l'un des deux sons élémentaires devient bref, & plus communément le premier. Voyez HIATUS.

On peut regarder encore comme naturelle une autre regle de quantité, que Despautere énonce en deux vers :

Dum postponuntur vocali consona bina

Aut duplex, longa est positu....

& que l'on trouve rendue par ces deux vers françois dans la méthode latine de Port-Royal :

La voyelle longue s'ordonne,

Lorsqu'après suit double consonne.

Ceci doit s'entendre du son représenté par la voyelle ; & sa position consiste à être suivi de deux articulations prononcées, comme dans la premiere syllabe de cãrmen, dans la syllabe põst, dans at suivi de pius, ãt pius Aeneas, &c. C'est que l'on ne tient alors aucun compte de syllabes physiques qui ont pour ame l'e muet qui suit nécessairement toute consonne qui n'est pas avant une autre voyelle ; & qu'en conséquence on rejette sur le compte de la voyelle antécédente, le peu de tems qui appartient à l'e muet que la premiere des deux consonnes amene nécessairement, mais sourdement. Ainsi la prononciation usuelle ne fait que deux syllabes de carmen, quoique l'articulation y introduise nécessairement un e muet, & que l'on prononce naturellement ca-re-mé-ne : cet e muet est si bref, qu'on le compte absolument pour rien ; mais il est si réel que l'on est forcé d'en retenir la quantité pour en augmenter celle de la voyelle précédente.

L'auteur de la méthode latine (traité de la quantité, reg. IV.), observe que pour faire qu'une syllabe soit longue par position, il faut au moins qu'il y ait une des consonnes dans la syllabe même qu'on fait longue. Car, dit-il, si elles sont toutes deux dans la suivante, cela ne la fait pas longue d'ordinaire. Cette remarque est peu philosophique ; parce que deux consonnes ne peuvent appartenir à une même syllabe physique ; & qu'une consonne ne peut influer en rien sur une voyelle précédente. Voyez H. Ainsi que les deux consonnes appartiennent au mot suivant, ou qu'elles soient toutes deux dans le même mot que la voyelle précédente, ou enfin que l'une soit dans le même mot que la voyelle, & l'autre dans le mot suivant, il doit toujours en résulter le même effet prosodique, puisque c'est toujours la même chose. Le vers qu'on nous cite de Virgile, Aeneid. IX. 37. Ferte citi ferrum, date telã, scandite muros, est donc dans la regle générale, ainsi que l'usage ordinaire des Grecs à cet égard, & ce que l'on traite d'affectation dans Catulle & dans Martial.

On peut objecter sur cela que la liberté que l'on a en grec & en latin, de faire breve ou longue une voyelle originairement breve, quand elle se trouve par hasard suivie d'une muette & d'une liquide, semble prouver que la regle d'allonger la voyelle située devant deux consonnes, n'est pas dictée par la nature, puisque rien ne peut dispenser de suivre l'impression de la nature. Mais il faut prendre garde que l'on suppose 1°. qu'originairement la voyelle est breve, & que pour la faire longue, il faut aller contre la regle qui l'avoit rendue breve ; car si elle étoit originairement longue, loin de la rendre breve, le concours de la muette & de la liquide seroit une raison de plus pour l'allonger : 2°. il faut que des deux consonnes, la seconde soit liquide, c'est-à-dire qu'elle s'allie si bien avec la précédente, qu'elle paroisse n'en faire plus qu'une avec elle : or dès qu'elle paroît n'en faire qu'une, on ne doit sentir que l'effet d'une, & la breve a droit de demeurer breve ; si on veut appuyer sur les deux, la voyelle doit devenir longue.

On objectera encore que l'usage de notre orthographe est diamétralement opposé à cette prétendue loi de la nature, puisque nous redoublons la consonne d'après une voyelle que nous voulons rendre breve. Nos peres, selon M. l'abbé d'Olivet, pag. 22, ont été si fideles à notre orthographe, que souvent ils ont secoué le joug de l'étymologie, comme dans couronne, personne, où ils redoublent la lettre n, de peur qu'on ne fasse la pénultieme longue en françois ainsi qu'en latin. " Quoique le second t soit muet dans tette, dans patte, c'est, dit-il, (p. 23.) une nécessité de continuer à les écrire ainsi, parce que le redoublement de la consonne est institué pour abréger la syllabe, & que nous n'avons point d'accent, point de signe qui puisse y suppléer ".

La réponse à cette objection est fort simple. Nous écrivons deux consonnes à la vérité ; mais nous n'en prononçons qu'une. Or la quantité du son est une affaire de prononciation & non d'orthographe ; si bien que dès que nous prononcerons les deux consonnes, nous allongerons inévitablement la voyelle précédente. Quant à l'intention qu'ont eue nos peres, en instituant le redoublement de la consonne dans les mots où la voyelle précédente est breve ; ce n'a point été de l'abréger, comme le dit l'auteur de la prosodie françoise, mais d'indiquer seulement qu'elle est breve. Le moyen étoit-il bien choisi ? Je n'en crois rien, parce que le redoublement de la consonne, dans l'orthographe, devroit indiquer naturellement l'effet que produit dans la prononciation le redoublement de l'articulation, qui est de rendre longue la syllabe qui précéde. Nous n'avons point de signe, dit on, qui puisse y suppléer. M. Duclos, dans ses remarques manuscrites sur cet endroit-là même, demande s'il ne suffiroit pas de marquer les longues par un circonflexe, & les breves par la privation d'accent. Nous pouvons déja citer quelques exemples autorisés : matin, commencement du jour, a la premiere breve, & il est sans accent ; mâtin, espece de chien, a la premiere longue, & il a le circonflexe : c'est la même chose de tache, souillure, & tâche que l'on a à faire ; de sur, préposition, & sûr, adjectif ; de jeune d'âge, & jeûne, abstinence. Y auroit-il plus d'inconvénient à écrire il tete & la tête, la pâte du pain, & la pate d'un animal ; vu surtout que nous sommes déja en possession d'écrire avec le circonflexe ceux de ces mots qui ont la premiere longue ?

2°. Une syllabe d'un mot est longue ou breve par usage seulement, lorsque le méchanisme de la prononciation n'exige dans le son, qui en est l'ame, ni longueur, ni briéveté.

Il y a dans toutes les langues un plus grand nombre de longues ou de breves usuelles qu'il n'y en a de naturelles. Dans les langues qui admettent la versification métrique & le rythme calculé, il faut apprendre sans réserve la quantité de toutes les syllabes des mots, & en ramener les lois, autant qu'il est possible, à des points de vue généraux : cette étude nous est absolument nécessaire pour pouvoir juger des différens metres des Grecs & des Latins. Dans nos langues modernes, l'usage est le meilleur & le plus sûr maître de quantité que nous puissions consulter ; mais dans celles qui admettent les vers rimés, il faut surtout faire attention à la derniere syllabe masculine, soit qu'elle termine le mot, soit qu'elle ait encore après elle une syllabe féminine. C'est que la rime ne seroit pas soutenable, si les sons correspondans n'avoient pas la même quantité : ainsi, dit M. l'abbé d'Olivet, ces deux vers sont inexcusables :

Un auteur à genoux, dans une humble préface,

Au lecteur qu'il ennuie a beau demander grãce.

C'est la même chose de ceux-ci, justement relevés par M. Restaut, qui, en faveur de Boileau, cherche mal-à-propos à excuser les précédens :

Je l'instruirai de tout, je t'en donne parle,

Mais songe seulement à bien jouer ton rõle.

(B. E. R. M.)


QUANZA(Géog. mod.) grande riviere d'Afrique, dans sa partie méridionale. Elle prend sa source vers le nord des montagnes de Lupata, qu'on appelle l'Epine du monde, traverse le royaume de Matamba, entre ensuite au royaume d'Angola ; & prenant finalement sa route vers l'occident septentrional, arrose Colombo, se perd dans l'Océan éthiopien, entre la pointe de Palmérino & le cap Ledo. (D.J.)


QUAPACHTOTOTLS. m. (Hist. nat. Ornith.) oiseau d'Amérique décrit par Nieremberg ; il dit que son corps & sa queue ont chacun huit pouces de longueur ; son bec est crochu, sa poitrine cendrée, son ventre noir, sa queue noirâtre, ses aîles, sa tête & son col d'un brun jaune.


QUAPATLIS. m. (Botan. exot.) arbre fongueux de la nouvelle-Espagne, qui sert de matiere propre à nicher & faire éclorre une grande quantité de vers velus & rudes, de couleur rouge, longs de deux pouces, & gros comme un tuyau d'orgue. Les sauvages les font cuire dans de l'eau jusqu'à-ce qu'ils soient consumés, & que toute la graisse nage dessus. Ils la recueillent & s'en servent à plusieurs usages. (D.J.)


QUAQUALES, (Géog. mod.) les Hollandois ont donné ce nom à quelques peuples d'Afrique, en Guinée. Ils habitent les pays d'Adow, & sont soumis au roi de Saka. Ils s'étendent depuis le cap de la Hou jusqu'au cap de Sainte Apolline, en tirant vers le cap des Trois-pointes. Ils font des pieces de coton composées de cinq ou six bandes, & dont ils commercent, ainsi que de l'yvoire, ou dents d'élephans. M. de Marchais vous donnera de plus grands détails de ce peuple, dans son voyage de Guinée.


QUARANTAINE(Jurisprud.) signifie l'espace de quarante jours.

Ce mot s'employe quelquefois pour signifier le tems du carême ; parce que ce tems est d'environ quarante jours.

QUARANTAINE, en termes de jurisprudence angloise, est un bénéfice accordé à la veuve d'un propriétaire d'une terre, en vertu duquel elle est maintenue pendant quarante jours après la mort du défunt, dans l'habitation du chef-lieu, ou principal manoir, pourvu que ce ne soit pas un château.

Si quelqu'un entreprend de l'en expulser, elle a à opposer l'action de quarantenâ habendâ.

QUARANTAINE, est aussi en Angleterre une mesure ou étendue de terre de quarante perches.

QUARANTAINE, (Hist. mod.) nom en usage sur les ports de mer pour signifier le tems que les vaisseaux venans du levant & les passagers qui sont dessus ou leurs équipages doivent rester à la vue des ports avant que d'avoir communication libre avec les habitans du pays.

On prend cette précaution pour éviter que ces équipages ou passagers ne rapportent d'Orient l'air des maladies contagieuses & pestilentielles qui y sont fort fréquentes ; & l'on a donné à cette épreuve le nom de quarantaine, parce qu'elle doit durer quarante jours. Cependant lorsqu'on est sûr que ni les marchandises, ni les passagers ne sont partis de lieux ou suspects, ou infectés de contagion, on abrége ce terme, & l'on permet le débarquement tant des personnes que des marchandises, mais on dépose au moins les uns & les autres dans un lazaret où on les parfume. Le tems qu'elles y demeurent se nomme toujours quarantaine, quoiqu'il ne soit souvent que de huit ou quinze jours, & quelquefois de moins. Ce langage n'est pas exact, mais l'usage l'a confirmé.

QUARANTAINE LE ROI, (Jurisprud.) étoit une treve de 40 jours, qui fut établie par Philippe-Auguste, ou, selon d'autres, par Philippe le Hardi, & renouvellée par S. Louis en 1245. Cette ordonnance fut appellée elle-même la quarantaine le roi ; elle porte que depuis les meurtres commis ou les injures faites, jusqu'à 40 jours accomplis, il y avoit de plein droit une treve de par le roi, dans laquelle les parens des deux parties seroient compris, que cependant le meurtrier ou l'agresseur seroit arrêté & puni, & que si dans les 40 jours marqués, quelqu'un des parens se trouvoit avoir été tué, celui qui auroit commis le crime seroit réputé traitre & puni de mort. Voyez Beaumanoir, ch. lx. de ses cout. de Beauvaisis ; Ducange, dissert. 29. sur Joinville, & la préface de M. de Lauriere sur le premier tome des ordonnances de la troisieme race.

Enchere de quarantaine. Voyez ci-devant ENCHERE. (A)

QUARANTAINE, s. f. (Corderie) corde de la grosseur du petit doigt, dont les matelots se servent pour raccommoder leurs cordages. Savary. (D.J.)


QUARANTAINSS. m. pl. (Lainerie) c'est un terme de manufacture de draperie, qui se dit particulierement en Languedoc, en Dauphiné & en Provence, des draps de laine, dont la chaîne est composée de quarante fois cent fils, qui font en tout quatre mille fils. Savary.


QUARANTE COUPS(Critique sacrée) Moïse ordonna sagement que les punitions corporelles fussent toujours proportionnées à la nature des crimes, mais que néanmoins le nombre des coups de fouet ne passât jamais celui de quarante, afin, dit le législateur, que votre frere ne sorte point de votre présence indignement déchiré. Deuter. xxv. 3. or, dans la crainte de passer le nombre des coups prescrits par Moïse, l'usage s'établit chez les Juifs d'ordonner pour les plus graves fautes trente-neuf coups de fouet, & non quarante. C'est pour cela que S. Paul, dans la deuxieme épitre aux Corinth. ch. xj. 24. leur dit, j'ai reçu des Juifs cinq différentes fois quarante coups de fouet, moins un, . Le récit des souffrances de cet apôtre arrache les larmes : il avoit été sept fois chargé de chaînes, & battu de verges, selon Clément dans son épit. aux Corinthiens, S. Paul lui-même ; j'ai été battu trois fois de verges, & lapidé une fois ; j'ai fait naufrage trois fois. Je me suis trouvé dans mes voyages en péril des fleuves, des brigands, des gens de ma nation, des gentils, des faux-freres ; en peines & en travaux, en veilles, en jeûnes, souvent nud, & souvent accablé par le froid, la soif & la faim. (D.J.)

QUARANTE HEURES, prieres de, (Théolog.) dévotion très-usitée dans l'église romaine, qui consiste à exposer le S. Sacrement trois jours de suite pendant quarante-heures à la vénération des fideles. Ces prieres sont accompagnées de sermons, saluts, &c. on les fait ordinairement dans le jubilé, dans les calamités publiques, &c.

QUARANTE LANGUES, voyez MOQUEUR.


QUARANTENIERS. f. (Marine) sorte de petite corde de la grosseur du petit doigt, dont on se sert pour raccommoder les autres cordes.


QUARANTIES. f. (Hist. de Venise) ce mot se dit en parlant de la république de Venise, & signifie cour composée de quatre juges. On distingue de trois sortes de quarantie ; savoir la vieille quarantie civile, la nouvelle quarantie civile, & la quarantie criminelle. Cette derniere juge tous les crimes, excepté les crimes d'état, qui sont de la compétence du conseil des dix. La nouvelle quarantie civile connoît des appels des sentences rendues par les juges de dehors. La vieille quarantie civile connoît des appellations des sentences rendues par les subalternes de la ville. Amelot. (D.J.)


QUARANTIEMES. m. (Arithmétiq.) en fait de fractions ou nombres rompus de quelque tout que ce soit, un quarantieme s'écrit de cette maniere 1/40 ; on dit aussi un quarante-unieme, un quarante-deuxieme, un quarante-troisieme, &c. & ces différentes fractions s'écrivent de même que celle ci-dessus, à l'exception que l'on met un 1, un 2, un 3, à la place du zéro qui est après le quatre, ce qui marque ainsi 1/41, 1/42, 1/43, &c. on dit encore deux quarantiemes, trois quarantiemes, &c. que l'on écrit de cette maniere 2/40, 3/40, 4/40. Le quarante-huitieme de vingt sols est cinq deniers, qui est une des parties aliquotes de la livre tournois. Ricard. (D.J.)

QUARANTIEME, s. m. (Droit des fermes) droit qui se leve à Nantes & dans toute sa prevôté sur les marchandises qui passent devant S. Nazaire, en montant de Nantes à la mer. Ce droit exorbitant revient à six deniers par livre du prix de la marchandise. Il est au choix du fermier de le prendre en marchandises, ou en argent.

QUARANTIEME JOUR, (Médec.) les anciens fixoient à ce jour la durée des maladies aiguës, & donnoient le nom de chroniques à celles qui duroient plus long-tems. On voit néanmoins des maladies aiguës durer pendant soixante jours, mais c'est communément l'effet du traitement du médecin.


QUARDERONNERv. act. (Charp.) c'est rabattre les arêtes d'un poutre, d'une solive, d'une porte, &c. en y poussant un quart de rond entre deux filets. (D.J.)


QUARELETvoyez CARRELET.


QUARIATES(Géog. anc.) ancien peuple de la Gaule narbonnoise, selon Pline, l. III. c. iv. Le P. Hardouin conjecture qu'ils occupoient les diocèses de Senez & de Digne en Provence.


QUARQUENI(Géog. anc.) ancien peuple de la Gaule transpadane, selon Pline, l. III. c. xix. Il étoit dans le pays qui est aujourd'hui l'état de Venise, vers la Marche Trévisane & le Frioul.


QUARRES. f. terme de Chapelier, c'est en terme de chapelier le tour de la forme du chapeau par le haut. (D.J.)

QUARRE, s. f. (Chauderonnerie) la quarre d'un chauderon, d'un poëlon, ou d'une marmite, est l'endroit où le fond de ces ouvrages se joint au bord. Faire la quarre d'un chauderon, c'est l'arrondir avec le maillet de buis sur cette espece d'enclume ronde, qu'en terme de chauderonnerie on nomme une boule. Dict. de comm.

QUARRE, s. f. terme de Cordonnier, la quarre d'un soulier signifie le bout ; & chez les tailleurs la quarre d'un habit veut dire la taille du haut d'un habit. (D.J.)


QUARRÉS. m. en Géométrie, est une figure à quatre côtés, dont les côtés & les angles sont égaux. Voyez FIGURE, QUADRILATERE, &c.

Pour trouver l'aire d'un quarré, cherchez la longueur d'un côté, multipliez-le par lui-même, le produit sera l'aire du quarré. Voyez AIRE & MESURE.

Ainsi si la longueur d'un côté est 345, l'aire sera 119025 ; & si le côté du quarré est 10, l'aire sera 100.

Puis donc qu'une toise contient 6 piés, qu'un pié contient 12 pouces, &c. une toise quarrée contient 36 piés quarrés ; un pié quarré contient 144 pouces quarrés, &c.

Les propriétés du quarré sont que ses angles sont tous droits, & par conséquent ses côtés perpendiculaires les uns aux autres ; que la diagonale le divise en deux parties égales ; que la diagonale du quarré est incommensurable avec les côtés, &c. Voyez DIAGONALE & INCOMMENSURABLE.

A l'égard du rapport des quarrés, ils sont les uns aux autres en raison doublée de leurs côtés. Par exemple, un quarré dont le côté est double d'un autre, est quadruple de cet autre quarré.

Un nombre quarré est le produit d'un nombre multiplié par lui-même. Voyez NOMBRE.

Ainsi 4 produit de 2 multipliés par 2, ou 16 produit de 4 multipliés par 4, sont des nombres quarrés.

Ces nombres sont appellés nombres quarrés, parce qu'on peut les arranger en forme de quarrés, en faisant que la racine ou le facteur soit le côté du quarré. Voyez RACINE.

La différence de deux nombres quarrés, dont les racines ne sont pas l'unité, est un nombre impair, égal au double de la racine du plus petit en y ajoutant une unité.

On a par ce moyen une méthode facile de construire des nombres quarrés pour un nombre de racines qui procedent suivant la suite naturelle des nombres, pour cela le double de la racine augmenté de l'unité doit toujours être ajouté au quarré précédent.

Ainsi si n = 1 ; 2 n + 1 = 3 ; si n = 2, donc 2 n + 1 = 5. si n = 3, donc 2 n + 1 = 7. si n = 4, donc 2 n + 1 = 9. &c. ainsi on forme des nombres quarrés en ajoutant continuellement des nombres impairs.

Racine quarrée est un nombre qu'on considere comme la racine d'une seconde puissance, ou d'un nombre quarré ; ou bien, un nombre qui multiplié par lui-même produit un nombre quarré. Voyez RACINE.

Ainsi le nombre 2 étant un nombre qui, multiplié par lui-même, donne le nombre quarré 4, est appellé la racine quarrée de 4.

Puisque la racine quarrée est au nombre quarré, comme l'unité est à la racine quarrée, la racine est moyenne proportionnelle entre l'unité & le nombre quarré.

Une racine quarrée qui a deux parties se nomme binome, comme 20 + 4. Voyez BINOME.

Si elle a trois parties, on l'appelle trinome, comme 6 + 2 - 1. Voyez TRINOME.

On démontre que chaque nombre quarré d'une racine binome est composé du quarré de la premiere partie, plus le double de la premiere multiplié par la seconde, plus le quarré de la seconde.

Pour extraire la racine quarrée de tout nombre donné. Voyez EXTRACTION & RACINE. (E)

QUARRE QUARRE, c'est la puissance immédiatement au-dessus du cube, ou la quatrieme puissance ; ainsi a 4 est un quarré quarré, parce que c'est le quarré du quarré a. (E)

QUARRES MAGIQUES, en Arithmétique, on donne ce nom à des figures quarrées formées d'une suite ou série de nombres en proportion arithmétique, disposés dans des lignes paralleles ou en des rangs égaux ; de telle sorte que les sommes de tous ceux qui se trouvent dans une même bande horisontale, verticale, ou diagonale, soient toutes égales entre elles.

Tous les nombres qui composent un nombre quarré quelconque, par exemple, 1. 3. 4. &c. jusqu'à 25 inclusivement, qui composent le nombre quarré 25, ayant été disposés de suite dans une figure quarrée de 25 cellules, chacun dans la sienne ; si après cela on change l'ordre de ces nombres, & qu'on les dispose dans les cellules de façon que les cinq nombres qui composeront une bande horisontale de cellules quelconques, étant ajoutés ensemble forment toujours la même somme que cinq nombres qui composeront toute autre bande de cellules, soit horisontale, soit verticale, & même que les cinq qui composeront chacune des deux bandes diagonales : cette disposition de nombres s'appelle un quarré magique, pour la distinguer de la premiere disposition qu'on appelle quarré naturel. Voyez les figures suivantes.

On pourroit croire que les quarrés magiques ont eu ce nom, parce que cette propriété de toutes leurs bandes, qui prises en quelque sens que ce soit font toujours la même somme, a paru fort surprenante, sur-tout dans certains siecles où les Mathématiques étoient suspectes de magie : mais il y a aussi beaucoup d'apparence que ces quarrés ont encore mieux mérité leur nom par des opérations superstitieuses où ils ont été employés, telles que la construction des talismans ; car selon la puérile philosophie de ceux qui donnoient des vertus aux nombres, quelle vertu ne devoient pas avoir des nombres si merveilleux ? Ce qui a donc commencé par être une vaine pratique des faiseurs de talismans ou des devins, est devenu dans la suite le sujet d'une recherche sérieuse pour les Mathématiciens ; non qu'ils ayent cru qu'elle les pût mener à rien d'utile ni de solide. Les quarrés magiques se sentent toujours de leur origine ; ils ne peuvent être d'aucun usage : ce n'est qu'un jeu dont la difficulté fait le mérite, & qui peut seulement faire naître sur les nombres quelques vûes nouvelles, dont les Mathématiciens ne veulent pas perdre l'occasion.

Emanuel Moscopule, auteur grec du quatorzieme ou du quinzieme siecle, est le premier que l'on connoisse qui ait parlé des quarrés magiques ; & par le tems où il vivoit, on peut soupçonner qu'il ne les a pas regardés en simple mathématicien : il a donné quelques regles pour les construire. On trouve dans le livre d'Agrippa, que l'on a tant accusé de magie, les quarrés des sept nombres qui sont depuis 3 jusqu'à 9, disposés magiquement ; & il ne faut pas croire que ces sept nombres aient été préférés à tous les autres sans une grande raison ; c'est que leurs quarrés sont planétaires, selon le système d'Agrippa & de ses pareils. Le quarré de 3 appartient à Saturne, celui de 4 à Jupiter, celui de 5 à Mars, celui de 6 au Soleil, celui de 7 à Venus, celui de 8 à Mercure, & celui de 9 à la Lune. Bachet de Meziriac étudia les quarrés magiques, sur l'idée qu'il en avoit prise par les quarrés planétaires d'Agrippa ; car il ne connoissoit point l'ouvrage de Moscopule, qui n'est que manuscrit dans la bibliotheque du roi. Il trouva, sans le secours d'aucun auteur qui l'eût précédé, une méthode pour les quarrés dont la racine est impaire, comme pour 25, 49, &c. mais il ne put rien trouver qui le contentât sur ceux dont la racine est paire.

Après lui vint Frenicle. Un habile algébriste avoit cru que les 16 nombres qui composent le quarré de 4, pouvant être disposés de 20 922 789 888 000 manieres différentes dans un quarré magique ou non magique, ce qui est certain par les regles de combinaisons, ces mêmes nombres ne pouvoient être disposés différemment dans un quarré magique qu'en 16 manieres. Mais M. Frenicle fit voir qu'il y en avoit encore 878. D'où il est aisé de conclure combien sa méthode devoit être supérieure à celle qui n'avoit produit que la 55e partie des quarrés magiques qu'il trouvoit.

Il s'avisa d'ajoûter à cette recherche une difficulté qui n'y avoit point encore eu lieu. Le quarré magique de 7, par exemple, étant construit, & ses 49 cellules remplies, si on en retranche les deux bandes horisontales de cellules & les deux verticales les plus éloignées du milieu, c'est-à-dire, toute l'enceinte extérieure du quarré, il restera un quarré dont la racine sera 5, & qui n'aura que 25 cellules. Il ne sera pas étonnant que ce petit quarré ne soit plus magique ; car les bandes du grand n'étoient disposées de maniere à faire toutes la même somme, que prises dans leur tout & avec les 7 nombres qu'elles renfermoient chacune dans leurs 7 cellules : mais ayant été mutilées chacune de deux cellules, & ayant perdu deux de leurs nombres, il peut bien arriver que leurs restes ne fassent plus par-tout une même somme. M. Frenicle voulut qu'une enceinte de quarré magique étant ôtée, & même telle enceinte qu'on voudroit, lorsqu'il y en a assez pour cela, ou enfin plusieurs enceintes à la fois, le quarré restant fût encore magique ; & sans-doute cette nouvelle condition rendoit ces quarrés beaucoup plus magiques qu'ils n'avoient jamais été.

Il renversa aussi cette question ; il voulut qu'une certaine enceinte prise à volonté, ou plusieurs, fussent inséparables du quarré ; c'est-à-dire qu'il cessât d'être magique si on les ôtoit, & non si on en ôtoit d'autres. M. Frenicle ne donne point de démonstration générale de ses méthodes, & quelquefois il ne se conduit qu'en tâtonnant. Il est vrai que son traité des quarrés magiques n'a pas été donné au public par lui-même ; il ne parut qu'après sa mort, & fut imprimé par M. de la Hire en 1693.

M. Poignard, chanoine de Bruxelles, publia en 1703 un livre sur les quarrés magiques, qu'il appelle sublimes. Jusqu'ici on n'avoit construit les quarrés magiques que pour des suites de nombres naturels qui remplissoient un quarré : mais à cela M. Poignard fait deux additions importantes. 1°. au lieu de prendre tous les nombres qui remplissent un quarré, par exemple les trente-six nombres consécutifs qui rempliroient toutes les cellules du quarré naturel, dont le côté seroit 6, il ne prend qu'autant de nombres consécutifs qu'il y a d'unités dans le côté du quarré, c'est-à-dire ici 6 nombres, & ces 6 nombres seuls il les dispose dans les 36 cellules, de maniere qu'aucun ne soit répété deux fois dans une même bande, soit horisontale, soit verticale, soit diagonale. D'où il suit nécessairement que toutes les bandes, prises en quelque sens que ce soit, font toujours la même somme. M. Poignard appelle cela progression répétée. 2°. Au lieu de ne prendre ces nombres que selon la suite des nombres naturels, c'est-à-dire en progression arithmétique, il les prend aussi & en progression géométrique & en progression harmonique : mais avec ces deux dernieres progressions il faut nécessairement que la magie soit différente de ce qu'elle étoit dans les quarrés remplis par des nombres en progression arithmétique ; elle consiste en ce que les produits de toutes les bandes sont égaux, & dans la progression harmonique, les nombres de toutes les bandes suivent toujours cette progression. Ce livre de M. Poignard fait également des quarrés de ces trois progressions répétées.

Enfin M. de la Hire nous a donné dans les Mémoires de l'académie 1705 ses recherches sur ce sujet. Il considere d'abord les quarrés impairs. Tous ceux qui ont travaillé sur cette matiere ont trouvé plus de difficulté dans la construction des quarrés pairs ; & par cette raison M. de la Hire les garde pour les derniers. Le plus de difficulté peut venir en partie de ce qu'on prend les nombres en progression arithmétique. Or dans cette progression si le nombre des termes est impair, celui du milieu a certaines propriétés qui peuvent être commodes ; par exemple, étant multiplié par le nombre des termes de la progression, le produit est égal à la somme de tous les termes.

M. de la Hire propose une méthode générale pour les quarrés impairs, & elle a quelque rapport avec la théorie du mouvement composé, si utile & si féconde dans la Méchanique. Comme cette théorie consiste à décomposer les mouvemens, & à les résoudre en d'autres plus simples ; de même la méthode de M. de la Hire consiste à résoudre en deux quarrés plus simples & primitifs le quarré qu'il veut construire. Il faut avouer cependant qu'il n'étoit pas si aisé de découvrir ou d'imaginer ces deux quarrés primitifs dans le quarré composé ou parfait, qu'il l'est d'appercevoir dans un mouvement oblique un mouvement parallele, & un perpendiculaire.

S'il faut, par exemple, remplir magiquement avec les 49 premiers nombres de la progression naturelle les 49 cellules d'un quarré qui a 7 de racine, M. de la Hire prend d'un côté les 7 premiers nombres depuis l'unité jusqu'à la racine 7, & de l'autre 7 & tous ses multiples jusqu'à 49 exclusivement ; & comme il n'a par-là que 6 nombres il y joint 0 ; ce qui fait cette progression arithmétique de 7 termes, aussi-bien que la premiere 0, 7, 14, 21, 28, 35, 42.

Ensuite avec sa premiere progression répétée, il remplit magiquement le quarré de 7 de racine. Pour cela il écrit d'abord dans les 7 cellules de la premiere bande horisontale les 7 nombres proposés, selon tel ordre que l'on veut ; car cela est absolument indifférent : & il est bon de remarquer ici que les 7 nombres seuls peuvent être arrangés en 5040 manieres différentes dans une seule bande. L'arrangement qui leur sera donné dans la premiere bande horisontale, quel qu'il soit, est le fondement de celui qu'ils auront dans tous les autres pour la seconde bande horisontale. Il faut mettre dans sa premiere cellule ou le troisieme, ou le quatrieme, ou le cinquieme, ou le sixieme, qui suit le premier de la premiere bande horisontale, & après cela écrire les six autres de suite. Pour la troisieme bande horisontale, on observe à l'égard de la seconde le même ordre qu'on a observé pour la seconde à l'égard de la premiere, & toujours ainsi jusqu'à la fin. Par exemple, si on a rangé les sept nombres dans la premiere bande horisontale selon l'ordre naturel 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, on peut commencer la seconde bande horisontale par 3, ou par 4, ou par 5, ou par 6 ; mais si on l'a commencé par 3, la troisieme doit commencer par 5, la quatrieme par 7, la cinquieme par 2, la sixieme par 4, la septieme par 6.

Le commencement des bandes qui suivent la premiere étant ainsi déterminé, nous avons déjà dit que les autres nombres s'écrivoient tout de suite dans chaque bande allant de 5 à 6 à 7, & retournant à 1, 2, &c. jusqu'à ce que chaque nombre du premier rang se trouve dans chaque rang au-dessous, selon l'ordre qui a été arbitrairement choisi pour la premiere.

Par ce moyen il est évident qu'aucun nombre ne sera répété deux fois dans une même bande quelle qu'elle soit, & par conséquent les sept nombres 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, étant toujours dans chaque bande, ils ne pourront faire que la même somme.

On voit dans l'exemple présent que l'arrangement des nombres dans la premiere bande ayant été choisi à volonté, on a pu continuer les autres bandes de quatre manieres différentes ; & puisque la premiere bande a pu avoir 5040 arrangemens différens, il n'y a pas moins que 20160 manieres différentes dont le quarré magique de sept nombres répétés puisse être construit.

L'ordre des nombres dans la premiere bande étant déterminé, si l'on prenoit pour recommencer la seconde, le second 2 ou le dernier 7, une des bandes diagonales auroit toujours le même nombre répété, & dans l'autre cas ce seroit l'autre diagonale ; par conséquent l'une ou l'autre diagonale seroit fausse, à moins que le nombre répété 7 fois ne fût 4, car 4 fois 7 est égal à la somme de 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, & en général dans tout quarré construit d'un nombre de termes impairs en progression arithmétique, une des diagonales seroit fausse par ces deux constructions, à moins que le nombre toujours répété dans cette diagonale ne fût le terme du milieu de la progression. Il n'est nullement nécessaire de prendre des termes en progression arithmétique ; & on peut faire, suivant la regle de M. de la Hire un quarré magique de tels nombres qu'on voudra qui ne suivent aucune progression. De plus, lors même qu'on les prendra en progression arithmétique, il faudra excepter de la méthode générale les deux constructions qui produisent la répétition continuelle d'un même terme dans l'une des deux diagonales, & marquer seulement le cas où cette répétition n'empêcheroit pas la diagonale d'être juste.

Recommencer la seconde bande par tout autre nombre que le second ou le dernier de la premiere, ce n'est pas une regle générale ; elle est bonne pour le quarré de 7 : mais s'il s'agissoit, par exemple, du quarré de 9, & qu'on prît pour le premier nombre de la seconde bande horisontale le quatrieme de la premiere ; on verroit que ce même nombre commenceroit aussi la cinquieme & la huitieme bande, & par conséquent seroit répété trois fois dans la premiere bande verticale ; ce qui entraîneroit de semblables répétitions dans toutes les autres. Voici donc comment doit être conçue la regle générale. Il faut que le nombre que l'on choisit dans la premiere bande pour recommencer la seconde, ait un exposant de son quantieme, tel que diminué d'une unité il ne puisse diviser la racine du quarré. Si, par exemple, dans le quarré de 7 on a pris pour recommencer la seconde bande le troisieme nombre de la premiere, cette construction est bonne, parce que l'exposant du quantieme de ce nombre qui est 3 - 1, c'est-à-dire 2, ne peut diviser 7 ; de même on peut prendre le quatrieme nombre de la premiere bande, parce que 4 - 1 ou 3 ne divise point 7. C'est la même raison pour le cinquieme & sixieme nombre. Mais dans le quarré de 9, le quatrieme nombre de la premiere bande ne doit pas être pris, parce que 4 - 1 ou 3 divise 9. La raison de cette regle sera évidente, pourvu que l'on observe comment se font ou ne se font point les retours des mêmes nombres, en les prenant toujours d'une même maniere dans une suite quelconque donnée.

Il suit de-là que moins la racine du quarré que l'on construit a de diviseurs, plus il y a à cet égard de manieres différentes de le construire ; & que les nombres premiers, c'est-à-dire qui n'ont aucuns diviseurs tels que 5, 7, 11, 13, &c. sont ceux dont les quarrés doivent recevoir le plus de variations à proportion de leur grandeur.

Les quarrés construits suivant cette méthode ont une propriété particuliere, & que l'on n'avoit point exigée dans ce problème. Les nombres qui composent une bande quelconque parallele à une des deux diagonales, sont rangés dans le même ordre que ceux de la diagonale à laquelle cette bande est parallele ; & comme une bande parallele à une diagonale est nécessairement plus courte qu'elle & a moins de cellules, si on lui joint la parallele correspondante qui a le nombre de cellules qui lui manque pour en avoir autant que la diagonale, on trouvera que les nombres des deux paralleles mis, pour ainsi dire, bout à bout, garderont entr'eux le même ordre que ceux de la diagonale. A plus forte raison ils feront la même somme ; ce qui fait que ces quarrés sont encore magiques en ce sens-là.

Au lieu que nous avons formé jusqu'ici les quarrés par les bandes horisontales, on pourroit en former par les verticales, & ce seroit la même chose.

Tout ceci ne regarde encore que le premier quarré primitif, dont les nombres étoient dans l'exemple proposé 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, reste le second primitif dont les nombres sont 0, 7, 14, 21, 28, 35, 42. M. de la Hire opere de la même façon sur ce second quarré ; & il peut être construit, selon sa méthode, en 20160 manieres différentes, aussi-bien que le premier, puisqu'il est composé du même nombre de termes. Sa construction étant faite, & par conséquent toutes ses bandes composant la même somme, il est évident que si l'on ajoute l'un à l'autre les nombres des deux cellules correspondantes dans les deux quarrés, c'est-à-dire les deux nombres de la premiere d'un chacun, les deux de la seconde, de la troisieme, &c, & qu'on les dispose dans les 49 cellules correspondantes d'un troisieme quarré, il sera encore magique, puisque ses bandes formées par l'addition de sommes toujours égales à sommes égales seront nécessairement égales entr'elles. Il s'agit seulement de savoir si par l'addition des cellules correspondantes des deux premiers quarrés, toutes les cellules du troisieme seront remplies de maniere que chacune contienne un des nombres de la progression depuis 1 jusqu'à 49, & un nombre différent de celui de toutes les autres ; ce qui est la fin & le dessein de toute l'opération.

Il faut remarquer que si dans la construction du second quarré primitif, on a observé en recommençant la seconde bande un ordre à la premiere différent de celui qu'on avoit observé dans la construction du premier quarré, si, par exemple, on a recommencé la seconde bande du premier par le troisieme terme, & que l'on recommence la seconde bande du second quarré par le quatrieme, chaque nombre du premier quarré se combinera une fois par l'addition & une fois seulement avec tous les nombres du second ; & comme les nombres du premier sont ici 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, & ceux du second 0, 7, 14, 21, 28, 35, 42, on verra qu'en les combinant ainsi on aura tous les nombres de la progression depuis 1 jusqu'à 49, sans qu'il y en ait aucun répété ; & c'est-là le quarré parfait qu'il s'agissoit de construire.

La sujétion de construire différemment les deux quarrés primitifs, n'empêche nullement que chacune des 20160 constructions de l'un ne puisse être combinée avec toutes les 20160 constructions de l'autre, & par conséquent 20160 multiplié par lui-même, c'est-à-dire 406425600, est le nombre de toutes les constructions différentes que peut avoir le quarré parfait, qui est ici celui des 49 premiers nombres de la progression naturelle.

Quant aux quarrés pairs, M. de la Hire les construit ainsi que les impairs par deux quarrés primitifs ; mais la construction des primitifs est différente en général, & peut l'être même en plusieurs manieres ; & ces différences générales reçoivent plusieurs variations particulieres, qui donnent autant de constructions différentes pour un même quarré pair. Il paroît à peine possible de déterminer, ne fût-ce qu'à peu-près, ni combien de différences générales il peut y avoir entre la construction des quarrés primitifs d'un quarré pair & d'un impair, ni combien chaque différence générale peut recevoir de variations particulieres ; & par conséquent on est encore bien éloigné de pouvoir déterminer le nombre des constructions qui se feront par des quarrés primitifs. Hist. & Mém. de l'académie des Sciences, 1705. (E)

M. Sauveur a donné aussi ses recherches sur le même problème dans les Mém. de l'acad. de 1710, auxquels nous renvoyons. Enfin dans ceux de 1750, M. Dons-en-Bray a donné aussi une méthode pour construire les quarrés magiques. On peut voir dans l'Hist. des Mathématiques de M. Montucla, tome I. p. 336. la liste des principaux ouvrages qui ont été composés sur ce sujet.

QUARRE-CUBE, quarré-quarré-cube & quarré-cube-cube, sont des noms dont Diophante, Viete, Oughtred & d'autres se servent pour exprimer la cinquieme, septieme & huitieme puissance des nombres. Voyez PUISSANCE. (E)

QUARRE DU CUBE, quarré-quarré-quarré & quarré du sursolide, sont des noms dont se servent les Arabes pour exprimer la sixieme, la huitieme & la dixieme puissance des nombres. Voyez PUISSANCE. (E)

QUARRE, en Musique, B quarré ou béquarre. Voyez B. (S)

QUARRE, terme d'Anatomie, on donne ce nom à deux muscles, dont la figure est quarrée.

Le quarré de la cuisse naît de la partie latérale externe de la tubérosité de l'ischion, & va s'attacher, en conservant sa grosseur & sa longueur, à la partie latérale interne du grand trochanter. Voyez nos Pl. d'Anatomie.

Le quarré pronateur. Voyez PRONATEUR.

Le quarré de la levre inférieure, c'est le nom qu'on a donné à la partie musculeuse du menton ; cette portion est composée de deux plans de fibres obliques attachés de part & d'autre aux parties latérales du menton, & qui en se réunissant se perdent dans la levre inférieure. On remarque entre ces deux plans une espece de houppe musculaire qui se perd dans le menton, auquel elle est attachée par une de ses extrêmités, & se perd par l'autre dans la peau. Voyez LEVRE, &c.

Le quarré ou triangulaire des lombes vient de la partie postérieure & supérieure de la crête des os des îles, & se termine aux apophyses transverses des vertebres lombaires de la derniere vertebre du dos, & à la derniere fausse-côte.

Le quarré de la levre inférieure est un muscle qui paroît composé de deux plans de fibres, situés obliquement sur le menton, & qui en montant de sa partie inférieure se rencontrent à sa partie moyenne, & s'attachent & à la peau & à la partie inférieure du muscle orbiculaire.

QUARRE, (Hydr.) est une piece d'eau de forme quarrée ; cependant on appelle communément de ce nom toute piece d'eau, à-moins qu'elle ne soit ronde ou assez longue pour être appellée canal. (K)

QUARRE NAVAL, (Marine) c'est un grand quarré qu'on fait sur le pont d'un vaisseau de guerre entre le grand-mât & le mât d'artimon, pour faciliter le mouvement de l'armée. On divise ce quarré en deux également par une ligne perpendiculaire à deux côtés paralleles, & on mene deux diagonales des quatre angles du quarré. La premiere ligne répond à la quille du vaisseau, & représente la route qu'il tient. Les côtés du quarré paralleles à cette ligne marquent son travers ; & quand le vaisseau est au plus près, les diagonales désignent l'une la route que tiendra le vaisseau, & l'autre son travers. La diagonale qui est à droite s'appelle la diagonale stribord, & celle qui est au côté gauche la diagonale bas-bord.

Le quarré sert pour reconnoître la position du vaisseau, à l'égard des autres, afin d'avoir des points sur lesquels on puisse se fixer, suivant les évolutions qu'on doit faire ; il paroît que le P. Hoste est l'inventeur de ce quarré. Il en a expliqué les usages avec soin dans son Art des armées navales, p. 409, & suivantes, qui se réunissent tous à celui que je viens d'indiquer.

QUARRE, s. m. (Art numismat.) on appelle ainsi le coin des médailles, lequel est gravé avec le poinçon, & sert à en frapper d'autres. Il ne faut pas croire que chaque médaille ait un coin, un quarré ou une matrice différente, comme quelques antiquaires l'ont imaginé, en prétendant qu'il ne s'est jamais trouvé deux médailles parfaitement semblables. Outre que le fait est faux, & qu'on a rencontré plus d'une fois des médailles tellement pareilles, qu'il n'étoit pas possible de disconvenir qu'elles ne fussent sorties du même coin. On peut alléguer deux raisons assez fortes pour détruire absolument ce principe, qui d'ailleurs n'est fondé sur rien. La premiere, c'est qu'il n'y a point d'apparence qu'on ait frappé les médailles autrement qu'on ne frappoit les médaillons ; & cependant il est très-certain qu'on a plusieurs médaillons de même coin, comme le sénateur Buonarotti l'a remarqué dans ses observations sur ceux du cardinal Carpagna. Assurément la dépense d'un nouveau coin auroit toujours excédé la valeur de la médaille dans le moyen & le petit bronze. 2°. S'il eût été d'usage de faire un nouveau coin pour chaque médaille, il ne s'en trouveroit point d'incuses. En effet, ces sortes de médailles n'existeroient point, si le monétaire par hasard ou par inattention, n'eût oublié de retirer la médaille qu'il venoit de frapper, & n'eût réuni dans le même coin une nouvelle piece de métal, laquelle trouvant d'une part le quarré, & de l'autre, la médaille précédente, a reçu l'impression de la même tête, d'un côté en relief, & de l'autre, en creux. Il est donc évident que les mêmes quarrés servoient à plus d'une médaille.

QUARRE, (Monnoie) c'est la matrice ou coin d'acier gravé en creux, avec lequel on imprime en relief sur les monnoies les différentes figures qu'elles doivent avoir pour être reçues dans le public. (D.J.)

QUARRES, en terme de Blanchisserie, voyez TOILE, & l'article BLANCHIR.

QUARRE, c'est ainsi que les Horlogers appellent l'extrêmité d'un arbre ou d'un canon limée à quatre faces égales ; ainsi l'on dit le quarré de la fusée, de la chaussée, &c. On les lime ainsi, pour que la clé entrant dessus, elle ne puisse tourner sans les faire tourner en même tems. Voyez FUSEE, CHAUSSEE, &c.

QUARRE A VIS SANS FIN, (Voyez les Planches de l'Horlogerie) espece de clé qu'on met sur le quarré de la vis sans fin, pour bander le grand ressort par le moyen de cette vis.

QUARRE, batons quarrés, (Lutherie) dans les mouvemens de l'orgue sont des barres de bois de chêne d'un pouce d'équarrissage, qui communiquent d'une piece du mouvement à une autre, pour transmettre l'action que le premier a reçu. Voyez MOUVEMENS, & la fig. 1, Planche d'orgue.

QUARRE, c'est dans le Manege, une volte quarrée & large, de maniere que le cavalier fasse marcher son cheval de côté sur une des lignes du quarré. Les écuyers imaginent quelquefois ce quarré parfait ; d'autres fois ils font un quarré long ; & c'est sur les angles de ces quarrés qu'ils instruisent le cheval à tourner, en faisant ensorte que les piés de devant fassent un quart de rond pour gagner l'autre face du quarré, sans que les piés de derriere sortent de leur place, & qu'ils fassent un angle presque droit. On dit travailler en quarré, lorsqu'au lieu de conduire le cheval en rond & sur une piste circulaire autour du pilier, on le mene par les quatre lignes droites & égales qui forment le quarré, tournant la main à chacun des angles qu'on suppose qu'elles forment à une égale distance du centre, ou du pilier qui le représente.

QUARRE, (Charpent.) faire le trait quarré, selon les ouvriers, c'est élever une ligne perpendiculaire sur une autre ligne. (D.J.)

QUARRE, bois, (Commerce de bois) c'est le bois de charpente & de sciage dont on fait les poutres, les solives, les poteaux, & autres sortes de bois qui se débitent pour les ouvrages des Charpentiers & les assemblages des Menuisiers.

QUARRE bataillon, (Art. milit.) c'est un bataillon qui a le nombre des hommes de la file égal au nombre des hommes du rang. Bataillon quarré du terrein est celui qui a le terrein de chacune de ses ailes égal en étendue au terrein de la tête, ou à celui de la queue. Dict. milit. (D.J.)

QUARRE perspectif, (Perspective) c'est la représentation d'un quarré en perspective : ce quarré comprend ordinairement toutes les assiettes des objets qu'on veut représenter dans un tableau, & pour cet effet, on le divise en plusieurs petits quarrés perspectifs, par le moyen desquels on décrit en abrégé les apparences de tout ce que l'on veut représenter dans le tableau. Voyez la perspective de M. Desargues.

QUARRE, (Jardin.) s'entend d'abord d'une forme quarrée telle que seroit un parterre, un bâtiment aussi long que large : ce qui s'évite ordinairement, n'étant pas une figure heureuse.

On dit encore un quarré de bois, de foin, de parterre, de potager.

Un quarré long, s'il est régulier, est un vrai parallélogramme.

QUARRE, en terme d'Orfevre en Grosserie, c'est une espece de rebord qui seroit sur le bassinet d'un chandelier, &c. ou même au milieu d'une piece, comme dans le bassinet entre le collet & le panache. Voyez COLLET & PANACHE.


QUARREAou CARRO, en latin quadrellus, quarellus, quadrilus, quadrum, (Art milit.) espece de grosse fleche dont le fer formoit une pyramide dont la base étoit un quarré.

Les quarreaux étoient empennés, & quelquefois empennés d'airain. Il y en avoit de fort grands, & ceux-là étoient lancés par des balistes ; les autres l'étoient avec l'arbalête.

Le pere Daniel remarque que d'Aubigné donne le nom de quarreaux du tems de Henri IV. à des balles de pistolet : ce qui lui fait penser qu'apparemment on se servoit quelquefois de balles quarrées. (Q)

QUARREAUX, s. m. pl. (Monnoie) ce sont les lames d'or, d'argent, ou de billon, réduites à-peu-près à l'épaisseur des especes à fabriquer, & coupées en morceaux quarrés approchant du diamètre des mêmes especes. (D.J.)

QUARREAUX, terme de jeu de paume, ce sont des pierres quarrées dont tous les jeux de paume sont pavés. Ces quarreaux n'ont point de longueur fixée, mais ils doivent être tous de même largeur, parce qu'ils servent à désigner la longueur des chasses ; ainsi on dit, la chasse est à six, huit, dix quarreaux, &c.


QUARRÉEou bréve, étoit dans nos anciennes musiques, une note ainsi figurée , qui valoit deux rondes ou trois, selon que la mesure étoit à deux ou à trois tems. Voyez BREVE. (S)

QUARREES-LES-TOMBES, (Géog. mod.) village de l'Auxois, province de Bourgogne, nommé en latin moderne parochia de quadratis, en sous-entendant apparemment lapidibus ; dans ce village, depuis un tems immémorial, on a découvert, & l'on découvre encore des tombeaux de pierre. M. Moreau de Mautour, qui a communiqué sur ce sujet en 1716, des réflexions à l'académie des belles-lettres, dit que ce village est situé sur les confins de la petite contrée du Morvant, à deux lieues de la ville d'Avalon, & que l'espace du terrein où l'on trouve ces tombeaux, ne contient qu'environ six cent soixante pas de longueur, & environ cent soixante de largeur : ces tombes qui sont d'une pierre grisâtre, ont environ cinq ou six piés de longueur. On en a brisé un grand nombre, pour bâtir & pour paver l'église de ce lieu ; on s'en est même quelquefois servi pour en faire de la chaux ; on en a réservé quelques-unes pour la montre, & on les a laissées dans le cimetiere.

Ce qu'il y a de singulier, c'est qu'on ne voit sur ces tombeaux aucune marque de christianisme, ni même d'autres figures, & qu'il n'y en a qu'un seul sur lequel on ait vu une croix gravée, & sur un autre un écusson qu'on ne sauroit déchiffrer. En creusant les fondemens de la sacristie, on en déterra deux dans lesquels on trouva deux pendans d'oreille ; dans un autre tiré d'une cave, quelques ossemens avec deux autres pendans d'oreille, & dans quelques autres enfin, des éperons.

Il n'y a, selon M. de Mautour, qu'une seule carriere dont on ait pu tirer les pierres qui ont servi à faire ces cercueils. Elle est dans un endroit nommé champ-rotard, à six lieues de Quarrées-les-tombes ; & d'habiles maçons, qui ont examiné la qualité & la couleur de la pierre de cette carriere, parfaitement ressemblante à celle des tombeaux, sont convenus de ce fait.

Savoir maintenant pour quelle raison il y a tant de tombeaux dans un lieu si peu célebre, c'est ce qu'il n'est pas aisé de deviner. On n'ignore pas qu'on avoit accoutumé autrefois d'enterrer les morts hors des villes, & sur les grands chemins : que cet usage s'observoit à Paris, & dans toutes les Gaules, dans les premiers tems du christianisme, & qu'il y dura jusques bien avant, sous la troisieme race de nos rois ; l'on pourroit en conclure, ou qu'il y avoit quelque ville considérable aux environs de Quarrées, ou que ce village auroit été un magasin de tombeaux, pour en fournir aux villes voisines : ces deux conjectures souffrent néanmoins de grandes difficultés. On ne trouve aucun vestige de villes aux environs de Quarrées ; les plus voisines sont Avalon, Saulieu & Lorme. De ces deux dernieres, l'une est aujourd'hui misérable, & l'autre trop éloignée. Avalon n'en est véritablement qu'à deux lieues ; mais, outre qu'on n'y a jamais découvert aucun de ces tombeaux, cette ville est plus proche de la carriere que du village de Quarrées ; ainsi il n'y a pas d'apparence qu'on ait été chercher à quatre lieues, ce qu'on trouvoit à moitié chemin.

Dans cet embarras, M. de Mautour a recours à l'histoire, pour voir si quelque bataille n'auroit pas donné occasion à ce prodigieux amas de tombeaux. Deux évenemens paroissent favorables à cette conjecture. Après la défaite & la mort d'Abdérame, général des Sarrasins, les débris de son armée s'étant joints aux Vandales, aux Alains, & aux Ostrogoths, ces barbares désolerent la Bourgogne, & se rendirent maîtres de Mâcon, de Châlons, de Dijon, d'Auxerre, d'Autun, & de plusieurs autres villes. Or Avalon étant située entre Autun & Auxerre, il y a lieu de croire que ces peuples ravagerent aussi cette contrée : ces tombeaux qui se trouvent dans Quarrées & dans la campagne voisine, sont une nouvelle raison de le penser.

Le second évenement est arrivé au commencement du xj. siecle, dans les années 1003, 1004 & 1005. Henri premier du nom, duc de Bourgogne, étant mort sans enfans, Landri, comte de Nevers, s'empara de plusieurs villes de ce duché. Robert, roi de France, neveu d'Henri, & son héritier légitime, entra peu de tems après dans la Bourgogne, prit la ville d'Auxerre, mit le siege devant Avalon. Cette ville résista pendant trois mois ; & soit qu'il ne s'en rendît maître que par la famine, comme le disent quelques historiens, soit qu'il l'ait prise par assaut, comme d'autres l'assurent, il est probable que ce prince, pendant un si long siege, perdit beaucoup de soldats, & on pouvoit, dit-on, avoir fait pour les enterrer, ce grand amas de tombeaux.

Mais il se présente une difficulté fort embarrassante : c'est que presque tous ces tombeaux paroissent n'avoir jamais servi. M. de Mautour répond que peut-être la qualité de la pierre étoit propre à consumer les cadavres en peu de tems. Il seroit aisé d'en faire l'expérience, pour voir si cette idée a quelque fondement. Du moins est-il sûr que Pline parle d'une sorte de pierre qu'on trouvoit dans la Troade, aux environs de la ville d'Assus, & qui en quarante jours réduisoit les corps en poudre.

Cependant malgré ces raisons, il est plus sensé de croire que Quarrées étoit autrefois un magasin, un entrepôt où l'on avoit conduit de la carriere de Champ-Rotard, des cercueils tout faits, pour être de-là transportés dans des lieux, où l'on en auroit besoin ; & de-là vient qu'ils n'ont ni caractere ni gravure, ni aucune autre marque qui prouve qu'ils ayent servi. Ce qui confirme cette opinion, c'est la lecture d'un ancien manuscrit de la bibliotheque de M. de Savigny, président à mortier du parlement de Dijon, où M. de Mautour a trouvé que dans le XIII. siecle, il y avoit dans Quarrées & aux environs, une multitude considérable de tombeaux de pierre, qui n'avoient jamais été employés, & qui étoient devenus inutiles depuis que l'usage s'étoit rétabli d'enterrer les fideles dans l'église.

Abrégeons ; l'amas de cercueils qui a donné le nom au lieu, n'est autre chose qu'un reste du magasin, que de riches marchands des anciens tems du christianisme avoient tiré de la carriere de Champ-Rotard, afin d'en pourvoir les autres villages du Morwant, dont la pierre ne peut être mise en oeuvre ; & comme l'usage des sépulcres de pierre a cessé peu-à-peu, le magasin est resté inutile. (D.J.)


QUARREMENTadj. (Architect.) signifie à angle droit, à l'équerre.


QUARRERv. act. (Mathém.) On dit quarrer un nombre, pour marquer qu'on le multiplie, ou qu'il faut le multiplier par lui-même. Ainsi quarrer le nombre 3, c'est multiplier 3 par 3, pour avoir le produit 9, qui est le quarré de 3.

Quarrer un triangle ou une figure plane quelconque, c'est trouver un quarré dont la surface soit égale à l'aire des plans proposés. Jusqu'à présent on n'a pu encore quarrer le cercle à la rigueur. Voyez QUADRATURE. (E)

QUARRER, v. act. (Architect.) c'est réduire en quarré quelque chose que ce soit ; quand on dit, quarrer un poutre, c'est l'équarrir. (D.J.)


QUARRYS. m. (Comm.) mesure des salines. Le quarry contient 62 pintes, mesure de Salins, qui font 90 pintes, mesure de Paris.


QUARTS. m. (Mathémat.) est la quatrieme partie d'un tout, laquelle est plus ou moins grande, selon la quantité du total dont elle fait partie. Ainsi l'on dit un quart d'heure, un quart de boisseau, un quart de muid. Voyez, HEURE, BOISSEAU, MUID. Voyez aussi MESURE.

Un quart dans les fractions s'exprime par 1/4, & les trois quarts par 3/4. Voyez FRACTION.

QUART DE CERCLE, en Géométrie, est un arc de cercle de 90 degrés, ou la quatrieme partie de toute la circonférence. Voyez ARC & CERCLE. Voyez aussi DEGRE.

QUART DE CERCLE, signifie aussi un instrument d'un grand usage dans la navigation & dans l'Astronomie, pour prendre des hauteurs, des angles, &c. Voyez HAUTEUR & ANGLE.

Il y a plusieurs especes de quarts de cercle, qui sont tous différens selon leurs différens usages ; mais tous ont cela de commun, qu'ils consistent en un quart de cercle, dont le limbe est divisé en 90 degrés ; qu'ils ont un plomb suspendu à leur centre, & qu'ils sont armés de pinnules ou de lunettes pour observer. Voyez PINNULES, &c.

Les principaux quarts de cercle les plus ordinaires & les plus utiles, sont le quart de cercle d'arpenteur, le quart de cercle astronomique, & le quart de cercle mural.

Le quart de cercle simple, (représenté Pl. d'arpent.) se fait de cuivre, de bois, ou d'autre matiere. Son rayon est ordinairement de 12 ou 15 pouces ; son limbe circulaire est divisé en 90 degrés, & chacun de ces degrés est divisé en autant de parties égales, que l'espace peut permettre, diagonalement ou autrement. Sur un demi-diametre sont attachées deux pinnules immobiles ; & au centre est suspendu un fil avec un plomb. On attache aussi quelquefois au centre une regle mobile, qui porte deux autres pinnules semblables à l'index d'un télescope ; & au lieu des pinnules immobiles, on y met quelquefois un télescope, quoique cet appareil appartienne plus particulierement au quart de cercle astronomique.

Sous la surface inférieure de l'instrument, est un genou, au moyen duquel on peut lui donner toutes les situations dont on a besoin. Voyez GENOU.

Outre les parties essentielles du quart de cercle, on met fort souvent sur la face, proche le centre, une espece de compartiment, que l'on appelle quarré géométrique, comme on le voit dans la figure. Ce quarré fait en quelque sorte un instrument séparé. Voyez sa description & son usage à l'article QUARRE GEOMETRIQUE.

On conçoit facilement qu'il faut donner au quart de cercle différentes positions, selon les différentes situations des objets que l'on observe ; ainsi que pour mesurer des hauteurs ou profondeurs, il faut que son plan soit situé perpendiculairement à l'horison, & que pour prendre des distances horisontales, il y soit parallele.

De plus, on peut prendre de deux manieres les hauteurs & les distances, c'est-à-dire par le moyen des pinnules fixes & du plomb, & par le moyen de l'index mobile.

Usage de ce quart de cercle ; pour mesurer la hauteur d'un objet, ou sa profondeur avec les pinnules fixes & le fil à plomb. Si vous voulez prendre, par exemple, la hauteur d'une tour, placez verticalement le quart de cercle, & regardez par la pinule qui est près de la circonférence, en dirigeant l'instrument, jusqu'à ce que l'oeil apperçoive le sommet de la tour au-travers des pinnules. Alors la portion de l'arc, interceptée entre le fil & le demi-diametre, où sont fixées les pinnules, fait voir le complément de la hauteur de la tour au-dessus de l'horison, ou sa distance au zénith, & l'autre portion de l'arc interceptée entre le fil & l'autre demi-diametre, montre sa hauteur même au-dessus de l'horison.

Le même arc donne pareillement la quantité de l'angle formé par le rayon visuel, & par une ligne horisontale parallele à la base de la tour.

Pour mesurer les profondeurs, il faut remarquer que l'oeil doit être placé au-dessus de cette pinule, qui est proche le centre du quart de cercle.

La hauteur ou la profondeur de l'objet, étant ainsi déterminée en degrés (que nous supposerons ici 35°. 35'), & la distance du pié de l'objet au lieu de l'observation, étant mesurée avec un très-grand soin (distance que nous supposerons de 47 piés) ; rien ne sera plus facile ensuite, que de déterminer en piés ou en toises, cette hauteur ou cette profondeur, en se rappellant les problèmes les plus communs de la trigonométrie. Voyez TRIANGLE.

Car nous avons ici, dans un triangle, un côté donné, c'est-à-dire la ligne ou la distance mesurée, & de plus, nous connoissons tous les angles. En effet, celui de la tour étant toujours supposé un angle droit, les deux autres pris ensemble, seront égaux à un droit ; mais on a observé un angle de 35°. 35'. L'autre angle sera donc de 54°. 25''. Voyez ANGLE.

Le cas proposé se réduit donc à celui-ci ; le sinus de 54°. 25'', est à 47 piés, comme le sinus de 35°. 35' est à un quatrieme, c'est-à-dire à 35 piés 1/2, auxquels ajoutant la hauteur de l'oeil de l'observateur, que l'on peut supposer de 5 piés, la somme 38 piés 1/2, exprime ou donne la hauteur de la tour proposée.

Si l'on veut avoir un usage plus étendu du quart de cercle pour prendre la hauteur des objets, tant accessibles qu'inaccessibles, il n'y a qu'à recourir à l'article HAUTEUR.

Usage du quart de cercle, pour prendre les hauteurs & les distances, par le moyen de l'index, & des pinnules. Pour prendre, par exemple, une hauteur telle que celle d'une tour, dont la base est accessible, placez le plan de l'instrument à angles droits, avec le plan de l'horison, & faites que l'un de ses diametres y soit aussi parallele, en vous servant du plomb, qui dans ce cas doit prendre tout le long de l'autre diametre perpendiculaire au premier. Dans cette situation, tournez l'index jusqu'à ce que vous apperceviez le sommet de la tour, en regardant par la pinule, & l'arc du limbe du quart de cercle, compris entre le bord parallele à l'horison, & l'index donnera en degrés la hauteur de la tour : d'où il suit qu'en mesurant une base, & calculant, comme ci-dessus, on en peut trouver la hauteur en piés, ou si l'on ne peut pas employer le calcul trigonométrique avec les données, c'est-à-dire avec l'angle observé, & la base mesurée, on fera sur du papier ou sur une carte, un triangle semblable au grand triangle imaginé dans l'air ; alors, en portant la hauteur verticale de ce petit triangle sur une échelle bien exactement divisée en parties égales, on aura la hauteur de la tour. Voyez ECHELLE.

Usage du quart de cercle, pour mesurer des distances horisontales. Quoique le quart de cercle, ne soit pas un instrument aussi propre à cet usage que le théodolite, le demi-cercle, &c. à cause que l'on ne peut pas prendre par son moyen des angles plus grands qu'un quart de cercle, cependant la nécessité oblige quelquefois de s'en servir.

En ce cas la maniere d'appliquer cet instrument, est la même que celle du demi-cercle. Toute la différence entre ces deux instrumens, consiste en ce que l'un est un arc de 180°. qui peut prendre par conséquent un angle d'une grandeur quelconque, & que l'autre ne peut prendre qu'un angle de 90 degrés : ainsi il est borné aux angles de cette quantité. Voyez donc. DEMI-CERCLE.

QUART DE CERCLE ASTRONOMIQUE, ou simplement quart de cercle. C'est un grand quart de cercle fait ordinairement de cuivre, quelquefois de barres de bois, soutenues ou garnies seulement de plaques de fer, &c. dont le limbe est divisé, avec le plus d'exactitude qu'il est possible, diagonalement ou autrement, en degrés, minutes & même secondes ; sur l'un de ses côtés sont attachées des pinnules, ou en leur place, un télescope ; & il y a un index, tournant autour du centre, qui porte aussi des pinnules, ou un télescope.

On se sert principalement de ces quarts de cercle pour observer le soleil, les planetes, les étoiles fixes. Voyez OBSERVATION.

Les modernes ayant découvert les télescopes, les ont substitués aux pinnules dont les anciens se servoient, parce qu'ils donnent beaucoup plus de précision. Voyez PINULE & TELESCOPE. Ajoutez que l'idée que l'on a eue de rendre l'index mobile, par le moyen d'une vis placée sur le côté du limbe, celle de pouvoir, lorsque l'instrument est sur son piédestal, le pointer ou le diriger sur le champ, & avec facilité à un phénomene quelconque, moyennant des vis & des roues dentées, tout cela, dis-je, a porté le quart de cercle astronomique à un point de perfection bien supérieur à celui des anciens.

Quart de cercle horodictique. C'est un instrument assez commode, ainsi appellé à cause que l'on s'en sert pour avoir l'heure du jour. V. HEURE & CADRAN.

Sa construction est si simple & si aisée, & son application si promte que nous ne pouvons nous dispenser d'en donner la description ; elle pourra être de quelque utilité à ceux qui manqueront de tout autre moyen.

Construction & usage du quart de cercle horodictique. Du centre du quart de cercle C (tab. astron. fig. 54.) dont le limbe A B est divisé en 90, décrivez sept cercles concentriques d'un rayon quelconque ou à volonté, & ajoutez à ces cercles les signes du zodiaque dans l'ordre que vous indique la figure.

2°. Appliquant une regle au centre C & au limbe A B, marquez sur les différentes lignes paralleles les degrés correspondans à la hauteur du soleil, quand il se trouve sur ces lignes pour exprimer les heures données, joignez les points qui appartiennent à la même heure par une ligne courbe, & mettez-y le nombre de l'heure ; attachez au rayon C A une couple de pinnules, & au centre du quart de cercle C, suspendez un fil avec un plomb ; enfin mettez sur ce fil un grain de chapelet qui puisse y glisser.

Maintenant, si l'on fait avancer le grain jusqu'au parallele où est le soleil, & que l'on dirige le quart de cercle vers cet astre, jusqu'à ce qu'un rayon visuel passe par les pinnules, le grain montrera l'heure.

Car dans cette situation le plomb coupe tous les paralleles dans les degrés correspondans à la hauteur du soleil ; ainsi puisque le grain est dans le parallele que le soleil décrit dans ce moment, & que les lignes horaires passent par les degrés de hauteur auxquels le soleil est élevé à chaque heure, il est nécessaire que le grain indique l'heure présente.

Sans se piquer d'une délicatesse bien scrupuleuse, il y en a qui représentent les lignes horaires par des arcs de cercles ou même par des lignes droites, ce qui ne cause pas une erreur sensible.

Le quart de cercle de Gunter est une espece de quart de cercle (représenté dans la planche d'astron. fig. 55.) de l'invention de M. Edm. Gunter, anglois.

Outre le limbe gradué, cet instrument a des pinnules fixes & un plomb comme les autres quarts de cercle ; il a pareillement une projection stéréographique de la sphère sur le plan de l'équinoxial, où l'on suppose l'oeil placé dans l'un des poles ; outre les usages ordinaires des autres quarts de cercle, on peut avec cet instrument résoudre avec beaucoup de facilité plusieurs problêmes d'astronomie fort utiles.

Usage du quart de cercle de Gunter. 1°. Trouver la hauteur méridienne du soleil pour un jour donné quelconque, ou bien trouver le jour du mois pour une hauteur méridienne donnée quelconque, mettez le fil au jour du mois dans l'échelle qui est proche le limbe, le degré que ce fil coupe sur le limbe est la hauteur méridienne du soleil.

Ainsi plaçant le fil au 15 de Mai, il coupe 50°, 30', qui est la hauteur cherchée ; & au contraire le fil étant mis à la hauteur méridienne, fera voir le jour du mois.

2°. Trouver l'heure du jour. Ayant mis le grain qui glisse sur le fil au lieu du soleil dans l'écliptique, observez avec l'instrument la hauteur du soleil ; alors si l'on place le fil sur cette même hauteur marquée sur le limbe, le grain tombera sur l'heure que l'on demande.

Ainsi supposons qu'au 10 d'Avril, le soleil étant alors au commencement du taureau, j'observe avec cet instrument la hauteur du soleil, & que je la trouve de 36°, je mets le grain au commencement du taureau dans l'écliptique, je couche le fil dans les 36 degrés du limbe, & je trouve qu'il tombe sur la ligne horaire marquée 3 & 9 ; ainsi cela fait voir qu'il est ou 9 heures du matin, ou 3 heures après midi, ou bien mettant le grain sur l'heure donnée, (après avoir eu soin de le rectifier, c'est-à-dire de le placer au lieu du soleil) le degré coupé par le fil sur le limbe, donne la hauteur du soleil.

Remarquez que le grain peut se rectifier d'une autre maniere, c'est-à-dire en portant le fil au jour du mois, & le grain à la ligne horaire de 12.

3°. Le lieu du soleil étant donné, trouver sa déclinaison, & au contraire ; mettez le grain au lieu du soleil dans l'écliptique ; faites mouvoir le fil jusqu'à la ligne de déclinaison E T, & le grain coupera le degré de déclinaison que l'on cherche ; au contraire, le grain étant placé à une déclinaison donnée, & le fil étant mu jusqu'à l'écliptique, le grain coupera le lieu du soleil.

4°. Le lieu du soleil étant donné, trouver son ascension droite, ou au contraire ; mettez le fil sur le lieu du soleil dans l'écliptique, & le degré qu'il coupe sur le limbe est l'ascension droite cherchée ; au contraire, posant le fil sur l'ascension droite, il coupera le lieu du soleil dans l'écliptique.

5°. La hauteur du soleil étant donnée, trouver son azimuth, ou au contraire ; rectifiez le grain pour le tems (comme dans le second article) & observez la hauteur du soleil ; portez le fil jusqu'au complement de cette hauteur ; de cette maniere le grain donnera l'azimuth cherché parmi les lignes azimuthales.

6°. Trouver l'heure de la nuit par quelqu'une des cinq étoiles marquées sur le quart de Gunter ; 1. mettez le grain à l'étoile que vous vous proposez d'observer, & cherchez (par l'art. 2.) de combien d'heures elle est éloignée du méridien ; alors de l'ascension droite de l'étoile, soustrayez l'ascension droite du soleil convertie en heures, & marquez-en la différence ; cette différence ajoutée à l'heure observée dont l'étoile est éloignée du méridien, fait voir de combien d'heures le soleil est éloigné du méridien ; ce qui donne l'heure de la nuit.

Supposons par exemple qu'au 15 de Mai, le soleil étant au quatriéme degré des gémeaux, je place le grain en Arcturus, & qu'observant sa hauteur je le trouve élevé du côté de l'occident d'environ 52 degrés, & que le grain tombe sur la ligne horaire de 2 heures après midi, en ce cas il sera 11 heures 50 min. après midi, c'est-à-dire minuit moins 10. min.

Car 62 degrés, ascension droite du soleil, convertis en tems, donnent 4 heures 8 minutes, lesquelles otées de 13 heures 58 minutes, ascension droite d'arcturus, donneront pour reste 9 heures 50 minutes, lesquelles étant ajoutées à 2 heures, distance observée d'arcturus au méridien, font voir qu'il est 11 heures 50 minutes du soir.

Quart de cercle de Sutton, que l'on appelle aussi quart de cercle de Collins, (Pl. d'astron.) est une projection stéréographique de la quatrieme partie de la sphere, située entre les tropiques, sur le plan de l'écliptique, l'oeil étant supposé à son pole nord. Il est adapté à la latitude de Londres.

Les lignes qui vont de droite à gauche sont les paralleles des hauteurs, & celles qui les croisent sont des azimuths ; le plus petit des deux cercles qui terminent la projection, est un quart du tropique du capricorne, & le plus grand un quart du tropique du cancer. L'écliptique ou plutôt ses deux portions partent d'un point placé sur le bord gauche du quart de cercle. Sur ces portions sont marqués les signes, & les deux horisons sont tracés aussi du même point. Le limbe est divisé en degrés & en minutes, & en connoissant la hauteur du soleil, on peut y trouver l'heure du jour à une minute près.

Les arcs quadrantaux qui sont proche du centre, contiennent le calendrier des mois, & la déclinaison du soleil est dans un autre arc en dessous.

On a marqué sur la projection plusieurs des étoiles fixes les plus remarquables, qui sont entre les tropiques, & tout proche au dessous sont marqués les divisions du quart de cercle & la ligne des ombres.

Usage du petit quart de cercle de Sutton ou de Collins. Trouver le tems du lever ou du coucher du soleil, son amplitude, son azimuth, l'heure du jour, &c. Mettez le fil sur le jour & le mois, & portez le grain sur la portion de l'écliptique qui répond à la saison où l'on est ; c'est-à-dire sur celle de l'été si c'est en été, & sur celle de l'hyver si c'est en hyver ; ce qui s'appelle rectifier. Faites ensuite mouvoir le fil, jusqu'à ce que le grain soit à l'horizon ; alors ce fil coupera le limbe au tems du lever ou du coucher du soleil, avant ou après six heures, & le grain coupera en même tems l'horizon en degrés d'amplitude du soleil.

De plus observant la hauteur du soleil avec ce quart de cercle, & supposant qu'on la trouve de 45 degrés au 24 d'Avril, couchez le fil sur le quantieme de ce mois, portez le grain sur l'écliptique d'été, & faites-le glisser jusqu'au parallele de hauteur de 45 degrés, le fil coupera alors le limbe à 55 degrés 15 minutes, & l'on verra sur les lignes horaires qu'il est 9 h. 41 min. du matin, ou 2 h. 19 min. après midi ; enfin le grain montrera sur les azimuths que la distance du soleil au sud est de 50 degrés 41 min.

Mais il faut remarquer que si la hauteur du soleil est moindre qu'elle ne l'est à six heures, l'opération doit se faire parmi ces paralleles qui sont au-dessus de l'horizon supérieur, le grain devant être placé alors sur l'écliptique d'hyver. (T)

QUART DE CERCLE MURAL ou INSTRUMENT MURAL. On appelle quart de cercle mural un quart de cercle fixé solidement à un mur dans le plan du méridien.

Depuis long-tems les astronomes sont convenus de la grande utilité de cet instrument pour les principaux objets de l'astronomie ; car il est clair que la latitude d'un lieu étant une fois déterminée, en observant la hauteur méridienne d'un autre, on aura sa déclinaison, & en observant au même instant avec une bonne pendule l'heure de son passage par le méridien, on aura son ascension droite ; desorte qu'avec un tel instrument bien exécuté, on peut faire un catalogue des lieux des étoiles fixes, ou plutôt une géographie céleste, en bien moins de tems & avec beaucoup plus d'exactitude qu'avec un quart de cercle ordinaire, ou un sextant : sans compter qu'en en faisant usage, on évite encore un travail immense de calculs trigonométriques. On croit que l'illustre Tycho-Brahé fut le premier qui se servit d'un arc mural pour prendre les hauteurs méridiennes ; mais manquant d'instrumens pour mesurer le tems, aussi parfaits que nos pendules, il n'en put retirer de grands avantages. Hévélius, Flamstead & plusieurs autres après Tycho-Brahé, se sont servis de quarts de cercles muraux, dont on peut voir les descriptions dans leurs ouvrages ; mais je n'en parlerai pas étant de beaucoup inférieurs à celui de l'observatoire royal de Greenwich, qui a servi de modèle à la plûpart de ceux que l'on a fait depuis. Feu S. M. George I. en fit la dépense, & il fut exécuté selon les vues & par les soins du célebre M. George Graham, horloger & de la societé royale de Londres, dont nous parlons dans plusieurs endroits de ce Dictionnaire. Cet instrument est si bien entendu & a été exécuté avec tant de précision, que je ne crains point de dire qu'il est un des plus beaux & des plus excellens qu'on ait jamais employé en astronomie. Nous diviserons cet article en deux parties ; dans la premiere nous donnerons une description complete de l'instrument, & dans la seconde nous expliquerons comment on a exécuté quelques-unes de ses parties qui demandoient une très-grande précision.

Il est bien plus important qu'on ne le pense ordinairement, d'être instruit des moyens qu'on a employés dans l'exécution d'un instrument ou d'une machine ; car lorsqu'on tend à un certain degré de perfection, on ne sauroit croire combien il faut de soins, d'attentions & de ressources dans l'esprit, pour parer à tous les inconvéniens & à toutes les difficultés qui se présentent.

Les vûes principales qu'on a eues dans la construction de cet instrument, ont été 1°. que malgré sa grandeur il fût fort solide ; 2°. qu'en étant bien arrêté, ce fût cependant de façon que la dilatation des métaux dont il est composé, ne pût changer son plan, comme il arrive souvent aux autres instrumens, où une partie se dilatant plus que l'autre, ils se courbent, & leurs plans deviennent fort irréguliers ; 3°. que le plan du limbe fût si exact que lorsqu'une de ses parties seroit dans le méridien, on pût être assuré que toutes les autres y seroient aussi ; & enfin que le point autour duquel la lunette, ou le télescope tourne, fût tellement identique, qu'on fût certain qu'il ne changeât qu'au bout d'un très-long espace de tems, & qu'encore si cela arrivoit, on fût en état de le retrouver à volonté. Par cette derniere précaution on n'avoit point à craindre, comme dans certains instrumens, qu'au bout de quelques années l'usure de l'axe autour duquel le télescope tourne lui faisant décrire des arcs excentriques à ceux du limbe, on ne retrouvât plus les mêmes distances entre les mêmes étoiles.

Cet instrument est composé d'un grand chassis de fer, formant un quart de cercle A B C, fig. 1. d'un limbe B C, d'un télescope F H, portant un nonius, ou plutôt un vernerus, voyez VERNERUS ; & enfin d'un petit chassis de tringles de bois servant à empêcher le télescope de se courber, & pour le faire communiquer avec un contrepoids i h, qui sert à décharger le centre du frottement occasionné par le poids de la lunette. Le chassis de fer est composé principalement de barres jointes ensemble, comme il est représenté dans la fig. 2, & dans fig. 3. Ces barres sont disposées de deux façons ; les unes posées à plat, ont leur plan parallele à celui du quart de cercle ; les autres situées en sens contraire, ont leurs plans perpendiculaires à celui du quart de cercle. J'appellerai dans la suite celles-là barres à plat, & celles ci barres de champ. Les lignes dans la fig. 2. représentent la disposition des premieres, & celles de la fig. 3. la disposition des autres, placées derriere les barres à plat, qui ne se voyent que par derriere l'instrument. Par cette disposition l'on satisfait à la seconde des vûes dont nous avons parlé ; car elle empêche la figure & le plan du quart de cercle de varier, soit par le poids de l'instrument, soit par la dilatation, ou la condensation occasionnée par le froid ou le chaud, soit par le mouvement du télescope sur le centre du quart de cercle, ou enfin par quelque accident qu'on puisse imaginer. De plus tout ce bâtis est fortifié par un grand nombre de petites plaques de fer courbées en équerre, & placées derriere le quart de cercle, dans les angles que font entre elles les barres à plat & perpendiculaires. Leur nombre & les endroits où elles sont rivées, sont représentés dans la fig. 3. par les petits parallélogrammes qui accompagnent ces lignes. Afin qu'elles ayent plus de place, l'épaisseur des barres perpendiculaires ne divisent pas les barres à plat en deux également, mais dans la raison de deux à un ; & ces petites plaques sont rivées du côté le plus large. Les traits noirs plus forts à l'intersection des lignes dans même figure, présentent d'autres plaques de fer courbées, aussi en équerre, & rivées dans les angles formés par l'intersection des barres perpendiculaires. La circonférence du quart de cercle est aussi garnie d'une barre perpendiculaire, courbée circulairement, & attachée tout du long de la largeur du limbe ou de l'arc à plat par un nombre suffisant de ces petites plaques dont nous venons de parler.

Le limbe du quart de cercle est composé de deux arcs ou limbes de 90 degrés, de même longueur, largeur & épaisseur, l'un de cuivre, & l'autre de fer ; leur largeur est de 3 pouces 4/10, ils sont rivés l'un sur l'autre, & posés de telle sorte que le limbe de cuivre est éloigné du centre de 1 pouce 2/10 de plus que celui de fer, & dans l'endroit où ils sont doubles, leur épaisseur commune est de 2 pouces 2/10.

Sur le limbe de cuivre sont décrits deux arcs, l'un d'un rayon de 8 piés, ou plus exactement de 96 pouces 85, & l'autre de 95 pouces, 8. L'arc intérieur est divisé en degrés & en 12 parties de degrés, ou en 5 minutes, & l'extérieur en 96 parties égales, qui sont chacune subdivisée en 16 autres parties égales. Ces deux especes de divisions se rectifient mutuellement formant en effet deux quarts de cercle distincts. Les divisions d'un des arcs ayant été reduites à celles de l'autre, par une table faite exprès, on trouva qu'elles ne différoient au plus que de 5''. ou 6''. dans quelque endroit du limbe qu'on les prît ; mais lorsqu'elles différoient réellement, on donnoit toujours la préférence aux divisions de l'arc extérieur, parce qu'elles furent faites, comme on le verra plus bas, par une bissection continuelle, division la plus simple de toutes.

Pour éviter l'embarras de diviser le quart de cercle en plus petites parties, ce télescope porte, comme nous l'avons dit, un vernerus, voyez VERNERUS, ou plaque de laiton glissant avec lui sur le limbe, qui sert à diviser de nouveau les parties de ce limbe ; car quoiqu'il ne soit divisé qu'en 5'. on peut cependant, par le moyen du vernerus, estimer jusqu'aux demi-minutes, & même au-delà. Qu'on suppose donc l'arc supérieur (la figure à laquelle on renvoie ici, doit avoir été dessinée avec les autres relatives à la description de ce quart de cercle mural) A B, fig. 11. représentant un degré divisé en 12 parties égales, ou en 5'. l'arc inférieur C D, la 96e. partie du quart de cercle divisée en 16 parties égales, & E F, la plaque du vernerus glissant dans l'espace qui est entre ces deux arcs A B, C D ; que cette plaque contenant en longueur vers A, 11 parties des 12 de l'arc intérieur soit divisée en 10 parties, & que contenant vers B, 13 parties de l'autre arc, elle soit divisée en 16 parties, il est clair dans le premier cas, que chaque division du vernerus vaudra 5'. 1/2, & dans le second, qu'elle vaudra 1/16, plus le seizieme du seizieme, ou 1/256, par conséquent on aura une subdivision très exacte, & d'une très-petite partie ; puisque d'une part, on aura des 1/2, & de l'autre des seiziemes de seiziemes, ou des 1/256. Sur le quart de cercle, on compte de gauche à droite les degrés & les minutes, de même que les 96 parties, le point de o commençant aux intersections du rayon vertical, afin de mesurer les distances des objets au zénith ; mais sur le vernerus on compte les parties en sens contraire, en commençant à la ligne o o, appellée l'index. L'axe optique du télescope est déterminé par les fils transverses qui sont à son foyer, de façon qu'il est parallele à l'index o o, qui prolongé passe par le centre du quart de cercle. Dans la fig. 11. la situation du vernerus est telle que l'extrêmité supérieure de l'index o o, n'est opposée à aucun trait sur l'arc du limbe, mais à quelque point inconnu de la douzieme partie d'un degré intercepté entre les 50'. & 55'. Pour trouver le surplus de 50'. on observera qu'en comptant à gauche de l'index, un trait du vernerus, qui est entre les nombres 3 & 4, se trouve directement opposé à un trait de l'arc joignant, ce qui montre qu'il faut ajouter 3'. 1/2 aux 50'. dont on vient de parler.

Pour donner au télescope un mouvement insensible, & faire que les fils transverses couvrent parfaitement l'objet, la vis o p parallele au limbe, fig. 1. est adaptée par son extrêmité p au télescope, de maniere cependant qu'elle peut tourner sur son axe, tandis que l'autre extrêmité n passe dans un écrou qui fait partie de la petite plaque m n, que l'on fixe où l'on veut sur le limbe, au moyen d'une vis qu'on ne peut voir ici, mais qu'il est facile d'imaginer. Il est clair que cette petite plaque m n étant fixée au limbe, en tournant la vis o p à droite ou à gauche, on fera avancer ou reculer le télescope imperceptiblement.

Comme la partie du centre autour duquel le télescope tourne, contient plusieurs pieces qu'il est à-propos de faire connoître ; on les a représentées dans la fig. 4. a b c d représente un morceau de laiton quarré avec plusieurs piés, il est vissé au centre du quart de cercle sur les barres à plat par quatre vis. Les trous de ces vis sont assez grands pour que les tiges ne les touchent pas, & qu'elles ne servent qu'à presser la piece fortement contre les barres, tandis que les piés dont nous avons parlé, l'empêchent d'avoir aucun mouvement circulaire. k l m n représente une plaque circulaire de laiton fort épaisse, à laquelle est adaptée perpendiculairement au milieu, un canon f g. Lorsqu'on fit ce quart de cercle, cette plaque fut tournée sur un arbre o i, qui avoit été tourné en pointe, & un peu en creux dans le milieu de sa longueur, afin qu'il remplît mieux le canon f g, & que ce canon portât sur l'arbre, principalement à ses deux extrêmités. Elle est ajustée & fixée par des vis & des piés sur la premiere plaque a b c d, le canon f g entrant dans le trou de cette derniere, où il s'ajuste parfaitement. Le point o du pole de l'arbre o i, placé ainsi dans le canon f g est non seulement le centre du cylindre k l m n, autour duquel le télescope devoit tourner ; mais ce fut encore celui duquel on décrivit les deux arcs sur le limbe du quart de cercle.

L'extrêmité du télescope qui porte le verre objectif traverse perpendiculairement une des extrêmités de la plaque oblongue s t, & il y est fixé par une espece de pince qui s'ouvre & se ferme par une vis. A l'autre extrêmité de la plaque s t est un trou rond, doublé d'un anneau d'acier qui doit tourner autour du cylindre k l m n, & le recouvrir. On voit en z la section de cet anneau, faite perpendiculairement à son plan, sa partie la plus large étant au-dessous de la plaque s t, & étant contiguë à la plaque quarrée a b c d. Un ressort de laiton v, se visse par-dessus cet anneau, sur la plaque circulaire k l m n, pour empêcher que la piece s t ne sorte de dessus. Une calotte représentée en x, recouvre tout l'ouvrage du centre pour le garantir de la poussiere. Un anneau de laiton placé entre les plaques a b c d & s t, & vissé à la derniere, empêche la poussiere de passer entre les deux plaques. Pour cet effet, il entre dans une rainure 1, 2, 3, 4, faite dans la plaque a b c d, & y tourne sans y toucher.

La perfection principale de toutes ces pieces que nous venons de décrire consiste, non-seulement à éviter le frottement & empêcher l'usure de la partie, autour duquel le télescope tourne ; mais encore à conserver toujours le centre du quart du cercle, ou le point o i, c'est-à-dire à faire que ce point ne soit jamais perdu : car s'il arrivoit que la plaque circulaire k l m n fût assez usée pour causer un mouvement irrégulier dans le télescope autour du centre du quart de cercle ; on pourroit refaire une autre plaque avec son canon, qui étant tournée bien ronde sur les poles de l'arbre o i, & remplissant parfaitement le trou de la plaque s t, feroit tourner le télescope autour du même point o i, ou du centre du limbe, aussi exactement qu'auparavant.

La durée de l'exactitude du quart de cercle dépendant principalement du mouvement libre du télescope autour de son centre ; il y a un contre-poids au télescope pour décharger le centre autant qu'on a pû, du poids qu'il porte. Pour cet effet, dans la fig. 1. a b représente un essieu de fer, posé sur le haut du mur transversalement. Ce mur a deux plaques de cuivre, fixées perpendiculairement à ses extrêmités avec des entailles pour recevoir cet essieu, & qu'il y puisse tourner librement. L'axe de cet essieu prolongé passe par le centre du quart de cercle, & il est perpendiculaire à son plan. Aux deux extrêmités de l'essieu, il y a deux bras de fer, l'un h i, l'autre c d ; le premier est situé parallelement au telescope, mais en sens contraire, c'est-à-dire que l'axe de celui-ci prolongé de l'autre côté du centre, se trouveroit dans le même plan que le bras h i. Ce bras porte un poids i pour faire équilibre avec le télescope & le faire tenir dans toutes sortes de positions. L'autre bras c d posé à l'autre extrêmité, c'est-à-dire du côté du quart de cercle, porte presque perpendiculairement deux plaques de cuivre c e, d f. A ces plaques sont rivées deux legeres tringles de sapin, dont les extrêmités se rencontrent en g près de l'oculaire, y étant reçûes dans une virole de cuivre ; une petite plaque attachée à une frette de cette extrêmité du télescope, reçoit une vis, qui passant par un trou de cette virole, attache les tringles au corps du télescope ; les tringles sont fortifiées par cinq ou six petites traverses du même bois, comme on le voit dans la même figure. Pour faciliter le mouvement du télescope, il y a deux rouleaux fixés à chaque côté en k & en l, qui sont pressés sur le plan du limbe par une plaque qui fait ressort & qui est située par derriere ; cette plaque a aussi un rouleau à chacune de ses extrêmités.

Nous venons de décrire le quart de cercle dans toutes ses parties ; nous allons faire voir à présent comment on le posa & on le fixa au mur. On le voit dans la fig. 1. fixé à la partie orientale d'un mur de pierre de taille, bâti pour cet effet dans le plan du méridien. Tout le poids du quart de cercle est porté par deux forts tenons de fer attachés au mur, comme nous le décrirons plus bas, & passant au-travers de deux trous faits dans deux plaques de fer, rivées au quart de cercle en a & en b. Dans la même figure, le tenon a qui supporte la plus grande partie du poids, est scellé à demeure dans le mur ; mais le tenon b est mobile de haut en bas au moyen d'une forte vis, afin de pouvoir mettre un des côtés du quart de cercle parfaitement vertical, & l'autre parfaitement horisontal. La fig. 6. représente la machine qui sert à faire mouvoir le tenon b ; l m n o est une plaque de fer oblongue, incrustée dans le mur & qui y est attachée par de forts verroux de fer qui le traversent, & une autre semblable plaque incrustée dans le côté opposé ; le bras de la premiere plaque est formé en équerre, & est aussi enterré dans le mur : e f g h sont les têtes de quatre vis de fer, dont les tiges passant au travers de quatre longues fentes faites dans une autre plaque de fer, représentée par le plus petit parallelogramme, se vissent dans la plaque fixe ; l m n o une longue vis qui passe dans un fort écrou, attaché en p q à la partie inférieure de la grande plaque, sert à élever ou baisser le tenon mobile b c, en le poussant par son extrêmité inférieure d. La clé qui sert à tourner la longue vis k i est une portion de roue représentée en r s t, percée au centre d'un trou quarré pour qu'elle s'ajuste sur le quarré h, & son rayon est tel, qu'elle passe facilement entre le mur & le quart de cercle, sans toucher à l'un & à l'autre ; elle est dentée, pour qu'au moyen d'un ciseau qu'on met dans les dents, on la fasse tourner plus commodément.

Le poids du quart de cercle étant ainsi soutenu par les tenons a b, on en fixe le plan au mur par autant de petites pinces, qu'il y a de petites équerres autour du quart de cercle. Voyez la fig. 3.

On voit dans la fig. 7. le mur de profil a b & les pinces qui y sont attachées ; entre les mâchoires de chacune de ces pinces représentées en d e, est l'extrêmité d'une petite plaque de laiton, dont le plan est parallele à celui du quart de cercle ; l'autre extrêmité étant pliée en équerre, & rivée aux barres perpendiculaires du quart de cercle. Chacune de ces petites plaques est arrêtée par deux vis opposées r s, qui se vissent dans les mâchoires d e qui sont fort larges, pour pouvoir mettre le quart de cercle parfaitement dans le plan du méridien. Le but principal de ces vis dans les mâchoires, est qu'au cas que le mur ou le quart de cercle se dilate ou se contracte, les plaques de laiton puissent glisser sans que l'instrument travaille. Ces pinces ne sont point scellées dans le mur avec du plomb qui est trop sujet à céder ; mais avec une composition faite de sciure de pierre, de gaudron & de soufre, ou de résine, telle que les marbriers l'employent.

Quand le quart de cercle est une fois placé dans le plan du méridien, par les pinces dont nous venons de parler ; on suspend un fil à plomb de fil d'argent très-fin, de maniere qu'il passe exactement au milieu du point central o ; ensuite par le mouvement de la piece e f i h c b d, on éleve ou on abaisse le quart de cercle jusqu'à ce que ce fil soit parfaitement sur la division marquée zéro sur le limbe. La vraie position du quart de cercle étant une fois trouvée, afin d'examiner promtement par la suite, s'il n'a point travaillé, & si en conséquence cette position n'est point changée ; on suspend un autre fil à plomb au-delà de l'ouvrage du centre, desorte qu'il réponde au milieu d'un point très-fin fait sur le limbe. Pour cet effet, sur la plaque quarrée du centre du quart de cercle, on fait tenir par deux vis e f une plaque de laiton a b oblongue, fig. 8. dans laquelle les trous des vis sont fendus transversalement pour qu'elle puisse avoir un mouvement latéral, qu'on communique par deux vis c d qui s'appuient contre ses extrêmités. Sur cette plaque a b sont fixées une cheville g, & une petite plaque h qui déborde un peu la grande a b, & qui a une petite entaille angulaire ; on suspend par cette cheville g un fil à plomb qui passe dans l'entaille de la petite plaque h, & au moyen des vis c d, on fait avancer ou reculer la plaque a b, jusqu'à ce que le fil à plomb h i couvre parfaitement le milieu du point i sur le limbe, ensuite on serre les vis e f afin que la plaque reste ferme dans cette position. Le quart de cercle étant une fois situé parfaitement dans le plan du méridien, & le fil à plomb passant exactement par le centre & par le point e sur le limbe, sera tout prêt pour les observations.

Nous venons d'expliquer la construction de cet instrument, & la maniere dont on le place. Voici, comme nous l'avons promis plus haut, le détail des moyens qu'on employa pour exécuter certaines parties qui demandoient la plus grande précision.

Pour réduire le limbe à un plan parfait, on fixa d'abord le quart de cercle a b d o, fig. 9, d'une maniere très-solide sur un plan bien de niveau & fort stable, le limbe étant tourné en en-haut ; ensuite on le racla avec le racloir n p d'acier, jusqu'à ce que sa surface fût un plan parfait. Ce racloir, comme on le voit dans la même fig. étoit attaché fermement à une barre de fer n m égale au rayon du quart de cercle, qui étoit elle-même solidement attachée à angles droits avec une autre barre l m perpendiculaire au quart de cercle, & dont l'axe prolongé passoit par son centre. Cette barre tournoit sur les deux points o & r, dont le premier répondoit parfaitement au centre du quart de cercle ; par ce moyen le racloir décrivoit une circonférence dont toutes les parties étoient exactement dans le même plan, sur-tout par le grand soin que l'on avoit eu que son tranchant fût perpendiculaire à l'axe de son mouvement, & qu'aucune des barres ne prêtât tandis qu'on faisoit tourner toute la machine.

Le plan du limbe étant bien parfait, on divisa le limbe de cette maniere : on décrivit, comme on l'a dit plus haut, deux arcs de cercle, l'un de 96 pouces, 85 de rayon, l'autre de 85, 8. Ces deux arcs furent décrits avec un compas à verge que l'on avoit fortifié par des especes d'entraits, pour empêcher qu'il ne pliât en aucune façon en décrivant ces deux arcs. On détermina sur le plus petit un arc de 60 degrés, en plaçant une pointe du compas en a, même fig. & en marquant un trait avec l'autre en b. On divisa ensuite cet arc en deux en c, en décrivant deux traits très-légers des centres a & b, & d'un tel rayon que ces traits fussent aussi près l'un de l'autre qu'il étoit possible, sans se toucher. Alors on divisa ce petit espace en deux, également en c, la moitié en ayant été estimée par le seul secours du microscope. Ceci étant fait, on prit l'intervalle a e, ou son égal e b, que l'on transporta de b en d, & qui détermina la longueur du quart de cercle, ou les 90 degrés. Chacun de ces trois arcs étant divisés de nouveau par la moitié, le quart de cercle fut divisé en six parties égales de 15 degrés chacune, qui furent redivisées en trois autres parties égales de la maniere suivante. Pour ne point faire de faux traits sur l'arc du quart de cercle, on décrivit avec la même ouverture du compas sur un autre plan, un arc parfaitement du même rayon que celui du quart de cercle, sur lequel on marqua 15 degrés ; & en ayant déterminé le tiers par plusieurs différentes tentatives, on le marqua sur le quart de cercle, qui devint pour lors divisé en 18 parties contenant 5 degrés chacune. On refit une opération semblable sur le plan, en décrivant d'un autre centre un autre arc exprès pour trouver la cinquieme partie de cet arc ; & l'ayant trouvée, on la transporta de nouveau sur le quart de cercle ; on subdivisa de la même façon les degrés en 12 parties égales. On divisa ainsi tout le quart de cercle sans faire aucun faux trait.

L'arc extérieur fut divisé, comme on l'a dit dans le commencement, en 96 parties, par une bissection continuelle, ayant divisé les 60 degrés en 64 parties, ou les deux tiers, & le tiers restant en 32. Ainsi tout l'arc fut divisé en 96 parties, dont chaque partie fut encore redivisée en 16 parties égales.

Les divisions dont nous venons de parler n'étant que des points sur l'arc délié a b, & presque imperceptibles à la vûe simple, il étoit nécessaire comme de coutume de tirer par chacun de ces points des lignes perpendiculaires à cet arc ; mais comme la chose est fort difficile & ennuyeuse, on pensa que la méthode suivante seroit plus précise, & s'exécuteroit plus facilement.

On proposa donc de diviser un arc quelconque concentrique f h t en parties semblables à celles de l'arc donné a c g e b d, par des traits qui le coupassent. Ayant pris un petit compas à verge, & ayant fixé ses deux pointes à une distance convenable, les centres e g, &c. étant des points donnés de l'arc divisé, on décrivit de ces centres de petits arcs f i h k, &c. coupant le nouvel arc divisé dans les points f h, &c. d'où l'on voit que les arcs interceptés comme h f, &c. étoient semblables aux arcs e g, &c. c'est-à-dire qu'ils contenoient les mêmes angles au centre o : car en joignant e f, h g comme o f, o h, o e, o g, les triangles e o f, g o h seront semblables & égaux, chaque côté de l'un étant respectivement égal à chaque côté de l'autre. C'est pourquoi en retranchant l'angle commun e o h des angles égaux e o f, g o h, les angles e o g, f o h qui restent seront égaux. Si les triangles e f o, g h o, &c. sont droits en f & en h, les traits de division f i, h k, &c. couperont aussi l'arc du quart de cercle f h t à angles droits en f & en h, &c.

Nous avons dit plus haut que la ligne de vûe du télescope étoit parallele à l'index o o du vernerus, qui prolongé passe par le centre du quart de cercle. Voici comme on s'en assura.

Le télescope étant détaché du quart de cercle, on y attacha fortement par des vis la plaque du vernerus e d, & la plaque s t, fig. 10. après quoi on y fixa solidement & à demeure le verre objectif ; ensuite ayant tiré sur ces plaques les lignes s o t & e c f, toutes deux perpendiculairement à la ligne o c, on prit de chaque côté de o e des distances quelconques o t & c f, égales entr'elles ; & de l'autre côté de o c on prit de nouveau d'autres distances quelconques o s & c e, égales entr'elles, & assez longues pour aller audelà du télescope. Par les points s e f on lima exactement parallele à o c les extrêmités des deux plaques : alors on plaça les points t f sur deux points m n d'une ligne horizontale tirée sur un plan solide, remarquant le point d'un objet éloigné qui étoit couvert par les fils transverses ; & faisant faire au télescope une demi-révolution sur son axe, desorte que les points opposés e s portassent sur la même ligne m n, on remarqua un autre point dans le même objet, couvert de même par les fils transverses. Ensuite on fit mouvoir ces fils toujours au foyer du télescope, jusqu'à-ce qu'après plusieurs répétitions ils couvrissent parfaitement le même point de l'objet dans les deux situations du télescope ; car dans ce cas l'axe optique devient exactement parallele à la ligne o e, pourvu qu'on suppose l'objet fort distant. Mais comme de plus petites marques sur un objet plus près se distinguent plus facilement, on en fit deux distantes entr'elles d'une quantité égale (autant qu'il fut possible) à la différence des hauteurs de l'axe du télescope, au-dessus de la ligne m n dans ses deux positions, & on ajusta les fils transverses de façon que dans chaque position du télescope ils couvrissent parfaitement ces deux marques.

Enfin, voici comme on s'assura que l'axe du télescope & le plan que cet axe décrivoit, étoient parfaitement paralleles à celui du limbe, & dans le plan du méridien. D'abord on rendit la ligne de vûe parallele au plan du limbe autant qu'on le put, par les dimensions des pieces de cuivre adaptées au télescope ; ensuite on le fit plus précisément, en observant si les étoiles passoient au même instant par les fils transverses du quart de cercle, que par ceux d'un instrument des passages placé parfaitement dans le plan du méridien, & si près du quart de cercle, que les deux observateurs pouvoient s'avertir l'un l'autre de l'instant du passage des étoiles. Ayant ainsi observé plusieurs étoiles à différentes hauteurs, on trouva que leur passage par les deux instrumens étoit si instantané, qu'on en pouvoit conclure que le plan du limbe du quart de cercle étoit très-parfait ; car il est certain que le plan décrit par le télescope d'un instrument des passages autour de son axe transverse, doit être de beaucoup plus précis que celui qui est décrit par le télescope du quart de cercle, lequel n'est guidé sur le limbe que par des rouleaux. Voyez INSTRUMENT ou PASSAGES. Les dimensions qu'on a données à cet instrument sont en piés & pouces anglois, dont il sera facile de connoître le rapport avec nos mesures, en consultant les articles PIE, MESURE, &c.

QUART, (Comm.) en fait de poids, est la quatrieme partie d'un quintal ou poids de cent livres. Il contient vingt-cinq livres de seize onces chacune. Voyez QUINTAL & LIVRE de seize onces.

Quart se dit aussi d'une petite mesure qui fait la quatrieme partie d'une plus grande. Ainsi l'on dit un quart de muid, un quart de boisseau. Le demi-quart est la huitieme partie de toute la mesure.

Quart en sus, que l'on appelle aussi parisis, signifie dans quelques bureaux des fermes du roi ou des péages des seigneurs, une augmentation du quart de la somme énoncée qui se paye avec & outre la somme même. Ainsi, si une marchandise doit payer quarante sols du cent pesant avec le quart en sus ou le parisis, c'est-à-dire qu'elle paye en tout cinquante sols.

Quart est encore une certaine caisse de sapin plus longue que large, dans laquelle on envoie de Provence des raisins en grappe que l'on nomme raisins aux jubis. Voyez RAISINS. Dictionn. de Comm.

QUART D'ECU, (Monnoie de France) monnoie courante d'argent qui étoit à onze deniers de fin, pesoit 7 deniers 12 grains 1/2, & valoit 15 sols. Le nom de quart d'écu fut donné à cette monnoie, à cause qu'elle faisoit justement le quart de l'écu d'or, qui valoit 60 sols. L'usage de fabriquer des quarts d'écu & des demi quarts d'écu, commença en France sous Henri III. & dura jusqu'en 1646, à ce que nous apprend M. le Blanc. (D.J.)

QUART DE CONVERSION, c'est un mouvement par lequel une troupe décrit un quart de cercle autour du chef de file de la droite ou de la gauche, qui sert de centre ou de pivot.

Ainsi, si la troupe avant que d'exécuter le quart de conversion est opposée ou fait face à l'orient, elle le fera au nord ou au midi après l'exécution de ce mouvement. Voyez CONVERSION & EVOLUTIONS. (Q)

QUART DENIER, (Jurisp.) est une finance qui se payoit aux parties casuelles pour la résignation des offices. Présentement ce droit ordinaire qui se paye par l'officier qui veut vendre ou par sa veuve & ses héritiers, est le huitieme denier ; mais faute d'avoir payé le prêt & l'annuel, ils payent le double droit qui revient au quart denier. Voyez l'édit de Charles IX. pour l'érection des sceaux en titre d'office ; l'édit de Louis XIII. du 4 Février 1638 ; Loyseau des offices, liv. III. ch. iij. n °. 21. & suivans. (A)

QUART, (Marine) c'est le tems qu'une partie de l'équipage d'un vaisseau emploie à veiller pour faire le service, tandis que tout le monde dort. Dans les vaisseaux du roi ce tems est de huit horloges, qui valent quatre heures. Voyez HORLOGE. Dans les autres vaisseaux, il est tantôt de six, tantôt de sept, & quelquefois de huit. A chaque fois qu'on change le quart, on sonne la cloche pour en avertir l'équipage, c'est ce qui se pratique en France. Les autres nations maritimes reglent le quart différemment ; en Angleterre, par exemple, le quart est de quatre heures, en Turquie de cinq, &c.

On distingue deux sortes de quarts, un qu'on appelle premier quart ou quart de tribord, & l'autre second quart, ou quart de bas-bord. Le premier commence vers minuit, ou à l'aube, & ce sont les officiers subalternes en pié, ou les plus anciens d'entre les officiers subalternes qui le font. Le second quart commence quand l'autre est fini ; & il est composé des officiers subalternes qui sont en second, ou des anciens officiers d'entre les subalternes. C'est le commandant ou le capitaine du vaisseau qui fait la division de ces quarts, & qui en fait écrire la disposition dans un tableau qu'on attache à la porte de la chambre ou au mât d'artimon. Lorsqu'on appelle ceux dont le tour vient de faire le quart, on crie au quart ; & on dit prendre le quart lorsqu'on entre en garde avec une partie de l'équipage.

Quart bon, ou bon quart, commandement ou avis à l'équipage de faire bonne garde. On dit faire bon quart sur la hune, cela veut dire faire bonne sentinelle pour découvrir une roche & les corsaires.

Quart du jour, c'est le quart qui amene le jour, c'est-à-dire que le jour paroît quand ce quart est fini.

Quart du vent, c'est un air de vent, compris entre un air de vent principal, comme nord, sud, est, & ouest, nord-est, nord-ouest, &c. & un demi-air de vent qui suit ou précede un air de vent principal ; tel que nord-nord-est ou nord-nord-ouest. Ainsi deux airs de vent principaux renferment deux quarts de vent. Entre le nord ou le nord-est, on a les quarts de vent nord 1/4 nord-est, & nord-est quart de nord. Entre le nord-est & l'est, sont compris les deux quarts de vent nord-est 1/4 d'est, & est 1/4 de nord-est : desorte qu'il y a seize quarts de vent ; savoir nord 1/4 nord-est, nord-est 1/4 de nord, nord-est 1/4 d'est, est 1/4 de sud-est, sud-est 1/4 d'est, sud-est 1/4 de sud, sud 1/4 de sud-est, sud 1/4 de sud-ouest, sud-ouest 1/4 de sud, sud-ouest 1/4 d'ouest, ouest 1/4 de sud-ouest, ouest 1/4 de nord-ouest, nord-ouest 1/4 d'ouest, nord-ouest 1/4 de nord, & nord 1/4 de nord-ouest. Voyez les airs de vent de la boussole, liv. XXI. fig. 3.

QUART DE SOUPIR, est, en musique, une valeur de silence qui se figure ainsi , & qui signifie, comme le porte son nom, la quatrieme partie d'un soupir, c'est-à-dire, l'équivalent d'une double croche. Voyez SOUPIR, valeur des notes. (S)

QUART DE TON, intervalle de musique, introduit dans le genre enharmonique par Aristoxene, & duquel la raison est sourde. Voyez ENHARMONIQUE. Nous n'avons ni dans l'oreille, ni dans les nombres aucun principe qui nous puisse fournir l'intervalle du quart de ton ; & quand on considere quelles opérations géométriques sont nécessaires pour le déterminer sur le monocorde, on est bien tenté de soupçonner qu'on n'a peut-être jamais entonné & qu'on n'entonnera peut-être jamais un quart de ton juste ni par la voix, ni sur aucun instrument. (S)

QUART, (Charpent.) premiere soudivision de la marque de bois de charpente, mesure de Rouen ; il faut quatre quarts pour faire la marque, & 75 chevilles pour faire un quart. (D.J.)

QUART DE CERCLE, (Architecture) les Architectes appellent quart de cercle un instrument sur lequel sont divisés les 90 degrés qui composent le cercle ; c'est par le moyen de cet instrument, qu'on peut rapporter sur le papier tout angle plus serré que le droit.

QUART EN QUART, terme de Manege. Travailler de quart en quart, c'est conduire un cheval trois fois de suite sur chaque ligne du quarré qu'on se figure autour du pilier, le changer ensuite de main, le faire partir, le conduire trois fois sur la seconde ligne, & en faire autant sur les autres angles & lignes. Voyez QUARRE.

QUART DE VOLTE, ou de rond, terme de Manege. Pour apprendre à un cheval à tourner & plier sur les voltes, on partage celles-ci en quatre, & l'on arrête le cheval droit & juste sur quatre parties. Lorsqu'il est instruit dans cet usage, il faut, à chaque fois que le cavalier l'arrête, qu'il l'éleve en une place, quatre courbettes seulement sans tourner, puis continuer, tournant de pas, arrêtant & levant quatre courbettes en une place, jusqu'à ce qu'il sache parfaitement bien cette leçon. Lorsque le cheval est arrivé à ce point, au lieu de faire les quatre courbettes en une place, il faut que le cavalier tourne doucement la main, & s'il aide bien à-propos, il obligera le cheval à tourner, & faire le quart de volte sans discontinuer les courbettes. Voyez VOLTE, QUARRE, &c.

QUARTS, piece des, c'est dans une montre ou une pendule à répétition une piece qui sert à faire sonner les quarts. Voyez REPETITION.

QUART DE ROND, en terme d'Orfevre en grosserie ; c'est un ornement qui regne au bas du pié d'un chandelier. Il forme une espece de moulure concave, ce qui le fait appeller quart de rond.


QUART-SOMMEAUS. m. terme de riviere, se dit d'un petit sac d'un minot de charbon, pour complete r la mesure des charbons qui viennent en sacs. Anciennes ordonnances.


QUARTALS. m. (Mesure seche) sorte de mesure de grains en usage en quelques lieux de France, particulierement dans le pays de Bresse, & à Beaurepaire en Dauphiné. Savary.


QUARTANS. m. terme de Vénerie ; on dit sanglier en son quartan, pour dire qu'il a quatre ans.


QUARTARIUSS. m. (Mesure romaine) le quartarius étoit une des petites mesures de liquides chez les Romains, laquelle contenoit deux cyathes & demi. Il faut ici se rappeller que la plus grande des mesures de liquides s'appelloit culeus, qui contenoit vingt amphores, ou cinq cent vingt pintes. L'amphore contenoit deux urnes, ou quatre-vingt livres pesant. L'urne contenoit quatre conges, le conge six septiers, le septier deux hémines ou demi-septiers, le demi-septier contenoit deux mesures nommées quartarii, chaque quartarius contenoit, comme je l'ai dit, deux cyathes & demi, enfin le cyathe contenoit la quatrieme partie d'un demi-septier, qui s'appelloit acetabulum. (D.J.)


QUARTATIONS. f. (Chymie, Métallurgie) on nomme quartation ou inquart une opération qui consiste à unir ensemble de l'or avec de l'argent, ou de l'argent avec de l'or, afin de pouvoir ensuite séparer ces deux métaux par le moyen de l'eau régale ou de l'eau-forte.

Cette opération est fondée sur ce que l'eau régale ne dissout point l'or, quand il est allié avec une trop grande quantité d'argent, & sur ce que l'eau-forte ne dissout point l'argent lorsqu'il est allié avec trop d'or. Ainsi lorsqu'on veut séparer ou faire le départ de ces métaux, s'il se trouve dans la masse une très-petite quantité d'or unie à beaucoup d'argent, cette séparation ne pourra point se faire par l'eau régale, parce que l'argent qui se trouve en trop grande quantité dans l'alliage tenant l'or enveloppé, empêchera ce dissolvant d'agir sur lui ; alors pour qu'il agisse, il faudra joindre à l'alliage assez d'or, pour qu'il y en ait trois parties contre une partie d'argent ; on a remarqué qu'il falloit que l'argent fût dans cette proportion dans l'alliage pour ne point empêcher l'eau regale d'agir sur la masse, & de séparer l'or de l'argent.

D'un autre côté, si dans un alliage d'or & d'argent dont on veut faire le départ par l'eau-forte, l'or se trouvoit en trop grande quantité, l'eau-forte n'agiroit point sur cet alliage ; ainsi, pour qu'elle puisse dissoudre l'argent, il faut joindre avec l'or une assez grande quantité d'argent pour qu'il y ait dans l'alliage trois parties d'argent contre une partie d'or. Voyez DEPART. (-)


QUARTAUTS. m. (Commerce) que l'on écrit quelquefois quarto. Petit vaisseau ou futaille propre à mettre les liqueurs, particulierement le vin. Le quartaut est plus ou moins grand, suivant la diversité des lieux où il est en usage. En France il y en a de deux sortes, lesquels sont du nombre des vaisseaux réguliers marqués sur la jauge ou bâton dont on se sert pour jauger les divers tonneaux à liqueurs ; l'un est le quartaut d'Orléans, & l'autre celui de Champagne. Le quartaut d'Orléans est la moitié d'une demi-queue, ou le quart d'une queue du pays ; il contient treize septiers & demi, chaque septier de huit pintes de Paris, ce qui revient à cent huit pintes. A Blois, à Nuits, à Dijon, à Mâcon, le quartaut est semblable à celui d'Orléans. Le quartaut de Champagne est aussi la moitié d'une demi-queue ou le quart d'une queue de cette province. Il contient ordinairement douze septiers faisant quatre-vingt-seize pintes, ou le tiers d'un muid de Paris. Il y a aussi des demi-quarts qui tiennent aussi à proportion des quartauts. Quelques-uns appellent quartaut ou quarto une sorte de petite futaille à vin, qui est la quatrieme partie d'un muid de Paris, mais c'est improprement qu'on lui donne ce nom, d'autant que ce vaisseau s'appelle ordinairement quart. Il est ainsi que les quartauts d'Orléans & de Champagne, un des vaisseaux réguliers marqués sur le bâton de jauge. Le quart de muid doit contenir neuf septiers ou soixante & douze pintes de Paris. Le muid étant composé de deux cent quatre-vingt-huit pintes ou trente-six septiers. Il y a quelques pays étrangers où l'on se sert de même qu'en France du mot de quartaut. En Allemagne les quatre quartauts font le muid, & en Angleterre le muid contient trente-deux quartauts ; en Espagne les quatre quartauts font le sommer ; les huit sommers l'arrobe, & les vingt-huit arrobes la pipe.

Quartaut ; c'est aussi la mesure de continence dont on se sert en Bretagne, particulierement à Nantes pour mesurer les sels. Cinquante-deux quartauts nantois font le muid de sel à Nantes, & c'est sur ce pié-là qu'on en paie les droits du roi, conformément au chapitre six de la pancarte de la prevôté de cette ville. Diction. de commerce.


QUARTE(Géog. & Astronom.) c'est la quatrieme partie de l'hémisphere divisée par le méridien. La quarte septentrionale orientale est celle qui est entre l'orient & le midi. (D.J.)

QUARTE, fievre (Médecine) espece de fievre intermittente, qui revient tous les quatre jours après deux jours d'intermission, & qui s'annonce par le frisson, auquel succede la chaleur. Dans cette fievre, la nature tâche de se délivrer elle-même de quelque matiere nuisible adhérente à quelques-uns des visceres hypocondriaques, & de prévenir en s'en délivrant le mal qui en pourroit résulter.

Ses symptomes. Elle surpasse ordinairement par son opiniâtreté, la fievre tierce : elle est souvent accompagnée de foiblesse, d'extensions involontaires des membres, de maux de tête, & de quelques douleurs contondantes dans le dos, dans les reins & dans les jambes. Les piés & les mains se refroidissent, le visage & les ongles palissent, le frisson & le froid surviennent ensuite, les levres tremblent ; il y a des anxiétés dans les parties voisines du coeur, & des inquiétudes dans le corps. Ces symptomes durent pour l'ordinaire deux ou trois heures. La chaleur qui renaît peu-à-peu n'est point brûlante. Le froid étant cessé, le battement des arteres devient plus réglé, plus grand & plus promt. Il succede enfin au bout de quatre ou six heures une légere moiteur sur la peau, qui termine l'accès. Dès qu'il est passé, le malade se trouve en assez bon état pendant les deux jours d'intermission, excepté qu'il lui reste un certain sentiment douloureux dans les extrêmités supérieures & inférieures. L'urine, qui pendant l'accès étoit tenue & aqueuse, devient épaisse, & dépose un sédiment. Le même accès que nous venons de décrire reparoît après deux jours d'intervalle à la même heure qu'auparavant, & pour l'ordinaire sans variété. S'il retarde, c'est tant mieux ; s'il anticipe de beaucoup, il est à craindre que la maladie ne tourne en fievre continue.

Ses variétés. La fievre quarte n'est pas toujours de même nature. Quelquefois elle est simple, & quelquefois double. Dans le premier cas elle est telle que nous l'avons décrite ci-dessus. On l'appelle double lorsque dans l'espace de quatre jours, il survient deux accès ; ensorte cependant qu'ils conservent chacun leur caractere, & commencent dans un tems particulier, qui répond toujours alternativement à celui du précédent accès. Le troisieme jour demeure entierement libre, & c'est ce qui arrive très-souvent lorsqu'on traite mal la fievre quarte simple, ou qu'on commet quelque faute dans le régime.

On distingue encore la fievre quarte en vraie ou batarde. La premiere observe plus exactement qu'aucune autre fievre, le tems de son retour. Dans la seconde, au contraire, le tems du retour n'est point certain, & elle est accompagnée d'une plus grande chaleur, & d'un frisson plus violent.

Quelquefois les accès reviennent tous les quatre jours, & sont précédés d'extensions involontaires des membres & de frissonnemens ; mais ils n'ont point de terme fixe. La fievre ne cesse pas tout-à-fait ; quoique sa violence diminue, elle est seulement moins forte dans les jours intermédiaires que dans ceux où l'accès revient. La chaleur est encore plus grande que la naturelle, le pouls est plus agité, le malade n'a ni force ni appétit ; il a la bouche seche, la tête pesante, son sommeil est inquiet, son urine rougeâtre & épaisse, dépose un sédiment. Les Médecins appellent cette fievre, quarte continue ; nous en dirons encore un mot dans la suite.

Les fievres quartes varient encore suivant la différence des gens qu'elles attaquent ; dans ceux dont les hypocondres sont mal disposés, elles sont opiniâtres & fâcheuses ; c'est bien pis si le sujet est cacochyme. Elles dégénerent aisément en coutume dans ceux dont les forces sont épuisées par l'âge, la maladie & le mauvais régime. On s'en apperçoit par l'abattement qui suit l'accès, par la vîtesse du pouls, la chaleur lente, le défaut d'appétit, l'accablement, les inquiétudes, l'insomnie, le desordre de l'esprit, &c.

La fievre quarte est quelquefois épidémique, comme on l'a vû en 1606, 1652, 1684, 1719, 1726, &c. sur quoi l'on peut lire Sennert, Hoffman, & autres observateurs. De plus, cette maladie est même épidémique dans quelques pays, comme en Zélande, en Westphalie, en Poméranie, & autres contrées septentrionales ou marécageuses, dont l'air en automne est imprégné d'exhalaisons putrides, & où les habitans usent d'alimens cruds & pesans.

Ses causes. La cause générale de la fievre quarte, est une matiere visqueuse, morbifique, logée dans les vaisseaux hypocondriaques, & communiquant par leurs moyens avec la veine-porte. Le foie, la rate & les glandes du mésentere sont d'ordinaire le siége de cette fievre, & les premieres voies très-rarement. Il est évident que ces visceres sont attaqués dans la fievre quarte par les hydropisies, les jaunisses, & autres maladies pareilles qui en sont quelquefois les suites.

La cause prochaine de la fievre quarte est une contraction spasmodique générale des parties nerveuses qui dérange le mouvement des solides & des fluides ; il en résulte un mouvement tardif du sang dans les visceres du bas-ventre qui servent à sa purification & à ses excrétions, sur-tout dans le foie & dans la rate.

Les causes occasionnelles sont assez fréquemment une fievre tierce ou quotidienne mal traitée, des obstructions ou des engorgemens dans les vaisseaux hypocondriaques. Cela paroît en ce que les personnes qui sont dans un âge déja avancé, d'un tempérament mélancholique, qui menent une vie trop sédentaire, chez lesquelles il se trouve la suppression des regles ou des hémorrhoïdes, qui usent d'alimens grossiers & mal-sains, qui font un très-grand usage de liqueurs spiritueuses, qui ont souffert un froid subit dans le bas-ventre, après avoir eu fort chaud auparavant ; toutes ces personnes, dis-je, sont plus sujettes à la fievre quarte que les autres, & l'éprouvent ordinairement en automne.

Ses prognostics. Remarquons d'abord pour consoler ceux qui ont la fievre quarte, que quand elle est simple elle n'est pas dangereuse, & qu'elle ne produit la mort que lorsque le corps est d'un tempérament très-cacochyme, affoibli par l'âge ; lorsque la maladie a été irritée par des passions violentes, ou que le médecin & le malade l'ont fait dégénérer par quelque grande faute en une maladie chronique & funeste.

Il est vrai qu'elle résiste souvent aux remedes les mieux employés, sur-tout dans la saison de l'automne ; ensorte qu'alors on la voit persister tout l'hiver. Elle est sur-tout très-opiniâtre lorsque le mal a jetté de profondes racines dans les visceres, que la masse des humeurs est viciée, & que tout le système nerveux est affoibli.

La fievre quarte printaniere se guérit aisément, parce que la température & la légéreté de l'air hâte l'effet des remedes. Il en est de même quand elle attaque un corps jeune & vigoureux, qui se conduit bien, & dont le corps n'est point chargé d'humeurs impures.

La fievre quarte, même irréguliere, & qui devient double de simple qu'elle étoit auparavant, n'a point le danger qu'on imagine dans un jeune homme bien constitué, parce que son corps est assez fort pour chasser la matiere qui cause la maladie ; & cette récidive d'accès y concourt au moyen d'un petit nombre de remedes convenables.

Il y a plus, la fievre quarte est souvent un préservatif & un remede de plusieurs maladies chroniques ; car l'augmentation du mouvement des solides & des fluides pendant l'accès, atténue les humeurs épaisses, les fait circuler, & contribue beaucoup à détruire les anciennes obstructions des vaisseaux & des glandes. C'est pourquoi tous les grands médecins anciens & modernes ont regardé la fievre quarte comme le remede de plusieurs autres maladies, particulierement des affections hypochondriaques, de l'asthme convulsif, des mouvemens épileptiques, & de la néphrétique, pourvû que le médecin la traite avec prudence, la tempere, & n'en suspende pas le cours par ses remedes.

Lorsque la fievre quarte est grave, & qu'on la traite mal, elle dégénere en de fâcheuses maladies, telle que l'hydropisie, le scorbut, les tumeurs oedémateuses, la fievre lente, l'ictere, la toux férine, &c.

Ceux qui meurent de la fievre quarte périssent ordinairement dans le frisson & le délire. Chez les enfans les contractions spasmodiques qu'elles leur causent, dégénerent en des mouvemens convulsifs.

Sa méthode curative. Les indications pour la cure de la fievre quarte, se réduisent :

1°. A corriger & à évacuer par les émonctoires convenables les crudités visqueuses, acides & bilieuses, qui ont passé des premieres voies dans le sang, avec le chyle & la lymphe, & qui causent des mouvemens fébriles dans le système nerveux.

2°. A procurer un cours libre au sang dans les visceres du bas-ventre, sur-tout dans ceux où aboutit la veine-porte, à en détruire l'amas, l'engorgement & l'obstruction, ou pour le moins à empêcher qu'elles n'augmentent.

3°. A calmer la contraction spasmodique du système nerveux, qui cause tous les symptomes fâcheux qui surviennent durant la maladie.

4°. A rétablir la force des visceres de l'estomac & des parties nerveuses, pour empêcher le retour des accès & une nouvelle rechûte.

Les remedes qui satisfont à la premiere indication sont ceux qui ont la vertu d'émousser les acides, de dissoudre la ténacité des humeurs, de tempérer leur acreté, & de nettoyer les premieres voies. Si les acides prédominent, on usera de remedes alkalis, de sels neutres, de la terre foliée de tartre, &c. On corrigera l'acrimonie bilieuse par les remedes opposés. On évacuera les crudités visqueuses par les sels des fontaines médicinales, tels que ceux d'Egra, d'Epson, de Sedlitz, &c.

On satisfait à la seconde indication, par les extraits amers des gommes balsamiques résineuses, tempérées ; par des préparations minérales, qui ont une qualité active & pénétrante.

Les remedes propres à calmer les contractions spasmodiques du système nerveux, sont les linimens nevritiques joints aux frictions, les lavemens antispasmodiques & adoucissans ; les bains d'eau douce, les épithemes & les linimens préparés avec des drogues spiritueuses & aromatiques, qu'on applique dans le frisson sur la région de l'épigastre.

On satisfait à la derniere indication par les amers, qui ont une qualité balsamique & astringente ; telles sont les essences tirées des plantes ameres aiguillonnées de quelque liqueur calybée, le quinquina, ou l'électuaire antifébrile d'Hoffman.

Observations cliniques. Comme la fievre quarte est quelquefois une maladie très-opiniâtre, sur-tout dans l'automne, les hypocondriaques, les vieillards & les cacochymes, on ne doit point se hâter de la traiter par des remedes violens, mais user des remedes tempérés, propres à calmer les spasmes du système nerveux, à soutenir les forces ; il faut faire plus de fond sur le régime que sur la pharmacie.

Il est bon dans cette fievre, ainsi que dans les autres maladies chroniques, d'user pour boisson d'une décoction de racines de salsepareille & de chicorée, de feuilles de chardon béni & de raisins secs. Les eaux minérales tempérées, comme celles de Selts, conviennent aussi. On fera bien d'exciter la transpiration avant & après l'accès, non par des sudorifiques, mais par des remedes, qui en augmentant le ton des solides, accélerent la circulation. L'exercice du cheval, la promenade, la danse, &c. mises en usage quelques heures avant l'accès, sont propres à cet effet.

Quand la fievre est sur son déclin, que la chaleur s'appaise, & que le corps devient moite, on doit prendre garde d'interrompre la transpiration en s'exposant au froid, ou en préférant des liqueurs froides à des boissons délayantes chaudes.

La saignée ne convient que dans la pléthore, la suppression des mois, des hémorrhoïdes, & autres cas semblables. Les vomitifs ne veulent être employés que dans les nausées & les vomissemens occasionnés par un amas d'humeurs visqueuses dans les premieres voies.

Le quinquina est d'une utilité admirable ; mais seulement après qu'on a purgé les premieres voies, diminué la pléthore, & levé les obstructions des visceres. Il est bon de le donner avec des drogues apéritives & diaphorétiques, comme aussi de le mêler quelquefois avec du safran de Mars tres-subtilisé.

On adoucira les maux de tête qui subsistent souvent dans la fievre quarte, en usant des remedes qui lâchent le ventre, & des bains tiedes des piés, qui détournent le sang de la tête vers les extrêmités inférieures.

On prévient les rechûtes de cette fievre en suivant un bon régime, en entretenant la transpiration libre, en fortifiant l'estomac, en usant pendant quelque tems de stomachiques convenables.

Réflexions particulieres sur la fievre quarte continue. Cette fievre est fâcheuse parce que la chaleur continue jusqu'au tems de l'accès suivant ; ce qui fait que la maladie approche beaucoup d'une fievre hectique. Elle est accompagnée d'une soif continuelle, de sécheresse dans le palais, de manque d'appétit, de douleurs de tête, & de somnolence sans soulagement pour le malade. On vient cependant à-bout de la guérir par une méthode curative, patiente & éclairée. Cette méthode demande des boissons de liqueurs délayantes & acidules, de doux purgatifs, des apéritifs, des résolutifs ; & le soir une dose modérée de quelque anodin, comme de pilules de styrax. La saignée, les vomitifs, les purgatifs stimulans, & les aléxipharmaques chauds, doivent être évités, comme autant de remedes nuisibles. (D.J.)

QUARTE, (Jurisprud.) se dit de la quatrieme partie de quelque chose ; il y a en droit plusieurs sortes de quartes.

Quarte suivant l'ancien droit romain, étoit la légitime de droit ; elle étoit ainsi appellée, parce qu'elle consistoit en la quatrieme partie de la succession ; ce qui fut changé depuis. Voyez LEGITIME.

Quarte de l 'authentique praeterea ; est le quart de la succession du conjoint prédécédé, que les lois romaines accordent au conjoint survivant, lorsqu'il est pauvre & qu'il n'a point d'autres reprises à exercer sur les biens du prédécédé, ou qu'elles ne suffisent pas pour le faire subsister suivant sa condition.

Ce droit a été établi par les novelles 53 & 54 de Justinien, dont Irnerius a tiré l'authentique praeterea, qu'il a insérée au code unde vir & uxor.

Cette portion appartient au survivant en toute propriété, lorsqu'il n'y a point d'enfans communs, & en usufruit lorsqu'il y a des enfans.

Quand il y a plus de trois enfans, le conjoint survivant, au lieu de la quarte, n'a que sa part afférente. Voyez Décius, cons. 24, & Dumoulin, ibid. Despeisse, le Brun, des succ. le tr. des gains nuptiaux, chap. xiij.

QUARTE CANONIQUE, ou FUNERAIRE, est ce qui est dû au curé du défunt lorsque celui-ci meurt sur sa paroisse, & se fait enterrer ailleurs.

L'usage de presque toutes les églises de France est que le curé qui a conduit le corps de son paroissien dans l'église d'un monastere où le défunt a élu sa sépulture, partage le luminaire par moitié avec les religieux.

Il y a néanmoins des églises où l'on ne donne que la quatrieme partie du luminaire au curé ; cette discipline est ancienne, & autorisée par des conciles généraux, & entr'autres par celui de Vienne ; c'est ce qu'on appelle la quarte funéraire ; quelques arrêts sont conformes à cette discipline.

Le concile de Vienne veut même que l'église paroissiale du défunt ait aussi la quatrieme partie des donations qu'il fait au monastere où il veut être inhumé.

La glose sur le canon in nostrâ fixe la portion du curé au tiers : le synode de Langres en 1404, la fixe tantôt à la moitié, tantôt à la quatrieme partie des frais funéraires ; ce même concile ajoute qu'il est dû de droit pour toutes les sépultures faites chez les mendians, non-seulement la quatrieme partie des frais funéraires, mais encore de omnibus relictis ad quoscumque usus certos vel incertos.

Les monasteres bâtis avant le concile de Trente, & qui quarante ans avant n'ont point payé de quarte funéraire, n'en doivent point ; mais elle est dûe par ceux qui sont établis depuis. Il faut néanmoins en cela se conformer à l'usage. Voyez les mém. du clergé, tome III.

QUARTE DU CONJOINT PAUVRE, voyez ci-devant QUARTE DE L'AUTHENTIQUE PRAETEREA.

QUARTE DOUBLE ; c'est lorsque l'héritier fait en même tems la détraction de la légitime & de la trébellianique. Voyez le Brun, tr. des success. liv. II. c. iij. sect. 3. n. 39.

On entend aussi quelquefois par double quarte, lorsque l'héritier fait la détraction de la quarte falcidie & de la quarte trebellianique. Voyez ci-après QUARTE FALCIDIE & QUARTE TREBELLIANIQUE.

QUARTE FALCIDIE, qu'on appelle aussi falcidie simplement ; est le quart que l'héritier a droit de retenir sur les legs suivant le droit romain.

La loi des douze tables avoit laissé aux testateurs la liberté de léguer de leurs biens autant qu'ils le jugeoient à propos.

Mais comme cette liberté indéfinie parut sujette à plusieurs inconvéniens, elle fut restrainte par plusieurs lois.

D'abord la loi furia défendit de léguer à quelqu'un plus de mille écus d'or, mille aureos, à peine de restitution du quadruple contre le légataire qui auroit reçu davantage.

Cette précaution n'étant pas suffisante pour l'héritier, la loi voconia défendit de donner au légataire plus qu'il ne resteroit à l'héritier & à tous ceux qui étoient compris dans le dénombrement du peuple, d'instituer pour héritier aucune femme ou fille pour plus du quart de leurs biens.

Mais comme il étoit encore facile de frauder cette loi, Caius Falcidius, tribun du peuple du tems du triumvirat d'Auguste, fit une loi qui fut appellée de son nom falcidia, par laquelle tout le patrimoine d'un défunt fut divisé en douze onces ou parties ; & il fut défendu à tout testateur de léguer à quelqu'un ultrà dodrantem, c'est-à-dire plus de neuf onces, faisant les trois quarts de la succession, soit qu'il n'y eût qu'un héritier, ou qu'il y en eût plusieurs ; de maniere que le quart des biens demeurât toujours aux héritiers, & que ceux-ci ne fussent tenus d'acquiter les legs que jusqu'à concurrence du surplus.

La falcidie se prend sur tous les legs & fideicommis particuliers, & sur les donations à cause de mort, même sur un legs d'usufruit.

On excepte le testament du soldat qui est fait à l'armée, les legs pieux, &c.

Au reste il n'y a point de falcidie que les dettes ne soient payées ; les droits dotaux n'y sont pas non-plus sujets.

On ne rejette point sur les autres legs ce qui n'a pû être déduit sur ceux non sujets à la falcidie ; cela demeure en pure perte pour l'héritier.

Suivant le droit des pandectes, on ne pouvoit pas prohiber à l'héritier la détraction de la falcidie, mais par le droit du code, cela a été permis ; ce qui est confirmé par l'ordonnance des testamens.

La détraction de la falcidie appartient à l'héritier, & non pas au légataire.

Pour la pouvoir retenir, il faut que l'héritier ait fait inventaire ; autrement il est tenu de payer les legs indéfiniment.

L'héritier n'impute sur la falcidie que ce qu'il a eu du défunt en qualité d'héritier, & non ce qu'il a eu à quelque autre titre, comme de legs ou de fideicommis, & par forme de prélegs.

Pour régler si la falcidie est dûe, on forme une masse de tous les biens que le testateur avoit au moment de son décès, & alors on connoît si les legs excedent le quart des biens.

La falcidie peut concourir avec la quarte trébellianique, & même avec la légitime.

La falcidie peut être prohibée par testament ou codicille, soit purement & simplement, ou bien le testateur peut défendre de cumuler la falcidie & la trébellianique, ou l'une de ces deux quartes avec la légitime ; mais il faut que ces prohibitions soient expresses ; une prohibition tacite ne suffiroit pas.

En pays coutumier la falcidie n'a pas lieu. Voyez ff. ad legem falcid. & au code, liv. VI. tit. 50, nov. 1. cap. ij. nov. 119, cap. ij. Berengarius Fernandus, tract. de falcidiâ ; le Brun, des successions ; Furgoles, des testamens.

QUARTE FUNERAIRE ou QUARTE CANONIQUE. Voyez ci-devant QUARTE CANONIQUE.

QUARTE TREBELLIANIQUE est la quatrieme partie de la succession que l'héritier institué a droit de retenir, lorsqu'il est grevé de fidei-commis, soit pour le tout ou pour partie ; cette quarte tire son nom du senatus-consulte trébellien, par lequel elle fut établie.

Ce qui y donna lieu, fut que l'hérédité étoit souvent abandonnée par l'héritier institué, lorsqu'il voyoit que la succession étoit embarrassée, & qu'il n'y avoit point de profit pour lui. Cette abdication de l'héritier entrainoit l'extinction des fidei-commis.

Il fut pourvu à cet inconvénient d'abord par le S. C. trébellien, qui ordonna d'abord que si l'héritier étoit chargé de rendre moins des trois quarts de la succession, les actions seroient dirigées tant contre l'héritier grevé, que contre le fidei-commissaire, chacun à proportion de leurs émolumens.

Mais si l'héritier étoit chargé de rendre plus des trois quarts, ou la totalité, le senatus-consulte Pégasien lui donnoit le droit de retenir le quart : avec cette différence seulement, que s'il avoit accepté la succession volontairement, on interposoit des stipulations pour le faire contribuer aux charges à proportion de l'émolument ; si c'étoit comme contraint, tout le bénéfice & les charges passoient au fideicommissaire.

Justinien, pour simplifier les choses, donna toute l'autorité au senatus-consulte trébellien, qu'il amplifia, en ordonnant que l'héritier grevé de fideicommis, soit qu'il eût le quart plus ou moins, suivant le testament, auroit toujours le quart, ou ce qui s'en défaudroit, & que les actions des créanciers se dirigeroient contre lui & contre le fideicommissaire au prorata de l'émolument.

La quarte trébellianique contribue donc aux dettes ; mais elle ne contribue pas aux legs & fidei-commis particuliers.

La détraction de cette quarte se fait sur le fideicommis universel, & non sur les legs & fidei-commis particuliers.

Du reste la trébellianique se retient sur tous les corps héréditaires, à moins que le testateur n'ait assigné à l'héritier grevé un corps certain pour sa trébellianique, ou que cela n'ait été convenu entre l'héritier & le fidei-commissaire, auxquels cas il doit se contenter de cet effet, pourvu qu'il soit suffisant pour le remplir du quart des biens, les dettes payées.

L'héritier ne peut pas retenir la quarte trébellianique sur ce que le défunt a destiné pour être employé ès oeuvres pies, ni sur les choses qu'il a défendu d'aliéner.

Celui qui a détourné des effets, n'y prend point la quarte trébellianique.

Il n'en est pas dû non plus à celui qui n'a accepté l'hérédité, que comme contraint, & aux risques, périls & fortunes du fidei-commissaire.

Le défaut d'inventaire n'empêche pas l'héritier de retenir la quarte trébellianique.

Il peut la retenir avec la falcidie, & même avec la légitime du droit ; mais le testateur peut défendre de cumuler ces différens droits, pourvu que la prohibition soit expresse.

Quoiqu'il y ait plusieurs degrés de substitutions établis par le testament, la quarte trébellianique ne se retient qu'une seule fois.

Tout ce que l'héritier grevé tient du défunt à titre d'héritier, s'impute sur la trébellianique.

La quarte trébellianique n'a pas lieu dans les pays coutumiers, si ce n'est dans les coutumes qui desirent une institution d'héritier pour la validité du testament, ou qui se referent au droit écrit pour les cas non exprimés. Voyez au code le tit. ad S. C. trebellianum, l'ordonnance des testamens, celle des substitutions, le recueil de quest. de Bretonnier, le tr. des testamens de Furgoles, tom. IV. & les mots FIDEI-COMMIS, HERITIER, SUBSTITUTION, TESTAMENT. (A)

QUARTE, en italien quartario, mesure des liquides en usage à Venise ; quatre quartes font le bigot, huit quartes la botte, & seize quartes l'amphora.

Quarte, c'est pareillement à Venise une des mesures des grains. La quarte pese environ 32 liv. gros poids ; quatre quartes font le staro, cent quarante-quatre quartes quatre cinquiemes font le last d'Amsterdam.

Quarte, mesure des liqueurs qui se nomme en plusieurs endroits quartot ou pot. Elle contient à-peu-près deux pintes mesure de Paris. Voyez POT.

Quarte est aussi une sorte de mesure de grains, particulierement en usage à Briare ; elle approche assez du boisseau de Paris ; car les onze quarts de Briare font le septier de Paris qui est composé de douze boisseaux. On se sert aussi de la quarte à Port-sur-Saône, à Luxeuil, à Saint-Loup, à Favernay, à Vannillers, à Vesoul, à Betfort, à Sare-Louis, à Sarebric, à Metz, & à Pont-à-mousson. Quelques-unes sont égales pour le poids, les autres sont différentes. A Port-sur-Saône, la quarte de froment pese 60 livres poids de marc ; celle de meteil 59, celle de seigle 58, & celle d'avoine 48. A Luxeuil, Saint-Loup & Favernay, la quarte de froment pese 70 liv. de méteil 68, & de seigle 67.

A Vannillers, la quarte de froment pese 63 livres, de meteil 62, & de seigle 61. A Vesoul, la quarte de froment pese 60 livres, de meteil 59, de seigle 58, d'avoine 44 liv. A Betfort, la quarte de froment pese quarante-trois liv. & celle de meteil 41. A Sare-Louis, la quarte de froment pese 110 livres, de meteil 109, de seigle 108, & d'avoine 96. A Sarebric, la quarte de froment pese 128 livres, de meteil 126, de seigle 116, d'avoine 108. A Metz, la quarte de froment pese 93 liv. 1/4, de meteil 95 3/4, de seigle 99 1/4, d'avoine 82 livres. A Pont-à-mousson, la quarte de froment pese 120 livres, de meteil 112, & de seigle 112 : toutes ces pesées sont aux poids de marc. Dictionn. de commerce, tom. III. pag. 1025.

QUARTE, s. m. en Musique, est la troisieme consonnance parfaite. (Voyez CONSONNANCE.) Son rapport est de 3 à 4. Elle est composée de trois degrés diatoniques ou de quatre sons ; d'où lui vient le nom de quarte : son intervalle est de deux tons & demi.

La quarte peut s'altérer en diminuant son intervalle d'un demi-ton, & alors elle s'appelle quarte diminuée, ou en augmentant d'un semi-ton ce même intervalle, & alors elle s'appelle triton, parce que l'intervalle en est de trois tons pleins ; il n'est que de deux tons, c'est-à-dire, d'un ton & deux semi-tons dans la quarte diminuée ; mais c'est un intervalle banni de l'harmonie, & admis seulement dans le chant.

Il y a un accord qui porte le nom de quarte & quinte ; quelques-uns l'appellent accord d'onzieme : c'est celui où, sous un accord de septieme, on suppose à la basse un 5e son, une quinte au-dessous du fondamental ; car alors ce fondamental fait quinte, & sa septieme fait onzieme ou quarte sur le son supposé. Voyez SUPPOSITION. Un autre accord s'appelle triton : c'est un accord dominant, dont la dissonance est portée à la basse ; car alors la note sensible fait triton sur cette dissonance. Voyez ACCORD.

Deux quartes justes de suite sont permises en composition, même par mouvement semblable, pourvu qu'on y ajoute la sixte ; mais ce sont des passages dont on ne doit pas abuser, & que la basse fondamentale n'autorise pas extrêmement. (S)

QUARTE DE NAZARD, (Luth.) jeu d'orgue ainsi nommé, par lequel sonne la quarte au-dessus du nazard, & un jeu de ceux qu'on appelle de mutation : ce jeu qui est de plomb, sonne l'octave au-dessus du prestant. Voyez la table du rapport & de l'étendue des jeux de l'orgue. Les basses sont à cheminée, & les dessus ouverts ; ou bien il est fait en fuseau, comme le nazard. Voyez NAZARD.

QUARTE estocade de, (Escrime) est un coup d'épée qu'on porte à l'ennemi de dans & sur les armes. Voyez TIRER dans les armes & sur les armes.

Cette estocade s'exécute ainsi, 1°. faites du bras droit tout ce qui a été enseigné pour parer en quarte ; 2°. étendez subitement le jarret gauche, pour qu'il chasse le corps en avant ; 3°. portez le pié droit vers l'ennemi, sans qu'il s'éleve beaucoup de terre, à quatre longueurs de pié de distance d'un talon à l'autre ; 4°. pliez le genouil droit, & tenez l'os de la jambe qu'on appelle tibia, perpendiculaire à l'horison ; 5°. développez le bras gauche avec action, étendez les doigts de cette main ; 6°. avancez le corps jusqu'à ce que le bout de ces doigts soit sur l'à-plomb du talon gauche ; 7°. tournez le dedans de la main gauche de même côté que le dedans de la droite, & mettez le fendant de la main au niveau de la ceinture ; 8°. regardez l'ennemi par dessus l'humerus ; 9°. la main droite doit se trouver au niveau des yeux, parce que le corps s'est baissé par l'allongement du pié droit ; (il ne faut faire aucun mouvement pour placer la main au niveau des yeux ; elle se trouve naturellement en la soutenant à la hauteur où on la met du premier tems :) 10°. il faut effacer de même qu'en parant quarte, en tournant l'axe des épaules à gauche. Na. Qu'il faut faire ces mouvemens d'un seul tems, & avec action.

QUARTE parer en, c'est détourner du vrai tranchant de son épée celle de l'ennemi sur un coup qu'il porte dedans & sur les armes. Voyez TIRER dans les armes & sur les armes.

Pour exécuter cette parade, il faut 1°. sans varier la pointe d'aucun côté, élever le poignet à la hauteur du noeud de l'épaule, sans roidir le bras ; 2°. avancer un peu le haut du corps vers l'ennemi, en tournant l'axe des épaules à gauche. Voyez EFFACER. 3°. tourner la main de façon que le plat de la lame soit parallele à l'horison, (il faut, en tournant la main, serrer la poignée de l'épée avec tous les doigts pour donner plus d'action à ce mouvement.) 4°. porter le talon du vrai tranchant du côté de l'épée ennemie jusqu'à ce que la garde ait passé l'alignement du corps (observez de ne pas porter le bras plus loin) ; 5°. tenez le bras souple en toutes ses jointures, & observez que le coude ne regarde pas la terre, au contraire qu'il fasse continuellement effort pour tourner en-dehors ; 6°. regardez l'ennemi par-dessus le bras. Na. Qu'on fait tous ces mouvemens avec action, d'un seul tems, & sans remuer les piés.

QUARTE BASSE, ESTOCADE DE, (Escrime) est un coup d'épée qu'on allonge à l'ennemi dedans, & sous les armes. Voyez TIRER dedans les armes, & sous les armes.

Elle s'exécute comme l'estocade de quarte (voyez ESTOCADE DE QUARTE) ; avec cette différence, que la lame de votre épée passe sous le bras de l'ennemi.

QUARTE BASSE, PARER EN, (Escrime) c'est détourner avec le vrai tranchant de son épée celle de l'ennemi, sur un coup qu'il porte dedans ou sous les armes. Voyez TIRER dedans, & sous les armes.

Cette parade s'exécute comme la quarte, excepté qu'on doit avoir la pointe de l'épée plus basse que le poignet, & la lame de l'ennemi doit passer sous votre bras.


QUARTELAGES. m. (Gramm. & Jurisprud.) vexation des seigneurs qui enlevoient aux habitans de leurs domaines la quatrieme partie de ce qu'ils avoient recueilli.


QUARTENIERS. m. (Police) est un officier royal & municipal qui est préposé sur un des quartiers de la ville de Paris, pour y faire exécuter les ordonnances & mandemens du bureau de la ville, & y exercer certaines fonctions de police.

Le titre de quartenier vient de quartier, & de ce qu'anciennement la ville de Paris n'étoit divisée qu'en quatre parties ou quartiers ; & néanmoins lorsque le nombre de ces divisions a été augmenté, on leur a conservé le nom primitif de quartier, & à l'officier préposé sur chaque division le titre de quartenier.

L'établissement des quarteniers de la ville de Paris est conforme à l'usage de toutes les nations policées qui ont toujours eu l'attention de diviser ainsi les villes en plusieurs régions ou quartiers, & de préposer sur chacun certains officiers pour y maintenir le bon ordre, & y faire exécuter les mandemens du magistrat : tel étoit l'usage des Hébreux, des Grecs, & des Romains.

Rome & les autres villes qui en dépendoient, étoient divisées en plusieurs régions ; & ceux qui étoient préposés sur chacune de ces divisions s'appelloient curatores regionum, adjutores praefecti urbis, ce qui revient très-bien aux quarteniers, lesquels sont aussi des aides du prevôt des marchands, dont l'office a beaucoup de rapport à celui que les Romains appelloient préfet de la ville.

On tient que ce fut du tems des Romains que la ville de Paris commença à être partagée en différentes régions, pour y faciliter l'exercice de la police, & que ce partage fut d'abord fait en quatre parties ou quartiers ; telle est l'opinion de l'auteur des annales de Paris, dans le parallele qu'il fait de cette ville avec les plus célebres villes du monde ; c'est aussi le sentiment de Loyseau, en son traité des Offices, liv. V. ch. vij. des offices des villes. Ce dernier auteur pense que les diverses régions de Paris sont appellées quartiers, soit parce qu'anciennement il n'y en avoit que quatre, ou parce qu'à-présent il y en a quatre fois quatre, de même qu'à Rome il n'y eut au commencement que trois tribus, puis trois fois trois ; mais la premiere étymologie paroît la meilleure.

En effet, depuis le premier accroissement de la ville de Paris & jusqu'à la nouvelle enceinte qui fut faite sous Philippe Auguste, toute la ville n'étoit encore divisée qu'en quatre quartiers, dont l'un comprenoit & comprend encore toute l'ancienne cité renfermée dans l'île du palais ; les trois autres qui étoient dans la ville au nord de la cité, étoient exactement bornés ; c'étoient le quartier de saint Jacques de la Boucherie, celui de la Verrerie, & celui de la Greve ; ensorte qu'il ne devoit y avoir alors que quatre quarteniers.

Depuis le second accroissement de la ville de Paris, qui fut entrepris par Philippe Auguste en 1190, & achevé l'an 1211, Paris fut augmenté de quatre nouveaux quartiers ; savoir, du côté du nord, ceux de sainte Opportune & de saint Germain de l'Auxerrois ; & du côté du midi, les quartiers de saint André & de la place Maubert. Il y a lieu de croire que le nombre des quarteniers augmenta comme celui des quartiers ; qu'ainsi depuis 1211 ils étoient au nombre de huit.

Paris ayant reçu un troisieme accroissement qui fut commencé par Charles V. & achevé sous Charles VI. en 3383, cette ville se trouva encore augmentée de huit nouveaux quartiers ; savoir ceux de saint Antoine, saint Gervais, sainte Avoie, saint Martin, saint Denis, les halles, saint Eustache, & saint Honoré ; desorte que la ville se trouvant par ce moyen divisée en seize quartiers, le nombre des quarteniers fut pareillement mis à seize, afin qu'il y en eût toujours un préposé sur chaque quartier.

Ils furent tous supprimés par des lettres patentes de Charles VI. du 27 Janvier 3382, portant abolition de la prevôté des marchands de la ville de Paris, & union d'icelle à la prevôté du Châtelet de cette ville. Le roi défend par l'article 4 de ces lettres, que dorénavant il y ait dans cette ville aucuns quarteniers, cinquanteniers, ou dizainiers, établis pour la défense de cette ville ou autrement ; & il déclare qu'en cas de besoin ou nécessité, par la puissance de ses ennemis ou autrement, il y pourvoira & fera garder ladite ville & les bourgeois de toute oppression, de telle maniere qu'aucuns inconvéniens ou dommages ne pourront s'en suivre, ou à aucun des bourgeois.

Ce changement fut occasionné par la faction du duc de Bourgogne ; en 1388, la prevôté des marchands fut séparée de la prevôté de Paris ; mais on ne voit pas que les quarteniers ayent été dès-lors rétablis ; ils ne le furent à ce qu'il paroît, qu'en 1411, suivant des lettres de Charles VI. du 20 Avril de ladite année, dans lesquelles le roi dit que pour la garde & sûreté de sa bonne ville de Paris, & pour aucunes nouvelles qui étoient survenues, il avoit par délibération du conseil, ordonné que l'on feroit guet & garde de jour aux portes de la ville de Paris, & de nuit dans les rues de ladite ville ; & qu'afin que cela fût plus diligemment exécuté & avec un meilleur ordre, il avoit établi pour cet effet des quarteniers & cinquanteniers, pour ordonner ledit guet.

Pendant les guerres civiles, sous le regne de Charles VI. la nuit du 28 au 29 Mai 1418, Perrinet le Clerc, fils d'un quartenier de la ville, prit sous le chevet du lit de son pere les clés de la porte de Bussy, & l'ouvrit aux troupes du duc de Bourgogne. Ces troupes auxquelles se joignit la plus vile populace, pillerent, tuerent, ou emprisonnerent tous ceux qui étoient opposés à la faction de ce prince, & qu'on appelloit Armagnacs. Le 12 Juin le carnage recommença avec encore plus d'horreur ; la populace courut aux prisons, & se les fit ouvrir. Les plus notables bourgeois, deux archevêques, six évêques, plusieurs présidens, conseillers & maîtres des requêtes, furent assommés ou précipités du haut des tours de la Conciergerie & du grand Châtelet ; on les recevoit en-bas sur la pointe des piques & des épées ; les corps du connétable Bernard d'Armagnac, & du chancelier Henry de Marle, après avoir été traînés dans les rues, furent jettés à la voirie. Les Bouchers érigerent ensuite à Perrinet le Clerc à la place saint Michel, une statue dont le tronc subsiste encore, & sert de borne à la maison qui fait le coin de la rue saint André-des-Arcs & de la rue de la vieille Boucherie.

Malgré la tradition & le sentiment de la plûpart des historiens, M. de Mautour prétend que cette borne avec une tête d'homme, n'est que le pur effet du caprice d'un ouvrier, & qu'il n'y a jamais eu de statue de Perrinet le Clerc ; il en paroît si persuadé, qu'il a négligé d'appuyer son opinion sur des preuves & de bonnes raisons. Germain Brice, qui d'ailleurs rapporte très-mal ce trait historique, dit que l'on trouva il y a quelques années dans la cave d'une maison voisine les fragmens de cette statue. Il y a toute apparence qu'on la mutila dès que Charles VII. fut le maître de Paris, & que par dérision on la mit à servir de borne ; il est aisé de voir combien elle est différente des autres bornes par sa longueur & sa grosseur. Ess. histor. sur Paris, par Saint-Foix, tome I. page 31.

Depuis le rétablissement des quarteniers, il arriva en 1642 un changement dans la division des quartiers de Paris ; celui de saint André qui étoit devenu très-considérable, fut divisé en deux, & l'on en détacha un nouveau quartier qui fut celui du fauxbourg saint Germain ; ce qui forma un dix-septieme quartier, du-moins à l'égard des commissaires au Châtelet ; mais la division des quartiers demeura toujours la même par rapport aux quarteniers.

Quant à la place de quarteniers, ce n'étoient jusqu'alors que des commissions à vie, auxquelles le bureau de la ville nommoit sous le bon plaisir du roi, & suivant l'élection qui étoit faite du nouveau quartenier par les cinquanteniers & dizainiers de son quartier, & par deux notables bourgeois de chaque dizaine qui étoient élus entre ceux que chaque dizainier avoit mandé pour cet effet.

Ceux qui vouloient se démettre de cette place, ne pouvoient le faire qu'en personne & entre les mains du prevôt des marchands & échevins, de même que plusieurs autres officiers de police dépendans du bureau de la ville.

Louis XIII. ayant reconnu les inconvéniens qu'il y avoit pour ces officiers d'être obligés de se faire ainsi transporter en personne au bureau de la ville pour y faire leurs résignations entre les mains des prevôt des marchands & échevins, par un édit du mois de Février 1623, il les dispensa de faire ces résignations en personne dans l'hôtel-de-ville, & leur permit de les faire devant des notaires ou tabellions, ainsi qu'il se pratique pour les autres officiers, en payant par eux par chacun an une somme modérée aux prevôt des marchands & échevins pour cette dispense.

Mais l'exécution de cet édit fut différée ; & par un autre du mois d'Octobre 1633, le roi ordonna que conformément au précédent édit, tous ces officiers pourroient résigner leurs offices par-devant notaires ou tabellions, sans être tenus de faire, si bon ne leur sembloit, leurs résignations en personne à l'hôtel-de-ville, en payant par eux pour une fois seulement pour cette dispense, la finance qui seroit taxée au conseil, & encore à l'avenir par chacun an en l'hôtel-de-ville, ès-mains du receveur d'icelle, une reconnoissance annuelle, telle qu'elle seroit arbitrée, pour dédommager lesdits prévôts des marchands & échevins, procureur & greffier de la ville, de la faculté qu'ils avoient de pourvoir à ces offices, vacation arrivant d'iceux, que le tiers de cette redevance seroit employé par les prevôt des Marchands & échevins, au payement des rentes dûes par la ville, & autres nécessités d'icelle, & que les deux autres tiers leur appartiendroient comme droits & émolumens de leurs charges.

Les quarteniers ayant été nommés dans cet édit de 1633 cumulativement avec plusieurs autres officiers de police, que cet édit concernoit aussi, se firent admettre au payement de la finance qui avoit été reglée, & de la redevance annuelle. Ils prétendirent en conséquence que leurs places avoient été créées en titre d'office par cet édit du mois d'Octobre 1633, & qu'ils les possédoient en titre de propriété ; ces prétendus offices entrerent même dans le commerce.

Mais le roi ayant été informé de cette nouveauté, par arrêt de son conseil du 11 Juillet 1679, en interprétant l'édit de 1633, déclara que le procureur de la ville, le receveur & le greffier, les conseillers de ville, les quarteniers, & quelques autres qui sont dénommés dans cet arrêt, n'avoient point été créés & érigés en titre d'office par l'édit de 1633, que les quittances de finances, provisions & installations faites à l'hôtel-de-ville en vertu de cet édit, étoient nulles, ainsi que tous actes & ordonnances donnés par les prevôt des marchands & échevins à quelques-uns de ces officiers, pour être reçus au droit annuel de l'hôtel-de-ville. Sa Majesté fit défenses aux prevôt des marchands & échevins d'admettre à l'avenir aucunes résignations faites en leur faveur par les conseillers & quarteniers, & autres officiers dénommés dans cet arrêt, ni de procéder à l'élection des offices de cette qualité, que huitaine après le décès des officiers, ordonnant qu'avant leur installation, les prevôt des marchands & échevins présenteroient à Sa Majesté les actes de l'élection, pour agréer celui qui auroit été élu, si tel étoit le plaisir de Sa Majesté.

Depuis, sur les remontrances des prevôt des marchands & échevins, conseillers de ville, quarteniers & autres officiers, le roi par l'édit du mois de Juillet 1681, registré au parlement le 15 du même mois, & à la cour des aydes le 29, créa en titre d'offices formés, entr'autres 26 conseillers du roi en l'hôtel-de-ville, dont dix seroient possédés par des officiers des cours & compagnies, & par des secrétaires du roi du grand college, & seize par des notables bourgeois & marchands de la ville de Paris. Il créa aussi en titre d'office les seize quarteniers, auxquels il attribua le titre de ses conseillers ; ensorte que présentement ces offices sont tout-à-la-fois offices royaux & municipaux.

Ces offices furent créés aux mêmes honneurs, autorités, pouvoirs, fonctions, prérogatives, prééminences, droits & privileges dont les possesseurs de ces charges avoient jouï jusqu'alors.

Le roi admit à ces offices, ceux qui en faisoient alors l'exercice, auxquels il fut expédié pour cette premiere fois seulement des provisions scellées du grand sceau, en payant aux parties casuelles du roi, la finance qui avoit été taxée, il fut ordonné qu'ils feroient enregistrer au greffe de l'hôtel-de-ville, sans qu'ils fussent tenus de prêter un nouveau serment.

Il leur fut permis de résigner leurs offices devant notaires, à personnes capables, sans que les résignataires fussent tenus de prendre des provisions du roi, mais seulement d'observer le même ordre qui s'étoit pratiqué jusqu'alors, c'est-à-dire que les résignations sont admises par sentence du bureau de la ville, où le nouveau pourvu prête serment entre les mains du prévôt des marchands. Suivant l'édit de 1681, les quarteniers sont tenus de payer chacun annuellement au receveur du domaine de la ville, pour forme de droit annuel, & pour la faculté de résigner leurs offices, les sommes pour lesquelles ils seroient compris dans l'état que le roi en feroit mettre au greffe de la ville.

Par édit du mois de Décembre 1701, le roi créa plusieurs offices de ville, entr'autres quatre nouveaux offices de conseillers du roi quarteniers ; ces quatre offices furent levés aux parties casuelles du roi par divers particuliers.

Le 14 Janvier 1702, le roi rendit en son conseil un arrêt, portant une nouvelle division de la ville de Paris en 20 quartiers, dans chacun desquels les commissaires au châtelet seroient distribués ; il ordonna aussi que pareille distribution seroit faite des 20 quarteniers dans les mêmes quartiers par les prevôt des marchands & échevins, pour y faire leurs fonctions, à l'effet de quoi toutes lettres patentes seroient expédiées.

Cette nouvelle division de la ville de Paris en 20 quartiers, fut confirmée à l'égard des commissaires au châtelet, par une déclaration du 12 Décembre 1702 ; on a même depuis ajouté un 21e quartier.

Mais ces changemens n'étant relatifs qu'aux commissaires du châtelet, les quarteniers qui s'en étoient toujours tenus à l'ancienne division de la ville en seize quartiers, obtinrent du roi le 3 Février 1703, la réunion à leur compagnie des quatre nouveaux offices de quarteniers, à la charge de rembourser ceux qui en étoient pourvus.

Le roi leur permit néanmoins de les désunir, & d'en disposer au profit de personnes capables, qui seroient pourvues sur leur nomination par les prevôt des marchands & échevins, même d'en faire pourvoir quatre d'entr'eux qui en pourroient jouïr & faire les fonctions sans incompatibilité avec leurs autres offices, & sans qu'il soit besoin d'obtenir du roi de nouvelles provisions ; mais les quarteniers ont laissé ces offices réunis à leur compagnie, au moyen de quoi il n'y a toujours que seize quarteniers en titre, qui ont chacun leur quartier, suivant l'ancienne division.

Ces seize quartiers, suivant l'ordre du département, qui est renouvellé dans le courant du mois de Septembre de chaque année, sont ceux de l'hôtel-de-ville, de la Place royale, du Marais, de saint-Martin, de saint-Denis, des saints-Innocens, des Halles, de saint-Eustache, du Palais royal, du Louvre, de saint-Germain-des-prés, du Luxembourg, de Sorbonne, de sainte-Genevieve, de l'île Notre-Dame, & de la Cité.

Il y a pour chaque quartier un quartenier, qui a sous lui quatre cinquanteniers & seize dizainiers.

Les quarteniers ne sont point obligés de demeurer dans le quartier qui leur est distribué. L'ancienneté qu'ils acquierent dans leur compagnie, ne leur donne pas non plus le droit de changer de quartier, & si par une prédilection pour un quartier plutôt que pour un autre, ils en vouloient changer, ils ne le pourroient faire que de gré à gré, & en vertu d'une sentence du bureau de la ville, qui autoriseroit l'accord qu'ils auroient fait entr'eux à ce sujet.

Les quarteniers, suivant leur premiere institution, étoient plutôt officiers d'épée que de robe : car quoiqu'ils ayent toujours eu certaines fonctions de police, ils étoient anciennement chacun les capitaines, ou plutôt les colonels de leur quartier, dont ils commandoient la milice bourgeoise dans le tems que les Parisiens étoient armés, & qu'ils se gardoient eux-mêmes.

Les lettres de Charles VI. des 27 Janvier 1382, & 20 Avril 1411, justifient que leur principale fonction étoit de commander dans leur quartier, qu'ils étoient établis pour la garde, sûreté & défense de la ville, & pour faire faire guet & garde aux portes & sur les murs de la ville.

L'ancienne formule du serment qu'ils prêtoient à leur reception, étoit de bien & loyalement exercer l'état en charge de quartenier, d'obéir aux commandemens des prevôt des marchands & échevins, présens & à venir, de faire mettre à exécution promtement, les mandemens qui leur seront envoyés par eux ; de faire bon guet & garde aux portes & sur les murs de la ville, toutes les fois que besoin seroit, & que s'ils savoient chose qui fût contre & au préjudice du roi, de la ville, de la chose publique, il en viendra incontinent avertir le prevôt des marchands & échevins, ou le procureur du roi de la ville.

Ils avoient chacun spécialement la garde d'une des portes de la ville ; mais il n'y a pas toujours eu autant de portes que de quarteniers, le nombre des portes ayant varié selon les tems. Ils ont encore actuellement chacun inspection sur une des portes ou entrées de la ville ; mais plusieurs de ces portes se trouvent abattues, comme les portes saint-Honoré & de la Conférence ; ceux qui ont dans leur département une porte encore existante, disposent du logement qui se trouve au dedans de cette porte : ce logement, dans l'origine, étant destiné pour loger le portier, qui, sous les ordres du quartenier, avoit soin d'ouvrir & fermer les portes.

Les cinquanteniers commandoient sous leurs ordres à 50 hommes de milice bourgeoise, & les dizainiers à dix hommes ; desorte que chaque quartenier ayant sous lui anciennement deux cinquanteniers, & dix dizainiers, il en résulte que le quartenier étoit le capitaine d'une compagnie de 100 hommes. Présentement ils ont sous eux quatre cinquanteniers & seize dizainiers.

Les lettres patentes de Louis XIII. du mois de Février 1618, portant confirmation des privileges des quarteniers, font mention que c'est en considération des recommandables services rendus par leurs prédécesseurs à l'état & à la couronne, sous le regne des rois Jean, & Charles VII. & par les impétrans au feu roi Henri IV. & au roi Louis XIII. lui-même, durant les derniers mouvemens qu'il y avoit eu à Paris ; & pour leur donner moyen de continuer ces services à l'avenir, avec autant de soin, vigilance & travail de jour & de nuit, qu'ils avoient fait par le passé, dont Louis XIII. témoigne qu'il est grandement satisfait.

Il y eut seulement un tems où les quarteniers légitimement pourvus par la ville, furent troublés dans leurs fonctions. Ce fut pendant le tems funeste de la ligue où les capitaines des quartiers furent nommés par une faction qui se forma à Paris en 1589, & que l'on nomma les seize. Les principaux de cette faction étoient au nombre de quarante ; ce fut un bourgeois de Paris nommé la Roche-le-blond, qui commença cette ligue particuliere pour s'opposer aux desseins du roi Henri III. lequel favorisoit, dit-on, les huguenots, & pour empêcher que le roi de Navarre ne succédât à la couronne de France.

La Roche-le-blond eut d'abord une conférence secrette avec deux curés de Paris, & un chanoine de Soissons qui prêchoit à Paris ; peu de jours après ces quatre personnes en attirerent huit autres dans leur parti ; ces douze séditieux furent les fondateurs de la ligue particuliere de Paris : elle fut bientôt augmentée de nouveaux confédérés, gens d'église, de palais & de boutique, dont les principaux, au nombre de quarante, formerent entr'eux un conseil pour délibérer sur les affaires publiques.

Ce conseil, pour garder quelque ordre dans cette conspiration, choisit seize des séditieux, auxquels il distribua les seize quartiers de la ville de Paris, afin d'observer ce qui s'y feroit, & d'y exécuter les ordres du conseil ; c'est de-là que cette faction fut nommée les seize, ou le conseil des seize.

Cette faction se joignit à la grande ligue commencée à Peronne. Cependant elle eut aussi ses intérêts particuliers, & les seize ne seconderent pas toujours les intentions du Duc de Guise, ni celles du duc de Mayenne, auquel ils préférerent le roi d'Espagne.

On sait toutes les insolences & les désordres que commirent à Paris les seize, avec quelle audace Bussy-le-Clerc, l'un d'eux, conduisit le parlement prisonnier à la Bastille, & comment les seize firent périr ignominieusement le docte président Brisson, & deux conseillers qui s'opposoient à leurs desseins.

Mais autant cette faction fut aimée du duc de Guise, autant elle fut haïe du duc de Mayenne, son frere, qui fut après lui le chef de la ligue ; il en condamna lui-même neuf à mort en 1591, dont quatre furent pris & exécutés ; les cinq autres, du nombre desquels étoit Bussy-le-Clerc se sauverent : le duc de Mayenne envoya une abolition au parlement pour les autres coupables : il défendit toutes assemblées privées, sous peine de la vie & du râsement des maisons où elles se feroient ; c'est ainsi que cette faction des seize fut deshonorée & ruinée par le duc de Mayenne.

Les quarteniers légitimement pourvus, étant par ce moyen rentrés dans leurs fonctions, rendirent, comme on l'a déja observé, des services essentiels au roi Henri IV. & ensuite au roi Louis XIII. outre ceux dont il fait mention dans les lettres de 1618. On voit qu'ils furent encore employés pour son service en 1636, suivant un ordre qu'il envoya le 6 Août aux prevôt des marchands & échevins, portant, que comme il ne pouvoit fournir à ce qui étoit nécessaire pour l'équipage & attirail de son artillerie, ou pour monter sa cavalerie, s'il n'étoit secouru & assisté de ses bons sujets dans une si pressante nécessité, il ordonnoit aux prevôt des marchands & échevins de Paris, de députer aucuns des quarteniers, colonels & capitaines, en chacun des quartiers, pour faire la levée des chevaux dont S. M. avoit besoin ; savoir, un cheval de chaque personne ayant carrosse, avec lequel on envoyeroit un laquais ou cocher pour en avoir soin, &c.

Les lettres-patentes du mois de Mars 1663, obtenues par les cinquanteniers & dizainiers, pour l'autorisation de leurs statuts, portent entr'autres choses, que quiconque prétendra à la charge de cinquanteniers & dizainiers de Paris, sera tenu de certifier au quartenier de son quartier, par les cinquanteniers & dizainiers, ou autres bourgeois du même quartier, ses bonnes vie, moeurs, religion catholique, apostolique & romaine, & de son affection pour le service du roi.

Le quartenier doit présenter aux prevôt des marchands & échevins le nouveau cinquantenier ou dizainier, lequel doit faire serment d'obéir aux mandemens du prevôt des marchands & échevins, & de son quartenier, & de garder exactement en tout l'ordre qu'ils lui auront prescrit.

Les cinquanteniers & dizainiers doivent exécuter en personne les mandemens des prevôt des marchands & échevins & de leurs quarteniers, sinon en cas d'excuse légitime, & pour-lors ils y peuvent commettre des personnes dont ils répondent, mais il faut qu'elles soient agréées par les quarteniers.

Les statuts portent encore, qu'afin que la tranquillité de la ville soit religieusement gardée, les cinquanteniers & dizainiers iront aux maisons des quarteniers prendre les clés des portes de la ville en tems de guerre, pour les ouvrir & les fermer lorsque les capitaines de leurs dizaines iront en garde, &c.

Il est dit aussi qu'ils feront les rôles des personnes résidentes dans leurs dizaines, par noms, surnoms, & qualités, pour les délivrer aux quarteniers selon l'ordre que l'on leur pourra enjoindre, & sans qu'ils puissent donner copie de ces rôles à qui que ce soit que par l'ordre des quarteniers.

Que pour maintenir le repos de la ville ils veilleront incessamment que l'on ne fasse aucunes assemblées générales ou particulieres, ni qu'il y ait amas de gens de guerre qui puissent tendre à sédition, dont en ce cas ils feront leurs procès-verbaux qu'ils porteront aux quarteniers pour y être pourvû par les prevôt des marchands & échevins.

Ils doivent prendre garde que les rues soient bien garnies de chaînes de fer avec leurs rouets & autres fermetures nécessaires pour les soutenir, à les faire tendre dans les désordres, tumultes, & séditions lorsqu'ils en reçoivent l'ordre de la part des prevôt des marchands & échevins ou des quarteniers.

Pour faire que la milice soit exactement observée parmi les bourgeois, il est dit qu'ils porteront aux quarteniers les rôles des colonels, capitaines, lieutenans, enseignes, & autres officiers qui décéderont dans leurs dizaines, ou qui changeront de demeure, afin que sur le rapport que les quarteniers en feront aux prevôt des marchands & échevins il soit procédé à la nomination de nouveaux officiers, &c.

Ils sont tenus d'avertir les bourgeois de prêter leur secours lorsque le feu prend dans quelque maison, & de faire fournir les seaux, crocs & outils, qui sont tant à l'hôtel-de-ville que chez les quarteniers, &c.

Ils délivrent aux quarteniers des certificats de ceux qui desirent obtenir droit & lettres de bourgeoisie, comme ils contribuent aux charges ordinaires de la ville, & sont actuellement résidans dans l'étendue de leurs dizaines, & sur le certificat du dizainier le quartenier donne le sien, par lequel il certifie à messieurs de la cour des aides & à tous qu'il appartiendra, qu'un tel est demeurant depuis tant de tems à Paris dans une telle rue, en une telle maison, sise dans l'étendue de son quartier, & en la dizaine du sieur tel.... en laquelle celui auquel il donne ce certificat contribue à toutes les charges de ville pour la police, comme boues, pauvres, & lanternes, ainsi que font les autres bourgeois de Paris.

Les cinquanteniers & dizainiers peuvent résigner leurs offices en appellant leur quartenier, & les résignataires sont présentés par le quartenier aux prevôt des marchands & échevins, pour être admis en la maniere accoutumée.

Telles sont les dispositions de ces statuts des cinquanteniers & dizainiers qui ont rapport aux quarteniers.

On a vû ci-devant que les quarteniers étoient comme les capitaines ou colonels de leurs quartiers, mais il paroît que dès avant 1663, les prevôt des marchands & échevins commettoient dans chaque quartier des capitaines & autres officiers pour commander la milice bourgeoise sous les ordres des quarteniers du bureau de la ville.

Louis XIV. ayant, par édit du mois de Mars 1694, créé dans toutes les villes des colonels, majors, capitaines, lieutenans & enseignes des bourgeois, il en excepta la ville de Paris, dans laquelle il maintint les capitaines & autres officiers nommés & établis sous les ordres des prevôt des marchands & échevins dans toutes leurs fonctions, droits & privileges ; mais comme ils y étoient tous les jours troublés sous prétexte qu'ils n'exerçoient qu'en vertu de simples commissions des prevôt des marchands & échevins, Louis XIV. par édit du mois de Septembre 1703, registré au parlement le 3 Octobre suivant, revoqua toutes les commissions qui pouvoient avoir été accordées, soit par les gouverneurs de Paris, ou par les prevôt des marchands & échevins, de capitaines, majors, lieutenans & enseignes de bourgeoisie, & il créa en même tems en titre d'office formé en chacun des seize quartiers de Paris, un lieutenant-colonel, un major, un capitaine, un lieutenant, & un enseigne pour chacune des 133 compagnies de milice bourgeoise qui étoient alors établies à Paris.

Il ordonna que du nombre des huit bourgeois & notables habitans que chaque quartenier choisit tous les ans dans son quartier pour l'élection des échevins, il en seroit pris deux dans le nombre des officiers créés par cet édit pour donner leur voix au scrutin, pour l'élection des deux échevins entrans, à peine de nullité de l'élection.... & qu'aucun bourgeois de Paris ne pourroit posséder aucun office de conseiller de ville, quartenier, dizainier, ni cinquantenier, qu'il n'eût possédé, savoir le conseiller ou quartenier l'une des charges de lieutenans-colonels, majors ou capitaines, & les dizainiers & cinquanteniers l'un desdits offices, ou ceux de lieutenans ou enseignes.

Ces officiers de milice, à leur réception, sont conduits chez M. le prevôt des marchands par le quartenier auquel ils sont subordonnés, conjointement avec les autres officiers de la même compagnie, & présentés au bureau de la ville, après en avoir donné avis au colonel, s'il y en a un, qui peut le présenter lui-même conjointement avec le quartenier.

Un des plus beaux droits des quarteniers est d'avoir part à l'élection des prevôt des marchands & échevins ; on trouve des preuves qu'ils jouïssoient de ce droit dès l'an 1438, ainsi qu'il paroit par un procès-verbal du 23 Juillet de ladite année, qui est rapporté à la fin du recueil des ordonnances de la ville, édition de 1644.

Pour cet effet chaque quartenier, après avoir reçu un mandement du bureau de la ville pour faire assembler les officiers de ville & bourgeois au sujet de cette élection, va lui-même en manteau & en rabat inviter des notables bourgeois de son quartier de tout état, tant officiers du roi & de milice, qu'anciens échevins, ecclésiastiques, magistrats, & autres gens de robe, gentilshommes, marchands non méchaniques demeurant dans l'enceinte de la ville & non dans les fauxbourgs, de se trouver en son hôtel au jour & heure qu'il leur indique, qui est ordinairement le 14 du mois d'Août, sur les 4 heures de relevée, pour entendre la lecture d'un mandement à lui envoyé par la ville au sujet de l'élection des nouveaux prevôt des marchands & échevins au-lieu & place de ceux qui ont fait leur tems. Anciennement on mandoit six notables, depuis, le nombre en fut fixé à huit, présentement le quartenier n'en mande ordinairement que quatre. Quand il ne trouve pas les notables chez eux, il laisse pour eux une lettre ou billet qui les instruit du sujet de sa visite.

Il envoye aussi à chacun de ses cinquanteniers un mandement, à l'effet par eux de faire avertir les dizainiers étant sous leur charge, de se rendre avec eux en l'hôtel du quartenier, au jour & heure par lui indiqués.

Lorsque la compagnie est assemblée chez le quartenier, il fait donner un fauteuil à celui qu'il a destiné pour présider à la dite assemblée, il le fait placer au bout du bureau & lui donne la droite ; il fait ensuite placer les autres mandés, puis leur fait la lecture du mandement, & le serment étant pris par le président de l'assemblée, chacun des mandés donne sa voix.

Le quartenier dresse du tout son procès-verbal, & marque les noms des quatre d'entre les mandés qui ont eu le plus de voix ; il enjoint à ceux-ci de se trouver en leur maison le 16 du mois jusqu'après 11 heures du matin ; que deux d'entr'eux seront mandés en l'hôtel-de-ville pour procéder à l'élection des nouveaux prevôt des marchands & échevins ; le quartenier signe ce procès-verbal avec ses mandés & en remet un double signé de lui au bureau de la ville.

Le jour de l'élection venu, & tous ceux qui doivent y avoir part étant assemblés, les quarteniers sont appellés par le greffier de la ville, chacun en leur rang, avec leurs deux mandés appellés pour l'élection ; ils les conduisent vers les scrutateurs, entre les mains du premier desquels ils prêtent tous trois serment, & donnent leur bulletin pour l'élection.

Les quarteniers ont eux-mêmes l'avantage de parvenir à l'échevinage.

On ne connoît ceux qui ont rempli les places de quarteniers que depuis l'an 1500, suivant l'armorial que la ville a fait faire en 1729, où Jean Croquet est le premier qui soit marqué ; il étoit quartenier en 1500, & fut échevin en 1502, & remis en 1510. On voit parmi ceux qui suivent qu'il y en eut nommés échevins dans chacune des années 1504, 1506, 1507, 1509, 1510, 1512, 1514, 1516, 1518 ; & que Jean Bazanier, qui avoit été élu en 1514, fut remis en 1520.

Dans le rôle des prevôt des marchands & échevins qui est à la fin du recueil des ordonnances de la ville, édition de 1644, on trouve que le 16 Août 1525, il fut élu trois nouveaux échevins, dont le dernier devoit achever seulement le tems d'un qui étoit décédé. Sire Jean Turquant, quartenier & bourgeois de Paris, est nommé le second entre les trois qui furent élus, c'est le premier de cette liste qui soit désigné avec la qualité de quartenier.

Dans toute la suite de cette liste les quarteniers qui n'avoient point d'autre qualité, ou qui y joignoient seulement celle de bourgeois de Paris, sont qualifiés de ce titre sire tel, comme on qualifie encore les consuls ; ceux qui avoient quelqu'autre fonction publique sont qualifiés maîtres.

Au surplus, on remarque encore dans cette même liste, qui va jusqu'en 1643, que les quarteniers qui furent élus échevins, furent nommés tantôt premier échevin & tantôt le second : il s'en trouve de nommés de deux années l'une, & quelquefois il y a eu de plus long intervalle ; en 1525 sire Jean Turquant, quartenier, bourgeois de Paris, est élu second échevin ; en 1528, sire Claude Maciot, premier échevin ; en 1532, sire Jean Barthélemi second ; en 1534, Me Guillaume Quinette, receveur des généraux des aides sur le fait de la justice, premier échevin.

En 1538, on prit pour échevins deux quarteniers, sire Jean Croquet & Guillaume Danes.

En 1540 & en 1542, deux quarteniers furent élus seconds échevins ; en 1546 le quartenier fut le premier, en 1548 il fut le second, en 1552 il fut le premier.

Mais depuis long-tems il est d'usage d'élire alternativement un conseiller de ville & un quartenier ; & ces officiers sont toujours premiers échevins.

Par un édit du mois de Mai 1554, il fut ordonné qu'un quartenier qui voudroit accepter l'échevinage, seroit tenu de se demettre de l'état de quartenier, sans pouvoir même ensuite reprendre ledit état ; mais présentement l'office de quartenier n'est plus incompatible avec la fonction d'échevin.

Les quarteniers ont une chambre à l'hôtel-de-ville où ils s'assemblent pour leurs affaires particulieres.

Ils s'assemblent aussi avec les conseillers de ville pour les affaires qui sont communes aux deux compagnies.

Enfin ils sont du corps de ville, & en cette qualité ils sont appellés aux assemblées générales qui sont convoquées par le bureau de la ville.

Ils sont aussi propriétaires en corps de plusieurs autres offices qui ont été unis à leurs offices de quarteniers, savoir :

1°. De l'office de conseiller-lieutenant du prevôt des marchands, lequel leur appartient & aux conseillers de ville. Cet office fut créé une premiere fois par édit du mois de Mai 1690, & uni par édit du mois d'Août suivant au corps des conseillers quarteniers, moyennant finance, & les fonctions de cet office étoient faites, conformément à cet édit, par l'un des conseillers & quarteniers qui en étoient pourvus, & étoient reçus audit office au bureau de la ville, alternativement chaque année ; il fut de nouveau créé par édit du mois de Mai 1702 ; mais par une déclaration du 10 Juillet 1703, ce nouvel office fut éteint & supprimé, & le roi ordonna que celui qui avoit été créé en 1690, & qui avoit été uni au corps des conseillers & quarteniers, continueroit d'être par eux exercé, comme ils avoient fait jusqu'alors, & il les maintint dans les droits de cet office. Présentement c'est le premier échevin qui fait la fonction de lieutenant.

2°. Ils sont aussi propriétaires conjointement avec les conseillers de ville des quatre offices de conseillers de ville intendans & commissaires des fontaines, regards, aqueducs & conduites publiques dépendantes de la ville de Paris, créés au lieu des conseillers de ville qui en faisoient auparavant les fonctions ; de l'office de conseiller du roi syndic général des communautés d'officiers dépendans de l'hôtel-de-ville, & de l'office de conseiller du roi trésorier des deniers destinés à l'entretenement des hôtels des deux compagnies des mousquetaires du roi. Ces différens offices furent créés par l'édit du mois de Novembre 1706 ; mais par un autre édit du mois de Décembre 1707, ils furent réunis aux corps des conseillers & quarteniers pour en faire par eux les fonctions ; savoir, que deux offices de commissaires-intendans des fontaines seroient exercés par les conseillers de ville, & deux par les quarteniers alternativement les uns après les autres, l'office de trésorier par les quarteniers aussi alternativement, & celui de syndic en vertu de commission des prevôt des marchands & échevins sur la présentation qui leur en sera faite par les conseillers & quarteniers.

Outre ces fonctions, les quarteniers en ont encore d'autres, & notamment quelques-unes qui ont rapport à la police.

Lors de l'établissement du grand bureau des pauvres, c'étoient quatre conseillers au parlement & quatre quarteniers qui en avoient la direction & administration.

Ils ont chacun sous l'entrée de leur maison vingtquatre seaux de ville, & des crocs pour les incendies, de l'usage desquels ils ordonnent en cas de besoin, ainsi qu'il est dit dans une ordonnance du prevôt des marchands du 31 Juillet 1681. La Mare, tom. IV. p. 155.

Ils sont obligés, de même que les cinquanteniers & dizainiers, dès qu'un crime est commis, & qu'il est venu à leur connoissance, d'en avertir le commissaire du quartier. La Mare, traité de la police, tome I. pag. 224.

En tems de peste ils doivent veiller pour empêcher les progrès de la contagion ; le réglement fait le 13 Septembre 1533 par la chambre ordonnée par le roi François I. au tems des vacations, concernant la police de la ville & fauxbourgs de Paris, pour obvier aux dangers de la peste, art. 18. enjoint aux quarteniers, dizainiers & cinquanteniers de donner aux commissaires renfort & aide, & de les avertir des transgressions & fautes qui viendront à leur connoissance ; afin que les quarteniers & autres soient plus enclins à faire les dénonciations, la chambre ordonne qu'ils auront le tiers des amendes qui pour ce seront adjugées.

L'article 33 du même réglement enjoint par provision à tous ceux qui connoîtront quelqu'un entaché ou soupçonné de peste, de le révéler incontinent au quartenier, cinquantenier ou dizainier, sans aucune personne excuser ni exempter, fussent-ce mari, femme, serviteurs, maîtres ou maîtresses, pour en avertir le commissaire du quartier, pour y pourvoir selon l'ordonnance, auxquels la chambre enjoint d'y pourvoir incontinent & sans délai, sur peine de privation de leurs offices & amende arbitraire.

Suivant une ordonnance de François I. du mois de Novembre 1539, pour tenir la ville de Paris nette & bien pavée, il est enjoint aux quarteniers, dizainiers & cinquanteniers de répondre de ceux de leur quartier qui auront fait quelque contravention au contenu de ce réglement, à peine de suspension de leurs fonctions pendant un an pour la premiere fois, & pendant trois ans pour la seconde, & pour la troisieme d'être privés & déclarés inhabiles de tous autres états & offices.

Il est encore enjoint expressément aux quarteniers, par cette ordonnance, de donner avis au commissaire du quartier des maisons qui n'ont point de fosses ou retraits, & de veiller que personne ne nourrisse aucuns cochons, oisons, lapins, pigeons & autres volailles.

Enfin la même ordonnance enjoint très-étroitement aux commissaires de faire observer ce réglement en général, & aux quarteniers, dizainiers & cinquanteniers d'y vaquer & entendre, & de donner confort & aide aux commissaires, de leur révéler les transgressions & fautes ; & afin de rendre ces officiers plus soigneux, le roi leur a accordé le quart des amendes qui seront adjugées.

Dans les tems de trouble, & lorsqu'il y a dans la ville des personnes suspectes, ils doivent concourir avec les commissaires à faire les recherches nécessaires ; c'est ainsi que par arrêt du parlement du 6 Septembre 1567, c'étoit le tems des troubles causés par les religionnaires, la cour enjoignit aux commissaires du châtelet, quarteniers, dizainiers & cinquanteniers de Paris de faire les recherches accoutumées, ordonnées, & d'y procéder en toute diligence, donnant aide & confort les uns aux autres, selon l'exigence des cas, & que la nécessité le requiereroit.

Lorsque la capitation fut établie pour la premiere fois en 1695, il fut ordonné par un arrêt du conseil du 22 Février de ladite année, que les propriétaires qui habitoient leurs maisons à Paris, ou les principaux locataires, donneroient aux quarteniers qui en feroient la visite, une déclaration de toutes les personnes qui habitoient dans lesdites maisons, de leur état & qualité, à peine de répondre de la taxe des personnes omises, & du double de la taxe à laquelle ils seroient sujets contre ceux qui déguiseroient leurs qualités.

Par des lettres-patentes du 23 Mars suivant, données sur un arrêt du conseil du 12 du même mois, il fut ordonné que les quarteniers de la ville de Paris feroient chacun dans l'étendue de son quartier la recette, & recouvrement en détail des taxes de la capitation générale faite sur les bourgeois & autres habitans de ladite ville, ils furent dispensés par ces mêmes lettres de donner caution & de compter à la chambre des comptes, il fut seulement ordonné qu'ils compteroient au bureau de la ville ; mais la capitation ayant été supprimée après la paix de Riswick, & ensuite remise par l'édit du 12 Mars 1701, les quarteniers n'ont plus été chargés de la recette.

Le roi ayant par déclaration du 3 Décembre 1743, ordonné le rachat de la taxe des boues & lanternes, les quarteniers furent appellés avec les commissaires pour donner leur avis sur l'imposition de la taxe ou rachat sur chaque maison ; & à cette occasion ils assemblerent chacun dans leur hôtel les principaux propriétaires des maisons de leur quartier, pour entendre leurs observations sur la répartition de la taxe sur chaque maison.

Enfin les conseillers de ville assistent au nombre de quatre, & les quarteniers au nombre de deux, aux assemblées qui se font pour le tirage des loteries royales. C'est ainsi que cela fut réglé par un arrêt du conseil d'état du 6 Décembre 1718, à l'occasion de la loterie qui avoit été établie en 1717, pour le remboursement des billets de l'état, le roi ayant ordonné que cette loterie seroit tirée chaque mois en présence du prevôt des marchands & échevins, & de six conseillers de ville, sans aucune désignation précise des quarteniers, sa majesté déclara que son intention n'avoit point été de les exclure de ces assemblées ; & pour ne pas diminuer leurs droits, sans néanmoins augmenter le nombre des personnes en présence desquelles la loterie devoit se tirer, le roi ordonna qu'au lieu de six conseillers de ville, il n'y en auroit que quatre, & qu'il y auroit deux quarteniers, ce qui a depuis toujours été observé de même au tirage des autres loteries royales.

Les quarteniers jouissent encore de plusieurs autres droits, privileges, franchises & exemptions, ils ont entr'autres droits celui de committimus, aux requêtes de l'hôtel & du palais à Paris, suivant un arrêt du conseil du 19 Février 1688, & lettres-patentes sur icelui.

Ils ont aussi droit de franc-salé.

Ils sont exempts du logement des gens de guerre, suivant une déclaration du 15 Mars 1655, qui leur accorde cette exemption dans leurs maisons sises tant dans la ville & fauxbourgs de Paris, que dans toute l'étendue du royaume.

Enfin ils participent en général à tous les droits & exemptions qui ont été accordés au corps des officiers de la ville de Paris.

In dépendamment des différens édits, déclarations, lettres-patentes & arrêts qui ont confirmé les privileges de tous les officiers qui composent le corps-de-ville en général, les privileges des quarteniers ont été confirmés en particulier par un édit du mois de Janvier 1505, par des lettres-patentes du mois de Mai 1567, par d'autres lettres du mois de Juillet 1607, & encore d'autres lettres du mois de Février 1618, une déclaration du 15 Janvier 1655, un édit du mois de Mars 1669, un arrêt du conseil du 10 Juillet 1707.

Il faut encore remarquer que les quarteniers ont la nomination de trois lits à l'hôtel-Dieu de Paris, comme il résulte de trois délibérations du bureau de cet hôtel-Dieu, en date des 9 Juin 1708, 3 Juillet 1726, & 3 Juin 1747, par lesquelles, en considération de ce que M. le prevôt des marchands & échevins ont donné & concédé audit hôtel-Dieu 2 pouces d'eau, & aussi de ce que les conseillers de ville & quarteniers ont remis en faveur des pauvres, les droits qui leur étoient dûs pour cette concession, le bureau de l'hôtel-Dieu leur a accordé neuf lits à perpétuité dans les salles de l'hôtel-Dieu, pour coucher un malade seul dans chaque lit, la nomination de trois desquels appartiendra à MM. du bureau de la ville, trois autres à la compagnie des conseillers de ville, & les trois autres à celle des quarteniers, à condition qu'ils nommeront des malades de la qualité requise à l'hôtel-Dieu.

Sur ce qui concerne les quarteniers, on peut encore voir Bacquet, Papon, Bouchel, la Mare, Sauval, le recueil des ordonnances de la ville. (A)


QUARTERS. m. (Mesure angloise) c'est une mesure pour les grains, dont on se sert dans quelques lieux d'Angleterre, & particulierement à Newcastle. Il faut 10 quarters pour faire le last, & 10 gallons pour le quarter, le gallon pese depuis 56 jusqu'à 62 livres. (D.J.)

QUARTER, terme d'escrime. V. ESTOCADE DE VOLTE.


QUARTERONS. m. terme de Négoce, c'est un compte qui fait le quart d'un cent.

Il y a beaucoup d'endroits en France, particulierement à Paris, où le quarteron de harengs, de coterets, de fagots, de foin, d'aiguilles & d'autres marchandises, est composé de vingt-six, savoir vingt-cinq qui est le quart du cent, & un qu'on donne pardessus. Il est de même du demi-quarteron. Savary.

QUARTERON, s. m. (Poids) c'est le quart d'une livre ; le quarteron poids de marc est de quatre onces, & le demi-quarteron de deux onces, qui est la huitieme partie d'une livre.

QUARTERON D'OR, terme de Batteur d'or, c'est un petit livre de papier quarré, qui contient vingt-cinq feuilles d'or ou d'argent battu. Il y a des quarterons de trois pouces en quarré qui se nomment petite-mesure, & des quarterons de quatre pouces aussi en quarré, qui s'appellent grande-mesure. (D.J.)

QUARTERON, en terme d'Epinglier, est une plaque de fer garnie à son extrêmité inférieure, de maniere de dents de la longueur environ d'une ligne, au nombre de vingt-cinq. Sa partie supérieure est arrondie, il en sort vers le milieu un manche ou poignée de même matiere sur laquelle le marteau frappe. Il y a des quarterons dont les dents sont séparées par un intervalle qui en laisse douze d'un côté, & treize de l'autre, & d'autres qui n'ont aucune séparation. Il y a apparence que cet outil se nomme du nombre des trous qu'il fait sur le papier d'un seul coup. Voyez la fig. Pl. de l'Epinglier, qui représente la maniere de percer le papier avec un quarteron.


QUARTERONNÉadj. (Gramm.) nom qui est donné au Pérou à un enfant né d'un espagnol & d'une métice ou mulâtre. Les quarteronnés sont petit-fils d'un espagnol & d'une indienne du Pérou ou d'une négresse.


QUARTIENSS. m. (Hist. mod.) nom d'une milice de Pologne & de Lithuanie, destinée à la garde des frontieres, & à empêcher les incursions des Tartares.


QUARTIEou QUART, s. m. (Gram.) est la quatrieme partie d'un tout. Voyez QUART.

QUARTIER de l'année est l'espace de trois mois. En ce sens il est mieux de dire trimestre.

Quartier se dit aussi du quart d'un payement annuel : ainsi on dit un quartier de pension, un quartier de rente ou simplement un quartier.

QUARTIER, en terme d'Astronomie, se dit du changement qu'éprouve la lune au bout de sept à huit jours. On appelle aussi ce changement quadrature. Voyez LUNE & QUADRATURE.

A proprement parler, le premier quartier commence à la nouvelle lune, & finit lorsqu'elle entre en quadrature, c'est-à-dire lorsqu'elle est éloignée du soleil de la valeur d'un quart de cercle, ou de trois signes du zodiaque ; & qu'elle est, par exemple, dans le bélier, le soleil étant dans le capricorne ; en ce cas on ne voit que la moitié précisément de sa face éclairée.

Le second quartier se compte depuis le moment qu'elle est entrée en quadrature jusqu'à la pleine lune, &c. Voyez QUADRATURE. (O)

QUARTIER ANGLOIS, instrument fort en usage sur mer ; ainsi appellé, parce qu'il a été inventé par un capitaine anglois, nommé Davis.

Cet instrument sert à prendre la hauteur du soleil, il consiste en deux arcs F G, E D, le premier de 30 degrés, & l'autre de 60, & en trois marteaux A, B, C, voyez Planche de Navigation, fig. 6. Les deux arcs sont graduez de la maniere suivante : sur l'arc E D le point de O est en D, & on compte de ce point jusqu'à la ligne A G où sont marqués les 60 degrés ; sur l'arc F G, on compte en sens contraire le point de O étant en F, & les 30 degrés étant marqués sur la même ligne A G. Le marteau A, par lequel on observe l'horison, est fendu dans sa longueur d'une pinule fort étroite de 6 ou 7 lignes de long. Le marteau C n'a qu'un petit trou pour y appliquer l'oeil ; le troisieme B n'est point percé : ces trois marteaux doivent être perpendiculaires au plan de l'instrument, & les deux B & C avoir des entailles pour entrer sur les arcs F G, E D, qui sont d'égale épaisseur par-tout, afin que les marteaux soient fermes dans quelque endroit qu'on les mette. Le marteau A, au lieu d'une entaille, a un trou quarré pour entrer sur la tringle G A jusqu'au centre A.

Pour faire usage de cet instrument, on met le marteau B sur l'arc 60 à un degré pair de latitude, moindre de 10 ou de 15 degrés que le complément de la hauteur qu'on juge que doit avoir le soleil : ensuite on met le marteau A au centre A, & le marteau C sur l'arc F G ; alors tournant le dos au soleil, on éleve l'instrument & on regarde à-travers la pinule de vue, C élevant ou abaissant l'instrument jusqu'à-ce que l'ombre du tranchant supérieur du marteau d'ombre B tombe fur le tranchant supérieur de la fente qui est au marteau A ; que si regardant toujours par la pinule C, on voit l'horison à-travers cette fente, l'observation est bien faite ; que si au contraire on voit la mer ou le ciel, il faut baisser le marteau C vers F, ou le hausser vers G jusqu'à-ce qu'enfin le rayon visuel qui va de la pinule C à la fente du marteau A soit tangent à l'horison. Ensuite on observe sur l'arc de 30 degrés combien il y a de degrés & de minutes de puis le point de O jusqu'à l'endroit marqué par la perpendiculaire abaissée sur cet arc du centre du trou de la pinule de vue, & on ajoute à ces degrés ceux qui sont de même contenus sur l'arc de 60 degrés, depuis l'O jusqu'au point marqué par le tranchant supérieur du marteau B. Si on avoit fait l'observation par le tranchant inférieur du marteau d'ombre, il faudroit compter depuis l'O jusqu'au point marqué par ce tranchant, la somme de ces degrés sera la distance du soleil au zenith ou le complément de sa hauteur sur l'horison. Si on veut trouver la hauteur méridienne, ou la plus grande hauteur du soleil, on continue l'observation tant que cette hauteur paroît augmenter, ce qu'on connoît facilement par la nécessité où l'on est de baisser la pinule de vue pour voir la mer ; car au même instant que le soleil a passé par le méridien, on est obligé au contraire de la hausser, ce qui marque qu'alors l'angle qu'il fait avec l'horison est diminué, & par conséquent qu'il est au-delà du méridien. On s'arrêtera donc à la derniere des observations qui a précédé l'instant où sa hauteur a paru diminuer, & ajoutant les degrés & les minutes observés sur les deux arcs, comme nous l'avons dit plus haut, on aura le complément de la hauteur méridienne du soleil.

Comme cette maniere d'observer ne donne que la distance du limbe supérieur ou inférieur du soleil au zénith, & non la distance de son centre, il faut, quand on observe par le tranchant supérieur du marteau B, ajouter à l'angle trouvé par l'observation 16 minutes pour le demi-diamêtre du soleil, ce qui donnera la vraie distance du centre du soleil au zénith. Et quand au contraire on observe par la partie inférieure du marteau B, il faut retrancher ces 16 minutes pour avoir la hauteur du soleil ; mais si on considere que la hauteur de l'observateur au-dessus de la surface de la mer est communément de 16 à 20 piés ; on verra qu'au lieu de retrancher 16 minutes, il faudra dans ce dernier cas en retrancher 20, & au contraire dans le premier n'en ajouter que 12, on en trouvera la raison à la fin de l'article.

On a fait en différens tems des changemens & des corrections à cet instrument : quelques-uns, par exemple, ont placé un petit miroir sur le marteau A, pour que l'ombre se vît avec plus de netteté ; d'autres ont percé le marteau B & y ont placé une lentille, afin que le soleil formant un petit point lumineux sur ce même marteau A, on puisse observer avec plus de précision, sur-tout lorsque le soleil est couvert de quelques nuages, ou qu'il y a de la brune ; car en observant en pareil tems, à la maniere ordinaire, l'ombre du marteau B sur le marteau A devient très-mal terminée, ce qui diminue beaucoup de la justesse de l'observation. Mais, sans parler des inconvéniens auxquels ces changemens pourroient être sujets, je dirai seulement qu'il est inutile de s'attacher à perfectionner un instrument qui ne pourra jamais être bien parfait, tandis qu'on en a un si excellent, je veux dire l'instrument de M. Hadley. Voy. instrument de M. Hadley. Au reste, comme le quartier anglois est le meilleur de ceux dont on se servoit avant l'invention de ce dernier, on peut encore en faire usage dans bien des cas où une grande précision n'est pas absolument nécessaire.

Il est comme inutile de dire que cet instrument peut servir aussi pour prendre la distance entre deux astres, comme la lune & une étoile, ou entre deux étoiles, &c.

On a dit plus haut que l'observateur étant élevé au-dessus de la surface de la mer de 15 ou 20 piés, il falloit retrancher 4 ou 5 minutes de la distance du soleil au zénith, ou au contraire en ajouter autant à son élévation sur l'horison : ceci paroîtra clair, si l'on fait attention à la maniere dont on observe la hauteur du soleil avec cet instrument. On a vu que l'observateur ayant le dos tourné au soleil il vise à-travers des deux pinnules à l'horison, & qu'ensuite il prend l'angle que fait au centre de l'instrument le rayon du soleil avec ce rayon visuel ; mais cet angle n'est pas le véritable angle de sa hauteur, puisque le rayon visuel tangent à l'horison ne l'est pas dans le lieu où se fait l'observation, & qu'il n'est tangent qu'à une certaine distance : or, comme l'observateur se trouve entre ce point & le soleil, pour peu qu'on y réfléchisse, on verra que cet angle sera plus petit que l'angle réel de la hauteur du soleil sur l'horison ; il faudra donc ajouter quelque chose à cet angle, pour avoir l'angle véritable de la hauteur du soleil sur l'horison, ou en retrancher pour avoir sa véritable distance au zénith. Pour cet effet on a calculé des tables, où, en supposant l'observateur élevé d'un certain nombre de piés au-dessus de l'horison, on a trouvé, comme on le voit dans une table, ce qu'il faut ajouter ou retrancher de la hauteur du soleil trouvée par l'observation.

Il est clair que lorsqu'on observe avec l'arbalestrille par-devant, il arrive directement le contraire de ce qu'il arrive en se servant du quartier anglois, & que par conséquent il faut retrancher de la hauteur du soleil au-dessus de l'horison trouvée par l'observation, ce que l'on auroit ajouté en se servant du quartier anglois. (T)

QUARTIER DE DAVIS. V. QUARTIER ANGLOIS.

QUARTIER DE REDUCTION, (Marine) c'est un instrument qui représente le quart de l'horison avec lequel on résout les problèmes du pilotage par les triangles semblables. (Pour l'intelligence de ceci, voyez PILOTAGE). Pour le construire on forme un quarré A B C D (Pl. XXI. fig. 1.), qu'on divise en plusieurs petits quarrés par des lignes ab, cd, &c. paralleles au côté A B, & les lignes e f, g h, &c. paralleles au côté A C. Les premieres représentent des méridiens, & on les appelle lignes nord & sud ; & les autres ef, gh, représentent des paralleles à l'équateur, & on les nomme lignes est-ouest. Ayant décrit du centre B un arc ib, on le divise en huit parties égales ; on mene par ces points de division les lignes B a, B c, &c. qui représentent huit rumbs de vents, & on divise ces huit rumbs ou airs de vent en plusieurs parties égales à celles des lignes A B, B D, par un grand nombre de quarts de cercle concentriques, ib, gd, &c. L'un de ces arcs de cercle est divisé en degrés ; & par le moyen d'un fil attaché au centre B, ce cercle sert à diviser les autres proportionnellement.

Telle est la construction du quartier de réduction dont on se sert pour résoudre les problèmes du pilotage.

Ces problèmes consistent dans la solution d'un triangle rectangle, dont on connoît trois choses. Voy. PILOTAGE. Or ces trois choses sont ici, ou la latitude, ou la longitude, ou le chemin qu'on a fait, ou l'air de vent qu'on a suivi.

Le chemin est évalué en lieues, qu'on réduit en degrés, en les divisant par 20, parce que 20 lieues valent un degré. Mais avant que de faire cette réduction, il faut réduire les lieues mineures en lieues majeures, ou les lieues faites sur un parallele, en lieues de l'équateur ; & le quartier de réduction est très-utile à cette fin.

Réduire les lieues mineures en lieues majeures. 1°. Tenez le fil sur le degré de la latitude proposée ou moyenne (voyez MOYENNE PARALLELE) en comptant cette latitude sur le quart de cercle gradué, depuis la ligne est-ouest B D, en montant vers la ligne nord-sud B A. Pl. XXI. fig. 1.

2°. Comptez sur la ligne est-ouest les lieues mineures.

Observez le méridien ou la ligne nord-sud, qui passe par le point où les lieues mineures se terminent, & en quel point cette ligne coupe le fil.

La longueur du fil, depuis le centre jusqu'à ce point de rencontre, déterminera le nombre de lieues majeures par le nombre des arcs de cercle.

Cette opération est fondée sur ce raisonnement. Le quart de cercle qui passe par le point où se terminent les lieues mineures, représente le quart du méridien, & le point par lequel on commence à compter les degrés de latitude du côté de la ligne nord-sud, représente le pole de la terre. Cela étant, la ligne est-ouest, comprise depuis le centre B, jusqu'audit quart de cercle, sera un rayon de l'équateur, & le méridien qui passe par le point où les lieues mineures se terminent, sera le rayon du parallele proposé ou moyen. Mais les lieues majeures sont proportionnelles au rayon de l'équateur, & les lieues mineures d'un parallele sont proportionnelles au rayon de ce parallele : donc les degrés de ce parallele seront proportionnels au degré de l'équateur ; c'est-à-dire, que si le rayon de ce parallele est la moitié, le tiers ou le quart, &c. du rayon de l'équateur, les degrés de ce parallele seront chacun la moitié, le tiers ou le quart d'un degré de l'équateur.

De-là il suit que pour réduire les lieues majeures en lieues mineures, il faut tendre le fil suivant la latitude proposée, & compter sur ce fil le nombre des lieues majeures. Le méridien qui passe par le point qui termine ce nombre, marque sur la ligne est-ouest le nombre des lieues mineures.

Au reste, en comptant les lieues majeures ou les lieues mineures, on fait valoir chaque intervalle des arcs pour les lieues majeures, ou chaque division de la ligne est-ouest, un certain nombre de lieues, comme 4, 6, 10, &c.

Sans entrer dans le détail de tous les problèmes du pilotage qu'on peut résoudre par le quartier de réduction qu'on trouvera dans le traité complet de navigation de M. Bouguer, & dans la pratique du pilotage du pere Pezenas ; il suffit ici de faire connoître que les problèmes de cet art consistent dans la résolution d'un triangle rectangle. Or il y a deux façons de parvenir à cette résolution. La premiere consiste en un calcul de trigonométrie, & la seconde en des triangles semblables. Cette seconde façon est employée par le quartier de réduction.

On forme sur cet instrument des triangles semblables à ceux qui sont l'objet des questions à résoudre ; & comme les triangles semblables ont leurs côtés proportionnels, ceux qu'on forme sur le quartier de réduction étant résolus ; les autres le sont aussi, en ayant égard à leur proportion. Un exemple rendra ceci très-intelligible.

Connoissant la différence en latitude du lieu du départ à celui de l'arrivée, & le rumb de vent qu'on a suivi, on demande la longitude du lieu où l'on est. On a ici le côté V A d'un triangle rectangle (Pl. XXI. fig. 5.) l'hypotenuse de ce triangle ou le côté VB, & l'angle A V B, qui est celui qui fait le vent, avec la ligne nord-sud, représentée par la ligne V A, laquelle représente elle-même un méridien, qui sont connus, & il s'agit de connoître le côté V A B.

Pour résoudre ce problème par le quartier de réduction, on forme ce triangle sur cet instrument de cette maniere. On réduit les degrés de la différence en latitude en lieues, en les multipliant par 20, & on compte ces lieues sur la ligne nord-sud de l'instrument. En faisant valoir, s'il le faut, chaque division de cette ligne ou petit quarré 1, 5, 10, ou 20 lieues, selon que cette différence en latitude est plus ou moins grande, ou que ces lieues sont en plus grand nombre. On tend ensuite le fil sur le degré du quart de cercle gradué qui forme, avec la ligne nord-sud, un angle égal à celui de l'air ou rumb de vent ; on remarque le point auquel la ligne ou le parallele à la ligne est-ouest du quartier comme le fil, & le triangle est formé. Il ne reste plus qu'à compter les intervalles ou les divisions de ce parallele, comprise entre la ligne nord-sud & le rumb de vent, & à faire valoir les divisions comme celles de la ligne nord-sud pour avoir les lieues en longitude, qu'on réduit en degrés, en les divisant par 20.

On peut connoître en même tems le chemin qu'on a fait en comptant le nombre des arcs de cercle compris depuis le centre, jusqu'au point où la parallele coupe le fil, & en supposant que chaque arc vaut le même nombre de lieues que les divisions des autres côtés du triangle. C'est toujours la même chose pour les autres problêmes du pilotage, soit qu'on cherche la latitude, le rumb de vent, & le chemin qu'on a fait étant connus, ou toute autre condition du problême étant donnée.

M. Blondel a fait un traité particulier sur le quartier de réduction & ses différens usages. On peut y avoir recours si l'on veut entrer dans un plus grand détail.

QUARTIER SPHERIQUE, (Marine) c'est un instrument qui représente le quart d'un astrolabe ou d'un méridien, avec lequel on résoud méchaniquement quelques problêmes d'astronomie, qui sont nécessaires dans l'art du pilotage ; comme trouver le lieu du soleil, son ascension droite, son amplitude, sa déclinaison, l'heure de son lever & de son coucher, son azimut, &c. Voyez Pl. XXI. Marine, fig. 2. un quartier sphérique. A l'égard de la construction & de l'usage de cet instrument, comme ce n'est point ici une invention nécessaire absolument pour les pilotes, il suffit pour satisfaire ceux qui voudront la connoître & en faire usage, de les renvoyer à la pratique du pilotage du pere Pezenas, seconde partie, ch. j. p. 73. in-12. à Avignon 1741.

QUARTIER ou VENT DE QUARTIER. V. LARGUE.

QUARTIER-MAITRE, (Marine) c'est un officier de marine, qui est l'aide du maître & du contre-maître. Ses fonctions sont de faire monter les gens de l'équipage au quart, de faire prendre & larguer les ris des voiles, d'avoir l'oeil sur le service des pompes, d'avoir soin que le vaisseau soit net, & de veiller à ce que les matelots font pour les faire travailler. Les Hollandois appellent cet officier esquiman.

QUARTIER se dit, dans l'Art milit. d'un lieu occupé par un corps de troupes pour y camper ou loger soit en campagne, dans un siege ou dans les places.

Il y a des quartiers de plusieurs especes ; savoir, le quartier du roi ou quartier général dans un siege & en campagne ; les quartiers de cantonnement, de fourrage ; les quartiers d'hiver, & les quartiers des troupes dans les places.

Le QUARTIER DU ROI ou le QUARTIER GENERAL est celui où loge le roi ou le général qui commande l'armée.

Le lieu choisi pour le quartier du roi ou le quartier général donne le nom au camp. Il doit être, autant qu'il est possible, à la queue du camp vers le centre ou entre les deux lignes, de maniere que l'ennemi ne puisse ni le canonner, ni l'insulter. Ce sont ces deux objets qui doivent en déterminer le choix, & non point la commodité & le nombre des logemens qui peuvent s'y trouver.

Outre le quartier général, où sont logés les principaux officiers qui composent l'état major de l'armée, il y a encore celui de la droite & celui de la gauche, qui sont occupés par les officiers-généraux qui ont leur poste à ces deux parties de l'armée. Ces différens quartiers doivent être à couvert de toutes les entreprises de l'ennemi. On les choisit pour cet effet entre les lignes, ou immédiatement derriere. On se sert des villages les plus à portée. S'ils se trouvent exposés à être enlevés, on les couvre par des corps de troupes qui les mettent à l'abri de toute surprise. Malgré cette précaution, il faut convenir que les généraux n'y sont pas toujours aussi en sureté qu'ils le seroient étant campés entre les lignes ; d'ailleurs leur garde est encore un surcroit de fatigue pour les troupes de l'armée.

Les généraux grecs & romains, c'est-à-dire nos maîtres dans l'art militaire, ont toujours campé au milieu de leurs troupes, comme ceux des Turcs le font encore aujourd'hui. Les princes d'Orange, ces fameux restaurateurs de la discipline militaire en Europe, ne campoient pas autrement. Tous les généraux devroient en user ainsi pour n'être jamais séparés des troupes qui sont sous leurs ordres. C'étoit là le sentiment de M. le marquis de Santa-Cruz. Il dit, dans ses réflexions militaires, que les officiers généraux devroient camper à la queue de leurs troupes, & qu'il ne devroit point leur être permis de choisir un logement plus commode à une plus grande distance ; autrement, ajoute-t-il, si l'ennemi venoit fondre à l'improviste sur une partie de l'armée, le combat seroit fini avant que les généraux fussent arrivés pour commander. Il en apporte un exemple arrivé de son tems au camp de la Garde. Cet événement, auquel on ne seroit point exposé, si les géneraux campoient à la queue des troupes, pourroit arriver assez souvent, si l'on avoit en tête des généraux entreprenans, & savans dans l'art de ruser & de surprendre.

Lorsqu'il se trouve des villages dans l'intervalle des lignes, c'est dans ce cas que les généraux peuvent s'y loger sans inconvénient. Il est vraisemblable que l'occasion s'étant présenté plusieurs fois de les loger ainsi, les commodités qu'on a trouvées dans ces logemens, en ont insensiblement établi l'usage : mais comme on ne doit pas chercher les mêmes aisances à la guerre que dans le séjour des villes, il paroît qu'on devroit sacrifier sans peine l'agrément de loger dans des maisons, aux avantages qui en résulteroient pour le service, de camper, comme le font toutes les troupes & les officiers particuliers. (a)

On ne peut douter qu'un des principaux devoirs des généraux ne soit de donner l'exemple aux troupes de toutes les fatigues militaires. Telle étoit au-moins la pratique des anciens. Ils n'exigeoient rien du soldat qu'ils ne le fissent eux-mêmes. Ils étoient bien aises qu'il vît que leur nourriture étoit souvent aussi frugale que la sienne ; qu'ils couchoient également sur la dure, exposés de même aux intempéries de l'air & des saisons. Rien n'étoit plus propre à l'encourager, à lui faire souffrir patiemment la faim, la soif, les travaux pénibles du camp, & la longueur des marches dans les chemins difficiles. Pour se mettre en état de soutenir cette vie dure ou militaire, les anciens s'appliquoient, dans le sein même de la paix, à rendre leurs corps forts & robustes par les exercices les plus fatigans. Il arrivoit de-là que la guerre les trouvoit préparés à soutenir les veilles, & les travaux qui en sont inséparables, sans que leur corps en souffrît presqu'aucune impression. Voyez EXERCICE.

Les quartiers de cantonnemens ne sont autre chose que les différens lieux, comme petites villes, bourgs & villages, à portée les uns des autres, dans lesquels on partage l'armée ; on en use ainsi pour la faire subsister plus facilement, & la mettre à l'abri des rigueurs du froid, soit au commencement d'une campagne en attendant que la terre puisse fournir du fourrage, soit à la fin, pour garantir les troupes de l'intempérie de la saison, lorsqu'on a affaire à un ennemi qui se tient assemblé sans prendre ses quartiers.

Les quartiers de fourrage sont des especes de quartiers de cantonnement, où l'on met les troupes lorsqu'elles ne peuvent pas subsister ensemble au commencement ou à la fin de la campagne, à cause de la disette de fourrage.

Les quartiers d'hiver sont les lieux différens qu'une armée occupe pendant l'hiver, où les troupes doivent trouver le repos, les commodités & les subsistances nécessaires pour se rétablir des fatigues de la campagne, & se mettre en état d'en recommencer une nouvelle.

(a) Les officiers généraux dans les armées du roi de Prusse ne sont point logés dans les maisons à moins qu'ils ne soient incommodés. Le camp du roi est au centre entre les deux lignes. Là campent aussi les officiers de l'état-major de l'armée. Les felds-maréchaux & les généraux soit d'infanterie ou de cavalerie, campent selon l'ordre qu'ils ont dans l'ordre de bataille ; mais les lieutenans & les majors-généraux campent derriere leurs brigades.

Enfin les quartiers des troupes dans les places sont celles qui leur sont assignées pour garnison. Voyez GARNISON.

Lorsque les armées sont nombreuses, on est obligé pour la commodité des subsistances de les séparer en plusieurs parties quand la saison devient fâcheuse, & de les établir en différens lieux qui forment autant de quartiers. Ils doivent être disposés de maniere qu'ils mettent le pays en sûreté & qu'ils se soutiennent réciproquement.

Chaque général d'armée fait ensorte d'être le dernier à prendre ses quartiers, parce que celui qui tient plus long-tems la campagne peut trouver l'occasion de tenter quelqu'entreprise sur son ennemi. On peut encore différer de prendre ses quartiers par une autre considération ; c'est lorsque les troupes qu'on commande sont plus propres à soutenir les rigueurs & les incommodités de la saison que celles de l'ennemi. En l'obligeant de tenir son armée ensemble, malgré l'intempérie du tems, on lui fait perdre beaucoup de monde par les maladies qui en résultent, tandis que les soldats qu'on a sous ses ordres étant plus robustes & plus accoutumés à souffrir les injures de l'air, ne s'en ressentent presque point.

Lorsque de part & d'autre les troupes sont nées à peu près sous le même climat, comme dans ce cas elles souffriroient également du froid, on prend ordinairement des deux côtés, vers la fin du mois d'Octobre, ou lorsque les fourrages commencent à manquer, le parti de se retirer pour prendre chacun ses quartiers.

L'armée devant trouver dans les quartiers le repos dont elle a besoin, on les choisit de maniere que les troupes ne soient point obligées d'être toujours sous les armes pour se garantir des entreprises de l'ennemi ; il faut d'ailleurs qu'ils soient assez sûrs pour qu'une petite partie des troupes suffise pour les garder, & qu'ils couvrent le pays que l'on veut conserver.

Une bonne disposition à cet égard demande beaucoup d'intelligence & de connoissances dans celui qui la dirige ; il faut qu'il soit parfaitement instruit de tout ce qui concerne le pays ; qu'il ait égard aux circonstances dans lesquelles l'armée peut se trouver ; qu'il ait attention au plus ou moins d'affection des habitans, aux forces de l'ennemi, au caractere du général qu'il a en tête, à la nature de ses troupes, & enfin qu'il juge de tous les événemens qui peuvent arriver pour tâcher de les prévenir par la sagesse de ses dispositions. On ne peut sur ce sujet donner que des regles très-générales ; mais le génie & la science de la guerre doivent y suppléer. Voici celles que prescrit Montécuculli.

Il faut, selon ce célebre général, fortifier un camp pour tenir les troupes en sûreté auprès de quelque grande ville marchande ou de quelque riviere, afin de couvrir le pays ; ou bien il faut, & c'est l'usage le plus ordinaire, les distribuer par grosses troupes dans les lieux serrés & voisins, afin que les quartiers puissent se soutenir les uns les autres.

On doit encore, ajoute ce grand capitaine, couvrir le voisinage des quartiers par des forts, des rivieres, des montagnes, des passages où l'on met des gardes de cavalerie, tant pour avertir quand l'ennemi vient, que pour empêcher qu'il ne puisse faire des courses avec de petits partis, ou pour lui couper les vivres derriere & harceler son arriere-garde s'il entreprenoit de passer en grand corps. Il faut aussi serrer les vivres des environs dans des lieux fermés.

L'évidence de ces principes est manifeste. Ce sont à peu près les mêmes que ceux que M. le maréchal de Puysegur donne dans son livre de l'art de la guerre. Il y ajoute seulement, 1°. qu'il faut choisir un lieu dont l'assiette puisse être avantageuse pour le champ de bataille où les troupes doivent se rendre au premier signal.

Et 2°. que ce champ de bataille soit placé de maniere que toutes les troupes puissent s'y rendre longtems avant l'ennemi. Il s'agit pour cet effet de calculer le tems nécessaire aux troupes des quartiers les plus éloignés, & d'examiner s'il est plus court que celui que l'ennemi doit employer pour s'y transporter ; joignant à cette attention des patrouilles ou de petits partis qui rodent continuellement du côté de l'ennemi pour éclairer ses démarches, beaucoup d'exactitude dans le service, & surtout des espions sûrs & fideles, on se met par-là à l'abri des surprises.

Les quartiers peuvent être pris dans le pays ennemi ou sur la frontiere de celui dont on est maître, & dans les provinces voisines. Leur disposition dans le premier cas exige encore plus de précautions que dans le second.

Il est essentiel d'avoir vers le centre des quartiers une espece de place forte capable de protéger, comme le dit Montecuculli, le champ de bataille, & de donner même une retraite aux troupes dans la circonstance d'un événement malheureux. Cette place doit renfermer les principaux magasins de l'armée & les gros équipages de l'artillerie. Comme on ne trouve pas dans tous les pays des places en état de défense, le premier devoir du général qui regle les quartiers, est d'en former une de cette espece ; le travail nécessaire pour cet effet, n'est ni long ni dispendieux, on en donne une idée dans le troisieme volume des élémens de la guerre des sieges, seconde édition.

Une place quelque mauvaise qu'elle soit étant réparée avec quelques soins, peut braver les efforts de l'ennemi pendant un tems considérable, sur-tout dans la saison de l'hiver où le mauvais tems empêche le transport des grosses pieces de batterie, ou si la terre est gelée elle se refuse entierement aux travaux des approches. On dira peut-être qu'il y a des exemples de plusieurs places de cette nature qui ont été attaquées & prises pendant l'hiver ; mais nous répondrons à cela que si ceux qui étoient dans ces places avoient été vigilans & habiles dans la défense, l'événement auroit été vraisemblablement différent ; car ce ne sont ni les murailles, ni en général les fortifications qui défendent les places, mais les hommes qui sont dedans. Il faut joindre à la bonté des places le génie, l'intelligence & la bravoure de leurs défenseurs, sans quoi il y a peu de secours à attendre des meilleures fortifications.

Indépendamment de la place d'armes ou du lieu d'assemblée pour les quartiers en cas de besoin, il faut occuper & même mettre en état de défense tous les principaux en droits les plus près de l'ennemi, & tous ceux qui pourroient lui servir d'entrée pour pénétrer dans l'intérieur des quartiers : cet objet mérite toute l'attention des officiers qui ont le commandement de ces différens postes.

On n'est jamais surpris à la guerre que par sa faute, personne ne doute de cette vérité ; mais on croit souvent éluder le blâme qui en résulte, en prétendant qu'un officier sur lequel on se reposoit n'a point fait son devoir. Cette excuse paroît assez foible : car comme les chefs doivent connoître le mérite des officiers qui sont sous leur commandement, ils ne doivent jamais leur confier des emplois au-dessus de leur portée ; s'ils se trompent à cet égard, on ne peut s'en prendre qu'à leur peu de discernement, & par conséquent il est assez juste qu'ils partagent une partie de la faute qu'ils ont donné lieu de faire ; c'est le moyen de les empêcher de donner le commandement des postes importans à l'amitié ou à la sollicitation. Au reste un officier qui commande dans un poste qu'il est absolument essentiel de conserver, doit avoir ordre de s'y défendre jusqu'à la derniere extrêmité ; il ne doit capituler ou l'abandonner que sur des ordres formels & par écrit du général.

C'est en fortifiant ses quartiers que César sut mettre les siens en état de se soutenir contre l'ennemi dans les Gaules. On voit dans ses commentaires l. V. qu'après sa seconde expédition d'Angleterre, il fut, contre sa coutume ordinaire, contraint de les disperser en différentes provinces voisines pour la commodité des subsistances, à cause de la disette que la sécheresse avoit occasionnée dans le pays. Ils étoient renfermés dans une étendue d'environ trente-trois lieues & non point de vingt-cinq, comme le dit d'Ablancourt. César, pour veiller plus particulierement à leur sûreté, prit le parti de demeurer dans les Gaules jusqu'à-ce que les troupes fussent bien établies & bien fortifiées dans leurs quartiers. Celui de Sabinus & de Cotta ayant été battu & détruit par la ruse que les Gaulois employerent pour engager les troupes à en sortir, le quartier de Ciceron, frere de l'orateur, qui étoit en Hainaut fut attaqué par les Gaulois des environs ; mais la résistance qu'ils y trouverent donna le tems à César de venir au secours de ce quartier, ce qui obligea les Gaulois de se retirer.

Tel est l'effet qu'on doit se promettre des quartiers retranchés ou fortifiés ; ils donnent le tems au général de venir au secours de ceux qui sont attaqués, & de faire avorter le dessein de l'ennemi. C'est à la vérité un travail un peu fatigant pour les troupes qui ont alors besoin de repos ; mais elles en sont bien dédommagées par la sûreté & la tranquillité dont elles jouissent ensuite dans les quartiers.

Chaque quartier doit être composé de cavalerie & d'infanterie en nombre suffisant pour le défendre & relativement aux vivres que le pays peut fournir. La cavalerie sert à faire des courses pour étendre les contributions ; l'infanterie est particulierement destinée à la défense du quartier. Chacune de ces deux especes de troupes doit être plus ou moins nombreuse suivant la nature du pays ; c'est-à-dire qu'il est plus montueux ou uni, & plus ou moins abondant en fourrage.

On fait quelquefois des quartiers de cavalerie seulement, on en fait aussi qui n'ont que de l'infanterie. Dans ce cas les quartiers de cavalerie doivent être dans des lieux sûrs, qui soient, dit M. le marquis de Santa-Cruz, de défense par eux-mêmes, parceque la cavalerie n'est pas si bonne que l'infanterie pour défendre un poste fermé.

Une attention qu'on ne doit point négliger dans l'établissement des quartiers, c'est qu'il y ait entr'eux des communications sûres que l'ennemi ne puisse pas couper. Pour cet effet il faut garder & fortifier les gués & les ponts, s'emparer de tous les bacs qui servent au passage des rivieres, & convenir de différens signaux pour que les quartiers s'avertissent réciproquement de tout ce qui peut leur arriver & des secours dont ils peuvent avoir besoin.

Dans un pays ennemi qu'on ne peut pas présumer de garder, on s'attache à l'épuiser autant que l'on peut pour le mettre hors d'état de fournir des secours à l'armée opposée.

On regle la contribution que les peuples doivent payer relativement à la richesse & au commerce de chaque lieu ; on fixe les termes du payement, & l'on menace les habitans de les exécuter militairement s'ils n'y satisfont point. Lorsque cette menace ne produit rien & qu'on a des preuves que c'est par mauvaise volonté de leur part, on fait vendre les meubles & les bestiaux & l'on enleve tout ce que l'on peut. Ces moyens, il faut en convenir, répugnent extrêmement à l'humanité : il doit être bien dur aux ames sensibles & bienfaisantes d'y avoir recours ; mais tel est le malheur de la guerre, qu'on croit pouvoir en justifier toutes les horreurs par les avantages qu'on en retire pour soi-même, ou par le mal & le préjudice que l'on cause à l'ennemi.

On ne parlera point ici du détail de l'emploi des troupes dans les quartiers ; le génie, l'intelligence & la pratique de la guerre doivent suggérer tout ce qu'il convient de faire, selon les lieux & les circonstances, pour faire manquer tous les desseins de l'ennemi. Nous remarquerons seulement qu'un des principaux moyens d'y parvenir est de se procurer des espions de toute espece. Il faut en avoir parmi les troupes, parmi les habitans des lieux que l'ennemi occupe, & même parmi ceux à qui il donne sa confiance, ou qui peuvent être instruits de ses desseins. Il faut avoir l'adresse de les découvrir & de les intéresser. En prodiguant l'argent à-propos pour ce sujet, on ne doit jamais manquer d'espions. L'avidité du gain, ou l'envie de satisfaire quelquefois de prétendus mécontentemens particuliers, ne fournissent que trop de gens capables de sacrifier leur devoir & leur patrie pour se satisfaire. Il ne s'agit que d'employer un peu d'art pour les connoître, & pour se les attacher ; art que le maréchal de la Vielleville possédoit supérieurement. Il savoit discerner parmi les habitans des lieux que ses troupes occupoient, ceux qui pouvoient lui donner des lumieres sur la conduite de l'ennemi, il ne négligeoit rien pour se les attacher. On voit dans les mémoires de sa vie, qu'il devoit à ses espions le succès de la plûpart de ses entreprises, particulierement de celles qu'il fit pendant le siege de Metz, qui ne contribuerent pas peu à la levée de ce fameux siege.

Il seroit peut-être à-propos de dire un mot de ce qui concerne les attaques & les enlévemens de quartiers ; mais ce que nous avons dit des précautions qu'il faut prendre pour les mettre à couvert de ces sortes d'entreprises, suffit pour donner une idée des occasions dans lesquelles on peut les tenter ; c'est-à-dire lorsqu'ils ne sont point à portée de se soutenir réciproquement ; que leurs communications peuvent être coupées ; que les postes qu'ils occupent ne sont point en état de défense ; que le service s'y fait avec beaucoup de négligence ; & enfin lorsqu'ils sont commandés par des officiers inappliqués, qu'on peut se flatter de surprendre & de faire tomber dans les différens pieges qu'on aura l'adresse de leur tendre. Ceux qui voudront un détail plus circonstancié sur ce sujet, pourront avoir recours aux mémoires de M. le marquis de Feuquiere, tom. III. où il traite des surprises de postes & des enlévemens de quartiers.

Les quartiers dans un siege, sont les différens lieux qu'occupent les troupes campées dans les lignes, sous les ordres d'un officier général, subordonné néanmoins au général en chef. Telle étoit, au moins anciennement, la formation des quartiers dans le siege des places ; & telle est encore celle qu'on observe aujourd'hui dans les armées composées de troupes de différens princes, qui ont chacune leur général particulier. En France il n'y a point actuellement d'autre quartier dans un siege que celui du général. Mais on donne quelquefois le nom de quartier à un certain nombre de troupes qui occupent différentes parties des lignes. Ainsi on dit le quartier de la droite & de la gauche, du centre, &c. pour exprimer le lieu que les troupes occupent dans ces différentes parties de la ligne de circonvallation.

En donnant ainsi le nom de quartier aux différens terreins des troupes dans la circonvallation, ce qu'il y a de plus essentiel à observer à cet égard, c'est que tous ces quartiers ayent entr'eux des communications sûres & commodes pour se soutenir réciproquement. On doit, lorsqu'il y a des rivieres ou des marais qui séparent les troupes, faire dessus grand nombre de ponts pour qu'elles se transportent promtement d'un lieu dans un autre, sans être obligées de défiler sur un trop petit front, qui retarde trop le secours & la protection qu'elles se doivent mutuellement.

Il n'est point d'usage aujourd'hui de fortifier aucun quartier particulier dans les lignes, si ce n'est quelquefois celui du général ; mais on n'y manquoit point du tems des princes d'Orange, & dans le commencement du regne de Louis XIV. Les lignes ayant alors plusieurs quartiers particuliers fortifiés, qui offroient une retraite aux troupes dans le besoin, elles n'étoient pas forcées pour avoir été percées dans quelqu'une de leurs parties. La briéveté qu'on a voulu employer dans les sieges, a fait supprimer plusieurs attentions qu'on prenoit autrefois pour mettre les lignes à l'abri de toute insulte. Le grand nombre de troupes qu'on a en campagne, qui suffisent pour faire le siege, & former une armée d'observation, a rendu une partie des anciennes précautions inutiles. Mais par cette conduite il arrive que le succès du siege dépend de celui que l'armée qui le soutient éprouve lorsque l'ennemi vient l'attaquer. Les anciens n'étoient point exposés à cet inconvénient : il peut arriver d'ailleurs qu'on soit obligé de faire un siege sans avoir le secours d'une armée d'observation ; il paroît que dans ce cas il faudroit au moins s'appliquer, non-seulement à faire de bonnes lignes, mais encore à fortifier les quartiers pour mettre les troupes en état de les défendre avec plus de sureté & d'opiniatreté. On peut voir sur ce sujet le II. volume de la guerre des sieges, deuxieme édition, où l'on est entré dans un grand détail sur tout ce qui concerne la fortification des lignes & des différens quartiers d'une armée qui fait un siege.

Outre les quartiers dont on vient de parler, les armées prennent en Espagne, en Italie, & dans les autres pays chauds, des quartiers d'été. Ce sont des especes de cantonnemens qu'on fait occuper aux troupes pendant les grandes chaleurs, où ils ne pourroient que très-difficilement supporter les fatigues & les travaux militaires.

Il y a aussi les quartiers d'assemblée & les quartiers de rafraîchissement. Les premiers sont différens lieux où les troupes doivent s'assembler pour se mettre en marche ; les autres sont des endroits abondans en vivres & en fourrages, où l'on envoie quelquefois des troupes harassées & fatiguées, même pendant la campagne, pour se rétablir, & se mettre en état de l'achever.

Nous observerons ici que le terme de quartier s'emploie ordinairement à la guerre pour le bon traitement qu'on promet à des troupes qui se rendent, ou qui mettent les armes bas. Lorsqu'on ne veut point les recevoir à composition, on dit qu'on ne leur donnera point de quartier. Demander quartier, c'est demander à se rendre. Cette façon de parler vient, suivant le dictionnaire de Chambers, de ce que les Hollandois & les Espagnols étoient autrefois convenus que la rançon d'un officier ou d'un soldat se payeroit avec un quartier de sa paye. Desorte que quand on ne vouloit point le recevoir à rançon, c'étoit refuser l'offre d'un quartier de sa solde. (Q)

QUARTIER-MAITRE, (Hist. mod.) c'est le nom qu'on donne parmi les troupes allemandes, angloises & hollandoises, à un bas officier dont la fonction est de marquer les quartiers ou les logemens des troupes, ce qui répond à ce qu'on appelle en France maréchal des logis. Le quartier-maître général, est le maréchal des logis de l'armée.

QUARTIER, (Hist. mod.) se prend pour un canton ou division d'une ville, qui consistent en différentes rangées de bâtimens, séparées les unes des autres par une riviere, ou par une grande rue, ou autre séparation arbitraire.

La ville de Paris, par exemple, étoit partagée en seize quartiers sous Henri III. Elle l'est maintenant en vingt. Celle de Rome a été plusieurs fois divisée différemment en quartiers, appellés régions, suivant ses divers accroissemens ; comme on l'apprend par les différens Antiquaires qui ont écrit tant sur l'état ancien, que sur l'état moderne de cette ville.

Il y a dans plusieurs villes des commissaires de quartier, qui ont soin de faire observer la police chacun dans le leur.

A Rome, le prieur des caporions se prétend chef & colonel des quatorze régions ou quartiers. Muscarat, pag. 134.

Franchise de quartiers, voyez FRANCHISE.

QUARTIER DESCENTE, terme de Généalogie, qui signifie chaque degré d'ordre & de succession des descendans dans une ligne ou une famille. Voy. DESCENDANT.

Ainsi on dit deux quartiers, trois quartiers de noblesse, &c. Un homme est reputé de bonne noblesse quand il prouve quatre quartiers du côté du pere, & autant du côté de la mere ; c'est-à-dire quand son bisayeul, son ayeul & son pere, tant du côté paternel que du côté maternel, ont été gentilshommes. Voy. GENTILHOMME, QUARTIER, &c.

Pour entrer dans certains chapitres nobles d'Allemagne, il faut faire preuve de seize quartiers, tant du côté paternel que du côté maternel ; & comme selon le calcul le plus reçu, on compte trois générations pour un siecle, la noblesse de ces candidats doit au moins remonter à cinq cent ans. Aussi n'y a-t-il point de nation plus jalouse de sa noblesse, & plus attentive à ne pas se mésallier que la nation allemande.

QUARTIER, s. m. terme de Blason, partie de l'écu où l'on met quelques armes de famille. On place dans le premier quartier les armes de la maison principale, & dans les autres quartiers les armes d'alliance. On dit d'un écu écartelé, au premier & quatrieme quartier, il porte de France ; au second & troisieme quartier d'Angleterre, &c. On dit un quartier tiercé en face ou en pal. Un franc-quartier est un quartier qui est seul, & qui fait une des parties honorables de l'écu. Ménétrier. (D.J.)

QUARTIER, (Archit. générale) C'est une partie d'une ville séparée par une riviere ou par une grande rue, comme, par exemple, les 20 quartiers de la ville de Paris. La ville de Rome a été plusieurs fois divisée différemment en quartiers appellés régions, suivant son accroissement. C'est ce que nous apprennent les topographies d'Aurelius Victor, d'Onuphre Panvinius, de Marillan, de Pietro Ligorio, de Boissard, & autres antiquaires. (D.J.)

QUARTIERS de Rome, (Littérat.) regiones, quartiers de la ville de Rome. Servius Tullius fut le premier qui partagea la ville de Rome en quatre quartiers ou régions, savoir la suburane, l'esquiline, la colline, & la palatine ; & les choses demeurerent en cet état jusqu'au tems d'Auguste, qui divisa Rome en quatorze quartiers, à chacun desquels il établit deux commissaires nommés curatores viarum, qu'on faisoit tous les ans, & qui tiroient leurs quartiers au sort. Ils portoient la robe de pourpre, & avoient chacun deux licteurs qui marchoient devant eux dans le quartier dont ils avoient l'intendance. Ils avoient sous eux les esclaves commis aux incendies qui arrivoient. Leur charge consistoit à pourvoir à la tranquillité & à la netteté du quartier dont ils avoient soin, de prendre garde que les nouveaux bâtimens n'avançassent trop, & ne s'élevassent au-delà de la hauteur prescrite. Ils avoient pour se soulager deux dénonciateurs dans chaque quartier qui les avertissoient des désordres qui y survenoient, avec des compagnies du guet pour dissiper les assemblées nocturnes, & se saisir des vagabonds & des filoux.

Ces quatorze quartiers avoient 424 rues, dont il y en avoit trente-une de principales appellées grandes rues, ou royales, qui commençoient à cette colonne dorée qui étoit à l'entrée de la grande place ; & à chacune de ces rues quatre vico-maîtres, qui sont comme nos dizainiers, pour en prendre soin, & porter les ordres de la ville à chaque citoyen.

Alexandre Sévere ajouta encore jusqu'à quatorze commissaires, qui étoient comme nos quarteniers, qui servoient d'assesseurs au gouverneur de la ville.

Le premier quartier commençoit à la porte Capène, & il contenoit 12222 piés de circuit. Il renfermoit neuf grandes rues qui avoient deux commissaires appellés curatores viarum, & deux dénonciateurs, avec trente-six vico-maîtres. Il s'étendoit dedans & dehors la ville. On y voyoit le temple de Mars Gradivus à cent colonnes, ouvrage magnifique de Sylla, où le sénat s'assembloit pour donner audience aux ambassadeurs étrangers. Tout proche de là se voyoit la pierre qu'on appelloit manalis, à manando, parce qu'au tems d'une grande sécheresse on la portoit en procession pour avoir de la pluie, qui ne manquoit pas de tomber aussi-tôt, comme nous le dit Festus : Manalem vocabant lapidem, petramque extra portam Capenam juxta aedem Martis, quam cùm propter nimiam ficcitatem in urbem protraherent, sequebatur pluvia statim, eamque, quod aquas manaret, manalem lapidem dixere.

Près de cette porte passoit le petit fleuve Almon, où la déesse Pessinunte fut lavée au sortir du vaisseau qui l'amena à Rome ; par-dessus passoit un aqueduc qui la mouilloit toujours. Ce qui fait que le poëte Juvenal a appellé cette porte madidam Capenam.

On voyoit non loin de-là les temples de la Tempête, de l'Espérance, des Muses ou Camenes, & l'autel d'Apollon.

En ce même quartier il y avoit trois bosquets appellés luci, & consacrés en l'honneur des dieux Lucus Cuperius Hostiliani, Lucus Egeriae, & Lucus Camerarum.

Quatre temples : celui d'Isis, de Serapis, de la Fortune des voyageurs, & de Mars Quirinus ; à la différence de celui qui étoit hors la porte Capene, qu'ils appelloient Martis gravidi templum. Le premier pour montrer la paix & le repos qu'ils souhaitoient avoir dans la ville, & le second pour montrer qu'ils vouloient employer leurs armes au-dehors contre leurs ennemis.

Dix chapelles sous le titre d'aediculae, dont on ne sait le nom que de cinq ; savoir Fortunae obsequentis Honoris, Virtutis, Rediculi, & Herculis. Celle de Rediculi étoit bâtie hors la porte Capene, après la retraite d'Annibal.

Sept grandes places appellées Areae, celle d'Apollon, de Thallus, de Gallus, d'Isis Eliane, de Pinaria, de Carsura, de Mercure.

Six bains ou étuves publiques, savoir de Vettius Bolanus, de Torquatus, de Mamertinus & d'Abascantianus, de Mettianus, Secondianus, d'Antiochianus, avec quatre-vingt-deux autres particuliers.

Quatre-vingt-trois réservoirs où se venoient rendre les eaux des fontaines.

Quatre arcs, savoir celui de Drusus Néron, de Trajan, de Verus Parthicus, & de Janus Bifrons.

Quatorze greniers publics, horrea publica.

Seize boulangeries ou moulins à bras, pistrinae.

Le cirque de Caracalla, le sénacule des femmes, le mutatoire de César à la porte Capene, mutatorium Caesaris, qui étoit une maison de plaisance, quelques sépulcres signalés, comme celui des Cornéliens, des Attiliens Calatins, des Serviliens, des Céciliens, des Horaces, &c.

Cent-vingt-un palais ou belles maisons sous le nom de domus ; 1250 îles ou maisons détachées, & non contiguës à d'autres, à l'entour desquelles on pouvoit aller.

Le second quartier, dit Celimontium, fut ainsi appellé à cause du mont Caelius. Il contenoit 13200 piés de circuit, & avoit deux commissaires de quartiers, deux dénonciateurs, trente-deux vico-maîtres, & cinq compagnies du guet.

Il renfermoit dans son enceinte douze rues, trente bains particuliers, sans parler des publics ; 65 réservoirs, 3106 maisons ou îles séparées, deux bosquets sacrés, 32 greniers publics, 23 moulins à bras, 133 hôtels considérables, entr'autres celui de Vetellianus, de Philippus, du Lateran, de César dictateur, de Tibérius, de Claudius Centimalus, & du poëte Stella ; huit édicules ou chapelles, cinq temples, celui de Tullus Hostilius, de Bacchus, de Faune, de l'empereur Claude, de la déesse Carnea sur le mont Caelius, où étoit aussi la cour Hostilie, dans laquelle le sénat s'assembloit souvent ; comme aussi le champ de Mars, où l'on couroit à cheval quand celui d'enbas étoit couvert des eaux du Tibre.

Entre le mont Célion & le Palatin étoit une grande rue appellée subura, qui commençoit à la grande place, & alloit se rendre au grand chemin de Tivoli tout le long des esquilies. C'étoit dans cette rue où demeuroient la plûpart des grands de Rome, & où l'on voyoit plusieurs boutiques de barbiers & de cordiers ; ce qui fait dire à Martial, l. II. epigr. 17.

Tonstrix suburae faucibus sedet primis

Cruenta pendent quâ flagella tortorum.

On y vendoit aussi toutes sortes de fruits & de volailles, comme le même poëte nous l'apprend l. VII. épigr. 30.

Le troisieme quartier, dit Isis & Serapis moneta, avoit 12450 piés de tour. Il commençoit auprès du mont Caelius, & occupoit une grande partie des esquilies. Il avoit, comme les précédens, deux commissaires de quartier, deux dénonciateurs, 32 vico-maîtres, & huit rues.

Il comprenoit la tribu de la Grace dorée, le haut lieu, ou la place des comédiens, nommée summum Choragium ; l'entrée de la rue sacrée, proche les carines, au bout des Esquilies, le bosquet Cuperien de l'école des catapulteurs ; deux temples, celui d'Isis & de Serapis moneta, & celui de la Concorde virile, auprès duquel étoit le portique de Livia, laquelle fit bâtir l'un & l'autre pour servir de monument éternel de la concorde qui fut toujours entr'elle & son mari.

Huit édicules ou chapelles de la bonne espérance, de Sérapis, de Sangus Fidonius, de Minerve, d'Isis, de Vénus, d'Esculape & de Vulcain ; le portique de Claudius Martialis ; l'amphithéatre de Vespasien, autrement le Colisée, où quatre-vingt mille personnes pouvoient regarder les jeux bien à leur aise ; le grand jeu des exercices, le Dacique, le Mamertin, le champ des soldats de Misene, & leur vieux camp ; les écoles des questeurs & de Gallus, les thermes ou bains de Tite, de Trajan & de Philippe, empereurs ; 70 bains particuliers, 33 moulins, 29 greniers, 160 hôtels, entre lesquels étoit la maison dorée de Néron, & le portique, & celle de Brutien, de Pompéïen, de Tite, avec le portique où l'on voyoit la statue de Laocoon & de ses deux enfans, & 2807 îles ou maisons seules.

Le quatrieme quartier, appellé via sacra, ou templum pacis, renfermoit de circuit 1800 piés, s'étendant en long entre le Palatin & les Esquilies, & ne comprenant que huit rues. Il avoit deux commissaires, trente-deux vico-maîtres, & deux dénonciateurs.

Ses principales parties étoient la rue sacrée, qui commençoit aux Carines & dans les Esquilies à la chapelle de Stremiae, & s'étendoit jusqu'au capitole, le long du Colisée & de l'arc de Tite, retournoit par l'arc de Septimius, & ainsi faisoit une partie du forum romain & du comice. Elle fut nommée sacrée, à cause que ce fut là que fut signée la paix entre Romulus & Tatius, roi des Sabins. Jules-César la fit couvrir de toile depuis son palais jusqu'à la pente du capitole, comme il avoit fait le forum romain pour représenter les jeux qu'il donna au peuple.

Le commencement des Carines, lieu fort habité & orné de beaux édifices, se trouvoit dans ce quartier. Aussi Virgile les appelle lautas Carinas. Les principaux édifices étoient les thermes & le palais de Tite, où il y avoit des salles souterreines longues de 137 piés, larges de 17, & hautes de 12, bâties par Vespasien pour le college des pontifes ; l'hôtel de Pompée, & l'école de son affranchi Lenaeus, fameux grammairien ; l'ancienne maison de Cicéron, qu'il laissa à son frere Quintus, pour aller demeurer au mont Palatin.

L'Aequimelium, qui étoit une place ronde devant le temple de Tellus, à un des bouts de la rue exécrable, où fut bâtie autrefois la maison de Sep. Melius, chevalier romain, laquelle fut démolie & rasée par sentence du dictateur L. Quintius Cincinnatus, pour avoir voulu s'emparer du gouvernement souverain.

Busta Gallica, le cimetiere des Gaulois, où furent défaits les Gaulois par Camillus.

Tigillum sororium, le chevron de la soeur posé sur deux murs, par-dessous lequel on fit passer Horace, pour expier le crime qu'il avoit commis en tuant sa soeur.

Meta sudans, la bute suante, proche de l'arc de Constantin. C'étoit une masse de maçonnerie de brique comme un obélisque, d'où dégouttoit l'eau de toutes parts, comme fait la sueur du corps, & au haut il y avoit une statue de Jupiter.

Dix temples, celui de la Paix, de Rémus, au-devant duquel on voyoit deux myrtes consacrés, l'un appellé patricia myrtus, & l'autre plebeia ; celui de Faustine, femme de l'empereur Marc Aurele, celui de Tellus dans les Carines, voué par le consul T. Sempronius ; celui de la Concorde, de Vénus Cloacine, du Soleil, de la Lune, d'Auguste & de Nerva, dans la place passante, in foro transitorio.

Huit chapelles, des Muses, de l'Espérance, de Mercure, de Lucine Valeriane, de Junon Lucine, de Mavors, de la Jeunesse, d'Isis.

Volcanale, le lieu où Romulus planta ce lotos, dont les racines s'étendoient jusqu'au forum de César.

Le sacré portique, la place de la Victoire, la place de Vulcain, le colosse du Soleil.

L'Odeum, lieu pour les jeux de musique, fait en forme de théâtre, avec des siéges comme les marches d'un escalier, couvert d'une tribune ou lanterne soutenue par des colonnes. Là les joueurs d'instrumens étoient exercés par un maître de musique, & les comédiens par un histrion, avant de paroître sur le théâtre.

Forum cupedinis, ou macellum cupedinis, le marché aux friandises.

La Basilique ancienne de Paulus Aemilius, celle de Constantin, le repositoire sacré du peuple romain ; le bain de Daphnis, 79 lacs ou réservoirs d'eau.

Les arcs de Tite & de Vespasien, de Septimus Sévere, & de Constantin.

Vingt-huit greniers, 24 moulins à bras, 118 hôtels, & 2758 îles ou maisons particulieres.

Le cinquieme quartier, dit Esquilina, comprenoit le mont Esquilin & le Viminal, & avoit de circuit 15950 piés, 15 rues, deux commissaires & deux dénonciateurs. Voici ce qu'il y avoit de plus remarquable.

Puticuli ou puticulae, des fosses faites en façon de puits, entre le mont Esquilin, les murailles de la ville, & la rue qui conduisoit à la porte Querquetulane, où l'on enterroit les pauvres gens ; ce qui causoit une si mauvaise odeur à tout le quartier, qu'Auguste, du consentement du sénat & du peuple romain, en fit présent à Mécénas son favori, qui y bâtit une belle maison de plaisance, & y fit faire les plus beaux jardins de Rome, comme nous l'apprenons d'Horace, dans la huitieme satyre du liv. I.

Hûc priùs angustis ejecta cadavera cellis

Conservus vili portanda locabat in arcâ :

Hoc miserae plebi stabat commune sepulchrum....

Nunc licet Esquiliis habitare salubribus, atque

Agere in aprico spatiari quo modò tristes

Albis informem spectabant ossibus agrum.

Virgile avoit sa maison près de ce lieu, comme Aquilius, jurisconsulte, Properce, Perse, & Pline le jeune.

On y voyoit plusieurs temples, comme celui de Jupiter Vimineus, de Junon Lucine, de Minerve, de la Médecine, d'Esculape, de Vénus Erycine, qui étoit à la porte Colline, à l'entour duquel se célébroient les jeux agonaux quand le Tibre étoit débordé.

L'amphithéâtre dit castrense, le cirque d'Aurelien, avec un obélisque, la basilique de Sicinius, le camp des gardes, le parc des bêtes sauvages, nommé vivarium ; plusieurs bains publics, 180 hôtels, entr'autres ceux de Servius Tullius, de Q. Lutatius Catullus, de M. Licinius Crassus.

Le sixieme quartier, appellé Alta semita, à cause de sa situation, contenoit 15600 piés de circuit, commençant aux deux grands chevaux de marbre faits par Phydias & Praxitele, & alloit aboutir à la porte Viminale. Il avoit 14 rues & 48 tours, avec deux commissaires, deux dénonciateurs, & 52 vicomaires.

On y remarquoit de plus considérable le champ exécrable près de la porte Colline, 10 boutiques où se vendoit le vermillon, 15 temples, celui du Salut, de Sérapis, de Flore, de Vénus, &c. un portique de mille pas ; les statues de Quirinus, hautes de 20 piés, comme celle de Mamurius, faite de plomb ; le cirque de Flore, les fors de Salluste & de Dioclétien, les thermes de Paulus Emilius, & le sénacule des dames romaines.

Le septieme quartier, dit violata, s'étendoit depuis le capitole jusqu'aux septes, ou la clôture du champ de Mars jusqu'au forum de Trajan, & se venoit rencontrer avec le cirque Flaminien & la rue large, qui a donné le nom à tout le quartier. Il avoit 23700 piés de circuit, & 40 rues, deux commissaires & deux dénonciateurs. Martial y avoit sa maison.

Le huitieme quartier, dit Forum romanum, étoit le plus beau & le plus célebre de tous. Il comprenoit le forum romain, le capitole, la roche Tarpéïenne, la porte nommée Stercoraria, & la rue neuve. Il avoit de circuit 14867 piés, douze rues, deux commissaires, deux dénonciateurs, & six compagnies du guet.

Ce quartier renfermoit encore ce qui suit : le Milliaire doré, le Putéal de Libon, lieu fort fréquenté des marchands ; le lac Curtien, ou Curtius se jetta tout armé ; la pile Horatienne, où furent attachées les dépouilles des trois Curiaces, & la statue de Marsyas, un des compagnons de Bacchus ; quinze temples, entr'autres celui du Capitole & ses favisses, celui de Jupiter Férétrien, de Jules-César, où étoit un simulacre de Vénus sortant de la mer, voué & bâti par Auguste ; celui de la Concorde, de Vesta, & de Janus.

Doliola, qui étoient des tonnes ou barriques où l'on serra les reliquaires sacrés à la prise de Rome par les Gaulois ; le sépulchre de Romulus, d'Acca Laurentia, & beaucoup de portiques.

Quatre cours où s'assembloit le sénat ; savoir Hostilia, Calabra, Pompiliana, ou regia Numae, & le Cénacle d'or, cenaculum aureum ; sept basiliques, & le Graecostasis, le Tullianum, prison bâtie par Servius Tullius ; 150 hôtels ou palais, entr'autres celui de Tarquin le superbe, de Manlius Capitolinus, de Scipion l'africain, de T. Annius Milon, & d'Ovide.

Le neuvieme quartier, dit circus Flaminius, renfermoit le côteau des Jardins, le champ de Mars, la rue voûtée, la rue droite, & avoit de circuit 30560 piés, & 30 rues qui avoient chacune leurs officiers comme les précédentes. On y comptoit huit temples, & entr'autres le Panthéon & celui de Janus, proche le théâtre de Marcellus.

Le cirque Flaminien, celui d'Alexandre Sévere, l'obélisque avec le cadran au champ de Mars ; quatre théâtres & amphithéâtres, & les écuries des quatre compagnies des coureurs ; les septes, l'ovile ou l'enclos où l'on donnoit son suffrage ; la prison des centum-virs, & les jardins de Lucullus & d'Agrippa.

Le dixieme quartier s'appelloit Palatium, parce qu'il commençoit au mont Palatin, & avoit de circuit 11600 piés & sept rues, dix temples, entr'autres celui d'Apollon Palatin ; 189 hôtels, comme celui d'Hostilius, d'Ancus Martius, de Valerius Publicola, de L. Crassus l'orateur, d'Hortensius, de Catilina, de Jules-César, & de Séneque.

Le onzieme quartier se nommoit circus Maximus, & renfermoit, outre le grand cirque, toute la vallée qui étoit entre l'Aventin & le Tibre, jusqu'où l'on portoit les enfans illégitimes. Il avoit outre cela huit rues, l'argiletum, où il y avoit des boutiques de librairies ; quatre temples, 30 chapelles, & l'égoût du grand cloaque qui se rendoit dans le Tibre.

Le douzieme quartier, qu'on appelloit Piscina publica, s'étendoit du cirque majeur le long de l'Aventin jusqu'aux thermes de Caracalla, & avoit 12000 piés de tour, & 12 rues.

Cette piscine publique étoit dans la ville, entre le Célion & le Céliole, où la jeunesse romaine apprenoit à nager. C'étoit un grand réservoir au bas de l'Aventin, où l'on faisoit venir l'eau appienne, & qui servoit d'abreuvoir aux chevaux, & à laver la lessive. Il y avoit quelques temples & quelques bosquets peu considérables.

Le treizieme quartier se nommoit Aventinus, & contenoit de circuit 16300 piés & 13 rues, avec les mêmes officiers que les quartiers précédens. Les places principales qu'il renfermoit étoient Clivus publici, par où l'on montoit sur l'Aventin ; il commençoit au marché aux boeufs, & se venoit rendre au temple de Junon la reine. Scalae gemoniae, les fourches patibulaires où l'on attachoit les malfaiteurs, d'où on les traînoit dans le Tibre ; le bout de l'Armilustrium, le Doliolum ou mont Testacé, Remuria, ou le pourpris où Rémus prit l'augure du vol des oiseaux, & où il fut enterré.

Le quatorzieme quartier s'appelloit Trans-tevere, & commençoit au Janicule, comprenant le Vatican, l'île du Tibre, & ce qu'on appelloit Navalia. Il avoit de tour 3489 piés & 28 rues. (D.J.)

QUARTIER DE VOYE, (Archit.) on appelle ainsi les grosses pierres, dont une ou deux font la charge d'une charrette attelée de quatre chevaux, & qui servent ordinairement pour les jambes d'encoignure & jambes étrieres à la tête des murs mitoyens. Daviler. (D.J.)

QUARTIER DE VIS SUSPENDUE, (Archit.) c'est dans une cage ronde, une portion d'escalier à vis suspendue, pour raccorder deux appartemens qui ne sont pas de plein-pié.

QUARTIER TOURNANT, (Archit.) c'est dans un escalier, un nombre de marches d'angles, qui par leur collet tiennent au noyau ; c'est peut-être ce que Vitruve a appellé inversura.

QUARTIER, s. m. (Mesure seche) mesure de grains en usage à Morlaix en Basse-Bretagne ; les dix-huit quartiers font le tonneau de Morlaix, qui est de dix pour cent plus fort que le tonneau de Nantes. Dict. de Commerce.

QUARTIER, s. m. (Comm. de bois) ce terme en marchandise de bois, se dit quelquefois par opposition à du bois qui n'est point scié ou fendu ; ainsi on dit du bois de quartier, & du bois de pié.

Des échalas de quartiers, sont des échalas faits de bois de chêne fendu de plusieurs morceaux ; on le dit pour le distinguer des échalas de bois blanc, comme de saule, de tremble, &c. qui sont des branches de ces arbres seulement émondées, & coupées de longueur. (D.J.)

QUARTIER, a plusieurs significations.

QUARTIER, v. on dit donner quartier, pour dire retourner une pierre, une piece de bois ; ensorte qu'elle pose sur la face contiguë à celle où elle posoit avant de lui donner quartier.

Il se prend comme nom pour une pierre de taille d'une certaine grosseur ; il signifie aussi le quart du tour d'un escalier ; & on dit, quartier tournant, si cette partie est arrondie.

QUARTIER, DRESSER UN, terme de Corroyeur ; c'est dresser un cuir des quatre quartiers, quand on le plie des quatre côtés, de patte en patte ; le dresser des quatre faux quartiers, c'est le plier des quatre coins, un peu en biaisant. Le dresser de travers, c'est le plier d'abord en deux, oeil contre oeil, & puis encore la queue contre la tête, ces façons se donnent ou avec l'étire, ou avec la pommelle. Savary. (D.J.)

QUARTIER, (Maréchal.) on appelle ainsi les côtés du sabot d'un cheval, compris entre la pince & le talon de part & d'autre. Voyez PINCE, SABOT.

Chaque pié a deux quartiers, celui de dedans & celui de dehors. Le défaut des quartiers, est d'être trop serrés, c'est-à-dire trop applatis ; celui de dedans y est plus sujet que celui de dehors. Faire quartier neuf, se dit du pié dont le quartier est tombé, ou a été ôté pour quelque maladie, alors il en revient un neuf. Les quartiers du cheval sont sujets aux seymes. Voyez SEYME.

QUARTIER, en parlant d'une selle, ce sont les pieces de cuir ou d'étoffe qui sont attachées aux deux côtés de la selle. Voyez SELLE.

QUARTIERS D'HABIT, &c. terme de Tailleur ; ce sont les quatre morceaux principaux, qui, quand ils sont assemblés, forment le corps & les basques d'un habit ou d'une veste. Chaque habit ou veste a quatre quartiers qu'on appelle les deux devans & les deux derrieres.


QUARTIERES. f. (Comm.) mesure pour les grains dont on se sert en quelques lieux d'Angleterre, particulierement à Newcastle. Il faut dix quartieres pour faire le last ; dix gallons font la quartiere, & le gallon pese depuis cinquante-six jusqu'à soixante-deux livres. Voyez GALLON, ARTERRTER. Dictionn. de Commerce.


QUARTILEadj. (Astronom.) est le nom que les Astronomes, ou plutôt les Astrologues, donnent à l'aspect de deux planetes, éloignées l'une de l'autre de trois signes, ou du 1/4 de la circonférence ; on l'appelle plus communément quatre aspect, & plus communément encore quadrature. Voyez ces mots.


QUARTO(Librairie) un livre in-quarto est celui dont la feuille est pliée en quatre.

QUARTO, s. m. (Comm.) que l'on appelle plus ordinairement quartaut, petite futaille qui fait le quart d'un muid, d'une queue, ou de quelqu'autre semblable tonneau. Voyez QUARTAUT.

QUARTO, en termes de comptes & de teneur de livres, signifie quatre ou quatrieme, mais il ne se dit que précedé du mot folio. Cet article est porté au grand livre, folio quarto, c'est-à-dire au quatrieme feuillet. Dictionn. de Comm.


QUARTO-DECIMANSS. m. (Hist. ecclés.) nom qu'on a donné à certains hérétiques qui enseignoient, qu'on devoit toujours célébrer la Pâque le quatorzieme de la lune de Mars, quelque jour de la semaine qu'il arrivât, comme faisoient les juifs ; au lieu que le plus grand nombre des églises la célébroit le dimanche qui suivoit le quatorzieme jour de cette lune.

Les Asiatiques étoient extrêmement attachés à la premiere de ces opinions, & ils la fondoient sur l'autorité de S. Jean qu'ils reconnoissoient pour leur apôtre. Le pape Victor voulut les obliger de changer cette coutume, & de suivre la pratique de l'église de Rome. Il alla même jusqu'à les menacer de les excommunier pour ce sujet ; quelques-uns prétendent qu'il les excommunia en effet : mais le sentiment le plus suivi, est qu'il s'en tint à la menace ; car Polycrate, évêque d'Ephèse, écrivit au pape Victor & au clergé de Rome une longue lettre, dans laquelle il soutient fortement la tradition des églises d'Asie, depuis l'apôtre S. Jean, & les évêques des Gaules, entr'autres S. Irenée, le dissuaderent de troubler la paix de l'église, en excommuniant des peuples qui n'avoient commis d'autre crime, que de demeurer inviolablement attachés à la tradition de leurs ancêtres.

Mais le premier concile général de Nicée fit un réglement, par lequel il obligea toutes les églises de célebrer la Pâque le jour du dimanche d'après le quatorze de la lune, & Constantin fit publier ce decret dans tout l'empire. Quelques églises & quelques évêques ayant refusé de s'y conformer, on les traita comme rébelles & comme schismatiques, en leur donnant le nom de Tessaradecatites ou de quarto-decimans ; & en effet, ce n'est proprement qu'à ces derniers qu'il convient, en qualité de sectaires : l'église n'ayant encore rien décidé sur cet article du tems de la dispute des églises d'Asie avec le pape Victor. Voyez PAQUES.


QUARTOTS. m. (Com.) mesure de liqueurs qui contient à-peu-près deux pintes, & qu'on nomme plus ordinairement quarte ou pot. Voyez QUARTE & POT.


QUARTOYÉadj. (Gram. Jurisprud.) les devoirs quartoyés & quintoyés de la coutume d'Anjou sont qu'étant donnés en assiette, trois valent quatre, & quatre valent cinq.


QUARTSS. m. pl. (Commerce) ce sont des caisses de sapin plus longues que larges, dans lesquelles on envoie de Provence, des raisins en grappes, que l'on nomme raisins aux jubis. Savary. (D.J.)


QUARTUMVIRS. m. (Hist. rom.) quatrieme officier de la monnoie, que César ajouta aux triumvirs monétaires. On trouve des médailles qui justifient le tems de l'institution du quartumvir. Il y en a une qui nous apprend que Cicéron l'avoit été. Il y en a une autre frappée du tems du triumvirat d'Auguste, d'Antoine & de Lépide. On voit au revers de cette médaille, un Mars avec cette inscription, L. Massidius F. E. Longus, IIII vir, A. P. F. ce qui signifie que L. Massidius Longus, qui avoit fait battre cette piece d'or, étoit quartumvir. Les lettres A. P. F. veulent dire, auro publicè feriundo. (D.J.)


QUARTZS. m. (Hist. nat. Minéralogie) mot allemand employé par les minéralogistes, & adopté par les naturalistes françois. C'est une pierre dure, de la nature du caillou, qui fait feu, lorsqu'on la frappe avec de l'acier, souvent remplie de gersures & de crevasses, variée pour la pesanteur ; elle se brise en morceaux d'une figure irréguliere & indéterminée.

Wallerius compte neuf différentes especes de quartz. 1°. Le quartz sec, fragile & opaque, qui est communément blanc. 2°. Le quartz solide & gras au toucher, qui est un peu bleuâtre. 3°. Le quartz transparent, qui ressemble beaucoup à du crystal de roche, ou à du verre ; il est de différentes couleurs. 4°. Le quartz laiteux & opaque. 5°. Le quartz solide, opaque & coloré. 6°. Le quartz par petits grains collés les uns aux autres. 7°. Le quartz spongieux qui est comme s'il avoit été rongé des vers. 8°. Le quartz crystallisé. 9°. Le quartz en grenat qui est en masses de la grosseur du poing.

La matiere qui forme le quartz, n'est point précisément de la même nature que celle du silex ou caillou, quoiqu'elle en ait presque toutes les propriétés ; cependant beaucoup de personnes sont de ce sentiment ; mais M. de Justi remarque que la maniere dont le quartz se forme est très-différente de celle du caillou, en ce qu'il remplit les fentes & les cavités des rochers & des montagnes où il est porté par les eaux ; & cette matiere doit être très-subtile & très-divisée, puisqu'elle s'insinue dans les moindres petites fentes des pierres, où elle se durcit par la suite des tems. M. Henckel, dans son traité de lapidum origine, dit positivement que le quartz tire son origine d'une terre marneuse, (terra margacea) par où il entend l'argille. En général on doit présumer que le quartz se forme de même que le silex ou caillou, & que c'est une espece de matiere gélatineuse formée par la dissolution de la terre calcaire qui le produit. Voyez l'article SILEX.

Quoi qu'il en soit de ces opinions qu'il est très-difficile de vérifier, les différentes couleurs du quartz, ses figures, & son plus ou moins de transparence, lui viennent d'un mêlange de parties étrangeres qui y sont jointes. Le quartz parfaitement pur & transparent ressemble au crystal de roche par masses, ou à un morceau de verre blanc. Celui qui est le plus commun ne peut être mieux comparé qu'à de l'eau trouble gelée, ou à de la glace impure & bourbeuse, & il a presque toujours un coup d'oeil, comme s'il étoit mouillé. La maniere ordinaire dont le quartz se crystallise, c'est en pyramides hexagones, & quand on en considere la base, de même que dans celle du crystal de roche qui n'est point parfaitement pur, on voit que ces pyramides sont formées de lames assez épaisses. Un fait peut encore servir à faire connoître la nature du quartz, c'est que dans les montagnes des Alpes, ceux qui cherchent le crystal de roche, reconnoissent les endroits où il y a des grottes remplies de crystal, le présument à la vue d'une bande ou d'une zone de quartz qui fait une espece de ruban autour de la montagne ; alors ils frappent avec des masses de fer contre la roche qui est au-dessous, & quand elle sonne creux dans un endroit, ils en concluent avec assez de certitude qu'elle renferme une grotte ; alors ils s'ouvrent un passage, & vont en tirer le crystal. Ces circonstances semblent prouver que le quartz est une pierre de la même nature que le crystal de roche ; lorsqu'il est opaque & mêlé de parties étrangeres, il ne crystallise point, semblable en cela aux sels, dont les crystaux sont d'autant plus beaux à proportion qu'ils sont plus purs. Ainsi je croirois que le quartz est la partie la plus grossiere, ou pour ainsi dire, ce que les chymistes appellent l'eau mere du crystal de roche, qui en est la partie la plus épurée & la plus parfaitement élaborée.

Les mineurs regardent ordinairement le quartz qui a le coup d'oeil gras, comme un indice d'une mine de bonne qualité, parce que cette pierre fournit aux mines & aux métaux une matrice compacte & solide, très-propre à retenir les exhalaisons minérales qui forment les mines. Voyez l'article MINES.

C'est le quartz qui est la matrice ordinaire de l'or, que l'on voit souvent attaché à sa surface sous la forme de feuillets minces, ou de fils qui sortent des petites gersures déliées dont cette pierre est ordinairement remplie. (-)


QUASI(Gramm.) M. de Vaugelas & M. Ménage n'approuvoient pas ce mot, si ce n'est en quelques endroits, comme, il n'arrive quasi jamais. Aujourd'hui on ne le souffre plus dans le beau style ; cependant, dans le siecle passé, le P. Rapin, M. de S. Evremont, M. de la Rochefoucault, le P. Bourdaloue, & d'autres bons auteurs n'ont point fait difficulté de s'en servir. Selon le P. Bouhours, il y a des occasions où cet adverbe trouve sa place avec grace. (D.J.)


QUASI-CASTRENSES. m. (Jurisprud.) voyez PECULE QUASI-CASTRENSE.


QUASI-CONTRATS. m. (Jurisprud.) voyez ci-devant au mot CONTRAT, l'article QUASI-CONTRAT.


QUASI-DELITS. m. (Jurisprud.) voyez ci-devant au mot DELIT, l'article QUASI-DELIT.


QUASI-MILITAIRE(PECULE) peculium quasi-castrense, terme de droit civil, étoit chez les Romains le pécule qu'avoit acquis un fils de famille au barreau, qu'ils appelloient militia togata. Il avoit été introduit ad instar du pécule militaire, & le fils de famille en étoit le maître, & en pouvoit disposer par testament, pourvu qu'il fût d'âge compétent pour tester. Voyez FILS DE FAMILLE, PECULE MILITAIRE & TESTAMENT.


QUASI-POSSESSIONS. f. (Jurisprud.) voyez ci-devant au mot POSSESSION, l'article QUASI-POSSESSION.


QUASI-PUPILLAIRE(Jurisprud.) se dit de ce qui approche de la nature des choses relatives à un pupille ; ainsi on appelle substitution quasi-pupillaire ou exemplaire celle qui est faite par les parens à leurs enfans furieux, imbécilles & dépourvus de jugement. Voyez SUBSTITUTION EXEMPLAIRE. (A)


QUASILLARIAS. f. (Littérat.) ce mot est le nom de l'esclave, à qui l'on donnoit une certaine quantité de laine à filer chaque jour, dans un petit panier appellé par les Latins quasillum. On nommoit encore quasillaria, l'esclave qui accompagnoit sa maîtresse, en portant au marché le panier de la provision. (D.J.)


QUASIMODOS. f. (terme de Breviaire) c'est le dimanche de l'octave de Pâques, ainsi marqué dans le breviaire. Ce nom lui vient du premier mot de l'introït de la messe qu'on dit ce jour-là, quasimodo geniti infantes.


QUATASS. m. (Mesure de liquides) petite mesure du Portugal ; il faut quatre quatas pour un cavadas, six cavadas pour un alquier, & deux cavadas pour l'almude. Le cavadas est semblable à la mingle ou bouteille d'Amsterdam ; ainsi le quatas qui est le quart du cavadas, est environ un demi-septier. Dict. du Comm. (D.J.)


QUATERNAINQUATERNAIN


QUATLALATZINS. m. (Hist. nat. Botanique) arbre de la nouvelle Espagne que Ximenès dit être fort grand. Ses feuilles sont semblables à celles du mûrier, mais plus larges, dentelées & remplies de veines. Son tronc est roussâtre, son fruit est rond, applati & rayé comme un melon ; il contient des pepins ronds & blancs, qui sont très-purgatifs, & très-propres à chasser la bile & les humeurs. Pour cet effet, on les fait un peu rôtir, on les met en macération dans de l'eau, & on boit la liqueur. Laet regarde ce remede comme très-efficace. On dit que le nom de cet arbre lui vient de ce que son fruit, lorsqu'il est mûr, s'ouvre avec beaucoup de bruit, & se porte aussi loin que s'il avoit été lancé par une arme-à-feu.


QUATORZAINES. m. (Jurisprud.) sont l'intervalle qui se doit trouver entre deux criées ; & comme elles se font les dimanches, on doit, après une criée, laisser passer un dimanche, & attendre le suivant pour faire l'autre criée ; ce qui forme la quatorzaine. Voyez CRIEES, DECRET, SAISIE REELLE. (A)


QUATORZEnom de nombre, c'est la somme de dix unités, plus quatre unités.

QUATORZE terme du jeu de piquet, ce sont quatre cartes de différentes couleurs, mais de même nom & de même valeur dans chaque couleur. Un quatorze d'as, de rois, de dames, sont les quatre as, les quatre rois, les quatre dames, &c.


QUATORZIEMES. f. (Arithm.) en matiere de fractions ou nombre rompus, de quelque entier que ce soit ; un quatorzieme, trois quatorziemes, cinq quatorziemes, &c. s'écrivent de cette maniere, 1/14, 3/14, 5/14, &c. Ricard.


QUATOTONIS. m. (Hist. nat.) nom d'un oiseau d'Amérique assez bien nommé par Nieremberg, picus imbrifoetus ; en effet, c'est un oiseau du genre des pics, ayant une crête rouge sur la tête, & deux raies blanches qui s'étendent depuis le col jusqu'à la poitrine. (D.J.)


QUATRAINS. m. (Littérat.) stance ou strophe composée de quatre vers qui doivent avoir un sens complet, & dont les rimes peuvent être suivies ou mêlées, de maniere que le premier & le dernier vers riment ensemble, ou le second avec le quatrieme, comme dans ces vers de Malherbe.

La mort a des rigueurs à nulle autre pareilles ;

On a beau la prier,

La cruelle qu'elle est se bouche les oreilles

Et nous laisse crier.

Les quatrains de Pibrac étoient autrefois fort admirés parmi nous, le style qui en est suranné les a fait abandonner ; on pourroit dire d'eux comme des distiques du vieux Caton, que pour n'avoir pas l'élégance & l'harmonie des vers de Virgile, ils n'en ont pas moins de solidité.


QUATRE(Arithm.) nombre pair composé de trois & un, ou de deux fois deux. En chiffre commun ou arabe un quatre s'écrit ainsi 4, en chiffre romain de la sorte IV, & en chiffre françois de compte ou de finance de cette maniere iiij ou iv. Le nombre quatre se joint aussi à plusieurs autres nombres, quatre-vingt, quatre-vingt-dix.

QUATRE POUR CENT, droit qui se paye à Lyon sur la plûpart des marchandises conformément au tarif de 1632 ; outre les anciens quatre pour cent, il y a un second droit, qu'on nomme la réappréciation des quatre pour cent.

QUATRE SOLS POUR LIVRE, c'est une nouvelle imposition qui fut mise sur tous les droits qui se payoient en France dans les dernieres années du regne de Louis XIV. & dans les pressans besoins de l'état. Elle fut supprimée au commencement de celui de Louis XV. puis rétablie en 1722. Dictionnaire de commerce.

QUATRE, en terme de Boutonnier, c'est une espece de fleur à quatre feuilles arrondies en cartisanne, en milanoise, ou en laiton couvert de soie, qui se met au bas des franges ou des graines d'épinars, & qui leur sert comme de patte.

QUATRE-BANDE, au jeu de billard, est une sorte de doublet, dans lequel on blouse la bille après l'avoir faite toucher aux quatre-bandes de la table.

QUATRE-COINS, (Maréchallerie) travailler sur les quatre-coins, ou faire les quatre-coins, en termes de Manege, c'est diviser la volte en quatre quarts, & faire faire au cheval un rond ou deux au trot ou au galop sur les quatre quarts, ou sur les quatre angles du quarré qu'on se figure autour du pilier, au lieu de la volte circulaire. Voyez QUARRE, VOLTE, &c.


QUATRE-NATIONS(Littérat.) nom d'un college fameux dans l'université de Paris, fondé en 1661 par le cardinal Mazarin, pour l'éducation & l'entretien de soixante jeunes gentilshommes natifs des pays conquis par le roi Louis XIV. savoir quinze de Pignerol & de l'Italie, quinze d'Alsace, vingt de Flandres, & dix du Roussillon. Voyez COLLEGE, UNIVERSITE.

Les gentilshommes sont nommés par le roi, & font preuve de noblesse pour être reçus dans ce college. On y enseigne aussi les Humanités, la Rhétorique, la Philosophie & les Mathématiques à toutes sortes d'écoliers. Il est composé de vingt officiers qui reçoivent tous leurs appointemens sur les biens du college, outre leur nourriture & leur logement. Les trois premiers officiers, savoir le grand-maître qui a la supériorité & la préséance sur tous les officiers du college, le procureur & le bibliothécaire sont à la nomination de la maison & société de Sorbonne, & tous les autres à celle du grand-maître, excepté le sous-bibliothécaire, qui est nommé par le bibliothécaire. La maison & société de Sorbonne a la direction générale de tout le college, à l'effet de quoi elle nomme quatre docteurs qui ont la qualité d'inspecteurs, & en font pendant quatre ans les fonctions, à-moins qu'on ne juge à-propos de les continuer. MM. les avocats & procureur-général ont aussi droit de visite dans ce college. La bibliotheque est publique, & s'ouvre deux fois la semaine, le lundi & le jeudi. Les fonds affectés pour l'entretien du college sont l'abbaye de S. Michel en l'Herm, diocèse de Luçon, qui y est unie, des rentes sur l'hôtel de ville de Paris, & sur les cinq grosses fermes, & plusieurs maisons bâties aux environs du college. On y ouvrit les classes au mois d'Octobre 1688 ; & depuis ce college s'est toujours maintenu dans une grande splendeur. Lettres-patentes du roi pour le college Mazarin. Fondation du college Mazarin.


QUATRE-TEMSS. m. pl. (Hist. ecclés.) jeûnes de l'Eglise dans les quatre saisons de l'année pendant trois jours d'une semaine en chaque saison, savoir le mercredi, le vendredi & le samedi. Voyez SAISON & JOUR.

Quelques-uns ont attribué l'institution au-moins de trois jeûnes par an aux apôtres, d'autres au pape Caliste, mais cette opinion n'est fondée que sur une fausse decrétale de ce pontife. Il est certain que le jeûne des quatre-tems étoit établi dans l'Eglise romaine dès le tems de S. Léon, qui distingue nettement dans ses sermons les jeûnes qui se pratiquoient aux quatre saisons de l'année, dans lesquels on jeûnoit le mercredi, le vendredi & le samedi ; savoir celui du printems, dans le carême ; celui de l'été, avant la Pentecôte ; celui d'automne, au septieme mois ; & celui de l'hiver, au dixieme. On ne trouve point cet usage établi dans l'église grecque, on lit seulement dans les constitutions apostoliques qu'il y avoit une semaine de jeûne après la Pentecôte. L'observation du jeûne des quatre-tems a passé de l'Eglise romaine dans les autres églises d'Occident, mais elle n'y a pas été tout-à-fait uniforme pour ce qui regarde le tems & les jours de ce jeûne. Le jeûne des quatre-tems du printems s'observoit d'abord en la premiere semaine du mois de Mars ; celui de l'été, dans la seconde semaine du mois de Juin ; celui de l'automne, dans la troisieme semaine du mois de Septembre ; & celui de l'hiver, en la quatrieme semaine du mois de Décembre. Mais le pape Gregoire VII. vers la fin du xj. siecle, ordonna que le jeûne de Mars seroit observé en la premiere semaine de carême, & celui de Juin dans l'octave de la Pentecôte, ceux de Septembre & de Décembre demeurant aux jours où ils se faisoient auparavant. Il semble que dans le vij. siecle où vivoit S. Isidore, on ne connoissoit en Espagne que deux de ces jeûnes, celui d'après la Pentecôte & celui du mois de Septembre. Le concile de Mayence, que Charlemagne fit assembler en 813, parle des quatre-tems comme d'un établissement nouveau qui se faisoit en France à l'imitation de l'église de Rome. Les jeûnes des quatre-tems n'ont pas été institués seulement pour consacrer à Dieu les quatre parties de l'année par la mortification & la pénitence, comme dit S. Léon, & pour obtenir sa bénédiction sur les fruits de la terre, mais aussi pour implorer la grace du S. Esprit dans les ordinations des prêtres & des diacres qui se faisoient le samedi de ces quatre-tems, comme on le voit dans l'épître IX. du pape Gélase vers la fin du v. siecle. Thomassin, traité historique & dogmatique des jeûnes de l'Eglise.

M. Chambers observe que dans les lois du roi Alfred & dans celles du roi Canut les jour de jeûnes des quatre-tems sont appellés ymbren, c'est-à-dire jours circulaires, d'où l'on a fait par corruption en anglois ember-days. Leurs canonistes appellent ces semaines quatuor anni tempora, les quatre saisons cardinales sur lesquelles se fait la révolution de l'année. C'est pourquoi Henshaw pense que ce mot ymbren a été formé par corruption de tember, qui vient de tempora.

Somner croit qu'originairement c'étoient des fêtes instituées pour implorer la bénédiction de Dieu sur les fruits de la terre ; &, suivant cette idée, Skinner pense que le mot ember vient des cendres que l'on répandoit alors sur la tête des fideles en signe de pénitence. Les Anglicans ont aussi destiné ces jours à l'ordination des prêtres & des diacres, suivant leur rit. Chamb. Diction. lettre Q, au mot Quatre-tems.

QUATRIEME, s. m. partie d'un tout divisé en quatre parties égales. Avoir un quatrieme dans une affaire de commerce, un armement, une société, c'est y être intéressé pour une quatrieme portion. Dictionn. de commerce.

QUATRIEME, au jeu de piquet, se dit de quatre cartes en séquence, comme de l'as, le roi, la dame & le valet, qui font ensemble une quatrieme majeure. Les autres se nomment de la premiere carte qui les commence ; si c'est le roi, par exemple, c'est une quatrieme au roi ; si c'est la dame, à la dame, ainsi des autres. Toute quatrieme vaut quatre, quand elle n'est pas effacée par une supérieure, & rien pour les deux joueurs qui en auroient chacun une semblable.


QUATRIENNALadj. (Gram.) qui revient tous les quatre ans ; une fonction quatriennale ; le quatriennal.


QUATRINOMES. m. (Algeb.) est une quantité composée de quatre termes, comme a + b + c + d.


QUATROUILLÉadj. (Vénerie) se dit d'un poil mêlé aux chiens parmi leur principale couleur.


QUATRUPLES. m. à la monnoie, sont des pieces de plaisir, voyez PIECES DE PLAISIR, que l'on fait par des ordres particuliers du prince ; les quatruples valent quatre fois la valeur d'une monnoie courante ; comme en France, les quatruples valent 4 louis.


QUATUORS. m. est le nom qu'on donne aux morceaux de Musique, qui sont à quatre parties récitantes. Voyez PARTIES. (S)


QUATUORVIRS. m. (Gouvern. romain) magistrat romain qui avoit trois collegues destinés avec lui aux mêmes fonctions, ou à la même administration. IIII vir ou quatuorvir, c'étoit quelquefois à des quatuorvirs qu'on donnoit la charge de conduire & d'aller établir les colonies que l'on envoyoit dans les provinces, & quelquefois on en chargeoit cinq personnes, qu'on nommoit par cette raison quinquevirs. Il y avoit aussi des quatuorvirs dans l'empire pour veiller à l'entretien & réparation des chemins ; c'étoient les voyeurs de l'empire. Ils furent établis par un sénatus-consulte, parce que les censeurs, qui auparavant étoient chargés de ce soin, n'y pouvoient vaquer à cause de la multitude des affaires dont ils étoient accablés.

QUATUORVIRS nocturnes, (Police de Rome) c'étoient de petits officiers du college de vigintivirs, dont l'emploi consistoit à faire la ronde pendant la nuit dans les rues de Rome, avec pouvoir d'arrêter les vagabonds, les gens sans aveu, ou les esclaves ; on les appelloit aussi viales, c'est-à-dire ambulans, parce qu'ils alloient dans tous les quartiers sans qu'on pût prévoir le lieu. (D.J.)

QUATUOR VIRI AB AERARIO, (Ant. rom.) titre que l'on donnoit dans les Gaules & ailleurs, à quatre personnes chargées de l'administration des deniers publics ; c'est ce que justifient plusieurs inscriptions rapportées par Poldo d'Albenas & par Grasser, aussi-bien que celle-ci découverte à Nismes en 1739, N. SOILLIO, Titi Filio VOLTinia VALERIANO Quatuorviro AB AERARio, car c'est ainsi qu'elle doit être lue. Les quatuorviri étoient des magistrats particuliers aux colonies & aux municipes dépendans de l'empire romain. On ne connoît point leur origine, parce que l'histoire ne parle que de l'institution des magistrats & des officiers de Rome, sans rien dire de ceux des provinces & des autres villes.


QUATZALCOATLS. m. (Hist. mod. Superst.) c'est le nom que les Mexicains donnoient à la divinité des marchands. Elle est représentée sous la figure d'un homme, mais avec la tête d'un oiseau à bec rouge, avec des dents, & couvert d'une espece de mitre pointue. Sa main étoit armée d'une faux ; ses jambes étoient ornées de bijoux d'or & d'argent. Ce dieu avoit un temple magnifique chez les Cholulans, peuples voisins du Mexique, & l'on s'y rendoit en pélérinage de toutes les provinces de l'empire. Sa statue étoit entourée d'un tas d'or, d'argent, de plumes rares, & d'autres choses précieuses. On célébroit une fête annuelle en son honneur, & on lui sacrifioit un captif, que l'on avoit soin de bien engraisser ; les prêtres lui annonçoient son sort neuf jours avant la cérémonie ; & s'il s'en affligeoit, son chagrin passoit pour un signe de mauvais augure ; mais les prêtres remédioient à cet inconvénient par des cérémonies qui, selon eux, changeoient les dispositions de la victime ; le sacrifice se faisoit au milieu de la nuit ; on offroit son coeur palpitant à la lune, & le corps étoit porté chez le principal des marchands où il étoit rôti pour le festin qui devoit se faire ; la fête se terminoit par des danses & des mascarades.


QUAUCOPALTIC-XIXIOS. m. (Hist. naturel. Botan.) arbre du Mexique qui a le tronc uni & tendre ; ses feuilles ressemblent à celles du basilic ; il porte un fruit verd en naissant, mais qui rougit en mûrissant. Cet arbre fournit une résine que les Indiens nomment quauheitlali ; elle passe pour arrêter le sang, & pour être un puissant remede dans la dyssenterie ; mais il faut en prendre avec modération.


QUAUHAYOHUATLIS. m. (Hist. nat. Bot.) grand arbre de la nouvelle Espagne, dont le tronc est gros, rouge, tortu & garni de beaucoup de branches ; ses feuilles sont longues & étroites comme celle du rododendron, ou de l'adelfe. Son fruit est rond & applati comme la feve marine, mais moins gros. Ce fruit infusé dans du vin, fait un excellent purgatif lorsqu'on en a ôté l'enveloppe. On nomme cet arbre quatlalatzin ; cependant sa description ne s'accorde point avec celle de l'arbre que l'on trouvera décrit sous ce nom.


QUAUHYACOcuilensium, (Botan. exot.) nom d'un grand arbre des Indes, dont les feuilles ressemblent à celles du citronnier ; son écorce est d'une odeur forte, astringente & dessicative.


QUAUTICONEX(Hist. nat. Botan.) arbre du Mexique d'une grandeur médiocre ; son tronc est gros, dur & odorant ; ses feuilles sont larges, sa fleur est petite & blanche ; son fruit ressemble aux baies du laurier. On coupe son écorce en pieces pour la mettre en macération dans l'eau pendant quatre jours ; on expose ensuite cette écorce au soleil ; & lorsqu'elle commence à s'échauffer, on en tire, par le moyen d'un pressoir, une huile ou un baume dont on vante les vertus.


QUEATUMO(Géogr. mod.) cap & bourgade de la Grece, sur la côte de l'Archipel, au midi de Démétriade, à l'extrêmité méridionale de la côte orientale de la presqu'île qui forme le golfe de Volo. Le cap est le même que le Sepias des anciens.


QUEBEC(Géogr. mod.) ville de l'Amérique septentrionale, capitale du Canada, avec une rade, un port, un château fortifié, & un évêché qui ne releve que du pape.

C'est au sieur de Champlain, gentilhomme de Saintonge, que les François doivent le premier établissement de Quebec. Il le commença en 1608, & y mourut en 1635, au bout de 27 ans de travaux. Cette ville est sur la rive septentrionale du fleuve S. Laurent, à six-vingt lieues de la mer, entre une petite riviere, qui porte le nom de S. Charles, & un gros cap, qu'on appelle le cap aux diamans, parce qu'on y trouve quelquefois de faux diamans, semblables aux pierres d'Alençon.

Les Anglois furent obligés de lever le siege de Quebec en 1690 ; mais ils ont pris cette ville en 1759. Long. selon Cassini, 307. 38'. 30''. latit. 46. 55. & suivant Harris, long. 386. 38'. 48''. latit. 60.

En 1744. M. Gautier estima que son thermometre étoit descendu au 33 degré de celui de M. de Réaumur ; nous disons estima, car le mercure étant rentré dans la boule après le 32 degré, il n'a pu avoir le dernier terme du froid que par estimation, & ce froid se trouvoit environ 17 degrés plus fort que celui de 1709 dans nos climats, ce qui est le plus grand froid artificiel que Fahrenheit ait pu faire. Le singulier est que Quebec est à-peu-près sous le parallele de 46 à 47 degrés qui répondent au milieu de la France ; preuve bien évidente que le degré de froid ne dépend pas toujours du lieu où on l'observe. (D.J.)


QUECKBRUNN(Hist. nat.) c'est une fontaine fameuse qui se trouve à Bunzlau en Silésie, dont l'eau est très-pure & très-bonne à boire ; elle a la propriété d'être chaude en hiver & froide en été.


QUEDA(Géog. mod.) petit royaume d'Asie, dans la presqu'île au-delà du Gange, près du détroit de Malaca. Le prince de cet état est tributaire du roi de Siam.

Les habitans sont Malais, ils suivent la secte mahométane des Turcs & des Mogols. Leurs maisons sont bâties de bambou, & élevées sur des piliers, à quatre ou cinq piés de terre, à cause de l'humidité. Le roi & quelques-uns des plus riches ont des maisons de planches. Leurs vêtemens sont semblables à ceux des malais de Malaca, de Jor & de Sumatra. Ils ont les cheveux longs, une piece de toile leur entoure la tête sans la couvrir entierement. Ils portent sur eux un poignard tranchant long de 15 pouces, & large de 2. Ils ont aussi des Zagayes. Il y a dans le pays plusieurs familles venues de la côte de Coromandel. On y trouve quelques Chinois qui y viennent de Siam par terre.

Ce royaume n'a pas vingt mille habitans ; il est rempli de grandes forêts, où l'on voit quantité de bufles sauvages, d'éléphans, de cerfs & de tigres ; on y prend les éléphans comme dans le royaume de Siam, & c'est un des principaux revenus du roi. Outre les fruits ordinaires qui viennent dans les Indes, la terre y produit d'elle-même plusieurs fruits excellens inconnus ailleurs, parmi lesquels le dangoustan & le durion sont les plus estimés.

Le roi ne leve aucun tribut sur ses sujets ; il a des mines d'un étain qui est aussi blanc que celui d'Angleterre, mais qui n'en a pas la solidité. Il en fait fabriquer des pieces de monnoie qui pesent une livre, & qui ne valent que sept sous. Les marchands de Surate viennent y charger de l'étain qu'on appelle calin aux Indes. Ceux de la côte de Coromandel y portent des toiles de coton, & ils en tirent de l'étain & des éléphans. Je laisse les autres détails aux lecteurs des lettres édifiantes. J'ajoute seulement que la capitale de ce petit royaume porte le même nom. Sa longit. est 160d. 50. latitude 61. 25. (D.J.)


QUEDLINBOURG(Géogr. mod.) petite ville d'Allemagne, au cercle de la haute Saxe, entre Halberstad & Anhalt, sur les confins du duché de Brunswick, avec une abbaye dont l'abbesse est princesse de l'Empire, sous la protection de l'électeur de Brandebourg. Cette petite ville est sur la riviere de Bode, à quatre lieues sud d'Halberstad, 13 ouest de Berneberg. Long. 29. 6. lat. 51. 18.

L'abbaye de Quedlinbourg fut fondée, à ce que l'on croit, par Henri l'Oiseleur, en 932, & ce prince y fut inhumé en 936. Mathilde sa fille en fut la premiere abbesse. Le territoire de cette abbaye, s'étend à deux lieues à la ronde. L'abbesse Anne de Stolberg y introduisit la religion protestante qu'on y professe toujours, & l'abbesse peut recevoir autant de dames conventuelles qu'elle le juge à propos. Elle envoie ses députés aux dietes ; son contingent est un cavalier & dix fantassins.

Quenstedt (Jean-André), théologien assez célebre parmi les Luthériens, naquit en 1617 à Quedlinbourg, & mourut en 1688, après avoir donné un volumineux système de théologie qu'on ne lit plus, & qui parut à Wittemb. en 1685 & 1696, in-fol. On a joint quelques-unes de ses dissertations les plus curieuses au recueil nommé Thesaurus philologicus ; mais on fait plus de cas de son ouvrage intitulé Sepultura veterum, seu tractatus de antiquis ritibus sepulchralibus Graecorum, Romanorum, Judaeorum & Christianorum, Wittebergae 1648 & 1660 in-8°. Ce traité a été inséré dans le tome XI. du trésor des antiquités grecques de Gronovius.

Le lecteur curieux des détails qui concernent cette petite ville, peut consulter l'ouvrage de Kettner (Frédéric Ernest), intitulé les antiquités de Quedlinbourg, Francofurt. 1712, in-4°. (D.J.)


QUEEN'S-BOROUG(Géog. mod.) petite ville d'Angleterre, dans la province de Kent. Elle envoie deux députés au parlement, & est à quarante-cinq milles sud-est de Londres. Long. 18. 22. lat. 51. 14.


QUEEN'S-COUNTY(Géog. mod.) c'est-à-dire, le comté de la Reine ; contrée d'Irlande dans la province de Leinster, & l'un des onze comtés qui la composent. Les Irlandois l'appellent en leur langue Lease. Ce comté a 35 milles de long & 35 de large. C'est un pays marécageux & couvert de bois. Sa ville principale se nomme Mariborough, & plus communément Queen's-town.


QUEEN'S-FERRY(Géog. mod.) petite ville d'Ecosse, dans la province de Lothian, sur le Forth, à 15 milles N. O. d'Edimbourg. Longit. 13. 35. latit. 56. 20.


QUEEN'S-TOWN(Géog. mod.) petite ville d'Irlande, dans la province de Leinster, capitale du Queen's-county, avec titre de baronie. Elle tient marché public, & envoie deux députés au parlement d'Irlande. Long. 11. 18. lat. 53. 36.


QUEI(Hist. nat.) nom que les Chinois donnent à une terre blanche fort douce au toucher, & assez semblable à ce qu'on appelle le talc de Venise. Les femmes s'en frottent le visage pour se rendre le teint uni & la peau douce.


QUEICGEU(Géog. mod.) prononcez Queitcheou ; province de la Chine, la quatorzieme en rang ; elle est bornée nord par la province de Suchuen, & par la province de Huquang ; sud-est par la province de Quangei ; sud-ouest par celle de Junnan : c'est un pays très-ingrat & hérissé de montagnes inaccessibles ; il est habité en partie par des barbares indépendans des Chinois. Long. de Gueiyang sa capitale, 122. 57. lat. 26. (D.J.)


QUEINou OLINS, voyez ESQUAINS.


QUEISSLA, (Géog. mod.) petite riviere d'Allemagne, qui prend sa source dans le duché de Jaüer en Silésie, & se dégorge dans le Bober.


QUENA(Langue franç.) vieux mot qui s'est dit il y a long-tems pour femme.


QUENAICES. m. (Droit coutumier) c'est, dit Ragueau dans son indice, un droit connu dans la Bretagne, par lequel un seigneur féodal retire l'héritage roturier après la mort du détenteur décédé sans hoirs de son corps. Aubert sur Richelet.


QUENOUILLE(terme de Corderie) est une perche de sept à huit piés de longueur, au bout de laquelle les fileurs attachent une queue de chanvre, & l'ajustent sur leur côté à-peu-près comme les femmes font leur quenouille. Voyez l'article CORDERIE.

QUENOUILLE, s. f. (terme de Fileuse) c'est un bâton ou roseau d'environ trois piés & demi de longueur, & de sept ou huit lignes de grosseur, ordinairement tourné au tour, sur le haut duquel on attache ou bien on étend les chanvres, lins, cotons, soies ou laines que l'on veut filer. Les quenouilles pour les filasses sont différentes de celles pour les laines ou soies, en ce que ces dernieres ont seulement un croissant de métal ou de bois au bout pour y attacher ce qu'on veut filer ; & que les autres sont enflées & grossies vers ce même bout, soit avec une espece de cône de bois ou de liege, soit avec de la bourre, couverte de toile ou d'étoffe, pour y tendre les filasses. L'on se sert également de quenouille soit que l'on file au fuseau, soit que l'on file au rouet. (D.J.)

QUENOUILLE, en terme d'Orfevre en grosserie, voyez POUPEES.

QUENOUILLE (grande) à cul rond, terme de pêche usité dans le ressort de l'amirauté de Dieppe ; c'est le nom d'un bateau.

QUENOUILLE A CUL QUARRE (terme de Pêche) bateau pêcheur du pollet de Dieppe, usité dans l'amirauté de Dieppe.

QUENOUILLE (petite), autre bateau pêcheur du pollet de Dieppe ; terme de pêche usité dans le ressort de l'amirauté de Dieppe.

QUENOUILLE SAUVAGE, (Botan.) nom vulgaire de l'espece de cnicus, nommée par Tournefort cnicus attractilis lutea ; cette petite plante ne pousse des tiges qu'à la hauteur de six ou huit pouces ; ses feuilles sont un peu velues & piquantes ; ses fleurs sont des bouquets à fleurons découpés en lanieres de couleur jaune, soutenues par un calice écailleux entouré de quelques feuilles. Lorsque ces fleurs sont passées, il leur succede des semences quarrées, noires, luisantes, garnies d'une aigrette. (D.J.)


QUENOUILLÉES. f. (terme de Manuf. de laine) une quenouillée contient deux traits unis, formant ensemble ce qui suffit pour le travail d'une quenouille. On entend par trait cette quantité de laine attachée à chaque fil.


QUENOUILLETES. f. (Fondeurs) les quenouilletes de Fondeur sont des verges ou tringles de fer qui ont à l'un des bouts une espece de cylindre aussi de fer, arrondi par l'extrêmité ; elles ont quelques pouces de hauteur, & sont d'un diametre convenable. Les fondeurs s'en servent pour boucher les godets ou entrées des jets qui aboutissent à l'écheno, jusqu'à ce qu'il soit suffisamment rempli de métal liquide pour qu'il tombe en même tems dans le moule par tous les jets dont on retire les quenouilletes. (D.J.)


QUENSS. m. (Lang. franc.) ce terme signifie dans nos anciens auteurs françois, un comte. On le trouve dans Villehardouin, & dans Guillaume Guyart, dont Ducange rapporte ces deux vers :

Et quens qui tant ot bataillé

Qu'il y ere suant & travaillé.

Et dans le roman de la Chasse cité par Borel : Là fut li quens de Tancarville. Aubert sur Richelet. (D.J.)


QUENTINSAINT, (Géog. mod.) ancienne ville de France en Picardie, capitale du Vermandois, au diocese de Noyon, de l'intendance d'Amiens, & du parlement de Paris. C'est une place forte, qui a environ sept mille habitans. Son commerce consiste en belles toiles de batiste. Cette ville a une coutume particuliere. Elle est située sur la Somme à 6 lieues de Peronne, 9 de Cambray, 14 d'Amiens, 13 d'Arras, & 30 de Paris. Long. 20, 57. lat. 49. 50. 51.

Saint-Quentin est l'Augusta Veromanduorum, & ce n'est point le village nommé Vermand qui est l'ancienne Augusta des Vermandois, comme le pensent Cluvier & Sanson. Toutes les anciennes chroniques déposent contre leur opinion. On peut lire dans les mém. de Littér. tome XIX. la dissertation de M. l'abbé Belley, où il prouve trois choses ; 1°. que l'Augusta des Veromandui est la ville qui a pris le nom de Saint-Quentin ; 2°. qu'elle fut la capitale de son peuple sous la domination romaine ; 3°. qu'elle a été le siége de ses premiers évêques.

En effet, l'histoire nous apprend que cette ville ayant été saccagée par les barbares, l'évêque, nommé saint Médard, se retira en 531 à Noyon, qui étoit la seconde ville des Veromandui. Dans la suite le corps de saint Quentin ayant été retrouvé dans les masures de Saint-Quentin, la ville se rétablit par la dévotion que les peuples portoient à la mémoire de ce saint, dont l'église est une des plus belles de France. Les curieux peuvent encore s'instruire sur cette ville, dans un livre assez rare, intitulé, antiquités de l'Auguste des Vermandois, à présent nommée Saint-Quentin, par le sieur Lenin, ingénieur du roi à Noyon, 1671, in-4°.

Cependant nous ne connoissons guere cette ville que depuis le xvj. siecle. On sait que les défaites de Crécy, de Poitiers, d'Azincourt, n'ont pas été plus funestes à la France, que le fut la victoire de Saint-Quentin, par les Espagnols en 1557. Il ne resta rien de l'infanterie françoise, tout fut tué ou pris. Le connétable de Montmorenci, & presque tous les officiers généraux, furent prisonniers, un duc d'Enghien blessé à mort, la fleur de la noblesse détruite, la France dans le deuil & dans l'allarme. Philibert-Emanuel de Savoye prit d'assaut Saint-Quentin après cette fatale journée. Henri II. fit fortifier Paris à la hâte ; mais Philippe se contentant d'aller voir son camp victorieux, donna le tems au duc de Guise de revenir d'Italie, & de rassurer le royaume. Saint-Quentin fut rendu à la France deux ans après.

Gobinet (Charles), docteur de la maison de Sorbonne, né à Saint-Quentin, mourut à Paris en 1690, à 77 ans. Il a donné plusieurs petits ouvrages de piété.

Mais d'Acheri (dom Luc), bénédictin de la congrégation de saint Maur, a fait plus d'honneur à Saint-Quentin, où il naquit en 1609. Il a publié entr'autres ouvrages en 1645, l'épître attribuée à saint Barnabé. On lui doit un recueil de pieces importantes, qui étoient jusqu'à lui restées manuscrites, & qu'il a intitulé spicilegium. Enfin son érudition l'a mis au rang des savans françois du xvij. siecle ; il mourut à Paris à l'abbaye de Saint-Germain-des-prés en 1685, âgé de 76 ans. (D.J.)


QUERA-IBAS. m. (Botan. exot.) nom d'un arbre qui croît dans le Brésil, & dont Marggrave n'a donné qu'une description tronquée, qu'il couronne, en disant que l'écorce de cet arbre pilée s'emploie par les naturels du pays pour guérir les ulceres des jambes & des autres parties du corps.


QUÉRASQUE(Géog. mod.) en italien Cherasco, & en latin moderne Clarascum, ville d'Italie en Piémont, dans la province de Cherasco, au confluent de la Sture & du Tanaro, à 8 lieues au nord-est de Coni ; & à dix au sud-est de Turin.

Ce n'étoit originairement qu'un château, qui en 1220 commença à se former en ville, laquelle devint assez puissante, & se gouverna pendant quelque tems en république. L'empereur Charles V. s'en rendit ensuite le maître ; mais la paix de Cambrai en 1559, en assura la possession au duc de Savoie, & sa postérité en jouit depuis ce tems-là. C'est maintenant une des plus fortes clés du pays, & le roi de Sardaigne y entretient un gouverneur. L'évêque d'Asti la gouverne pour le spirituel. Long. 25. 30. latit. 44. 36. (D.J.)


QUERATS. m. (Marine) c'est la partie du bordage, comprise entre la quille & la premiere préceinte.


QUERCERELLEou CRESSERELLE, ou CRÉCELLE, s. f. (Ornithol.) mot sous lequel vous trouverez la description de cet oiseau de rapine dans ce Dictionnaire.

Je remarquerai seulement ici, que c'est vraisemblablement celui qui est nommé par Aristote cenchrios, & par Pline, l. XXXVII., ch. lij. tinunculus. Aristote prétend que le cenchrios fait ses oeufs rouges comme son nom le signifie, & c'est ce que Pline attribue aussi au tinunculus. Il dit encore, liv. X. chap. xxxvj. que le tinunculus bâtit presque toujours son nid au haut des maisons & des tours ; & qu'il est ami des pigeons. Ce qu'il y a de sûr, c'est que la quercerelle se nourrit de souris, de rats, de mulots qu'elle trouve dans les champs où elle procure par sa chasse un bien inestimable, principalement dans les terres labourables. Il y a tels lieux, où sans elle, les milans & les buses, il faudroit que les habitans abandonnassent leurs terres par le dommage qu'y causeroit l'abondance des rats, des souris & des mulots. Aristote parlant de la quercerelle, nous dit que son gesier est d'une structure lâche & charnue, au lieu que les autres oiseaux de rapine l'ont dur & calleux. Voyez CRESSELLE. (D.J.)


QUERCUS CAPITA(Géog. anc.) c'est-à-dire les têtes de chêne, . Les Athéniens nommoient ainsi le même lieu que les Baeotiens appelloient tria capita, les trois têtes, , selon Herodote, in calliop. Ce lieu étoit à l'entrée du mont Cythaeron en allant à Platées. Thucydide, liv. III. en fait aussi mention.


QUERCYLE (Géog. mod.) en latin Cardurcinus pagus, province de France dans le gouvernement de Guyenne ; elle est bornée au nord par le Limousin, au midi par le haut Languedoc, au levant par le Rouergue, & au couchant par l'Agénois & le Périgord.

On divise le Quercy en haut & en bas ; le Lot en fait la séparation. Cahors est la capitale, & Montauban est le principal lieu du bas Quercy ; Cahors & Montauban sont deux évêchés.

Le Quercy est un pays peu commerçant, mais fertile en bled, en fruits & en excellens vins : voici l'histoire de cette province.

Le nom de Quercy ou Cahourcin, comme les anciens le nommoient, & celui de sa capitale, Cahors, sont venus de Cadurci, peuple célebre dans les commentaires de César, par sa valeur, & pour avoir tenu jusqu'à sa mort le parti de Vercingentorix. Ce peuple alors étoit du nombre des Celtes ; mais Auguste l'attribua à l'Aquitaine ; & depuis sous Valentinien, après la division de la Province en deux, c'est-à-dire en premiere & seconde, les Cadurci furent mis sous la premiere, & sous la métropole de Bourges. Les Visigots s'en rendirent les maîtres dans le cinquieme siecle, & ils en furent dépossédés au commencement du sixieme par les François. Les rois françois ayant partagé entr'eux l'Aquitaine, le Quercy échut aux rois d'Austrasie, qui ont possédé ce pays jusqu'au déclin de la race de Clovis, lorsqu'il n'y avoit plus qu'un prince qui avoit le titre de roi, mais dont l'autorité étoit entre les mains des maires du palais. Eudes, duc d'Aquitaine, dans le commencement du huitieme siecle, se rendit maître de Cahors, comme de tout le reste de l'Aquitaine, & ses descendans ont été en possession du Quercy jusqu'au tems du roi Pepin qui conquit toute l'Aquitaine.

Les rois de la France occidentale, depuis Charles le Chauve, jouirent du Quercy jusqu'au regne de Louis d'Outremer. Ce fut alors que les comtes de Toulouse, qui s'étoient rendus absolus dans leur comté, s'approprierent le Quercy. Ensuite cette contrée fut ôtée aux descendans de Raymond de Saint-Gilles, & adjugée par le haut domaine à saint-Louis, par une sentence que les légats du pape rendirent l'an 1228. Les Roi Jean fut contraint par le traité de Bretigny de céder aux Anglois le Quercy en toute souveraineté, & ils en jouirent à ce titre, jusqu'au regne de Charles V. qui reprit ce que son pere avoit perdu en Aquitaine. Depuis ce tems-là le Quercy est demeuré uni à la couronne de France. (D.J.)


QUEREINA(Hist. nat.) oiseau du Brésil, dont le plumage est d'une beauté singuliere. Il a l'estomac d'un rouge très-vif, les aîles noires, & tout le reste du corps bleu.


QUERELLES. f. (Gramm.) démélés, débat, dispute, contestation. Les querelles commencent par des mots, & finissent souvent par des blessures. Ce sont les peuples qui payent, souffrent dans les querelles des grands, & sont forcés de paroître contens.

QUERELLE D'INOFFICIOSITE, (Jurisprud.) est la même chose que plainte d'inofficiosité. Voyez INOFFICIOSITE, LEGITIME, & au mot PLAINTE, l'article PLAINTE D'INOFFICIOSITE, le mot PRETERITION, TESTAMENT.

QUERELLE, SERGENT DE LA (Jurisprud.) Voyez au mot SERGENT.


QUERELLER(Jurisprud.) dans cette matiere, signifie débattre, attaquer, se plaindre, comme quereller un testament d'inofficiosité.


QUERELLEURS. m. (Jurisprud.) se dit dans quelques coutumes, & provinces, pour exprimer celui qui intente la querelle ou plainte d'inofficiosité, ou qui intente complainte, ou qui attaque un arrêt ou autre jugement, ou un testament, ou autre acte. V. COMPLAINTE, INOFFICIOSITE, QUERELLE. (A)

QUERELLEUR, on appelle ainsi en Vénerie, un chien pillard.


QUERIMONIES. f. (Jurisprud.) du latin querimonia, plainte, est un terme usité dans les tribunaux ecclésiastiques, pour exprimer la plainte que l'on rend au juge d'église, à l'effet d'obtenir permission de publier monitoire. (A)


QUERNFURT(Géog. mod.) ville d'Allemagne, entre la Saxe & la Thuringe, chef-lieu d'une principauté ou seigneurie de même nom, qui appartient à la branche de Saxe-Weissenfels. Long. 29. 52. lat. 51. 30. (D.J.)


QUEROLLA VALLEE DE, (Géogr. mod.) en latin Querollii vallis, selon M. de Marca, canton de la Catalogne, dans la partie de la Cerdaigne, qui est présentement à la France, & qui appartenoit autrefois à l'Espagne. Il est parlé de cette petite contrée, qui s'étend entre de hautes montagnes, dans les anciennes ordonnances de Louis-le-débonnaire, de Charles-le-chauve, & autres actes de ces tems-là.


QUERRON(Géog. anc.) lac d'Egypte, au-delà duquel on enterroit les morts, & qui étoit formé des eaux du Nil. Il a donné lieu à la fable du Caron des Grecs.


QUERRONÈSE(Géog. anc.) Etienne le géographe compte jusqu'à sept lieux particuliers de ce nom ; 1°. une ville de la presqu'île de la Doride près de Cnide, ce que ne dit point le passage d'Elien, sur lequel Etienne s'est fondé ; 2°. une autre ville dans la Thrace ; 3°. une ville de ce nom entre le promontoire Parthenium, & le front du Bélier, autre promontoire ; 4°. une île voisine de la Crete ; 5°. une ville de la Lybie ; 6°. un promontoire de la Lycie ; 7°. un autre promontoire auprès de la ville Coronide. Voyez le mot QUERSONNESE. (D.J.)


QUERSONNÈSE(Géog. anc.) en latin Chersonnesus : les Grecs ont dit ou . Ce mot signifie une presqu'île, c'est-à-dire un lieu entouré de la mer comme une île, mais pourtant attaché à la terre ferme par un côté.

La plûpart des savans en introduisant le mot Quersonnèse dans notre langue, écrivent Chersonese, d'après son orthographe primitive, en lui conservant néanmoins la prononciation du ch ou des Grecs, qui est semblable au qu ; mais quelques écrivains illustres, comme Mrs Tillemont, d'Ablancourt, & Tourreil écrivent Quersonnèse. Je n'approuverois pas cette orthographe ; cependant je m'en sers ici pour faire quelques additions à l'article Chersonese de ce Dictionnaire. Je ne parlerai toutefois que des quatre Quersonnèse fameuses dans les écrits des anciens ; savoir la Quersonnèse cimbrique, la Quersonnèse d'or, la Quersonnèse taurique, & la Quersonnèse de Thrace.

La Quersonnèse cimbrique, est la presqu'île où sont le Holstein, le Sleswig, & le Jutland ; les Cimbres ont les premiers habité cette presqu'île, & lui ont donné leur nom. Elle étoit autrefois bien plus considérable que de nos jours, comme il paroît par le grand nombre d'hommes de guerre qu'elle fournissoit, & par plusieurs îles qui en sont aujourd'hui détachées, & qui faisoient sans-doute partie du continent. Il est même très-vraisemblable que les Cimbres, qui firent du tems de la république romaine une sortie, y furent forcés par une inondation qui les mit trop à l'étroit, en couvrant une partie de leur pays. Florus, liv. III. c. iij. confirme cette conjecture des inondations qui forcerent les Cimbres, les Teutons, & les Tiguriens à fuir des extrêmités de la Germanie, & à chercher de nouvelles demeures, parce que, dit-il, l'Océan avoit inondé leurs terres ; nous avons aussi des expériences modernes du terrein que la mer a gagné sur cette presqu'île.

La Quersonnèse d'or des anciens, est ce que nous appellons aujourd'hui la presqu'île de Malaca, entre les golfes de Bengale & de Siam ; mais il y faut joindre encore une partie de la côte occidentale de Siam, & peut-être quelque chose de celle de Pégu. Il paroît par ce qu'en dit Ptolémée, qu'on ne connoissoit qu'imparfaitement cette presqu'île de son tems.

La Quersonnèse taurique des anciens, est connue des modernes sous le nom de presqu'île de Crimée, dans la petite Tartarie. Les anciens l'appelloient aussi scythica, scythique ; cimmeria, cimmérienne ; & pontica, pontique.

La Quersonnèse de Thrace ; est la presqu'île de l'Europe, entre la mer de Marmora, autrefois la Propontide, l'Hellespont, l'Archipel (autrefois la mer Egée), & le golfe de Mégarisse (autrefois Melanis sinus) ; elle tient à la Thrace par le nord-est ; elle a la Propontide à l'orient, le détroit des Dardanelles ou l'Hellespont au sud-est & au midi, l'Archipel au sud-ouest, & le golfe de Mégarisse au nord-ouest & au nord.

La Quersonnèse de Thrace est un pays fertile, & où l'on comptoit autrefois onze ou douze villes assez considérables : voici l'histoire ancienne de cette presqu'île, qui entourée de toutes les mers dont nous venons de parler, ne tient au continent que par une langue de terre, laquelle n'a que trente-sept stades ou cinq mille pas.

Du tems que Pisistrate regnoit à Athènes, les Dolouques, anciens peuples de Thrace, possesseurs alors de la Quersonnèse, que les Thraces absynthiens, voisins fâcheux, ravageoient à toute heure, firent si bien par leurs supplications, & par la pythie, dont la réponse les favorisa, que Miltiade partit accompagné d'une troupe de volontaires. A son arrivée on l'élut roi de la Quersonnèse. Ce Miltiade étoit oncle du fameux Miltiade qui gagna la bataille de Marathon. Il voulut d'abord mettre la Quersonnèse à couvert des invasions ordinaires des Absynthiens ; & pour mieux remplir l'attente de ses nouveaux sujets, il bâtit une muraille depuis la ville de Candie jusqu'à la ville de Paëtye, la premiere sur la Propontide, & l'autre sur la mer Egée : cette muraille fut en divers tems tantôt abattue, tantôt relevée.

L'ancien Miltiade mourut sans enfans ; deux de ses neveux lui succéderent l'un après l'autre. Le second nommé Miltiade comme son oncle, essuya de terribles revers. Les Scythes nomades le chasserent, & les Dolouques le rétablirent ; mais à trois ans de-là rechassé par les Phéniciens qui étoient au service de Darius, il se retira dans Athènes, & se vangea noblement à Marathon. La victoire de Mycale rendit depuis la Quersonnèse aux Athéniens. Ils en jouirent paisiblement, & par le conseil de Périclès y envoyerent une colonie.

Quand Lysander eut détruit Athènes, les habitans de cette presqu'île se mirent sous la protection de Lacédémone ; & quand Conon, fils de Timothée, eut relevé sa patrie, ils retournerent sous la domination des Athéniens leurs premiers maîtres. Sous les Lacédémoniens, Dercylide, leur général, que les Chersonnésiens avoient appellé d'Asie, rétablit la muraille ; mais les Thraces encore après la forcerent de nouveau, & Cotys, roi de Thrace, conquit la Quersonnèse sur eux. Chersoblepte, fils de ce Cotys, la leur céda. Cette presqu'île ne laissa pas de demeurer exposée aux continuelles incursions des Thraces, qui sur le plus léger prétexte, se jettoient sur ce pays.

L'unique moyen de les arrêter, c'étoit de percer l'isthme. Le moindre petit trajet eût été pour eux une barriere insurmontable ; ils n'avoient ni vaisseaux ni bâtimens armés en guerre. Athènes prenoit fort à coeur la sureté & la tranquillité de la Quersonnèse. Philippe promit qu'en faveur des Athéniens & de leurs colonies, il perceroit l'isthme à ses dépens : cela est encore à faire. On se contenta seulement de rebâtir la vieille muraille dont Pline, liv. IV. c. xij. parle comme d'un monument qui subsistoit de son tems.

C'est une belle chose que le decret des peuples de la Quersonnèse de Thrace, qui érigerent tout-à-la-fois un autel à la déesse de la reconnoissance, & un autre aux Athéniens qui les avoient affranchis du joug de Philippe : voici les termes de ce decret dont parle Démosthène dans sa harangue pour la couronne.

" Entre les peuples que la Quersonnèse comprend, les habitans de Seste, d'Eléonte, de Madytes, & d'Alopéconèse, décernent au peuple & au sénat d'Athènes, une couronne d'or de soixante talens (11222 liv. sterl. 5. sh.) & dressent deux autels ; savoir l'un à la déesse de la reconnoissance, & l'autre aux Athéniens, pour avoir, par le plus grand de tous les bienfaits, affranchi du joug de Philippe, les peuples de la Quersonnèse, & les avoir rétablis dans la possession de leur patrie, de leurs lois, de leur liberté, & de leurs temples ; bienfait dont ils garderont éternellement la mémoire, & qu'ils ne cesseront jamais de reconnoître, selon l'étendue de leur pouvoir ".

Au-reste, outre les quatre grandes Quersonnèses dont nous avons parlé, il y a eu diverses presqu'îles, caps, & lieux nommés Quersonnèse par les anciens. Etienne le géographe en nomme quelques-uns que nous avons cités d'après lui au mot Querronnèse, car les Grecs ont également dit Querronnèse & Quersonnèse, la différence n'est que dans les lettres ; c'est le même mot, ou du-moins la même signification. (D.J.)


QUESNOYLE, (Géog. mod.) en latin moderne Quercetum, petite ville des Pays-bas, dans la Flandre françoise, entre Maubeuge & Cambray, à sept lieues au nord-est de cette derniere, dans une grande plaine. C'est une place fort irréguliere, & fortifiée ; on y compte environ deux mille six cent habitans, & il y a un bailliage créé en 1661. Le prince Eugene prit le Quesnoy le 4 Juillet 1712, & le maréchal de Villars reprit cette place le 4 Octobre de la même année. Long. 21. 19. lat. 50. 15. (D.J.)


QUESSONOS. m. (Hist. mod. Culte) idole adorée par les peuples du royaume de Benguela en Afrique, qui lui offrent des libations d'un mêlange de vin de palmier & de sang de chevres.


QUESTAUXS. m. pl. terme de Coutume, ce sont dans la coutume de Bourdeaux, des personnes d'une condition presque servile, puisqu'elles sont attachées à la terre qu'elles cultivent, & ne peuvent l'abandonner sans le consentement du seigneur ; cette loi de barbarie devroit bien être abrogée pour toujours dans le royaume. (D.J.)


QUESTE(Jurisprudence) est un droit que certains seigneurs ont droit de lever tous les ans sur chacun chef de maison & famille tenant feu & lieu ; ce droit qu'on nomme ailleurs fouage, dépend de la coutume & des titres. Voyez FOUAGE, la Rocheflavin des droits seigneuriaux. Henrys, tome II. livre III. quest. 24.

QUESTE ABONNEE, est une taille seigneuriale qui a été réduite entre le seigneur & ses sujets taillables à une certaine somme fixe ; il en est parlé dans l'article 345 de la coutume de Bourbonnois.

QUESTE COURANTE, est une taille seigneuriale qui s'impose à la volonté du seigneur ; elle est ainsi appellée dans l'art. 128. de la coutume de la Marche. (A)


QUESTENBERGGROTTE DE, (Hist. nat.) c'est une grotte remarquable, qui se trouve au Hartz dans une montagne composée de pierre à chaux ; on dit qu'en été on y éprouve un froid excessif.


QUESTEUR(Hist. rom.) Les questeurs chez les Romains, étoient des receveurs généraux des finances ; leur ministere étoit de veiller sur le recouvrement des deniers publics, & sur les malversations que les triumvirs, appellés capitales, furent obligés d'examiner dans la suite. Le nom de questeur étoit tiré de la fonction attachée à cette charge.

Il y avoit trois sortes de questeurs : les premiers s'appelloient questeurs de la ville, urbani, ou intendans des deniers publics, questores aerarii : les seconds étoient les questeurs des provinces, ou questeurs militaires ; les troisiemes enfin étoient les questeurs des parricides, & des autres crimes capitaux. Il ne s'agit point ici de ces derniers, qui n'avoient rien de commun avec les autres.

L'origine des questeurs paroît fort ancienne, ils furent peut-être établis dès le tems de Romulus, ou de Numa, ou au-moins sous Tullus Hostilius. C'étoit les rois mêmes qui les choisissoient. Tacite, ann. 11. c. xxij. dit que les consuls se réserverent le droit de créer des questeurs, jusqu'à l'an 307. D'autres prétendent, qu'aussi-tôt après l'expulsion des rois, le peuple élut deux questeurs ou trésoriers, pour avoir l'intendance du trésor public. L'an de Rome 333, il fut permis de les tirer de l'ordre plébéien, & on en ajouta deux autres, pour suivre les consuls à la guerre, c'étoit des intendans d'armées. L'an 488 toute l'Italie étant soumise, on créa quatre questeurs pour recevoir les revenus de la république, dans les quatre régions d'Italie ; savoir, celles d'Ostie, de Calene, d'Umbrie & de Calabre.

Sylla en augmenta le nombre jusqu'à vingt, & Jules-César, jusqu'à quarante, afin de récompenser ses amis, c'est-à-dire, de les enrichir en appauvrissant les peuples. Une partie de ces questeurs étoit nommée par l'empereur, & l'autre partie par le peuple. Sous les autres empereurs leur nombre ne fut point fixé. De tous ces questeurs, il n'y en avoit que deux pour la ville, & pour la garde du trésor public, les autres étoient pour les provinces & les armées.

Le principal devoir des questeurs de la ville étoit de veiller sur le trésor public, qui étoit dans le temple de Saturne, parce que sous le regne de Saturne, dans l'âge d'or, on ne connoissoit ni l'avarice, ni la mauvaise foi, & de faire le compte de la recette & de la dépense des deniers publics. Ils avoient aussi sous leur garde les loix & les sénatus-consulte. Jules-César, à qui les sacrileges ne coutoient rien, rompit les portes du temple de Saturne ; & malgré les efforts de Métellus, il prit dans le trésor public, tout l'argent qui y étoit déposé. Cet événement de la guerre civile des Romains est peint par Lucain avec les couleurs dignes du poëte, & qui n'ont pas été flétries par le traducteur.

Lorsque les consuls partoient pour quelque expédition militaire, les questeurs leur envoyoient les enseignes qu'ils tiroient du trésor public. Le butin pris sur les ennemis, & les biens des citoyens condamnés pour quelque crime leur étoit remis, pour les faire vendre à l'encan. C'étoient eux qui recevoient d'abord les ambassadeurs des nations étrangeres, qui les conduisoient à l'audience, & leur assignoient un logement.

Outre cela, les généraux en revenant de l'armée juroient devant eux, qu'ils avoient mandé au sénat, le nombre véritable des ennemis & des citoyens tués, afin qu'on pût juger s'ils méritoient les honneurs du triomphe, ils avoient aussi sous eux des greffiers sur lesquels ils avoient jurisdiction.

Les questeurs des provinces étoient obligés d'accompagner les consuls & les préteurs dans les provinces, afin de fournir des vivres & de l'argent aux troupes, ils devoient aussi faire payer la capitation & les impôts ; les impôts étoient invariables, mais la capitation n'étoit pas fixe. Ils avoient soin du recouvrement des blés dûs à la république, & de faire vendre les dépouilles des ennemis, ils ne manquoient pas d'envoyer un compte exact de tout cela au trésor public. Ils examinoient aussi, s'il n'étoit rien dû à l'état. Enfin, ils gardoient en dépôt auprès des enseignes, l'argent des soldats, & ils exerçoient la jurisdiction que les généraux d'armées & les gouverneurs des provinces vouloient bien leur donner. S'il arrivoit que les gouverneurs partissent avant d'être remplacés, les questeurs faisoient leurs fonctions jusqu'à l'arrivée du successeur. Il y avoit ordinairement une si étroite liaison entre le questeur & le gouverneur, que celui-ci servoit en quelque façon de pere à l'autre : si le questeur venoit à mourir, le gouverneur, en attendant la nomination de Rome, faisoit exercer l'emploi par quelqu'un : celui-ci s'appelloit proquesteur.

Le questeur de la ville n'avoit ni licteur, ni messager, viatorem, parce qu'il n'avoit pas droit de citer en jugement, ni faire arrêter qui que ce fût, quoiqu'il eût celui d'assembler le peuple pour le haranguer. Les questeurs des provinces, au contraire, paroissent avoir eu leurs licteurs, au-moins dans l'absence du préteur. La questure étoit le premier degré pour parvenir aux honneurs ; la fidelité de la questure, la magnificence de l'édilité, l'exactitude & l'intégrité de la préture, frayoient un chemin sûr au consulat.

On ne pouvoit être questeur qu'à l'âge de vingt-cinq ans, & lorsqu'on avoit exercé cette charge, on pouvoit venir dans le sénat, quoique l'on ne fût pas encore sénateur. Elle fut abolie & rétablie plusieurs fois sous les empereurs. Auguste créa deux préteurs pour avoir soin du trésor public, mais l'empereur Claude rendit cette fonction aux questeurs, qui l'étoient pendant trois ans. Dans la suite, on établit une autre espece de questeurs, qu'on appella candidats du prince. Leur fonction étoit de lire les ordres de l'empereur dans le sénat. Après eux vinrent les questeurs du palais, charge qui se rapporte à celle de chancelier parmi nous, & à celle de grand logothete sous les empereurs de Constantinople. (D.J.)

QUESTEUR NOCTURNE, (Hist. nat.) les questeurs nocturnes étoient à Rome de petits magistrats inférieurs ordinaires, chargés de prendre garde aux incendies, & qui, durant la nuit faisoient la ronde dans tous les quartiers.

QUESTEUR DU PARRICIDE, (Hist. rom.) magistrat particulier que le peuple nommoit, & auquel il donnoit la puissance de connoître du parricide & autres crimes qui seroient commis dans Rome ; parce qu'auparavant, il étoit défendu aux consuls de juger de leur chef aucun citoyen romain ; cependant, comme les moeurs multiplioient journellement les crimes, le peuple vit de lui-même la nécessité d'y remédier, en revêtant un magistrat de cette autorité ; la même chose s'exécuta pour les provinces, & l'on appella quaesitores, inquisiteurs, les prêteurs qui furent chargés de cette commission. La loi premiere, §. 23. de origine juris, nous apprend l'origine de ce commissaire, qu'on appella questeur du parricide. Mais il faut savoir que ce questeur nommoit un juge de la question, c'est-à-dire du crime, lequel tiroit au sort d'autres juges, formoit le tribunal, & présidoit sous lui au jugement.

Il est encore bon de faire remarquer ici la part que prenoit le sénat dans la nomination de ce questeur du parricide, afin que l'on voie comment les puissances étoient à cet égard balancées. Quelquefois le sénat faisoit élire un dictateur, pour faire la fonction de questeur, quelquefois il ordonnoit que le peuple seroit convoqué par un tribun, pour qu'il nommât le questeur ; enfin, le peuple nommoit quelquefois un magistrat, pour faire son rapport au sénateur sur certain crime, & lui demander qu'il donnât le questeur, comme on voit dans le jugement de Lucius Scipion, dans Tite-Live. Liv. VIII. (D.J.)

QUESTEUR DU SACRE PALAIS, (Hist. du bas-Emp.) l'une des premieres dignités sous les empereurs de Constantinople. C'étoit le questeur qui souscrivoit les rescripts de l'empereur & les réponses aux requêtes & aux suppliques qu'on lui présentoit. Il dressoit aussi les lois, & les constitutions que l'empereur trouvoit à-propos de publier. Quelques-uns comparent les fonctions de cet emploi à celles de nos chanceliers : c'étoit ordinairement un jurisconsulte qu'on honoroit de cette charge, parce qu'il devoit connoître les lois de l'empire, les dicter, les faire exécuter, & juger des causes qu'on portoit par appel devant l'empereur. Constantin est le premier qui ait fait un questeur du sacré palais. (D.J.)


QUESTINon dit caissetin, parce qu'il ressemble à une petite caisse, partie du métier des étoffes de soie. Le questin est un espece de coffre de 6 pouces en quarré sur deux piés de longueur, il est attaché de longueur contre le pié de métier de devant ; il est garni de plusieurs rayons, il sert à fermer les différentes dorures en espoleine, & les différentes qualités de soie en cannettes & en espoleine qui servent à l'étoffe qui est sur le métier.


QUESTIONS. f. (Gram.) discours adressé à quelqu'un sur une chose dont on veut être instruit. Il se dit aussi des différens points d'une science ou d'un art qu'on peut avoir à discuter ; de quelques traités composés d'une maniere sceptique & inquisitive.

QUESTION, (Jurisprudence) est un point sur lequel on n'est pas d'accord, & qui est soumis à la décision du juge.

Question agitée, est celle qui est débattue par les auteurs ou par les parties.

Question appointée, est lorsque dans une cause d'audience les parties ont été appointées à écrire & produire.

Question controversée, est celle sur laquelle les parties, les juges, ou les auteurs sont partagés.

Question départagée, est celle où il y a eu partage d'opinions entre les juges, lesquels ont depuis pris un parti à la pluralité des voix.

Question de droit, est celle qui roule sur un point de droit, comme quand il s'agit d'expliquer le sens d'une loi dont on fait l'application à la cause, ou de déterminer quel est le droit d'une partie dans telle ou telle circonstance.

Question de droit public, est celle où le public se trouve intéressé, & qui doit se décider par les principes du droit public.

Question d'état, est celle qui concerne l'état d'une personne, c'est-à-dire sa liberté, les droits de sa naissance, tels que sa filiation, sa légitimité, la validité de son mariage.

Question étrangere, est celle qui n'a point de rapport à celle qui fait le véritable objet de la contestation.

Question de fait, est celle dont la décision ne dépend que de la discussion des faits.

Question indécise, est celle qui est encore pendante devant le juge, & soumise à sa décision.

Question majeure, est celle qui intéresse directement ou indirectement beaucoup de personnes ; on l'appelle majeure, parce qu'elle est plus importante que les questions ordinaires.

Question mixte, est celle qui naît de la contrariété des lois, coutumes, statuts & usages de deux pays différens ; par exemple, lorsque la coutume du domicile répute un homme majeur à 20 ans, & que celle du lieu où les biens sont situés ne répute majeur qu'à 25 ans ; dans ce cas, il s'agit de savoir, si on doit se régler par la coutume du domicile, ou par celle de la situation des biens, c'est une question mixte, parce qu'il se trouve deux lois différentes, qui sont pour ainsi dire, mêlées ensemble sur les questions mixtes. Voyez Dumolin, Dargentré, Stockmans, Voet, Rodemburge, Burgundus, Froland, Boulenois.

Question mue, est celle qui est déja élevée, à la différence de celle qui n'est pas encore née.

Question partagée, est celle sur laquelle les opinions des auteurs ou des juges sont partagées, de maniere qu'il s'en trouve autant pour soutenir un parti que pour l'autre. Voyez QUESTION DEPARTAGEE.

Question pendante, est celle qui est actuellement soumise à la décision du juge.

Question de pratique, est celle qui ne roule que sur quelque point d'usage de la pratique judiciaire.

Question problématique, est celle sur laquelle il y a des raisons & des autorités pour & contre, tellement que l'on est embarrassé à la décider.

Question de procédure, est celle qui ne touche que l'ordre de la procédure & l'instruction.

Question triviale, est celle qui est déja rebattue, & dont la décision est notoire & connue de tout le monde. Voyez CAUSE, CONTESTATION, INSTANCE, PROCES. (A)

QUESTION ou TORTURE, (Jurisprudence) est une voie que l'on employe quelquefois dans les affaires de grand criminel pour faire avouer à l'accusé le crime dont il est prévenu, ou pour avoir révélation de ses complices.

Cette voie consiste à faire souffrir à l'accusé des tourmens violens, qui ne sont pas néanmoins ordinairement capables de lui causer la mort.

On appelle cette torture question, parce qu'à mesure que l'on fait souffrir l'accusé, on lui fait des questions sur son crime & sur ses complices, si l'on soupçonne qu'il en ait.

L'usage de la question est fort ancien, puisqu'on la donnoit chez les Grecs ; mais les citoyens d'Athènes ne pouvoient y être appliqués, excepté pour crime de lése-majesté : on donnoit la question 30 jours après la condamnation ; il n'y avoit pas de question préparatoire. Voyez Cursius Fortunatus, rhetor. schol. l. II.

Chez les Romains, la loi 3 & 4, ad leg. jul. majest. fait voir que la naissance, la dignité & la profession de la milice garantissoient de la question ; mais on exceptoit, comme à Athènes, le crime de lése-majesté.

Ce qu'il y avoit de plus étrange, c'est que l'on donnoit la question à des tiers, quoique non-accusés, & seulement dans la vue d'acquérir des preuves ou témoignages du crime & des coupables ; c'est ainsi que par le S. C. Silanien, qui fut fait du tems d'Auguste, il fut défendu d'ouvrir ni de publier un testament quand le testateur avoit été tué dans sa maison, avant d'avoir mis à la question les esclaves, & fait punir ceux qui étoient coupables de la mort du défunt.

Mais, selon nos usages, on ne traite point ainsi les domestiques, lesquels sont personnes libres ; on n'ordonne d'ailleurs la question, que quand la nature du crime & la qualité des preuves le permettent, & on ne la fait point subir à d'autres personnes qu'aux accusés, & seulement lorsqu'il y a des indices qui ne sont pas suffisans pour condamner l'accusé, mais qui sont assez forts pour déterminer les juges à ordonner la question.

Les lois des Visigots commencerent à mettre plusieurs sages restrictions à l'usage de la question.

Suivant la loi salique, on la donnoit seulement aux esclaves ; & celui qui avoit fait mourir dans les tourmens de la question l'esclave innocent d'un autre maître, étoit obligé de lui en donner un autre pour toute satisfaction.

Les anciennes ordonnances portent que les nobles de Champagne ne pouvoient être appliqués à la question, sinon pour crime qui mérite la mort ; que les capitouls de Toulouse étoient pareillement exempts de cette épreuve. On en usoit de même pour toutes les personnes qualifiées, mais cela ne s'observe plus.

Pour ordonner la question, il faut un crime constant qui mérite peine de mort, & que la preuve soit considérable. Un seul indice ne suffit point, ni la déclaration d'un seul témoin, si elle n'est accompagnée d'autres indices.

La confession seule de l'un des accusés ne suffit pas non plus pour condamner les autres accusés à la question.

La déclaration d'un condamné à mort, & celle d'un blessé, en mourant, sont pareillement insuffisantes.

Les juges peuvent condamner l'accusé à la question les preuves tenantes, & ensuite condamner l'accusé à telle peine qu'il y échet, excepté celle de mort ; à laquelle il ne peut plus être condamné, à moins qu'il ne survienne de nouvelles preuves depuis la question.

On peut, par le jugement de mort, ordonner que le condamné sera préalablement appliqué à la question, pour avoir révélation de ses complices ; c'est ce qu'on appelle la question préalable.

Il n'appartient qu'aux cours souveraines d'ordonner que l'accusé sera seulement présenté à la question sans y être appliqué ; c'est une grace qu'on accorde aux impuberes, aux vieillards décrépits, aux malades & valétudinaires, auxquels la question ne pourroit être donnée sans danger de la vie ; on présente l'accusé à la question pour tâcher de tirer de lui la vérité par la terreur des peines.

Les femmes grosses ne peuvent être appliquées ni présentées à la question ; mais on ne s'en rapporte pas à leur déclaration, on les fait visiter.

Les sentences de condamnation à la question ne peuvent être exécutées qu'elles n'ayent été confirmées par arrêt avant la question.

L'accusé doit être interrogé après avoir prété serment.

La question se donne en présence des commissaires, & l'on doit dresser procès-verbal de l'état de la question, & des réponses, confessions, dénégations & variations à chaque article de l'interrogation.

Les commissaires peuvent faire modérer & relâcher une partie des rigueurs de la question, si l'accusé confesse son crime, & s'il varie, le faire mettre dans les mêmes rigueurs ; mais lorsqu'il a été délié, & entierement ôté de la question, il ne peut plus y être remis.

L'accusé étant ôté de la question doit être de nouveau interrogé sur les déclarations & sur les faits par lui confessés ou déniés.

Quelque nouvelle preuve qui survienne, l'accusé ne peut être appliqué deux fois à la question pour un même fait.

Tous juges, tant royaux que subalternes, peuvent condamner à la question, à l'exception des juges ecclésiastiques, quoique quelques auteurs aient avancé le contraire.

On appelle question préparatoire celle qui est ordonnée avant le jugement définitif ; il faut de puissans indices pour ordonner la question préparatoire : la question définitive est celle que l'on donne au condamné avant l'exécution pour avoir révélation de ses complices.

Ce jugement de mort porte que le condamné sera préalablement appliqué à la question ordinaire & extraordinaire.

La question ordinaire à Paris, se donne avec six pots d'eau & le petit tréteau ; l'extraordinaire, avec six autres pots & le grand tréteau, qui serre & étend davantage le criminel.

On la donne ailleurs avec des coins & des brodequins ; on se sert aussi à Paris de cette sorte de question, quand l'accusé est condamné à mort.

En quelques endroits, comme dans les Pays-bas, on donne la question en chauffant les piés.

Dans le nord, on met l'accusé dans la boue.

En Angleterre, l'usage de la question est inconnu.

Sur la question, voyez les traités faits par Odofredus, Ambertus de Astramonia, Antonius de Canavio, Baldus de Periglis, Bartolus à Saxoferrato, Jacobus de Arena, Paulus Grillandus Cursius, & voyez aussi Fontanon, Imbert, Bouchel, le tit. 19 de l'ordon. criminelle. (A)

QUESTION, (Procédure criminelle) on vient de lire des détails instructifs pour des juges criminels ; mais puisqu'il n'est point défendu d'examiner les matieres les plus délicates du droit, nous profiterons de ce privilege en suivant l'exemple de plusieurs savans & citoyens, qui de tout tems ont osé exposer les inconvéniens qu'ils croyoient appercevoir dans la pratique de la question, ou pour mieux parler de la torture. La soumission des sujets demande bien qu'on obéisse aux magistrats, mais non pas qu'on les croie infaillibles, & qu'entre deux usages, ils n'aient pû embrasser le pire. C'est pour cela qu'il est permis de représenter avec respect les abus, afin d'éclairer le souverain, & de le porter par sa religion & par sa justice, à les réformer.

Je pourrois remarquer que les Athéniens n'usoient de la question qu'en cas de crime de lèse-majesté, & qu'ils ne connoissoient point la question préparatoire ; que chez les Romains, la naissance, la dignité, la profession militaire garantissoient de ce tourment, & que les seuls esclaves sur lesquels on avoit droit de vie & de mort, y étoient exposés ; que semblablement du tems de Charlemagne, la question ne se donnoit qu'aux esclaves : mais ces remarques sont foibles dès que la loi de la nature crie contre cette pratique, sans y mettre aucune exception vis-à-vis de qui que ce soit.

Indépendamment de la voix de l'humanité, la question ne remplit point le but auquel elle est destinée. Que dis-je, c'est une invention sûre pour perdre un innocent, qui a la complexion foible & délicate, & sauver un coupable qui est né robuste. Ceux qui peuvent supporter ce supplice, & ceux qui n'ont pas assez de force pour le soutenir, mentent également. Le tourment qu'on fait souffrir dans la question est certain, & le crime de l'homme qui souffre ne l'est pas ; ce malheureux que vous appliquez à la torture songe bien moins à déclarer ce qu'il sait, qu'à se délivrer de ce qu'il sent. Ainsi, comme le dit Montagne, les gehennes sont d'une dangereuse invention ; c'est, continue-t-il, " un essai de patience plus que de vérité ; car, pourquoi la douleur fera-t-elle plutôt confesser à un malheureux ce qui est, qu'elle ne le forcera de dire ce qui n'est pas ? & au rebours, si celui qui n'a pas fait ce dont on l'accuse, est assez patient que de supporter ces tourmens, pourquoi ne le sera celui qui a fait un crime, un si beau guerdon que celui de la vie lui étant assuré ? en un mot, c'est un moyen plein d'incertitude & de danger : que ne diroit-on, que ne feroit-on pas pour fuir à si grieves douleurs ? D'où il advient que celui que le juge a gehenné pour ne le faire mourir innocent, il le fasse mourir innocent & géhenné ".

Un état bien lamentable est donc celui d'un homme innocent, à qui la question arrache l'aveu d'un crime ; mais l'état d'un juge qui se croyant autorisé par la loi, vient de faire souffrir la torture à cet homme innocent, doit être selon moi, un état affreux. A-t-il quelques moyens de le dédommager de ses souffrances ? Il s'est trouvé dans tous les tems des hommes innocens, à qui la torture a fait avouer des crimes dont ils n'étoient point coupables. La véhémence de la douleur, ou l'infirmité de la personne, fait confesser à l'innocent ce qu'il n'a pas commis ; & l'obstination des coupables qui se trouvent robustes & plus assûrés dans leurs crimes, leur fait tout dénier.

Charondas, liv. IX. rép. 1. en rapporte un exemple très-déplorable. Un mari accusé d'avoir assassiné sa femme, nie le fait ; les présomptions étoient toutes contre lui, & même le soir de sa retraite, il avoit violemment maltraité cette femme, & s'étoit ensuite sauvé du logis. Sur ces demi-preuves, on l'applique à la question ; il confesse le meurtre ; on le condamne à la mort. Appel du jugement. Dans le tems qu'on fait le rapport du procès, tout entier à sa charge, la femme qui s'étoit cachée dans la maison d'un prêtre, son corrupteur, se représente. On comprend bien que l'arrêt qui intervint, déchargea de l'accusation le prétendu coupable : mais la torture qu'il avoit soufferte, le juge, ou si l'on veut, la loi, pouvoit-elle réparer les maux qu'il avoit endurés ?

Si je le voulois bien, il me seroit facile de citer plusieurs autres exemples de gens appliqués à la question, qui préférant une promte mort à de longs supplices, ont, pour s'en délivrer, confessé des crimes dont ils n'étoient pas coupables. Voyez S. Jerôme, épit. 34. & Papon, l. XXIV. tit. 8. nomb. 1. & Louis Vivès, dans son comment. sur S. Augustin, de civit. Dei, liv. XIX. ch. vj. où il se déclare hautement contre la torture.

Je ne serois pas même embarrassé d'alléguer de nouvelles raisons contre la torture, qu'on n'a point encore proposées. Il est du-moins certain que si l'on ne peut ôter la vie à un homme sur une preuve douteuse, celle que l'on arrache par la force des tourmens, sera toujours douteuse ; & par conséquent la confession extorquée ne peut servir de fondement à une condamnation à la mort. Si l'on croit ne devoir pas prononcer de jugement sur la confession volontaire d'une personne, on ne peut pas mieux ordonner le dernier supplice sur la confession que l'on arrache à force de supplices.

Une autre réflexion s'offre à mon esprit ; comme nous prétendons que la religion, la justice & les moeurs s'opposoient au combat judiciaire, nous devrions trouver également que les tortures y sont contraires ; autrement nous sommes inconséquens dans nos principes ; car il n'est pas moins possible qu'un accusé criminel résiste à la violence de la question, qu'il l'étoit que ce même homme vainquit & subjuguât son accusateur ; cependant, malgré cet inconvénient commun aux duels & aux tortures, on a gardé l'usage des tortures dans ces mêmes pays, où l'on a sévérement réprimé les duels, du-moins par les lois.

J'ajoute que la question, loin d'être utile pour découvrir les vrais complices d'un crime, pourroit quelquefois nuire à ce projet. Lorsque Guillaume Laud, évêque de Londres, menaça Felton, qui avoit assassiné le duc de Buckingham, de le faire appliquer à la torture, s'il ne déclaroit ses complices, il lui répliqua : " Mylord, je ne sais ce que les tourmens de la question me feront dire, mais il se pourra que je vous nommerai comme le premier de mes complices, ou quelqu'autre membre du conseil du roi ; ainsi vous ferez bien de m'épargner des tourmens inutiles. "

Enfin la question contre les criminels n'est point dans un cas forcé : nous voyons aujourd'hui une nation très-polie, & aussi éclairée que respectueuse envers l'humanité, qui a rejetté ce supplice sans inconvénient, même dans le cas de haute trahison ; il n'est donc pas nécessaire par sa nature. Mais tant d'habiles gens & de beaux génies ont écrit sur cette matiere, qu'il est inutile que je m'étende davantage à la discuter. Ainsi pour exemple, je renvoye le lecteur en particulier, à l'ouvrage de Jean Grevius. Il est intitulé, Tribunal reformatum, in quo sanioris & tutioris justitiae via judici christiano in processu criminali demonstratur, rejectâ & fugatâ torturâ, cujus iniquitatem, multiplicem fallaciam, atque illicitum inter christianos usum, aperuit, Joh. Grevius Clivensis Hamb. 1624, in-4°. Cet ouvrage a produit des effets salutaires en Hollande. On a laissé dormir la loi qui prescrivoit la question ; on n'en a fait aucun usage dans les Provinces-Unies depuis plus de cent ans.

Je couronne mon article par ces paroles de Quintilien, Inst. Orat. lib. V. c. iv. Sicut in tormentis quoque, qui est locus frequentissimus, cùm pars altera quaestionem, vera fatendi necessitatem vocet, altera saepè etiam causam falsa dicendi, quòd illis patientia, facilè mendacium faciat, aliis, infirmitas necessarium. Ajoutez le passage du jurisconsulte Ulpien, in lib. I. §. quaest. de quaest. Statutum est non semper fidem tormentis, nec tamen nunquam adhibendam fore. Etenim res est fragilis, quaestio & periculosa, veritatem fallat ; nam plerique patientiâ, sive duritiâ tormentorum, ita tormenta contemnunt, ut exprimi eis veritas, nullo modo possit : alii tantâ sunt impatientiâ, ut quaevis mentiri, quam pati tormenta velint. Ita fit, ut etiam vario modo fateantur, ut non tantùm se, verùm etiam alios criminentur. (D.J.)

QUESTIONS perpétuelles, (Hist. romaine) c'est ainsi qu'on appelloit chez les Romains, les matieres criminelles, dont le jugement étoit commis à des magistrats particuliers, que le peuple créoit à cet effet, & qui furent nommés quaesitores parricidii, questeurs du parricide.

Ce fut seulement l'an de Rome 604, que quelques-unes de ces commissions furent rendues permanentes. On divisa peu-à-peu toutes les matieres criminelles en diverses parties, qu'on appella des questions perpétuelles, quaestiones perpetuae, c'est-à-dire des recherches perpétuelles. On créa divers préteurs pour faire ces recherches, & on en attribua un certain nombre à chacun d'eux, suivant les conjonctures. On leur donna pour un an la puissance de juger les crimes qui en dépendoient, & ensuite ils alloient gouverner leurs provinces. Voyez de plus grands détails au mot RECHERCHES perpétuelles. (Jurisprud. rom.)


QUESTIONNAIRES. m. (Jurisprud.) est celui qui donne la question ou torture aux accusés.

On se sert aussi du questionnaire pour faire fustiger ceux qui sont condamnés à avoir le foüet sous la custode, & auxquels on ne veut pas imprimer de note d'infamie.

Dans les endroits où il n'y a pas de questionnaire en titre, c'est l'exécuteur de la haute justice qui donne la question. Voyez ci-devant QUESTION & le mot TORTURE. (A)


QUESTIONNERINTERROGER, DEMANDER, (Synonymes) on questionne, on interroge, & l'on demande pour savoir ; mais il semble que questionner fasse sentir un esprit de curiosité ; qu'interroger suppose de l'autorité, & que demander ait quelque chose de plus civil & de plus respectueux.

Questionner & interroger font seuls un sens ; mais il faut ajouter un cas à demander ; c'est-à-dire que pour faire un sens parfait, il faut marquer la chose qu'on demande.

L'espion questionne les gens ; le juge interroge les criminels ; le soldat demande l'ordre au général. Girard.


QUESTOIRES. m. (Art milit. des Rom.) quaestorium ; on nommoit ainsi chez les Romains la tente, le pavillon, le logement du questeur dans le camp. C'étoit dans ce logement qu'étoit la caisse militaire ; & nous apprenons de Polybe qu'on posoit toujours pour la garde trois sentinelles devant le questoire ; mais on n'en posoit que deux devant le logement de ceux que le sénat envoyoit pour servir de conseil au général ; c'étoit ordinairement des sénateurs sur l'expérience desquels on pouvoit compter.


QUESTURES. f. (Hist. rom.) la questure ainsi que l'édilité, étoit une magistrature qui servoit à parvenir à de plus élevées ; elle étoit annuelle comme celle de consul, & elle ne s'obtenoit, à ce qu'il paroît, qu'à 25 ans au plus tôt. De-là il est facile de conclure qu'on ne pouvoit avoir entrée au sénat avant cet âge, puisque pour y entrer, il falloit avoir obtenu la questure, ou exercer quelqu'autre charge. Voyez Sigonius, de antiq. juris rom. Celui qui étoit honoré de la questure s'appelloit questeur. Voyez QUESTEUR.


QUÊTES. f. (Gramm.) action de chercher ; on dit : il y a long-tems que je suis en quête de cet homme, de sa demeure, de sa naissance, de cette vente. On dit de l'action de demander les aumônes des fideles pour quelque oeuvre pieuse, faire une quête. On fait une quête pour les brûlés, pour des pauvres familles honteuses, pour les prisonniers. Il faut une permission expresse de la police, de l'archevêque, pour faire une quête publique. Il y a un grand nombre de religieux qui n'ont pour vivre que ce qu'ils tirent de leurs quêtes.

QUETE, (Hist. de la Chevalerie) terme de l'ancienne chevalerie, qui signifie les courses ou voyages que plusieurs chevaliers qui venoient de recevoir les honneurs de la chevalerie, ou qui avoient assisté aux fêtes qui y étoient relatives, faisoient en commun, soit pour retrouver un fameux chevalier qui avoit disparu, soit pour reprendre une dame restée au pouvoir d'un ennemi, soit pour d'autres objets encore plus relevés, comme celui de la quête du S. Graal. Ces sujets se sont étendus & multipliés à l'infini dans l'imagination des faiseurs de romans. Nos héros errant de pays en pays, parcouroient sur-tout les forêts presque sans autre équipage que celui qui étoit nécessaire à la défense de leur personne ; & ils vivoient uniquement de leurs chasses : des pierres plates plantées en terre, qu'on avoit exprès placées pour eux, servoient à faire les apprêts de leurs viandes, comme à prendre leurs repas ; les chevreuils qu'ils avoient tués étoient mis sur ces tables, & recouverts d'autres pierres, avec lesquelles ils pressoient pour en exprimer le sang, d'où cette viande est nommée dans nos romans, chevaux de presse, nourriture des héros : du sel & quelques épices, les seules munitions dont on se chargeoit, en faisoient tout l'assaisonnement. Afin de surprendre plus surement les ennemis qu'ils alloient chercher, ils ne marchoient qu'en petites troupes de trois ou de quatre, ayant soin pour n'être point connus, de changer, de déguiser leurs armoiries, ou de les cacher en les tenant couvertes d'une housse. L'espace d'un an & d'un jour, étoit le terme ordinaire de leur entreprise. Au retour, ils devoient, suivant leur serment, faire un recit fidele de leurs avantures, exposer ingénument leurs fautes, leurs malheurs & les succès qu'ils avoient eus dans leurs quêtes. (D.J.)

QUETE, (Marine) c'est la saillie, l'élancement ou l'angle, que l'étrave & l'étambord font aux extrêmités de la quille. Cet angle est plus grand à l'étrave qu'à l'étambord.

QUETE, (Charpent.) c'est l'avance que font les bateaux sur les rivieres, tant du côté du chef que de la quille, lorsqu'elle s'éleve & ne touche plus sur le chantier. La quête du chef d'un bateau-foncet est de la septieme partie de la longueur du fond, & celle de la quille est de la sixieme partie de celle du chef. Savary.

QUETE, (terme de Chasse) action de celui qui va détourner une bête pour la lancer & la chasser avec des chiens courans. (D.J.)


QUÊTERou aller en quête, se dit en Vénerie lorsqu'un valet de limier va détourner les bêtes avec son limier. C'est aussi aller quêter une bête pour la lancer & la chasser avec les chiens courans.


QUEUES. f. (Gramm.) la partie qui termine certains animaux par derriere. Ce mot a un grand nombre d'acceptions différentes. On dit la queue d'une morue, d'un chien, d'un oiseau, d'un lésard, &c. La queue d'un muscle ; la queue d'un fruit, d'une feuille, &c. la queue d'une poële ; la queue d'une robe, d'un manteau ; la queue d'une perruque ; une queue de cheveux ; la queue d'une affaire ; la queue d'un ouvrage, &c.

QUEUE, (Conchyl.) partie inférieure d'une coquille, laquelle partie est plus ou moins longue. Il est essentiel de la distinguer du bec, en latin rostrum, qui est toujours fort court, & qui se dit de l'extrêmité de la queue, lorsqu'elle est recourbée ; d'ailleurs le mot bec, désigne quelquefois la coquille, même recourbée dans un de ses bouts, ou vers la charniere. (D.J.)

QUEUE d'une comete, (Astronom.) quand une comete porte sa chevelure en avant, ou vers la partie du ciel où son mouvement propre semble la porter, cette chevelure s'appelle barbe ; mais quand elle la porte vers l'endroit du ciel d'où son mouvement propre semble l'éloigner, cette chevelure se nomme queue : & enfin quand sa chevelure l'environne de toutes parts, on l'appelle simplement chevelure. On trouvera un plus grand détail sur ces différens phénomènes, avec des conjectures sur leurs causes physiques, à l'article COMETE. Chambers. (O)

QUEUE DU DRAGON, en terme d'Astronomie, est le noeud descendant de la lune ; on le représente sous cette figure . Voyez NOEUD & DRAGON.

Les Astronomes ont soin de mettre cette figure dans tous leurs horoscopes ; elle y est aussi nécessaire que les autres. Voyez HOROSCOPE. (O)

QUEUE DE CHEVAL, s. f. terme d'Anatomie, la partie inférieure de la moëlle épiniere formée par la réunion des quatre paires lombaires inférieures, & par les 5 à 6 paires sacrées, dont la derniere est très-petite. Voyez LOMBAIRE & SACRE.

QUEUE, (Hydr.) on dit la queue d'un moulin, laquelle comme un gouvernail, sert à le tourner au vent. On dit encore des queues de renard, ce sont des traînasses de racines fort menues, qui passant par les pores d'un tuyau de grès, ou par les noeuds de mastic qui se pourrit en terre, se nourrissent dans l'eau, & viennent si grosses & si longues, qu'elles bouchent entierement la conduite. On en a tiré de 5 à 6 toises de long. (K)

QUEUE D'ARONDE, en terme de Fortification, est une espece de simple tenaille, comme D A B C E, Pl. I. de Fortification, fig. 12. dont les côtés A D, & C B, ne sont point paralleles, mais s'approchent plus du côté de la place que du côté de la campagne. Ainsi la queue d'aronde a la gorge plus petite, ou plus étroite que le front. Cette sorte d'ouvrage n'est plus guere en usage, si ce n'est dans la fortification passagere, à cause de son peu de défense. Voyez ANGLE MORT. (Q)

QUEUE DE LA TRANCHEE, terme de l'Art militaire, c'est le poste, ou le lieu où l'on commence à ouvrir la tranchée, pour se mettre à couvert du feu de la place. Voyez APPROCHE & TRANCHEE.

C'est à la queue de la tranchée que l'on fait ordinairement le dépôt ou l'amas des matériaux nécessaires pour les approches. On y établit aussi l'hôpital ambulant pour les blessés de la tranchée. (Q)

QUEUE DE CHEVAL, (Hist. mod.) enseigne ou drapeau sous lequel les Tartares & les Chinois vont à la guerre. Voyez ENSEIGNE, PAVILLON, &c.

Chez les Turcs, c'est l'étendart que l'on porte devant le grand-visir, devant les bachas, & devant les sangiacs. On l'appelle toug, & on l'attache avec un bouton d'or au bout d'une demi-pique.

Il y a des bachas à une, à deux & à trois queues.

La queue de cheval arborée sur la tente du général est le signal de la bataille. A l'égard de l'origine de cette coutume, on raconte que dans une certaine bataille l'étendart ayant été enlevé par l'ennemi, le général de l'armée turque, ou, selon d'autres, un simple cavalier coupa la queue à son cheval, & l'ayant mise au bout d'une demi-pique, il encouragea les troupes & remporta la victoire. En mémoire de cette belle action, le grand-seigneur ordonna de porter à l'avenir cet étendart comme un symbole d'honneur. Ricaut.

QUEUE, terme de Chancellerie, ce mot se dit de la maniere de sceller les lettres. Une lettre est scellée à simple queue, quand le sceau est attaché à un coin du parchemin de la lettre qu'on a fendu exprès ; & elle est scellée à double queue, quand le sceau est pendant à une bande en double de parchemin passée au-travers de la lettre, comme on fait dans les expéditions importantes.

QUEUE, s. f. (Mesure de liquides) particulierement pour les vins dont on se sert en plusieurs endroits, provinces & villes de France. Les queues d'Orléans, de Blois, de Nuys, de Dijon, de Mâcon, sont semblables & reviennent à un muid & demi de Paris, c'est-à-dire qu'elles contiennent chacune 420 pintes de Paris. Savary. (D.J.)

QUEUE, en Musique, virgula ; on distingue dans les notes la tête & la queue ; la tête est le corps même de la note ; la queue est ce trait qui tient à la tête, & qui indifféremment monte ou descend perpendiculairement à-travers la portée. Dans le plein chant les notes n'ont pas de queue, mais dans la musique il n'y a que la ronde qui n'en a point. Autrefois la breve ou quarrée n'en n'avoit pas non plus. (S)

QUEUE, LA, (Jeux) c'est au piquet à écrire, lorsque pour compter les tours dont on est convenu, les joueurs à chaque coup qu'ils ont marqués, mettent un jetton dans la bourse commune, laquelle à la fin du jeu, appartient totalement à celui qui gagne le plus ; & s'il y en a deux qui gagnent autant l'un que l'autre, la queue se partage également entr'eux. C'est à celui qui a la queue à payer les cartes. On la joue aussi au quadrille, & à tel jeu qu'on veut. Jeu de piquet. (D.J.)

QUEUE, en terme de Blason, se dit principalement de la queue d'un cerf. Celles de plusieurs autres animaux s'expriment par des noms particuliers.

QUEUE, (Archit.) ou cul-de-lampe ; nom qu'on donne aux extrêmités des pieces de bois qui servent comme de clés au haut des voûtes des dômes, & de quelques autres lieux, où ils sont suspendus en forme de roses.

Queue de pierre, c'est le bout brut ou équarri d'une pierre en boutisse, qui est opposée à la tête ou parement, & qui entre dans le mur sans faire parpain. Dict. d'Archit. (D.J.)

QUEUE, (Marine) c'est l'arriere-garde d'une armée navale.

QUEUE DE RAT, (Marine) on appelle ainsi une manoeuvre qui va en diminuant par le bout ; tel est le corcet.

QUEUE DE RAT en bois, outil d'Arquebusier & autres artisans, tant en fer qu'en autres matieres. C'est une lime ronde, piquée à grains d'orge, qui est tortillée comme une colonne torse. Les Arquebusiers s'en servent pour aggrandir & limer des trous en bois.

QUEUE se dit dans l'Ecriture des traits qui excedent le corps du caractere, comme les queues de b, g, d, &c.

QUEUE D'ARONDE, terme de Charpente & de Menuiserie, c'est une espece de tenon qui est plus large par le bout que par le collet, & qui a la figure de la queue d'une hirondelle. Cette sorte d'assemblage est très-forte.

QUEUE DE PAON, nom que donnent les Charpentiers & les Menuisiers aux assemblages ou compartimens circulaires, qui vont en s'élargissant depuis le centre jusqu'à la circonférence, & qui imite la queue du paon lorsqu'il l'ouvre en forme de roue ; telles sont les enrayures circulaires des tours, & ce que les Menuisiers appellent aussi évantail dans les chassis à verre des croisées ceintrées.

QUEUE, (Commerce de soierie & de toile) c'est ainsi qu'on appelle le dernier bout d'une piece d'étoffe ou de toile lorsqu'elle n'a point été entamée, au contraire du premier bout que l'on nomme chef. Savary. (D.J.)

QUEUE DE CHANVRE, (Corderie) paquet de filasse brute, dont les brins sont arrangés de façon que toutes les pattes ou racines sont du même côté. V. l'article CHANVRE.

QUEUES DE RAT, cordages qui sont plus gros par le bout où ils sont attachés, & qui diminuent depuis les deux tiers jusqu'à l'autre bout qui se trouve dans la main des matelots. Voyez l'article CORDERIE, où la maniere de fabriquer les cordages est expliquée.

QUEUE DE RENARD à étouper, (Doreur sur cuir) est la queue de cet animal dont l'usage est de servir à appliquer les feuilles d'argent sur l'assiette, dont le cuir est peint aux endroits que l'on veut argenter.

QUEUE DE RAME, terme de Gazier, ce sont les ficelles qui passent sur les poulies du cassin, & qui tiennent les fourches dans les métiers à fabriquer la gaze figurée ou brochée. Voyez GAZE.

QUEUE, (Jardinage) les feuilles ont une queue aux branches, & quelquefois un petit coeur entre deux ; les fruits, tels que les poires & les pommes, ont aussi une queue qu'ils ne quittent point, & dont la privation les rend difformes.

QUEUE, terme de Luthier, c'est une partie de la table de certains instrumens où les cordes sont attachées ; on dit queue de violon. (D.J.)

QUEUE, (Maréchallerie) on appelle ainsi le croupion du cheval dont les membres sortent du haut de la croupe, & sont garnis de peau ou de crins plus longs ou plus courts. Il y a des queues bien garnies, & ce sont les plus belles ; celles qui sont dégarnies de crins s'appellent queues de rat. C'est un agrément lorsque le cheval releve la queue en marchant, cela s'appelle porter bien sa queue ; on prétend que c'est signe de force. Il y a des chevaux qui portent leur queue en trompe, c'est-à-dire recourbée du côté du dos. Faire la queue ou rafraîchir la queue, c'est couper au bas tous les crins qui débordent. On trousse la queue en la nouant, ou se servant d'un trousse-queue. Voyez TROUSSE-QUEUE. Les vertebres de la queue s'appellent en terme de cavalerie les noeuds de la queue. Couper la queue à un cheval, c'est couper une partie de ces noeuds, afin que la queue n'ait que huit ou dix pouces de long ; on coupe la queue à tous les chevaux de chasse & de course. Ainsi on appelle les chevaux qui ont la queue coupée des coureurs ou des courtes queues ; on appelle racine de la queue l'endroit où elle sort de la croupe, & le tronçon ou le quoart le reste des vertebres jusqu'au bout. Jouer de la queue ou quoailler se dit d'un cheval qui remue perpétuellement la queue lorsqu'on le monte, ce qui marque de l'inclination à ruer. Faire un rossignol sous la queue, voyez ROSSIGNOL. Queue de rat, maladie du boulet & du canon de la jambe. Voyez ARETE, CANON & BOULET.

QUEUE, s. f. terme de Relieur, c'est la partie du livre qui regarde la fin des pages, & celle du haut s'appelle la tête ; on rogne un livre par la tête & par la queue. (D.J.)

QUEUE, s. f. (Paumier) instrument dont on se sert pour pousser les billes au jeu de billard. La queue est un bâton de trois ou quatre piés de longueur, fait au tour ; elle est fort grosse par un bout, & va en diminuant jusqu'à l'autre bout qui n'a pas plus d'un demi pouce de diamêtre. On tient la queue par le gros bout d'une main, & on en appuie l'autre extrêmité sur la main gauche, puis avec le petit bout on chasse la bille en lui donnant un coup sec.

QUEUE, terme de Perruquier, mettre des cheveux en queue, c'est attacher le derriere d'une chevelure avec un cordon, & la couvrir depuis le haut jusqu'en-bas en roulant tout-autour un long ruban.

QUEUE BLANCHE, voyez AIGLE A QUEUE BLANCHE.

QUEUE DE CHEVAL, voyez PRELE.

QUEUE DE LEZARD, saururus, (Hist. nat. Bot.) genre de plante dont la fleur n'a point de pétales ; elle est composée de deux sommets qui ont deux valvules, & qui sont remplis d'une poussiere très-menue ; l'embryon est placé entre les deux sommets, il devient dans la suite un fruit ovoïde & mou, qui renferme une seule semence. Il faut ajouter aux caracteres de ce genre que les fleurs & les fruits sont attachés à un axe, & qu'ils ressemblent à une queue de lézard. Plumier, Nova plant. amer. gener. Voyez PLANTE.

QUEUE DE LION, leonurus, (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur monopétale labiée ; la levre supérieure est pliée en gouttiere, & beaucoup plus longue que l'inférieure qui est divisée en trois parties. Le pistil sort du calice, il est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, & entouré de quatre embryons qui deviennent dans la suite autant de semences oblongues, renfermées dans une capsule longue & tubulée qui a servi de calice à la fleur. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE.

QUEUE DE POURCEAU, (Botan.) nom vulgaire du genre de plante, que les Botanistes appellent peucedanum. Voyez PEUCEDANE, Botan. (D.J.)

QUEUE DE POURCEAU, (Mat. méd.) cette plante est assez généralement regardée comme apéritive, nervine, hystérique, emmenagogue, béchique, incisive & diurétique. Elle est fort peu usitée, vraisemblablement à cause de sa mauvaise odeur. C'est un extrait formé du suc de sa racine épaissi, qu'on a sur-tout recommandé pour l'usage intérieur. Les auteurs, principalement les anciens, ont beaucoup vanté son application extérieure. Ils ont regardé cette plante comme puissamment résolutive & mondificative. (b)

QUEUE ROUGE, voyez ROUGE-QUEUE.

QUEUE DE SOURIS, (Botan.) plante nommée myosuros par J. B. 2. 512. Ray, hist. 2. 1332. Boerh. Ind. alt. 2. 202. Holoster affinis caudâ muris. C. B. P. 190. & par Tournef. ranunculus gramine folio, flore caudato, seminibus in capitulum spicatum congestis. I. R. H. 293.

La racine de cette plante est annuelle ; ses feuilles sont herbeuses, comme celles du coronopus, mais sans découpures ; son calice est composé de cinq feuilles, dont chacune a une espece de pendant ; ses fleurons sont herbeux, & munis d'un grand nombre d'étamines qui partent de la circonférence du fond de l'ovaire ; ses semences sont disposées en épis : c'est une petite plante fort basse ; elle croît dans les champs, dans les prés, dans les jardins, & fleurit au mois de Mai ; elle passe pour avoir les mêmes vertus que le plantain & le coronopus, c'est-à-dire pour être un peu astringente & dessicative. (D.J.)

QUEUE DES OISEAUX, (Ornith.) c'est une partie très-importante pour faciliter leur vol, & pour le rendre ferme en tenant le corps droit dans l'air, élément fluide, en faisant tourner le corps promtement, & en l'empêchant de chanceler. On peut la comparer au gouvernail, puisqu'elle sert à diriger le vol de l'oiseau dans lequel elle suit toujours la ligne du dos, qui est tant soit peu panchée. Le mouvement du milan, qui se tourne comme il veut par le moyen de sa queue, est une preuve évidente de cette vérité.

Aristote a judicieusement observé que les oiseaux à longues jambes, & ceux dont les doigts des piés tiennent les uns aux autres par une membrane, ont ordinairement la queue courte, & ne raccourcissent pas leurs piés vers le ventre, comme font les autres oiseaux, mais au contraire ils les étendent par derriere, afin qu'ils servent au lieu de queue à diriger leur vol.

De plus cette partie contribue beaucoup à maintenir le corps des oiseaux en équilibre dans l'air ; c'est pour cela qu'elle est parallele à l'horison lorsqu'elle est étendue & non-perpendiculaire, comme celle des poissons. Aussi les oiseaux qui n'ont point de queue, comme les plongeons, volent avec peine le corps élevé.

Borelli & quelques autres philosophes modernes ont trouvé que la queue des oiseaux en général ne contribuoit pas à les faire élever & descendre dans les airs ; ils le prouvent par les pigeons, qui ne laissent pas de se tourner de tous côtés après avoir perdu la queue. Aussi faut-il convenir que l'observation est très-vraie à l'égard des oiseaux qui ont la queue pointue & terminée en ligne droite. Mais à l'égard de ceux qui l'ont fourchuë, l'expérience justifie qu'elle produit l'effet que nous lui avons attribué pour le vol ; car il est très-visible que le milan qui a la queue fourchuë tourne entierement son corps en tournant sa queue de côté, élevant une des fourches & abaissant l'autre. Les hirondelles ont sans-doute la même faculté dans la queue, puisqu'il n'y a point d'oiseau qui se tourne en l'air avec plus d'agilité.

Une observation d'un autre genre par laquelle je finis, c'est que les plumes dont est composée la queue des oiseaux de presque tous les genres, sont arrangées les unes sous les autres & les unes à côté des autres, dans un plan parallele ou incliné à l'horison. Il n'y a peut-être qu'un seul genre d'oiseau dont la queue est dans un plan vertical & plié en deux parties égales, de maniere que le dessus d'une moitié de ses plumes s'applique contre le dessous des plumes de l'autre moitié. Ce genre d'oiseaux, dont le port de la queue nous paroîtroit très-singulier si nous le voyions pour la premiere fois, est le genre des poules. Un genre de poules distinct, dont la queue ne mérite pas moins notre attention, est le paon. Voyez PAON. (D.J.)


QUEUTERv. neut. terme du jeu de Billard, qui signifie pousser d'un seul coup les deux billes avec le petit bout de la queue ; quand un joueur queute, son adversaire gagne un point, & le coup est nul, si sa bille va dans quelque belouse.


QUEUXS. m. (Corps de jurande) ce vieux mot signifie cuisinier ; la communauté des maîtres Queux-cuisiniers-portes-chapes & traiteurs de la ville de Paris, ne fut établie en corps de jurande, que sur la fin du seizieme siecle ; elle doit ses premiers statuts à Henri IV, qui en accorda ses lettres patentes au mois de Mars 1599. Louis XIII. par les siennes du mois de Novembre 1612. les confirma ; & enfin, ils furent de nouveau examinés, réformés, & confirmés par celles de Louis XIV du mois d'Août 1663, enregistrées au parlement le 29 Janvier 1664. Dict. du Commerce. (D.J.)

QUEUX, s. f. (Coutellerie) pierre dure sur laquelle particulierement les Couteliers aiguisent & avivent les instrumens de fer destinés à couper. Il y a différentes sortes de queux ; les unes pour les rasoirs, les autres pour les couteaux, d'autres pour les lancettes, & d'autres encore pour les ciseaux.

QUEUX DE FRANCE, GRAND, (Hist. de France) nom d'un ancien officier de la maison des rois de France, qui commandoit tous les officiers de la cuisine & de la bouche ; c'étoit des gens de qualité qui étoient pourvûs de l'office de grand-queux, comme on le peut voir dans l'histoire des grands officiers de la couronne, par le P. Anselme.


QUÉVAGES. m. terme de Coutume, Ragueau avoue dans son indice, qu'il ne connoît point ce droit ; mais il semble à M. Aubert (& la chose est très-vraisemblable), que c'est le même droit que chevage, chevagium ou cavagium, dont il est fait mention dans plusieurs anciens titres rapportés par Galand en son traité du franc-aleu ; c'est donc ce qui se leve par tête. (D.J.)


QUIANPIANS. m. (Hist. nat.) oiseau du Brésil, qui est de la grosseur d'un merle, & dont tout le plumage est d'un bel écarlate.


QUIAYS. m. (Hist. mod. superstit.) nom générique que l'on donne aux idoles ou pagodes dans la peninsule ultérieure de l'Inde, c'est-à-dire au Pégu, dans les royaumes d'Arrakan, de Siam, &c. Quiay-Poragray est la grande divinité d'Arrakan ; ses prêtres s'appellent raulins, voyez cet article. Dans certaines solemnités, ce dieu est porté en procession sur un char très-pesant, dont les roues sont fort épaisses & garnies de crochets de fer. Les dévots d'Arrakan se font écraser sous le poids de ces roues, ou s'accrochent aux crampons de fer qui s'y trouvent, ou bien ils se font des incisions & arrosent le dieu de leur sang ; ces martyrs de la superstition sont des objets de vénération pour le peuple, & les prêtres conservent dans leurs temples les instrumens de leur supplice.


QUIBO(Géog. mod.) ou comme disent les Espagnols Caboya ; île de la mer du Sud, sur la côte de la province de Veragua, dans la nouvelle Espagne, au couchant du golfe de Panama. Cette île a environ six lieues de long, & trois de large. Sa latitude septentrionale est, selon Dampier, à 7 degrés 14'. (D.J.)


QUICHOAS. m. (Langues) c'est le nom que l'on donne à la langue que parlent les indiens du Pérou ; elle fut répandue autrefois par les Incas dans toute l'étendue de leur empire pour faciliter le commerce, en donnant à leurs sujets une langue uniforme. Les Indiens de la campagne ne veulent point parler d'autre langue, mais ceux qui habitent les villes affectent de ne savoir que l'espagnol, & d'ignorer la langue quichoa.


QUIDAMS. m. (Jurisprud.) terme purement latin adopté dans la pratique du palais, pour exprimer une certaine personne inconnue & que l'on ne peut nommer ; on fait ordinairement le signalement d'un quidam, en le désignant par les traits de son visage, la couleur de ses cheveux, par sa taille, par ses habits & autres choses qui peuvent servir à le faire reconnoître.

On rend plainte contre un quidam, & l'on permet aussi d'informer contre lui ; on le decrete & on fait contre lui toute la procedure nécessaire, & finalement on le juge par contumace & on le condamne s'il y a lieu, & l'exécution se fait contre lui de même que contre les autres contumax. Voyez CONTUMAX. (A)


QUIDIENSIS(Géog. anc.) siége épiscopal d'Afrique dans la Mauritanie Césariense ; la notice épiscopale d'Afrique range dans cette Mauritanie, tiberianus Quidiensis ; & la conférence de Carthage nomme Priscus, episcopus ecclesiae Quidiensis. On conjecture que c'est la même ville que Quiza. (D.J.)


QUIERS(Géog. mod.) ou Chieri, en latin du moyen âge Caira ; ville d'Italie dans le Piémont, capitale de la province du même nom, sur les confins du Monferrat, à 4 lieues au levant de Turin, & à 8 au nord-ouest d'Asti.

On croit que c'est la même ville que Pline appelle Carrea potentia, entre Pollentia & Forum Fulvii ; c'est du moins une ville très-ancienne, & dans laquelle on trouve plusieurs choses qui sentent le tems des Romains ; mais on ne connoît aucun écrit, où il soit parlé distinctement de cette ville avant l'an 1154. Elle est sur le penchant d'une colline dans un terrein fort agréable, & dans un air doux & salubre. Aussi est-elle peuplée de beaucoup de familles nobles ; elle est entourée d'une muraille à l'antique, flanquée de tours, & munie d'un fossé. Cette ville se donna en 1347 à Amédée de Savoye, nommé le comte verd, & à Jacques de Savoye son cousin, appellé le prince d'Achaïe. On y compte environ dix mille ames, & la ville est gouvernée par un lieutenant du souverain, comme prince de Piémont. Long. 25. 26. lat. 44. 52. (D.J.)


QUIETIS FANUM(Antiq. rom.) temple consacré au repos, dont Rome avoit fait une divinité. Il étoit hors de la porte Colline, dans le chemin nommé via lavicana, selon Tite-Live.


QUIÉTISMES. m. (Hist. des sect. mod.) ou mysticisme ; doctrine dont le principal point est que l'on doit s'anéantir soi-même pour s'unir à Dieu, & demeurer ensuite dans une parfaite quiétude, c'est-à-dire dans une simple contemplation sans faire aucune réflexion, & sans se troubler en aucune sorte de ce qui peut arriver dans le corps. Molinos (Michel) né dans le diocèse de Sarragosse en 1627 alla s'établir à Rome, où il s'acquit une grande considération, & répandit cette doctrine dans plusieurs livres, entr'autres dans celui qu'il intitula : la conduite spirituelle, ainsi que dans son oraison de quietudine ; delà vint qu'on nomma sa doctrine quiétisme, & ses disciples quiétistes.

Il avoit déja beaucoup de sectateurs en 1680 ; leurs opinions qui sont comme tant d'autres, si humiliantes pour la raison humaine, firent grand bruit à Rome, où ces sortes de contestations sont méprisées pour le fond, & jugées avec beaucoup de solemnité pour la forme. Molinos étoit grand directeur de conscience, & qui plus est homme de bien, selon la justice que lui rendit le pape, deux titres pour avoir beaucoup d'ennemis. Ceux qui étoient jaloux de gouverner les consciences, ne manquerent pas de voir un hérétique dangereux dans un homme, dont les idées sur la spiritualité étoient plus dignes de pitié que d'indignation.

Christine, soit par compassion naturelle, soit par haine contre les persécuteurs de Molinos, soit peut-être par le desir de jouer un rôle remarquable dans une affaire dont la chrétienté étoit alors occupée, prit très-hautement le parti du prêtre espagnol, & peu s'en fallut qu'on ne fît un crime à cette princesse, de remplir envers un malheureux prêtre les devoirs de l'humanité. Le repos spirituel qu'il prêchoit, & qui étoit alors l'objet de toute l'attention du saint office, fit dire à Pasquin assez plaisamment. " Si nous parlons, les galeres ; si nous écrivons, le gibet ; si nous nous tenons en repos, le saint office : " que faire donc ?

Mais enfin les ennemis de Molinos étoient si puissans, & poursuivoient si vivement sa condamnation, qu'elle fut prononcée en 1687, par le pape Innocent XI. alors assis sur le siége pontifical. Les livres de Molinos furent brûlés, & lui-même pour sauver sa vie, fut obligé de faire abjuration de ses erreurs sur un échafaud, dressé dans l'église des Dominicains en présence du sacré college. On le condamna ensuite à une prison perpétuelle, où il mourut le 29 Décembre 1689.

Dans cette conjoncture, la doctrine du quiétisme causoit en France une division, au milieu des querelles du jansénisme, preuve que l'esprit humain n'avoit pas encore fait assez de progrès philosophiques.

La dispute du quiétisme qui s'éleva dans ce royaume, dit M. de Voltaire, est une de ces intempérances d'esprit, & de ces subtilités théologiques qui n'auroient laissé aucune trace dans la mémoire des hommes, sans les noms des deux illustres rivaux qui combattirent. Une femme, sans crédit, sans véritable esprit, & qui n'avoit qu'une imagination échauffée, mit aux mains les deux plus grands hommes qui fussent alors dans l'église gallicane ; son nom étoit Bouvieres de la Motte. Elle étoit née à Montargis en 1648, où elle avoit épousé le fils de Guion, entrepreneur du canal de Briare. Devenue veuve dans une assez grande jeunesse, avec du bien, de la beauté, & un esprit fait pour le monde, elle s'entêta de ce qu'on appelle la spiritualité. Un barnabite du pays de Geneve nommé la Combe, fut son directeur. Cet homme connu par un mélange assez ordinaire de passions & de religion, & qui est mort fou, plongea l'esprit de sa penitente dans les rêveries mystiques dont elle étoit déja atteinte. L'envie d'être une sainte Therese en France, ne lui permit pas de voir combien le génie françois est opposé au génie espagnol, & la fit aller beaucoup plus loin que sainte Therese. L'ambition d'avoir des disciples, la plus forte peut-être de toutes les ambitions, s'empara toute entiere de son coeur. Elle alla avec son directeur dans le petit pays où l'évêque titulaire de Genève fait sa résidence ; elle s'y donna de l'autorité par sa profusion en aumônes ; elle tint des conférences ; elle fit des proselites, & fut chassée par l'évêque, ainsi que son directeur. Ils se retirerent à Grenoble ; elle y répandit un petit livre intitulé : Le moyen court, & un autre sous le nom des torrens, écrits du style dont elle parloit, & fut encore obligée de sortir de Grenoble.

Alors elle se rendit à Paris, conduite par son directeur, & l'un & l'autre ayant dogmatisé en 1687, l'archevêque obtint un ordre du roi pour faire enfermer Lacombe, comme un séducteur, & pour mettre dans un couvent madame Guion, qui s'étoit déja fait de grandes protections. Ses amis & amies se plaignirent hautement, que M. de Harlay, connu pour aimer trop les femmes, persécutât une femme qui ne parloit que de l'amour de Dieu. En particulier, la protection toute-puissante de madame de Maintenon, rendit la liberté à madame Guion, qui vint à Versailles pour la remercier, s'introduisit dans S. Cyr, & assista aux conférences dévotes que faisoit M. l'Abbé de Fénelon. Il étoit alors précepteur des enfans de France.

Né avec un coeur tendre, son esprit s'étoit nourri de la fleur des belles-lettres. Plein de goût & de graces, il préféroit dans la théologie tout ce qui a l'air touchant & sublime, à ce qu'elle a de sombre & d'épineux ; son imagination s'échauffoit par la candeur & par la vertu, comme les autres s'enflamment par leurs passions. La sienne étoit d'aimer Dieu pour lui-même ; il ne vit dans madame Guion qu'une ame éprise du même goût que lui, & se lia sans scrupule avec elle. Ainsi madame Guion, assurée & fiere d'un tel partisan, continua de répandre dans S. Cyr toutes ses idées. L'évêque de Chartres s'en plaignit, l'archevêque de Paris menaça de recommencer ses poursuites. Madame de Maintenon qui ne pensoit qu'à faire de S. Cyr un séjour de paix, & qui n'avoit en vûe que son crédit & son repos, rompit tout commerce avec madame Guion. Enfin, l'abbé de Fénelon lui-même conseilla à son amie, de s'en rapporter aux lumieres du célebre Bossuet, regardé comme un pere de l'Eglise. Elle le fit, communia de la main de ce prélat, & lui donna ses écrits à examiner.

Cependant M. de Fénelon ayant été élevé à l'archevêché de Cambrai en 1695, Bossuet devenu jaloux de la réputation & du crédit de son disciple, exigea qu'il condamnât madame Guion avec lui, & souscrivît à ses instructions pastorales. M. de Fénelon ne voulut lui sacrifier ni ses sentimens, ni son amie ; mais au contraire, en partant pour son diocése, il fit imprimer à Paris son livre des maximes des Saints, ouvrage dans lequel il crut rectifier tout ce qu'on reprochoit à madame Guion, & développer les idées orthodoxes des pieux contemplatifs qui s'élevent au-dessus des sens, & qui tendent à un état de perfection, où les ames ordinaires n'aspirent gueres. M. de Meaux & ses amis se souleverent contre ce livre, & le dénoncerent au roi, comme s'il eût été aussi dangereux qu'il étoit peu intelligible. Madame Guion accusée de dogmatiser toujours, fut mise en prison à Vincennes, où elle composa un volume de vers mystiques : on la transféra à la bastille.

M. Bossuet écrivit contre M. de Fénelon ; & leurs écrits partagerent la cour & la ville : tous deux envoyerent leurs ouvrages au pape Innocent XII. & s'en remirent à sa décision. Les circonstances n'étoient nullement favorables à l'auteur du livre des Maximes ; le pere de la Chaise n'osa soutenir M. de Cambrai auprès du roi son pénitent, & madame de Maintenon l'abandonna. Louis XIV. écrivit au pape Innocent XII. qu'on lui avoit déféré le livre de l'archevêque de Cambrai, comme un ouvrage pernicieux ; qu'il l'avoit fait remettre aux mains du nonce, & qu'il pressoit sa Sainteté de juger.

La congrégation du saint office nomma pour instruire le procès, un dominicain, un jésuite, un bénédictin, deux cordeliers, un feuillant, & un augustin ; c'est ce qu'on appelle à Rome les consulteurs. Les cardinaux & les prélats laissent d'ordinaire à ces moines l'étude de la Théologie, pour se livrer à la politique, à l'intrigue, ou aux douceurs de l'oisiveté. Les consulteurs examinerent pendant trente-sept conférences trente-sept propositions, les jugerent erronées à la pluralité des voix ; & le pape, à la tête d'une congrégation de cardinaux, les condamna par un bref, qui fut publié & affiché dans Rome le 13 Mars 1699.

L'évêque de Meaux triompha ; mais l'archevêque de Cambrai tira un plus beau triomphe de sa défaite ; il se soumit sans restriction & sans réserve. Il monta lui-même en chaire à Cambrai, pour condamner son propre livre ; il empêcha ses amis de le défendre. Cet exemple unique de la docilité d'un savant qui pouvoit se faire un grand parti par la persécution même ; cette candeur, & cette simplicité, lui gagnerent tous les coeurs, & firent presque haïr celui qui avoit remporté la victoire ; il vécut toujours depuis dans son diocèse en digne archevêque, en homme de lettres. La même année 1699, madame Guion sortit de la bastille, & se retira à Blois, où elle mourut douze ans après, le 9 Juin 1717, dans les sentimens de la spiritualité la plus tendre. Voltaire, siecle de Louis XIV.

Le quiétisme n'est point une idée nouvelle imaginée par Molinos : cette doctrine a la plus grande conformité avec l'origénisme spirituel qui s'étendit dans tout le monde, & dont les sectateurs, selon saint Epiphane, étoient irréprochables du côté de la pureté. Evagrius diacre de l'église de Constantinople, s'étant confiné dans un desert, publia, dit saint Jérome, un livre de maximes, par lesquelles il prétendoit ôter à l'homme tout sentiment de passions : voilà justement la prétendue perfection des Quiétistes.

Si nous passons en Orient, nous y trouverons des mystiques, qui de tems immémorial, ont enseigné la transformation de toutes choses en Dieu, & qui ont réduit les créatures à une espece de néant, c'est-à-dire d'inaction ; autre opinion des Quiétistes. Les Brachmanes ou les Bramines poussent si loin l'apathie ou l'indifférence à laquelle ils rapportent toute la sainteté, qu'il faut devenir pierre ou statue, pour en acquérir la perfection. C'est, disent-ils, ce profond assoupissement de l'esprit, ce repos de toutes les puissances, cette continuelle suspension des sens, qui fait le bonheur de l'homme, & le rend parfaitement semblable au dieu Fo.

Il paroît aussi que cette indifférence parfaite des Bramines, est le dogme favori des Quiétistes, & que, selon eux, la vraie béatitude consiste dans le néant. " Alors dans ce triple silence de paroles, de pensées, & de desirs, se trouvant dans un sommeil spirituel, dans une ivresse mystique, ou plutôt dans une mort mystique, toutes les puissances suspendues sont rappellées de la circonférence au centre : Dieu qui est ce centre, se fait sentir à l'ame par des touches divines, par des goûts, par des illaps, par des suavités ineffables. Ses affections étant ainsi émues, elle les laisse reposer doucement.... & trouve un délicieux repos qui l'établit au-dessus des délices, & des extases, audessus des plus belles manifestations, des notions, & des spéculations divines : on ne sait ce qu'on sent ; on ne sait ce qu'on est ". N'allez pas vous imaginer que M. de la Bruyere dans les paroles qu'on vient de lire, (dialogue ij. sur le Quiétisme, page 33) s'est servi d'amplifications : vous verrez son livre muni de preuves. Vous y trouverez ce passage de Molinos : " C'est alors que le divin époux suspendant ses facultés, l'endort d'un sommeil doux & tranquille : c'est dans cet assoupissement qu'elle jouit avec un calme inconcevable, sans savoir en quoi consiste sa jouissance ".

Vous y trouverez " qu'une ame spirituelle doit être indifférente à toutes choses, soit pour le corps, soit pour l'ame, ou pour les biens temporels & éternels : laisser le passé dans l'oubli, & l'avenir à la Providence de Dieu, & lui donner le présent ; & que l'abandon de l'ame doit aller jusqu'à agir sans connoissance, ainsi qu'une personne qui n'est plus. Que l'ame ne se sent plus, ne se voit plus ; elle ne voit rien de Dieu, n'en comprend rien, n'en distingue rien ; il n'y a plus d'amour, de lumiere, ni de connoissance.... Que cette ame ne se sentant pas, n'est pas en peine de chercher, ni de rien faire ; elle demeure comme elle est ; cela lui suffit, mais que fait-elle ? rien, rien, & toujours rien. Que l'indifférence de cette amante est si grande, qu'elle ne peut pencher ni du côté de la jouissance, ni du côté de la privation. La mort & la vie lui sont égales ; & quoique son amour soit incomparablement plus fort qu'il n'a jamais été, elle ne peut néanmoins desirer le paradis, parce qu'elle demeure entre les mains de son époux comme les choses qui ne sont point. Ce doit être l'effet de l'anéantissement le plus profond. Que l'oraison parfaite de contemplation met l'homme hors de soi, le délivre de toutes les créatures, le fait mourir & entrer dans le repos de Dieu ; il est en admiration de ce qu'il est uni avec Dieu, sans douter qu'il soit distingué de Dieu : il est réduit au néant, & ne se connoît plus ; il vit & ne vit plus ; il opere & n'opere plus ; il est & n'est plus. " Dialog. v. vj. & vij.

Plusieurs écrivains se sont attachés à refuter éloquemment ces folles visions, qui ne méritent que la compassion, & qui ne renferment qu'un jargon inintelligible. (D.J.)


QUIETISTESS. m. pl. (Hist. ecclés.) nom donné en divers tems à plusieurs sectes d'hérétiques contemplatifs & mystiques, défenseurs des sentimens détaillés au mot quiétisme, & sur-tout dans ces derniers tems aux disciples de Michel Molinos. Voyez MOLINOSISME & QUIETISME.


QUIÉTUDES. f. (Gramm.) ce mot est tiré du latin, qui l'employe pour signifier le repos de l'esprit, & plus communément le sommeil, ou du-moins le repos du corps ; mais ce terme dans notre langue est entierement consacré à la dévotion, qui a voilé quelquefois la paresse & l'oisiveté des apparences d'une sainte quiétude. Je crois pourtant que ce mot auroit bonne grace dans le style noble, sans qu'il fût question de dévotion & de mysticisme ; car pourquoi ne diroit-on pas élégamment en parlant d'un sage : la sérénité qui regne sur son visage, est un signe de la sérénité de son esprit, de la quiétude & de la tranquillité de son ame. (D.J.)


QUIEVREBOUTS DE, du grand savenau, terme de Pêche ; cet instrument consiste en deux longs bâtons de six à sept piés de longueur, qui sont croisés l'un sur l'autre, & mobiles sur une cheville de fer ; ensorte que cela ne ressemble pas mal à des ciseaux à couper les étoffes. On ouvre cette espece de compas à cinq ou six piés de distance, & on le fixe en cet état par une corde qui sert de traverse, & sur laquelle est amarrée le devant du sac du bout de quievre ; les côtés sont amarrés sur les bâtons, ensorte que le tout forme une espece de van que le pêcheur pousse devant lui ; ensorte que la corde dont nous avons parlé, traîne sur le sable.

Pour empêcher que l'extrêmité des bâtons où la corde est attachée ne laboure le sable, & ne s'engage trop avant dedans, on y met de petites cornes dont le crochet regarde en en-haut ; ce qui fait glisser facilement les bâtons sur le sable, & les empêche de s'y introduire.

Le pêcheur pour se servir de cet instrument le tient des deux mains par les extrêmités des bâtons opposées à celles où sont les cornes ; il se place le corps dans le milieu de l'ouverture que forment les deux portions de bâtons, & il pousse devant lui comme on fait le bouteux dont cet instrument-ci est une espece ; & quand on veut relever son filet, on serre l'une contre l'autre les deux extrêmités qu'on tient dans les mains ; ensorte que le sac du bout de quievre se trouve fermé. Voyez la représentation de cette pêche dans nos Pl. de Pêche.

QUIEVRE, bout de, ou PETIT BOUTET, terme de Pêche, usité dans le ressort de l'amirauté d'Oystréhan, sorte de petit bout de quievre à perches croisées, avec lequel les Pêcheurs font la pêche des sauterelles ou poux de mer, qu'ils nomment mignons. Les mailles du sac de cet instrument qui se termine en chausse de la longueur de trois à quatre piés, sont si serrées, qu'à peine ont-elles deux lignes de largeur. Ceux qui s'en servent dans l'embouchure de la riviere, le poussent devant eux la marée montante, écument la superficie de l'eau, & prennent indistinctement le frai & les sauterelles aux mignons que la mer apporte en abondance durant le tems des chaleurs.

Le mignon est la même chose que la menusse, maniquette, ou guildre des pêcheurs bretons qui s'en servoient avant les défenses, en appas ou boîte pour la pêche des sardines. On n'en fait aucun usage le long des autres côtes, où les Pêcheurs le nomment chevron & dont ils se servent pour nourrir leurs canards, de même que ceux de Benonville, lieu dans cette amirauté, qui en mettent dans leurs nasses pour la pêche des anguilles.

Buchotiers, bouraque, terme de Pêche, est une sorte de bouteux. Voyez BOUTEUX. Ils different des bouts de quievre, en ce que ceux-ci sont deux bâtons croisés que les Pêcheurs ferment comme des ciseaux. Voyez BOUT DE QUIEVRES.


QUIEXou QUIEZ, (Lang. franç.) ancien pronom qui signifie quel ; li quiez, lequel, & lesquiex, lesquels ; ce mot se trouve dans Perceval. (D.J.)


QUIJUBATUIS. m. (Ornithol.) nom d'une espece de perroquet d'Amérique qui est jaune & de la grosseur d'une alouette ; ses yeux sont noirs, son bec gris, sa queue longue & jaune, & le bord de ses aîles d'un verd foncé ; c'est en tout un fort bel oiseau, & très-aisé à apprivoiser. (D.J.)


QUILS. f. (Hist. nat. Botan.) racine des Indes orientales, que quelques-uns nomment aussi quirpele, & les Portugais pao de cobra. Elle est d'un blanc jaunâtre, dure, & très-amere ; les Indiens la mettent infuser dans du vin de palmier, & la regardent comme un grand remede contre les fiévres intermittentes, la morsure des serpens, & toutes sortes de venins. On assure qu'il y a des especes d'écureuils qui attaquent les serpens, & qui vont manger de cette racine aussi-tôt qu'ils se sentent mordus.


QUILAQUILS. m. (Ornithol.) nom donné par les habitans des îles Philippines à une très-jolie espece de perroquets sauvages qui vivent dans leurs bois. Ils sont plus petits que les perroquets ordinaires ; leurs jambes sont noires ainsi que leur bec, qui d'ailleurs est fort large ; tout leur corps est d'un verd admirable ; mais on ne peut les apprivoiser. (D.J.)


QUILBOQUETS. m. (Menuiserie) c'est un instrument dont les Menuisiers se servent pour sonder le fonds des mortaises, & voir si elles sont taillées quarrément ; il est fait de deux petits morceaux de bois dont l'un traverse l'autre à angles égaux. (D.J.)


QUILLAGEQUILLAGE


QUILLAN(Géog. mod.) petite ville de France, dans le bas Languedoc, au diocèse d'Alet, à deux lieues sud de cette ville, sur la riviere d'Aude, qu'on y passe sur un pont. Long. 19, 52, lat. 42, 58.


QUILLES. f. (Marine) la quille d'un vaisseau. C'est une longue piece de charpente ou l'assemblage de plusieurs pieces mises bout-à-bout & bien jointes ensemble qui fait la plus basse partie du vaisseau depuis la poupe jusqu'à la proue, pour soutenir tout le corps du bâtiment, & déterminer la longueur du fond de cale. Voyez Pl. I. figures 1 & 2, la quille marquée a, & Pl. I. figures 1 & 2, la quille cotée i.

Les quilles de petits bâtimens n'étant pas longues, sont d'une seule piece ; il y en a de deux pieces ; les plus longues sont de trois pieces, il y en a même de quatre pieces.

Si on compare la carcasse d'un vaisseau à un squelete, les membres en sont les côtes, & la quille l'épine du dos ; elle est la premiere piece qu'on mette sur le chantier de construction ; & pour s'en former une idée, il faut se représenter une ou plusieurs grosses poutres qu'on place bout-à-bout, & qu'on assemble les unes aux autres par des empatures ou entailles, qui étant faites dans les deux pieces, forment un assemblage à mibois, qu'on retient avec de grosses chevilles de fer frappées par-dessous la quille, & clavetées ou rivées en-dessus sur des viroles ; les empatures ont ordinairement de longueur cinq fois l'épaisseur de la quille.

La plûpart des constructeurs font que la quille se courbe dans son milieu, & releve par les extrêmités, ou, en terme d'art, ils lui donnent de la tonture.

Comme la virure ou la file de bordage la plus basse doit être calfatée avec la quille, on fait sur elle une feuillure ou rablure pour recevoir ces bordages.

Voici les regles de dimension qui ont été adoptées par différens constructeurs.

La hauteur ou la face verticale de la quille est d'un huitieme de sa longueur réduite en pouces, ou, ce qui revient au même, la hauteur perpendiculaire de la quille au-dessus des tins ou des chantiers qui la portent, est d'une ligne six points par piés de sa longueur, laquelle a cette même hauteur dans toute sa longueur.

La largeur horisontale de la quille au milieu est de dix lignes huit points par pouces de sa hauteur ; elle diminue d'un cinquieme vers ses extrêmités.

On donne à la quille plus de hauteur que de largeur, parce que les empatures sont prises dans ce sens, & qu'à quantité égale de matiere elle en est plus forte.

La profondeur de la rablure de la quille est réglée par l'épaisseur du bordage le plus bas, qu'on nomme gabord.

Les vaisseaux se terminent en avant par une piece de bois, qui a une forme circulaire : c'est ce qu'on appelle l'élancement de l'étrave ; & en arriere par une piece de bois qui tombe obliquement sur la quille, ayant de la saillie en-dehors ; c'est cette saillie qu'on appelle la quête de l'étambord.

Pour avoir la longueur de la quille, il faut additionner la somme de la quête de l'étambord & de l'élancement de l'étrave, puis soustraire le produit de ces deux sommes de la longueur de la quille. Il faut donc commencer par déterminer la quête & l'élancement.

Pour trouver l'élancement de l'étrave, plusieurs constructeurs prenoient anciennement un huitieme de la longueur totale du vaisseau, & ils donnoient pour la quête de l'étambord, le quart de l'élancement de l'étrave ; ainsi un vaisseau de 168 piés de longueur auroit eu 21 piés d'élancement, & 5 piés 3 pouces de quête.

D'autres constructeurs donnent pour l'élancement de l'étrave la douzieme partie de la longueur totale du vaisseau, pour les vaisseaux de 60 canons & audessus : pour ceux depuis 40 jusqu'à 60, la quatorzieme partie de la longueur, & la quinzieme pour les petits. Il y a aussi des constructeurs qui ne prennent que la quinzieme partie de la longueur totale, même pour les gros vaisseaux ; & pour la quête de l'étambord, la sixieme partie de l'élancement de l'étrave. (on entend par gros vaisseaux ceux de 40 canons & au-dessus.) Ainsi en prenant la quinzieme partie, un vaisseau qui auroit 168 piés de longueur, auroit 11 piés un quart d'élancement, & 1 pié 10 pouces 1/2 de quête. Pour les frégates, ils prennent la treizieme partie de la longueur du vaisseau pour l'élancement de l'étrave, & la sixieme partie de cet élancement pour la quête de l'étambord.

Pour les petites frégates de 22 canons & au-dessous, ils prennent la quatorzieme partie de la longueur totale du vaisseau pour l'élancement de l'étrave, & la sixieme partie de l'élancement pour la quête de l'étambord ; enfin quelques constructeurs, pour avoir la quête & l'élancement, prennent 1/10 ou 1/12 de la longueur totale, divisent cette quantité en cinq parties égales ; ils en destinent quatre pour l'élancement, & une pour la quête.

A l'égard de l'épaisseur de la quille, il y a une regle adoptée par plusieurs constructeurs, qui est de prendre autant de pouces que le 1/3 & le 1/8 du maître ban ont de piés.

Exemple. Un vaisseau de 70 canons a 42 piés de maître-ban, le tiers de 42 est 14, le huitieme de 41 est 5 piés 3 pouces ; ajoutant ces deux sommes ensemble, on a 19 piés 3 pouces : donc l'épaisseur à un pouce par pié est de 1 pié 7 pouces 3 lignes.

QUILLE, s. f. (Charpent.) grosse piece de bois formant le derriere d'un bateau foncet. C'est celle qui supporte le gouvernail. On nomme aussi en quelques endroits, quille de pont, une longue piece de bois qui soutient le pont. (D.J.)

QUILLE, s. f. (terme de Gantier) c'est un instrument dont se servent les Gantiers ; il est de bois dur & poli d'environ dix-huit pouces de long, ressemblant à une véritable quille, si ce n'est qu'il est beaucoup plus menu par le haut ; il sert à allonger les doigts des gants pour leur donner une meilleure forme.

QUILLES, en terme de marchand de modes, sont deux bandes de paremens que l'on met à une robe le long de la couture du côté jusqu'à la fente. Voyez PAREMENS.

QUILLE, (Rubanier) c'est ordinairement le tiers d'une petite buche de bois rondin, que l'on attache au moyen d'une ficelle à l'extrêmité des bâtons de retour, pour leur servir de contrepoids, & les faire remonter lorsque l'ouvrier tire un nouveau retour, après qu'il a fait travailler celui-ci : une pierre feroit le même effet que cette quille ; mais ceci est bien plus commode, lorsqu'il y a beaucoup de retours. Ces rondins de bois qui se trouvent tous en un tas, glissent plus facilement les uns le long des autres.

QUILLES, au jeu de ce nom, sont des bâtons tournés, de grandeur & de grosseur égales, qu'on abat jusqu'à un certain nombre pour gagner la partie. Il en faut neuf pour un jeu.

QUILLE le jeu de, est un jeu d'exercice & assez amusant. Il consiste à abattre un certain nombre de quilles fixé par les joueurs, avec une boule de grosseur proportionnée à celle de ces quilles. On peut y jouer plusieurs ensemble, à nombre pair ou impair. Voyez QUILLES.

On tire d'abord à qui aura la boule. Celui à qui elle est échue, joue le premier, & celui qui est à jouer le dernier, met le but, à moins que cet avantage n'accompagne la boule par convention faite. Il faut, pour gagner la partie, faire précisément le nombre de quilles qu'on a fixé ; car si on le passe, on creve, & on perd la partie, quand celui contre qui l'on joue, n'en auroit pas même abattu une. Voyez TIRER LA BOULE, AVOIR LA BOULE, METTRE LE BUT & CREVER, à leur article. Celui qui fait chou-blanc, perd son coup, c'est-à-dire, ne compte rien, puisqu'il n'a rien abattu. Toute quille abattue par autre chose que par la boule, n'est point comptée. Un joueur qui jetteroit la boule, avant que toutes les quilles ne fussent redressées, recommenceroit à jouer, quoique jouant pour peu de quilles, il ait fait le nombre qu'il lui falloit, d'un côté où toutes les quilles étoient relevées. Celui qui ne joue pas du but, est dans le même cas. Quand on est plusieurs, celui qui joue devant son tour, perd son coup ; & celui qui laisse passer son rang de même. Toute quille qui tombe quand la boule est arrêtée, ne vaut point, non plus que celle qui étant ébranlée & soutenue par une autre, ne tomberoit que quand on auroit ôté celle-ci. Celles que la boule une fois sortie du jeu fait tomber en y rentrant, ne sont point comptées non plus.

Ce jeu ne se joue guere à Paris que parmi les domestiques dans les guinguettes & à quelques promenades ; il est plus commun à la campagne, où de fort honnêtes gens ne dédaignent pas d'y jouer.

QUILLE DU MILIEU, est une quille ordinairement plus ornée que les huit autres, qu'on plante au milieu d'elles, & qui en vaut neuf à celui qui a l'adresse de l'abattre seule, à moins qu'on ne soit convenu du contraire.

QUILLES AU BATON jeu de, ce jeu se joue avec sept quilles plus hautes & plus grosses que les quilles ordinaires que l'on plante l'une près de l'autre dans du sable, & sur la même ligne : on abat ces quilles avec des bâtons. Pour gagner, il faut toujours en abattre un nombre pair, l'impair perdant à chaque coup. Quand le tireur a renversé trois fois des quilles en nombre impair, il ne peut plus tirer ; il faut alors céder le bâton à un autre. Il en est de même quand il a tiré trois coups sans rien abattre. On peut jouer un grand nombre à ce jeu ; c'est le tireur qui le borne, quand il a partagé entre plusieurs parieurs l'argent qu'il veut hazarder. Ces parieurs qui jouent pour le nombre impair, mettent la même somme que lui au jeu, & tous perdent, s'il amene pair. On peut gagner ou perdre beaucoup à ce jeu en peu de tems. Il ne se joue guere que dans les foires de campagne, du moins je ne l'ai vu jouer que là. Il n'est, à proprement parler, qu'un défi, qu'une gageure que fait un homme contre un autre d'abattre un nombre pair de quilles.


QUILLEBOEUF(Géog. mod.) en latin Henricopolis, selon Baudrand, terme qui ne répond pas mal au mot Erricarville, qui étoit l'ancien nom de Quilleboeuf. C'est une petite ville de France dans la haute Normandie, au diocèse de Rouen, sur la rive gauche de la Seine, à 7 lieues au-dessus du Havre-de-Grace, & à trois de Ponteau-de-mer. Cette ville étoit assez importante sous Louis XIII. mais ses fortifications ont été rasées. C'est la capitale du petit pays de Roumois. Long. 17. 46. latit. 49. 30. (D.J.)


QUILLIERS. m. (Charron) c'est une espece de grosse tariere qui sert au charron à ouvrer les moyeux des roues, avant que d'y passer le tarau.

QUILLIER, au jeu de quilles, est un espace en quarré dans lequel on a tracé trois lignes où l'on dresse trois quilles sur chacune à distance égale ; ensorte que le quillier forme deux especes de rues, soit qu'on le regarde de haut en bas ou par les côtés, selon la disposition du jeu.

QUILLIER, (Jeu) se dit aussi au jeu de pair à non, un amas de jettons que celui qui donne à deviner aux autres partage en deux portions, dont une se trouve sous sa main droite, & l'autre sous sa main gauche. Chaque ponte a le droit de choisir la main, & de parier pair ou non sous cette main. Il est indifférent en jouant de cette maniere à pair ou non, que le tas des jettons ou le quillier soit pair ou impair ; ce qui ne pourroit se dire si le banquier ne puisoit au tas que d'une main, & donnoit à deviner pair ou non de cette main seulement. Il est évident qu'il y a quelque avantage à dire non, car si le quillier est pair, il y a autant de pairs que de non pairs ; & si le quillier est non pair, il y a un non pair de plus que de pairs. Ainsi dans l'incertitude il faut toujours dire non ; mais dans le cas du quillier partagé sous deux mains sur lesquelles chaque partie peut indistinctement parier pour pair ou pour non, cette inégalité disparoît. Voyez PAIR OU NON, Jeu.


QUILLONS. m. terme de Fourbisseur, sorte de branche qui tient au corps de la garde de l'épée.


QUILLOTS. m. (Comm.) mesure de grains dont on se sert à Smyrne, à Constantinople, & dans quelques autres échelles du Levant. Quatre quillots & demi font la charge de Marseille, & même un peu plus. Voyez CHARGE.

Le quillot de Constantinople est de 22 ocques, & quatre quillots y font le fortin. Voyez OCQUE & FORTIN. Les quillots de Senderly, de Volon, de Salonique, d'Izeron & de Ténédos, sont un peu moindres que celui de Constantinople ; mais dans la vente des grains on les réduit tous à ce dernier, qui est proprement le quillot de compte.

Le quillot de l'île de Samos revient à 75 livres poids de France. Chaque quillot contient trois panaches, & chaque panache huit ocques. Voyez PANACHE. Dictionn. de Comm.


QUILMANCI(Géog. mod.) ville d'Afrique presque dépeuplée, dans le Zanguebar, sur la côte du royaume de Mélinde, près de l'embouchure de la riviere de même nom. Elle appartient aux Portugais. Latit. mérid. 2. (D.J.)


QUILOA(Géog. mod.) île & ville d'Afrique au Zanguebar, sur la côte de Mélinde, à 100 lieues du Mozambique. Les Portugais en firent la découverte en 1498, & rendirent son royaume leur tributaire. Le terroir de cette île porte quantité de palmiers & d'autres arbres. Les habitans sont en partie payens, en partie mahométans, & blancs de couleur. Le milieu de l'île est à 8. 20. de latit. mérid. & à 57. 2. de long. Quelques géographes prétendent que la ville Quiloa est le Rapta de Ptolémée, qui dit que c'étoit jadis la capitale de Barbarie, d'où le promontoire Raptum a pris son nom ; mais Ptolémée met ce promontoire au 7d. de latit. australe, & nos géographes le mettent à environ 9 degrés de la même latitude. (D.J.)


QUIMBAIA(Géog. mod.) province de l'Amérique méridionale, au Popayan. Elle s'étend depuis la riviere de Cauca, jusqu'aux Andes, ayant 15 lieues de long sur 10 de large. Il y a dans cette province un volcan considérable. Le lieu principal de cette contrée se nomme Carthago ; l'air en est assez sain, quoiqu'il y pleuve la plus grande partie de l'année. (D.J.)


QUIMPERou QUIMPER-CORENTIN, (Géog. mod.) &, comme d'autres l'écrivent, Kimper-Corentin ; mot que j'ai peut-être déja fait sous cette derniere orthographe. Mais il sera court de répéter que c'est une ville de France dans la basse-Bretagne, au confluent de l'Oder & du ruisseau Benaudet, à douze lieues sud-est de Brest. Long. selon Cassini, 13. 23. 30. latit. 47. 59. 40.

Je ne dois pas oublier de dire que cette ville a donné la naissance à deux célebres jésuites, le P. Hardouin (Jean), & le P. Bougeant (Guillaume Hyacinthe).

J'ai déja parlé plus d'une fois du P. Hardouin, homme profond dans l'Histoire, & chimérique dans les sentimens. Il découvrit des athées dans les peres Thomassin, Quesnel, Malebranche, dans MM. Arnauld, Nicole & Paschal. Sa folie, semblable à celle du P. Castel, à l'égard de M. Jean Jacques Rousseau de Genève, servit à ôter à sa calomnie son atrocité ; mais tous ceux qui renouvellent de semblables accusations contre des sages, ne sont pas toujours reconnus pour fous, & sont d'ordinaire très-dangereux. D'ailleurs on doit au P. Hardouin la meilleure édition de Pline ; & l'obligation qu'on lui a sur ce sujet est très-grande.

Le P. Bougeant est mort à Paris en 1743, à l'âge de 63 ans. Son histoire du traité de Westphalie est fort estimée ; & ses amusemens philosophiques sur le langage des bêtes, sont, en me servant des termes de Montaigne, un gentil livre pour son étoffe. (D.J.)


QUIMPERLÉ(Géog. mod.) On écrit aussi Quimperley & Quimperlay ; petite ville de France dans la basse-Bretagne, au diocèse de Quimper-Corentin, sur le ruisseau de l'Yssot, à 2 lieues de la mer, & à 8 de Quimper, avec une abbaye d'hommes ordre de S. Benoît, fondée l'an 1029. Long. 14. 11. lat. 47. 52. (D.J.)


QUINAIRES. m. (Art numismat.) Le nom de quinaire n'appartient à proprement parler qu'à une petite monnoie d'argent qui étoit du poids de demi-gros, valoit la moitié du denier, & le double du sesterce. Mais les antiquaires ont à-présent coutume d'appeller abusivement quinaires les médailles du plus petit module, de quelque métal que ce soit, en or, argent, bronze, ou autre, quoique les anciens n'aient jamais donné ce nom aux petites pieces d'or ou de bronze.

Des curieux, comme M. le duc du Maine, & M. l'abbé Strozzi, ont songé à former une suite de quinaires ; & il seroit à souhaiter qu'on eût un catalogue de ce genre de médailles, précédé d'une bonne dissertation sur les changemens arrivés dans le poids, dans la valeur, & dans le nom des plus petites pieces des monnoies que les anciens aient frappées en tous métaux.

M. Geinoz a observé un quinaire remarquable qui représente d'un côté la tête d'Auguste, & de l'autre celle de Marc-Antoine. Ce quinaire est frappé sur un morceau d'argent ou sur un flan, comme disent nos monétaires. Il y a deux fautes dans les légendes ; la premiere n'est que dans la ponctuation, c'est du côté qui représente la tête de Marc-Antoine : on y lit, Marc. Anton. Imp. III. Vi. R. R. L. C. Aug. La lettre R. la troisieme du mot Vir, est séparée des deux premieres par un gros point. La seconde faute se trouve dans la légende qu'on lit autour de la tête d'Auguste, Caesar Imp. Pont. III. Vir R. C. Il est visible qu'il falloit R. P. C. qu'on explique ordinairement par Reipublicae Constituendae. Cependant si la médaille étoit restée avec cette imperfection, il se seroit sans-doute rencontré plusieurs antiquaires qui n'auroient pas manqué de raisons pour nous prouver que cette suppression étoit faite à dessein. En tout cas, le monétaire a levé la difficulté, en ajoutant après-coup le P. dans l'interligne, comme nous avons coutume de faire lorsque nous voulons suppléer une lettre obmise en écrivant. Ce P. est d'une plus petite forme que les autres lettres de la légende ; il est aussi plus élevé, n'ayant pu trouver place entre l'R & le C. qui se touchent.

J'ai dit ci-dessus qu'il seroit à desirer qu'on eût un catalogue de tous les quinaires connus ; j'ajoute ici qu'une suite de quinaires seroit presque aussi nécessaire dans les cabinets que les suites de grands, de moyens & de petits bronzes. Ce sont de part & d'autre de différentes pieces de monnoie qui nous apprennent combien il y avoit de sortes de pieces en tout métal qui courent dans le commerce. De plus, les quinaires sont communément d'un coin plus fini que les autres médailles, & travaillés par des mains de maîtres. Il auroit été très-difficile à des ouvriers ordinaires de graver des figures entieres dans un si petit espace de métal. Enfin, par le peu de quinaires que nous connoissons exister dans les cabinets, il est aisé de conjecturer que l'on y verroit plusieurs revers qui leur seroient particuliers, & qui ne se trouveroient ni dans le grand, ni dans le moyen bronze.

Au reste, il est bon d'observer que le mot quinaire ainsi que celui de sesterce, ne fut plus en usage dans le tems du bas empire. (D.J.)


QUINCAILLou QUINCAILLERIE, s. f. (Mercerie) terme général de négoce qui renferme une infinité d'especes différentes de marchandises d'acier, de fer & de cuivre ouvré, qui font partie du commerce de la mercerie. Les principales de ces marchandises sont des couteaux, ciseaux, rasoirs, canifs, instrumens de chirurgie, tire-bouchons, & autres ouvrages de coutellerie.

La quincaille renferme encore plusieurs marchandises de taillanderie, de serrurerie, & quantité d'instrumens & outils propres à toutes sortes d'ouvriers & artisans. L'Angleterre fournit la quincaillerie la plus fine, la mieux travaillée, & la plus estimée de toute l'Europe. (D.J.)


QUINCAJOou CARCAJOU, (Hist. nat.) espece de chat sauvage qui se trouve dans les forêts de l'Amérique septentrionale. Son poil est roux ou brun, & sa queue est d'une longueur extraordinaire. Cet animal, qui est très-carnassier, attaque l'orignal, espece d'élan ; il entoure son cou avec sa queue, & lui ouvre la veine jugulaire avec ses dents, pour sucer son sang. Quoique l'orignal soit beaucoup plus fort, il ne peut s'en débarrasser qu'en se jettant à l'eau, que le quincajou craint extrêmement. On prétend que cet animal dans ses chasses s'associe avec des renards qui vont à la découverte pour lui, & avec qui il partage la proie.


QUINÇONvoyez PINÇON.


QUINCONCE(Fortification) ordre dans lequel la légion se mettoit ordinairement en bataille sur plusieurs lignes, tant pleines que vuides, ou avec des intervalles entre chaque corps de troupes égaux au front de ces troupes. C'est ce qu'on appelloit aussi être rangé en échiquier.

Cet ordre n'étoit pas toujours celui sur lequel on mettoit la légion en bataille ; les consuls le changeoient suivant les différentes circonstances. Les deux premieres lignes s'enchâssoient souvent l'une dans l'autre : alors on combattoit en ligne pleine, comme le conseille M. le maréchal de Puységur. Les triaires servoient de corps de réserve pour soutenir la ligne pleine. Voyez sur ce sujet les mémoires militaires de M. Guischardt, ouvrage dans lequel on trouve des notions & des éclaircissemens sur la tactique des anciens, qu'on chercheroit inutilement ailleurs. (Q)

QUINCONCE, s. m. (Jardin.) On prononce quinconge, mot dérivé du latin quinquunx, qui a cinq onces ou parties. C'est un plant d'arbres qui a été disposé dans son origine en quatre arbres formant un quarré, avec un cinquieme au milieu : desorte que cette disposition répétée compose un bois planté en symmétrie, & qui vû sur les angles forme des allées égales & paralleles. C'est de cette sorte de quinconce que parlent Ciceron dans son cato major, & Quintilien, liv. VIII. ch. iij.

Aujourd'hui la figure d'un quinconce est un plant d'arbres posés en plusieurs rangs paralleles, tant pour la longueur que pour la largeur. Le premier du second rang commence au centre du quarré qui se forme par les deux premiers arbres du premier rang, & les deux premiers du troisieme ; il n'y a point d'arbres au milieu. Lorsque ce quinconce est maillé, & qu'on regarde ces allées par le flanc, il forme un échiquier parfait. C'est ainsi qu'est le quinconce qui est vis-à-vis des Invalides à Paris, & celui du jardin de Marly.

La beauté d'un quinconce consiste en ce que les allées s'alignent & s'enfilent l'une dans l'autre, & se rapportent juste. On ne met ni palissades ni broussailles dans ce bois ; mais on y seme quelquefois sous les arbres des pieces de gazon, en conservant des allées ratissées, pour former quelques desseins. (D.J.)


QUINCUNCEadj. en Astronomie, signifie la position ou l'aspect des planetes, quand elles sont distantes l'une de l'autre de 150 degrés. Harris.


QUINCUNXS. m. (Hist. anc.) signifie à la lettre cinq onces, & en général cinq parties d'un tout divisé en douze. Voyez ONCE & AS.

Le quincunx étoit aussi une mesure romaine qui contenoit cinq cyathes ; car Martial, selon l'usage de son tems, demandant à boire autant de cyathes de vin qu'il y avoit de lettres dans les noms de trois de ses amis, nommés l'un Caïus, l'autre Julius, & le troisieme Proculus, dit dans une épigramme,

Quincunces, & sex cyathos, bessemque bibamus

Caïus ut fiat, Julius & Proculus.

Le quincunces est pour Caïus, dont le nom est composé de cinq lettres, comme les six cyathes sont à-proportion pour Julius, & le bes, c'est-à-dire les deux tiers du sextier, pour Proculus. Ce qui prouve incontestablement que le quincunx contenoit cinq cyathes, ou cinq douziemes du sextier romain. Voy. CYATHE.


QUINDA(Géog. anc.) forteresse d'Asie dans la Cilicie, au-dessus d'Anchiale, selon Strabon, l. XIV. pag. 672, qui dit que les Macédoniens gardoient leurs trésors dans ce lieu. Plutarque nomme ce fort Cynda ; d'autres disent Cuinda : c'est toujours la même place qui étoit aux confins de la Cilicie & de la Cappadoce. (D.J.)


QUINDECAGONES. m. terme de Géométrie, figure plane qui a quinze angles & quinze côtés. Voyez FIGURE. Ce mot est formé du mot latin quinque, cinq, & des mots grecs dix, & , angle. Pentadécagone seroit une dénomination plus réguliere. Si les quinze côtés du quindécagone sont égaux entr'eux, c'est un quindécagone régulier. Voyez REGULIER.

Pour inscrire un quindécagone régulier dans un cercle, il faut prendre avec un compas la longueur du côté du décagone, & celle de l'exagone, inscriptibles à ce cercle ; & porter ces deux longueurs sur la circonférence, ensorte qu'elles partent du même point, & que leur autre extrêmité détermine l'arc qui correspond à chaque polygone, alors la différence de l'arc de l'exagone à celui du décagone sera l'arc du quindécagone : car l'arc de l'exagone = 60 degrés, & celui du décagone en vaut 36 ; or 60 - 36 = 24, qui est le nombre des degrés de l'arc du quindécagone, puisque 15 fois 24 = 360.

Le côté du quindécagone régulier ainsi décrit, est égal en puissance à la moitié de la différence entre le côté du triangle équilatéral & du pentagone ; comme aussi à la différence des perpendiculaires abaissées sur ces deux côtés. Chambers. (E)


QUINDÉCEMVIRS. m. (Antiq. rom.) officier préposé à la garde des livres sibyllins, & chargé d'une partie des choses qui concernoient la religion, ce que faisoient auparavant les décemvirs & les duumvirs. Ils consultoient ces oracles lorsque le sénat l'avoit ordonné, & en faisoient leur rapport, y ajoutant leur avis. Ces magistrats étoient aussi commis pour exécuter tout ce qui étoit prescrit dans le livre des sibylles, & pour faire célébrer les jeux séculaires. Ce nom leur fut donné parce qu'ils étoient au nombre de quinze dans leur origine. On croit que ce fut Sylla, dictateur, qui les établit, en créant cinq magistrats qu'il ajouta au college des décemvirs. Quoique dans la suite ils aient été soixante, comme le prétend Servius sur le VI. liv. de l'Eneïde, v. 63. leur nom ne changea point, & on continua à les appeller quindécemvirs ; on les créoit de la même maniere que les pontifes, & celui qu'ils avoient à leur tête se nommoit magister collegii.

Outre le dépôt qu'ils avoient des livres sibyllins, & l'interprétation qu'ils en donnoient, ils présidoient aussi aux sacrifices & cérémonies extraordinaires que l'on faisoit. Sur les médailles, quand un dauphin est joint à un trépié, il marque le sacerdoce des quindécemvirs, qui pour annoncer leurs sacrifices solemnels, portoient un dauphin au bout d'une perche, par la ville ; ce poisson étoit consacré à Apollon, aussi-bien que la corneille parmi les oiseaux. Les quindécemvirs jouïssoient, comme les autres prêtres, de l'exemption d'aller à la guerre, & des autres charges, afin qu'ils fussent uniquement occupés de leur sacerdoce. L'an de Jesus-Christ 389, Stilicon brûla les livres sibyllins par l'ordre de l'empereur Théodore, & leurs interprêtes tomberent du même coup. (D.J.)


QUINESce sont, au jeu du trictrac, deux cinq qui viennent d'un même coup de dés.


QUINETTES. f. (Draperie) espece de camelot ordinairement tout de laine, & quelquefois mêlé de poil de chevre, qui se fabrique à Lille en Flandre, & aux environs ; sa largeur est de deux tiers, & la longueur des pieces de vingt à vingt-une aunes mesure de Paris ; la destination la plus ordinaire de ces sortes de camelots est pour l'Espagne. Il se fait à Amiens en Picardie, certains petits camelots de demi-aune de large, auxquels on donne aussi le nom de quinette ; mais les commerçans changent souvent le nom des étoffes, & il y en a plusieurs qui seront dans ce cas avant la fin de cet ouvrage.


QUINGou QUINGEY, (Géogr. mod.) petite ville de France, dans la Franche-Comté, chef-lieu d'un bailliage de même nom, sur la Louve, ruisseau qui grossit le Doux ; cette petite ville est presque ruinée par le passage des troupes, & n'est connue que par la grotte de congelation qui en est voisine, & qui en porte le nom ; voyez-en l 'article. Long. 23d. 15'. lat. 47d. 8 '.


QUINI-SEXTEadj. (Hist. ecclésiast.) terme de l'histoire ecclésiastique, qui se dit du sixieme concile tenu à Constantinople en 692, & qui est encore plus souvent nommé le concile in trullo. Il est regardé comme le supplément des deux conciles qui l'avoient précédé, parce que ces deux conciles n'ayant point fait de canon, les Orientaux jugerent à propos d'y suppléer par celui-ci. Les cent deux canons qu'on attribue aux cinquieme & sixieme conciles généraux, furent l'ouvrage du concile quini-sexte.


QUINOLAS. m. terme du jeu de reversis, mot tiré de l'espagnol ; c'est le valet de coeur, qui est la principale carte du jeu de reversis, & celle qui prend la poule ou l'argent du jeu ; on ne peut écarter le quinola ; on poursuit le quinola ; on force le quinola.


QUINQUAGÉNAIRES. m. (Hist. rom.) c'étoit chez les anciens romains, un officier de guerre qui commandoit une compagnie de cinquante hommes. C'étoit encore dans la police, un commissaire qui avoit inspection sur cinquante familles ou maisons ; enfin on a nommé du même nom dans les monasteres, un supérieur qui avoit une cinquantaine de moines sous sa conduite. (D.J.)


QUINQUAGÉSIMEDIMANCHE DE LA, (Hist. ecclésiast.) c'est le dimanche qui précede immédiatement le mercredi des cendres, que le peuple appelle communément le dimanche gras ; il est ainsi nommé parce qu'il arrive environ cinquante jours avant Pâques.

On appelloit aussi autrefois quinquagésime le dimanche de la Pentecôte, ou le cinquantieme jour après Pâques ; mais pour distinguer cette quinquagésime de celle qui arrive avant le carême, on l'appelloit quinquagésime paschale. Voyez PENTECOTE.


QUINQUATRIESS. f. pl. (Antiq. rom.) en latin quinquatria ; on donnoit ce nom à deux des fêtes de Minerve ; la premiere se célébroit le 19 de Mars, & duroit cinq jours ; le premier jour de la solemnité étoit exempt de ces combats, où il y avoit du sang répandu, parce qu'on croyoit que c'étoit le jour de la naissance de la déesse. Pendant les quatre autres jours, on donnoit des combats de gladiateurs dans le cirque ou dans l'amphithéâtre, pour honorer la divinité qui présidoit à la guerre. La seconde fête nommée quinquatria minora, se célébroit le 13 du mois de Juin ; elle étoit particuliere aux joueurs de flûte, qui ce jour-là couroient la ville, masqués & en habit de femme. On trouvera dans Ovide l'origine de cette cérémonie ; mais comme ces fêtes revenoient tous les ans, j'ai peine à croire qu'on ait pû en prendre occasion de frapper une médaille à Néron. Il est plus naturel de penser que la médaille dont parle le pere Jobert, désigne quelque sacrifice particulier que Néron fit à Minerve, pour s'acquiter d'un voeu dont l'histoire ne nous a pas conservé le souvenir.

Je finis par observer que les petites fêtes de Minerve, qui se célébroient le 13 de Juin, ne duroient qu'un jour selon les uns, & trois selon les autres. Les grandes fêtes de Minerve du 19 Mars, étoient particulierement fêtées par les écoliers. Ils avoient congé tout ce tems-là, & quelques-uns se divertissoient aux dépens de leur régent, en leur friponnant le minerval, c'est-à-dire l'argent que les parens leur donnoient pour porter à leurs maîtres en présent & gratification.

La fête des quinquatries prit ce nom, soit parce qu'elle commençoit le cinquieme jour inclusivement après les ides, & qu'elle duroit cinq jours ; soit parce qu'elle se terminoit par la purification des instrumens de musique qui servoient au sacrifice ; car les anciens latins disoient quinquare pour lustrare, purifier. (D.J.)


QUINQUES. m. est le nom qu'on donne aux morceaux de musique qui sont à cinq parties récitantes. Voyez PARTIES. (S)


QUINQUE-COLLES(Géog. anc.) lieu particulier du Péloponnèse, dans la Laconie, à sept stades de la ville de Lacédémone : on y faisoit du vin qui est vanté par Athénée. (D.J.)


QUINQUEGENTIANI(Géogr. anc.) ancien peuple d'Afrique. Eutrope, liv. IX. ch. xiv. dit qu'ils infestoient l'Afrique sous l'empire de Dioclétien ; mais les auteurs sont très-partagés sur la position du pays qu'ils habitoient, & même sur ce que c'étoit que quinquegentiani.


QUINQUENELLES. f. (Jurisprud.) quinquennale, seu quinquennium, signifioit un répi de cinq ans, que l'on accordoit à un débiteur qui étoit hors d'état de payer, & qui vouloit néanmoins éviter de faire cession de biens ; il obtenoit pour cet effet des lettres de petit sceau que l'on adressoit au juge royal ; ces lettres étoient entérinées du consentement du plus grand nombre des créanciers, sans avoir égard à la qualité des dettes. L'ordonnance d'Orléans, art. 61. défendit d'expédier de telles lettres. Voyez l'ordonnance du commerce, titre 9. des lettres de répi ; la coutume de Bourbonnois, article 68. les ordonnances du duc de Bouillon, article 464. le glossaire de M. de Lauriere aux mots quinquannion & quinquenelle, & CESSION, LETTRES DE REPI, & REPI. (A)


QUINQUENNALS. m. (Histoire rom.) en latin quinquennalis, magistrat des colonies & des villes municipales, dans le tems de la république romaine. Ils étoient ainsi nommés parce qu'on les élisoit à chaque cinquieme année, pour présider au cens des villes municipales, & pour recevoir la déclaration que chaque citoyen étoit obligé de faire de ses biens.


QUINQUENNAUXJEUX, (Littérature) jeux fondés à Tyr, à l'imitation des olympiques de la Grece ; on les appelloit quinquennaux, parce qu'on les célébroit tous les cinq ans, c'est-à-dire au bout de quatre ans ; car d'un jeu olympique à l'autre il n'y avoit que quatre ans ; les jeux quinquennaux s'établirent par la suite des tems dans plusieurs villes de l'empire romain, en l'honneur des empereurs déifiés.

Il ne faut pas confondre les jeux quinquennaux de Tyr avec ceux que Domitien institua en l'honneur de Jupiter Capitolin pendant son douzieme consulat. Tous les cinq ans on disputoit dans ces jeux le prix des vers & de la prose en grec & en latin, c'est Suétone qui nous l'apprend dans sa vie de Domitien, c. iv. en ces mots : Instituit & quinquennale certamen, Capitolino Jovi triplex, musicum, equestre, gymnicum, & aliquantò plurimum, quam nunc est coronatum, certabant etiam & prosâ oratione, graecè, latinèque. Il y avoit des juges publics qui présidoient à ces jeux, & qui décidoient des prix. Onuphrius Panvinus rapporte une inscription par laquelle il paroit que sous le regne de cet empereur, un certain Lucius Valerius Pudeus, natif d'un bourg des Frerentins, appellé de nos jours el Guasto, âgé de treize ans, remporta aux jeux quinquennaux le prix de la poësie, & fut couronné par l'avis de tous les juges. Le pere Pagi a produit une médaille où les jeux quinquennaux de l'empereur Posthume sont gravés, ce qui ne se trouve sur aucune médaille des empereurs qui l'ont précédé. (D.J.)


QUINQUENNIUMS. m. (Jurisp.) signifie l'espace de tems que les écoliers employent à faire leur cours de Philosophie, qui est de deux années, & celui de Théologie, qui est de trois années. On appelle lettres de quinquennium, le certificat que les universités accordent aux gradués de ce tems d'étude, pendant cinq ans, après avoir examiné les attestations des professeurs.

Le réglement du 28 Mai 1663, oblige les universités de marquer dans le quinquennium, le tems où a commencé & fini le cours d'étude. Voyez la bibl. can. tom. I. pag. 593. La Rocheflavin, l. VI. tit. 48. arrêt iv. & les mots GRADUES, SEPTENAIRE. (A)


QUINQUERCES. m. (Gymnastique) quinquertium, le quinquerce chez les Latins est ce que les Grecs appelloient pentathle, où l'on combattoit en un jour à cinq sortes d'exercices, ainsi que le prouve le témoignage de Pompeïus Festus : quinquertium Graeci vocant , quo die quinque genera artium ludo exercebantur. (D.J.)


QUINQUEVIRS. m. (Gouvernement romain) il y avoit à Rome des magistrats subalternes, ainsi nommés parce qu'ils étoient au nombre de cinq, employés aux mêmes fonctions ; mais ces fonctions étoient fort différentes, comme nous allons le prouver.

1°. Il y avoit des quinquevirs établis dans Rome deçà & de-là le Tibre, pour veiller pendant la nuit à la police de la ville, en la place des magistrats d'un certain ordre, qu'il ne convenoit pas de faire courir pendant les ténebres.

2°. Il y avoit des quinquevirs établis exprès pour conduire les colonies, & distribuer aux familles les terres des campagnes qu'on leur accordoit.

3°. Les épulons étoient aussi nommés quinquevirs, quinque viri epulones, quand ils étoient au nombre de cinq.

4°. Il y avoit des quinquevirs du change ou des rentes, nommés quinque viri mensarii ; ceux-ci furent créés l'an de Rome 301, sous le consulat de Valerius Poplicola, & de C. Martius Rusilius. Tite-Live, lib. VII. nous apprend qu'on les choisit d'entre les plébéiens. Ils furent chargés de modérer l'excès de l'usure que les créanciers, ou les banquiers tiroient, & dont le peuple étoit accablé.

5°. Enfin on appelloit encore quinquevirs, des especes d'huissiers, chargés d'exercer ce petit emploi de la justice dans les colonies, ou dans les villes municipales, pour y apprendre le train des affaires. On nommoit ces sortes d'huissiers quinquevirs, parce qu'ils étoient au nombre de cinq pour chaque jurisdiction ; ils changeoient toutes les années. Un homme qui avoit passé par cette charge devoit avoir acquis l'usage de ce que nous appellons la pratique, & l'on tiroit ordinairement de ce corps les greffiers & les notaires. Il est fait mention de ces derniers quinquevirs dans les lettres de Ciceron. (D.J.)


QUINQUINAS. m. (Botan. exot.) le quinquina est nommé par nos botanistes kinakina, cortex peruvianus, cortex febrifugus. C'est une écorce extrêmement seche, de l'épaisseur de deux ou trois lignes, qui est extérieurement rude, brune, couverte quelquefois d'une mousse blanchâtre, & intérieurement lisse, un peu résineuse, de couleur rousse ou de rouille de fer, d'une amertume très-grande, un peu styptique, & d'une odeur aromatique qui n'est pas désagréable.

Quelquefois on apporte le quinquina en écorces assez grandes, longues de trois ou quatre pouces au moins, & larges d'un pouce, non roulées : ce sont des écorces arrachées du tronc de l'arbre. Quelquefois elles sont minces, roulées en petits tuyaux, extérieurement brunes, marquées légérement de lignes circulaires & couvertes de mousse ; intérieurement elles sont rouges : ce sont les écorces des petites branches. D'autres fois elles sont par morceaux très-petits, ou coupés fort menus, jaunes en-dedans, & blanchâtres en-dehors. On dit que c'est le quinquina que l'on a levé des racines, & il est fort estimé des Espagnols.

Il faut choisir celui qui est rouge, ou qui tire sur le rouge, ou sur la couleur de la canelle ; n'ayant rien de désagréable au goût, & dont l'amertume ait quelque chose d'aromatique ; d'une odeur légérement aromatique, friable lorsqu'on le brise sous la dent. On doit rejetter celui qui est visqueux, gluant, dur comme du bois, vieux, passé, insipide, & falsifié par le mêlange de quelqu'autre écorce trempée dans le suc d'aloës.

L'arbre fébrifuge du Pérou, appellé quinquina, china Chinae, & ganaperide, Rai, hist. Palo de Calenturas des Espagnols, n'avoit point encore été décrit exactement, avant que M. de la Condamine envoyât sa description du Pérou à l'académie des sciences, où elle fut lue en 1738.

On a reconnu par cette description, que c'est un arbre qui n'est pas fort haut, dont la souche est médiocre, & qui donne naissance à plusieurs branches. Les feuilles sont portées sur une queue d'environ demi-pouce de longueur ; elles sont lisses, entieres, assez épaisses, opposées ; leur contour est uni & en forme de fer de lance, arrondi par le bas, & se terminant en pointe : elles ont dans leur mesure moyenne un pouce & demi, ou deux pouces de large, sur deux & demi à trois pouces de long : elles sont traversées dans leur longueur, d'une côte d'où partent des nervures latérales, qui se terminent en s'arrondissant parallelement au bord de la feuille.

Chaque rameau du sommet de l'arbre finit par un ou plusieurs bouquets de fleurs, qui ressemblent avant que d'être écloses, par leur figure & leur couleur bleue-cendrée, à celles de la lavande. Le pédicule commun qui soutient un des bouquets, prend son origine aux aisselles des feuilles, & se divise en plusieurs pédicules plus petits, lesquels se terminent chacun par un calice découpé en cinq parties, & chargé d'une fleur d'une seule piece, de la même grandeur & de la même forme à-peu-près que la fleur de la jacinte.

C'est un tuyau long de sept à neuf lignes, évasé en rosette, taillé en cinq, & quelquefois en six quartiers ; ceux-ci sont intérieurement d'un beau rouge de carmin, vif & foncé au milieu, & plus pâle vers les bords ; leur contour se termine par un liseré blanc en dents de scie, qu'on n'apperçoit qu'en y regardant de près. Du fond du tuyau sort un pistil blanc, chargé d'une tête verte & oblongue, qui s'éleve au niveau des quartiers, & est entouré de cinq étamines, qui soutiennent des sommets d'un jaune-pâle, & demeurent cachées au-dedans ; ce tuyau est par dehors d'un rouge sale, & couvert d'un duvet blanchâtre. L'embryon se change en une capsule de la figure d'une olive, qui s'ouvre de bas en haut en deux demi-coques séparées par une cloison, & doublées d'une pellicule jaunâtre, lisse & mince, d'où il s'échappe presqu'aussitôt des semences roussâtres, applaties & comme feuilletées. Les panneaux en se séchant deviennent plus courts & plus larges.

L'arbre du quinquina vient de lui-même dans le Pérou, qui est une contrée de l'Amérique méridionale, sur-tout auprès de Loxa ou Loja, sur les montagnes qui environnent cette ville, à soixante lieues de Quito. Le niveau de Loxa au-dessus de la mer, est d'environ 80 lieues de la côte du Pérou ; l'élévation de son sol est à-peu-près moyenne entre celle des montagnes qui forment la grande Cordeliere des Andes & les vallées de la côte. Le mercure se soutenoit à Loxa, en Février 1737, à 21 pouces 8 lignes, d'où on peut conclure par la comparaison de diverses expériences, faites à des hauteurs connues, que le niveau de Loxa au-dessus de la mer, est d'environ 800 toises ; le climat y est fort doux, & les chaleurs quoique fort grandes, n'y sont pas excessives.

Le meilleur quinquina, du moins le plus renommé, se recueille sur la montagne de Cajanuma, située à deux lieues & demie environ au sud de Loxa ; & c'est de-là qu'a été tiré le premier qui fut apporté en Europe. Il n'y a pas 40 ans que les commerçans se munissoient d'un certificat pardevant notaires, comme quoi le quinquina qu'ils achetoient étoit de Cajanuma. M. de la Condamine s'y étant transporté en 1737, passa la nuit sur le sommet, dans l'habitation d'un homme du pays, pour être plus à portée des arbres du quinquina, la récolte de leur écorce faisant l'occupation ordinaire & l'unique commerce de ce particulier. En chemin, sur le lieu, & au retour, il eut le loisir de voir & d'examiner plusieurs de ces arbres, & d'ébaucher sur le lieu même, un dessein d'une branche avec les feuilles, les fleurs & les graines, qui s'y rencontrent en même tems dans toutes les saisons de l'année.

On distingue communément trois especes de quinquina, quoique quelques-uns en comptent jusqu'à quatre ; le blanc, le jaune & le rouge. On prétend à Loxa que ces trois especes ne sont différentes que par leur vertu, le blanc n'en ayant presque aucune, & le rouge l'emportant sur le jaune ; & que du reste les arbres des trois especes ne différoient pas essentiellement. Il est vrai que le jaune & le rouge n'ont aucune différence remarquable dans la fleur, dans la feuille, dans le fruit, ni même dans l'écorce extérieure : on ne distingue pas à l'oeil l'un de l'autre par dehors, & ce n'est qu'en y mettant le couteau qu'on reconnoît le jaune à son écorce, moins haute en couleur & plus tendre. Du reste, le jaune & le rouge croissent à côté l'un de l'autre, & on recueille indifféremment leur écorce ; quoique le préjugé soit pour la rouge : en se séchant la différence devient encore plus légere, l'une & l'autre écorce est également brune en-dessus. Cette marque passe pour la plus sure de la bonté du quinquina ; c'est ce que les marchands espagnols expriment par envez prieta. On demande de plus qu'elle soit rude par-dessus, avec des brisures & cassante.

Quant au quinquina blanc, sa feuille est plus ronde, moins lisse que celle des deux autres, & même un peu rude ; sa fleur est aussi plus blanche, sa graine plus grosse, & son écorce extérieure blanchâtre. Il croît ordinairement sur le plus haut de la montagne, & on ne le trouve jamais confondu avec le jaune & le rouge qui croissent à mi-côte, dans les creux & les gorges, & plus particulierement dans les endroits couverts. Il reste à savoir, si la variété qu'on y remarque ne provient pas de la différence du terroir, & du plus grand froid auquel il est exposé.

L'arbre du quinquina ne se trouve jamais dans les plaines, il pousse droit, & se distingue de loin d'un côté à l'autre, son sommet s'élevant au-dessus des arbres voisins dont il est entouré ; car on ne trouve point d'arbres du quinquina rassemblés par touffes, mais épars & isolés entre des arbres d'autres especes ; ils deviennent fort gros quand on leur laisse prendre leur croissance. Il y en a de plus gros que le corps d'un homme, les moyens ont huit à neuf pouces de diamêtre ; mais il est rare d'en trouver aujourd'hui de cette grosseur sur la montagne qui a fourni le premier quinquina : les gros arbres dont on a tiré les premieres écorces, sont tous morts aujourd'hui, ayant été entierement dépouillés. On a reconnu par expérience que quelques-uns des jeunes meurent aussi après avoir été dépouillés.

On se sert pour cette opération d'un couteau ordinaire, dont on tient la lame à deux mains ; l'ouvrier entame l'écorce à la plus grande hauteur où il peut atteindre ; & pesant dessus, il le conduit le plus bas qu'il peut. Il ne paroît pas que les arbres qu'on a trouvés aux environs du lieu où étoient les premiers, dussent avoir moins de vertu que les anciens, la situation & le terroir étant les mêmes ; la différence si elle n'est pas accidentelle, peut venir seulement du différent âge des arbres. La grande consommation qui en a été faite est cause qu'on n'en trouve presque plus aujourd'hui que de jeunes, qui ne sont guere plus gros que le bras, ni plus hauts que de douze à quinze piés : ceux qu'on coupe jeunes repoussent du pié.

On préferoit anciennement à Loxa les plus grosses écorces, qu'on mettoit à-part avec soin, comme les plus précieuses ; aujourd'hui on demande les plus fines. On pourroit penser que les marchands y trouvent leur compte, en ce que les plus fines se compriment mieux, & occupent moins de volume dans les sacs & coffres de cuir, où on les entasse à-demi broyées. Mais la préférence qu'on donne aux écorces les plus fines, est avec connoissance de cause, & en conséquence des analyses chymiques, & des expériences qui ont été faites en Angleterre sur l'une & l'autre écorce. Il est fort vraisemblable que la difficulté de sécher parfaitement les grosses écorces, & l'impression de l'humidité qu'elles contractent aisément & conservent long-tems, a contribué à les décréditer. Le préjugé ordinaire est que pour ne rien perdre de sa vertu, l'arbre doit être dépouillé dans le decours de la lune & du côté du levant ; & on n'obmit pas en 1735, de prendre acte par-devant notaires de ces circonstances, aussi bien que de ce qui avoit été recueilli sur la montagne de Cajanuma, quand le dernier vice-roi du Pérou, le marquis de Castel-Fuerte, fit venir une provision de quinquina de Loxa, pour porter en Espagne à son retour.

L'usage du quinquina étoit connu des Américains avant qu'il le fût des Espagnols ; & suivant la lettre manuscrite d'Antoine Boli, marchand génois qui avoit commercé sur le lieu, cité par Sébastien Badus, les naturels du pays ont long-tems caché ce spécifique aux Espagnols, ce qui est très-croyable, vû l'antipathie qu'ils ont encore aujourd'hui pour leurs conquérans. Quant à leur maniere d'en faire usage, on dit qu'ils faisoient infuser dans l'eau pendant un jour, l'écorce broyée, & donnoient la liqueur à boire au malade sans le marc.

Les vertus de l'écorce du quinquina, quoique parvenues à la connoissance des Espagnols de Loxa, & reconnues dans tout ce canton, furent long-tems ignorées du reste du monde, & l'efficacité de ce remede n'acquit quelque célébrité qu'en 1638, à l'occasion d'une fievre tierce opiniâtre dont la comtesse de Chinchon, vice-reine du Pérou, ne pouvoit guérir depuis plusieurs mois ; & quoique ce trait d'histoire soit assez connu, je le rappellerai cependant ici avec quelques circonstances nouvelles.

Le corrégidor de Loxa, créature du comte de Chinchon, informé de l'opiniâtreté de la fievre de la vice-reine, envoya au vice-roi son patron, de l'écorce de quinquina, en l'assurant par écrit qu'il répondoit de la guérison de la comtesse, si on lui donnoit ce fébrifuge ; le corrégidor fut aussi-tôt appellé à Lima, pour régler la dose, & la préparation ; & après quelques expériences faites avec succès sur d'autres malades, la vice-reine prit le remede, & guérit. Aussi-tôt elle fit venir de Loxa une quantité de la même écorce, qu'elle distribuoit à tous ceux qui en avoient besoin ; & ce remede commença à devenir fameux sous le nom de poudre de la comtesse. Enfin elle remit ce qui lui restoit de quinquina aux peres Jésuites, qui continuerent à le débiter gratis, & il prit alors le nom de poudre des Jésuites, qu'il a longtems porté en Amérique & en Europe.

Peu de tems après, les Jésuites en envoyerent par l'occasion du procureur général de la province du Pérou qui passoit à Rome, une quantité au cardinal de Lugo de leur société, au palais duquel ils le distribuerent d'abord, & ensuite à l'apothicaire du college romain, avec le même succès qu'à Lima, & sous le même nom, ou sous celui de poudre du cardinal, gratis aux pauvres, & au poids de l'argent aux autres pour payer les frais du transport, ce qui continuoit encore à la fin de l'autre siecle. On ajoute que ce même procureur de la société, passant par la France pour se rendre à Rome, guérit de la fievre, avec le quinquina, le feu roi Louis XIV. alors dauphin.

En 1640, le comte & la comtesse de Chinchon étant retournés en Espagne, leur médecin, le docteur Jean de Vega, qui les y avoit suivis, & qui avoit apporté une provision de quinquina, le vendoit à Séville à cent écus la livre ; il continua d'avoir le même débit & la même réputation, jusqu'à ce que les arbres de quinquina non dépouillés, étant demeurés rares, quelques habitans de Loxa poussés par l'avidité du gain, & n'ayant pas de quoi fournir les quantités qu'on demandoit d'Europe, mêlerent différentes écorces dans les envois qu'ils firent aux foires de Panama ; ce qui ayant été reconnu, le quinquina de Loxa tomba dans un tel discrédit, qu'on ne vouloit pas donner une demi-piastre de la livre, dont on donnoit auparavant 4 & 6 piastres à Panama, & 12 à Séville.

En 1690 plusieurs milliers de cette écorce resterent à Pivra & sur la plage de Payta, port le plus voisin de Loxa, sans que personne voulût les embarquer ; c'est ce qui a commencé la ruine de Loxa, ce lieu étant aujourd'hui aussi pauvre qu'il a été autrefois opulent dans le tems que son commerce florissoit.

Entre les diverses écorces qu'on a souvent mêlées avec celles du quinquina, & qu'on y mêle encore quelquefois pour en augmenter le poids & le volume, une des principales est celle d'alizier qui a le goût plus styptique, & la couleur plus rouge en-dedans & plus blanche en dehors ; mais celle qui est le plus propre à tromper, est une écorce appellée cacharilla, d'un arbre commun dans le pays, qui n'a d'autre ressemblance avec le quinquina que par son écorce ; on le distingue cependant, & les connoisseurs ne s'y laissent pas tromper. Il y a tout lieu de croire que cette écorce de la cacharilla est celle que nous connoissons sous le nom de chacril. Depuis quelques années, pour prévenir cette fraude, on a la précaution qu'on négligeoit autrefois, de visiter chaque ballot en particulier, & à Payta où s'embarque pour Panama la plus grande partie du quinquina qui passe en Europe, aucun ballot, s'il ne vient d'une main bien sûre, ne se met à bord sans être visité.

Il faut avouer néanmoins que malgré cette précaution, les acheteurs, qui la plûpart ne s'y connoissent pas, & qui jamais ou presque jamais ne vont à Loxa faire leurs emplettes, sont dans la nécessité de s'en rapporter à la bonne foi des vendeurs de Payta, ou de Guayaquil, qui souvent ne le tiennent pas de la premiere main, & ne s'y connoissent pas mieux. De sages réglemens pour assurer la bonne foi d'un commerce utile à la santé, ne seroient pas un objet indigne de l'attention de sa majesté catholique.

On trouve tous les jours sur la montagne de Cajanuma près de Loxa, & aux environs dans la même chaîne de montagnes, de nouveaux arbres de quinquina ; tels sont ceux d'Ayavaca, distante de Loxa d'environ 30 lieues vers le sud-ouest ; ce quinquina est en bonne réputation ; aussi ceux qui s'appliquent à ce commerce, & qui découvrent quelque nouveau canton où ces arbres abondent, sont fort soigneux de ne le pas publier.

On a aussi découvert l'arbre du quinquina en différens endroits assez distans de Loxa, comme aux environs de Rio Bamba, à 40 lieues au nord de Loxa ; aux environs de Cuença, un degré plus nord que Loxa, un peu plus à l'est ; & enfin dans les montagnes de Jaën, à 50 ou 60 lieues au sud-est de Loxa.

La quantité de quinquina qui passe tous les ans en Europe, a persuadé dans tout le Pérou, qu'on s'en servoit en Europe pour les teintures ; soit qu'on en ait fait autrefois quelque essai ou non, le préjugé est ancien, puisque dès le tems qu'il fut décrié par la fraude de ceux de Loxa, on dit que les marchands d'Europe se plaignirent qu'on ne lui avoit trouvé ni la même efficacité contre les fievres, ni la même bonté pour les teintures.

Le nom de quinquina est américain : mais l'écorce qui porte ce nom en Europe n'est connu au Pérou & à Loxa, que sous le nom de corteza ou cascara, ou plus ordinairement cascarilla, écorce de Loxa ou petite écorce ; le nom de poudre des Jésuites, non plus que celui de bois des fievres, palo de calenturas, ne sont plus aujourd'hui en usage ; mais il y a un autre arbre fort célebre & connu dans diverses provinces de l'Amérique méridionale, sous le nom de quina quina, & dans la province de Maynas, sur les bords de Maranon, sous le nom de tatché ; de cet arbre distille par incision une résine odorante ; les semences appellées par les Espagnols pepitas de quina quina, ont la forme de feves ou d'amandes plates, & sont renfermées dans une espece de feuille doublée ; elles contiennent aussi entre l'amande & l'enveloppe extérieure un peu de cette même résine qui distille de l'arbre. Leur principal usage est pour faire des fumigations, qu'on prétend salutaires & confortatives, mais qui ont été en bien plus grand crédit qu'elles ne sont aujourd'hui.

Les naturels du pays forment de la gomme résine, ou baume de cet arbre, des rouleaux ou masses qu'ils vont vendre au Potosi & à Chuquizaca, où ils servent non-seulement à parfumer, mais à d'autres usages de médecine, tantôt sous la forme d'emplâtre, tantôt sous celle d'une huile composée qu'on en tire ; & enfin sans aucune préparation, en portant ces bols à la main, & les maniant sans-cesse, pour aider à la transpiration & fortifier les nerfs. Les Turcs font précisément le même usage du laudanum : il reste à savoir maintenant, comment & pourquoi l'écorce de Loxa a reçu en Europe & dans le reste du monde, hors dans le lieu de son origine, le nom de quinquina.

Parmi les différentes vertus qu'on attribue à l'arbre balsamique dont nous venons de parler, & nommé de tout tems quina quina par les naturels, & depuis par les Espagnols, la plus considérable est celle de son écorce, qui passoit pour un excellent fébrifuge. Avant la découverte de l'arbre de Loxa, cet autre étoit en grande réputation pour guérir les fievres tierces, & les jésuites de la Paz ou Chuquiabo, recueilloient avec grand soin son écorce, qui est extrêmement amère ; ils étoient dans l'usage de l'envoyer à Rome où elle se distribuoit sous son vrai nom de quina quina. L'écorce de Loxa ayant passé en Europe & à Rome par la même voie, le nouveau fébrifuge a été confondu avec l'ancien ; & celui de Loxa ayant prévalu, il a retenu le nom du premier, qui est aujourd'hui presque entierement oublié ; le nom de cascarilla ou de petite écorce, donné à celui de Loxa, semble aussi avoir été imposé, pour la distinguer d'un autre, qui étoit sans-doute celle de l'ancien fébrifuge.

Il est arrivé au quinquina ce qui arrive à presque tous les remedes communs & de peu de valeur, dans les pays où ils naissent, & où on les trouve, pour ainsi dire, sous la main. On en fait au Pérou, généralement parlant, peu de cas & peu d'usage : on le craint & on en use peu à Lima, beaucoup moins à Quito, & presque point à Loxa. Mais en Europe, le débit en est prodigieux, par la vertu spécifique qu'il a de guérir les fievres intermittentes ; cependant si la fievre est le symptome d'une autre maladie, c'est en vain & mal-à-propos que l'on donneroit l'écorce fébrifuge ; la fievre ne cédera qu'en guérissant la maladie idiopathique dont elle tire son origine ; on connoît encore que le quinquina n'est pas un remede convenable dans les fievres continues, hectiques, inflammatoires, putrides, malignes & pestilentielles ; il ne faut donc regarder cette écorce que comme un antidote dans les seules fievres intermittentes.

Nous lisons dans les mémoires d'Edimbourg, que des médecins & chirurgiens habiles ont fait usage du quinquina avec un grand succès dans la gangrene & dans le sphacele, qui viennent d'une cause intérieure ou extérieure, & que des malades désespérés, après avoir tenté vainement tous les autres remedes, recouvrent une parfaite santé par l'usage de celui-ci. S'il étoit vrai que le quinquina eût des propriétés si merveilleuses que de guérir les malades attaqués de gangrene ou de sphacele, il deviendroit alors cent fois plus cher aux hommes qu'il ne l'est par sa vertu fébrifuge. (D.J.)


QUINTS. m. (Commerce) la cinquieme partie d'un tout divisé en cinq parties égales. J'ai mon quint dans cette société, dans cet armement ; c'est-à-dire, j'y suis intéressé pour un cinquieme. Dict. du Comm.

QUINT, s. m. (Comm. d'Amér.) ce terme est particulierement en usage dans l'Amérique espagnole, pour signifier ce qui est dû au roi pour le droit qu'il leve sur tout l'or & argent qui se tire des mines, ou que l'on y recueille autrement. Ce droit est si considérable qu'on prouve par les registres de l'or & de l'argent quintés, que des seules mines du Potosi, le roi d'Espagne a tiré en moins de cinquante ans plus de cent onze millions de pesos, à treize réales un quart le peso.

Le quint est dû aussi au roi pour toutes sortes de pierreries, & sous ce nom sont compris non-seulement les pierres qu'on appelle précieuses, & qui ont de l'éclat, mais encore le bézoard, le corail rouge, l'aimant, le jais, l'arcanson & le vitriol. Dictionn. du Commerce. (D.J.)

QUINT, en matiere féodale, est la cinquieme partie du prix de la vente d'un fief.

En quelques pays on l'appelle vente ou droit de ventes ou lods, de même que le droit qui est dû pour les rotures.

Le quint est dû en général pour toute mutation par rente, ou par contrat équipollent à vente, comme quand le fief a été échangé, quand il a été donné à vente rachetable, quand il est adjugé par decret ou par licitation ; quand le débiteur le donne à son créancier en payement de ce qu'il lui doit ; lorsqu'il est donné ou légué à un étranger, à la charge de payer une somme à quelqu'un ; lorsque le vassal donne son fief à un cens modique avec des deniers d'entrée qui égalent la valeur du fief ; enfin quand le vassal donne une partie de son fief à cens ou à rente avec retention de foi, & qu'ensuite le cens ou la rente est vendu.

Le quint se prend sur le prix de la vente, comme de 100000 liv. 20000. liv.

On compte dans le prix non-seulement la somme payée au vendeur, mais aussi celles que l'acheteur s'est obligé de payer en son acquit.

Mais on ne compte point dans le prix ni les frais du contrat, ni les loyaux-coûts, ni les frais extraordinaires des criées, ni ceux du decret, parce que cela ne tourne point au profit du vendeur ; on suit à cet égard les mêmes regles que pour la fixation des lods & ventes à ci-devant LODS.

Dans quelques coutumes, outre le quint, on paie aussi un droit de requint, qui est la cinquieme partie du quint. Voyez les auteurs qui ont traité des fiefs, & les commentateurs des coutumes sur le titre des fiefs, & le traité du quint & des lods & ventes par M. Guyot, & les mots FIEF, MUTATION, RELIEF, SEIGNEUR, VASSAL, VENTE. (A)


QUINT-DATIFS. m. (Jurisprud.) on appelle ainsi dans les coutumes de Picardie & d'Artois la cinquieme partie des héritages dont la coutume permet de disposer. Voyez Mailloit sur Artois, article 91.

Quint-hérédital est la cinquieme partie des biens que les coutumes de Picardie & d'Artois réservent aux puînés. Voyez ci-devant QUINT-DATIF.

Quint-naturel est la même chose que quint-hérédital. Voyez le journal des audiences, tome I. liv. v. ch. xlvj.

Quint des puînés est la même chose que quint-hérédital & quint-naturel. Voyez ci-devant ces deux articles. (A)


QUINTADINERv. n. (terme d'Organiste) ce terme se dit des tuyaux de l'orgue lorsqu'ils raisonnent en maniere de quinte, & qu'ils ne parlent pas d'une façon harmonieuse, ce qui est un défaut.


QUINTAINES. f. (Jurisprud.) est un exercice du corps ou jeu que certaines personnes sont obligées de faire pour le divertissement du seigneur.

Balzamon prétend que ce jeu a été ainsi appellé parce qu'un nommé Quintus en fut l'inventeur, ce qui paroît appuyer sur la loi 1. au code de aleatoribus.

Pancirole, I. var. cap. jv. prétend qu'il a été ainsi nommé à Quintanâ viâ quae castris romanis in Quintanam portam exibat.

Ducange, en sa dissertation sur Joinville, tient que ce terme vient de ce que ce devoir s'acquitoit dans les banlieues appellées Quintes ou Quintaines, parce qu'elles s'étendoient à 5000 pas hors de la ville.

On plaçoit ordinairement vers l'extrêmité de la banlieue un pal ou poteau que l'on appelloit le pal de la quintaine, & ce pal servoit pour le jeu ou exercice dont il s'agit, qui a aussi été appellé la quintaine, du nom de la banlieue où il se faisoit, & du pal de la banlieue qui y servoit.

En la coutume locale de Mezieres en Touraine, les meuniers demeurans en la baronie & châtellenie de Mezieres, sont tenus une fois l'an frapper par trois coups le pal de la quintaine en la plus proche riviere du châtel du seigneur, baron ou châtelain, ou autre lieu accoutumé, & s'ils se feignent rompre leurs perches, ou défaillent au jour, lieu & heure accoutumés, il y a 60 sous d'amende au seigneur.

De même à Mehun sur Eure en Berry, les hommes mariés dans l'année, sont tenus, le jour de la pentecôte, tirer la quintaine au-dessous du château, & par trois fois frapper de leurs perches un pan de bois qui est piqué & planté au milieu du cours de l'eau.

En la châtellenie de Mareuil, ressort d'Issoudun en Berry, les nouveaux mariés tirent aussi la quintaine sur la riviere d'Amon.

Il y a de pareils exercices en Vendômois, Bourbonnois & ailleurs.

Il est fait mention de ce droit de quintaine au liv. II. du recueil des arrêts de Bretagne.

En quelques lieux, à chaque mutation de seigneur ou de vassal, le vassal doit courir la quintaine de service féodal. Voyez le Glossaire de Lauriere au mot Quintaine, & ci-après QUINTE. (A)

QUINTAINE, (Maréchal) on appelle ainsi dans les maneges, un poteau ou jacquemart représentant un homme armé d'un bouclier, auquel on jette des dards, & sur lequel on va rompre des lances à cheval. On appelle aussi cette figure faquin. Coure la quintaine ou le faquin, c'est un exercice d'académie.


QUINTALS. m. (Poids) le quintal, quoique de cent livres, n'est pas égal par-tout ; il differe quelquefois de cinq, de dix ou de vingt pour cent, plus ou moins, suivant que la livre est composée de plus ou de moins d'onces, ou que les onces sont plus fortes ou plus foibles, dans les lieux où l'on achete & vend les marchandises. Par exemple, le quintal de Paris rend à Marseille cent vingt-trois livres ; & le quintal de poids de Marseille ne rend à Paris que quatre-vingt-une livres : cette différence provient de ce que la livre de Paris est composée de seize onces, & que celle de Marseille n'est composée que de treize onces, ce qui se doit entendre poids de marc ; car la livre de Marseille est aussi de seize onces poids de table. Savary.

QUINTAL des Grecs, (Antiq. grecq.) ce poids ne répond point à ce que nous nommons de ce nom. Le quintal, que les Grecs appelloient , étoit de plusieurs sortes ; le moindre pesoit cent vingt-cinq livres ; il y en avoit de cent soixante-cinq, de quatre cent, de mille & de douze cent livres.

QUINTAL GEROUIN, le, (Poids d'Egypte) ce qu'on nomme au Caire quintal gérouin, est le poids le plus fort dont on se sert dans cette capitale & dans les autres villes de commerce d'Egypte, pour peser les marchandises les plus pesantes ou du plus grand volume, il est de deux cent dix-sept rotols du Caire, dont les cent dix font cent huit livres de Marseille. Dict. du commerce. (D.J.)

QUINTAL DU LEVANT, (Poids) le quintal de Constantinople est estimé le plus pesant de tous les quintaux dont on se sert au Levant. Il est de quarante-cinq ocques ; l'ocque pesant quatre cent dragmes, ou deux livres neuf seiziemes d'Amsterdam. Le quintal pese cent douze livres trois quarts d'Amsterdam, cent quatre-vingt-une livres de Venise, & cent soixante de Livourne. On peut aussi diviser le quintal en rottes à raison de cent rottes par quintal, la rotte est de cent quatre-vingt dragmes.

QUINTAL-MECHO, (Comm. d'Amériq.) on appelle ainsi en Espagne, à Buenos-Aires, & dans le reste de l'Amérique espagnole, un quintal qui est de moitié plus sort que le quintal commun. Il est de six arobes, & ce dernier seulement de quatre, c'est-à-dire l'un de cent cinquante & l'autre de cent à prendre l'arobe sur le pié de vingt-cinq livres ; ce qui rend poids de Paris quatre-vingt-treize livres pour le quintal commun, & cent trente-neuf livres & demi pour le quintal-macho. Savary. (D.J.)


QUINTANAE(Géogr. anc.) lieu de la seconde Rhetie. Il y avoit garnison romaine. La notice de l'empire, sect. 59. porte Praefectus alae primae Flaviae Rhetiorum Quintanis. C'est le même lieu dont parle Antonin dans son itinéraire, où il le nomme Quintianae entre Quilabis & Augusta Vindelicorum à XXIV. M. P. de Boiodorum & à XX. M. P. d'Augustae. On croit que c'est Kintzen. (D.J.)


QUINTES. f. (Jurisprud.) signifie la cinquieme. La quinte & surabondante criée est une cinquieme criée que l'on ordonne quelquefois outre les quatre criées ordinaires, pour suppléer à ce qui pourroit manquer à quelqu'une de ces criées. Voyez CRIEES.

Quinte d'Angers est la septaine, le territoire, la banlieue, la voirie, l'étendue de la jurisdiction du prevôt ou autre premier juge ordinaire. Ce terme vient de ce que les Poitevins & les Angevins donnoient aux banlieues de leurs villes l'espace de 5000 pas, coutume d'Anjou, article xxxv. Touraille, en sa note sur cet article, pense que ce terme vient de ce que le juge a droit de faire tirer la quintaine dans sa jurisdiction. Menage croit que ce mot quinte vient de ce que la jurisdiction du prevôt d'Angers est composée de cinq châtellenies, mais la premiere étymologie paroît la meilleure. Voyez Ducange sur Joinville, Chopin sur Anjou, le gloss. de Lauriere, & ci-devant le mot QUINTAINE.

QUINTE, s. f. en Musique, est la seconde des trois consonnances parfaites. Voyez CONSONNANCE. Son rapport est de 2 à 3 ; elle est composée de quatre degrés diatoniques ou de cinq sons, d'où lui est venu le nom de quinte. Son intervalle est de trois tons & demi.

La quinte peut s'altérer de deux manieres ; savoir en diminuant son intervalle d'un semi-ton, & alors elle s'appelle fausse-quinte, & devroit s'appeller quinte diminuée ; ou en augmentant d'un semi-ton ce même intervalle, ce qui rend la quinte superflue. Desorte que la quinte superflue a quatre tons, & la fausse quinte trois seulement, comme le triton.

Il y a deux accords qui portent le nom de quinte, savoir l'accord de quinte & sixte, qu'on appelle aussi grande-sixte ou sixte ajoutée, & l'accord de quinte superflue. Le premier de ces deux accords se considere de deux manieres, savoir, comme un renversement de l'accord de septieme, la tierce du son fondamental étant portée au grave, c'est l'accord de grande sixte ; ou bien, comme un accord direct dont le son fondamental est au grave, & c'est alors l'accord de sixte ajoutée. Le second est un accord dominant en mode mineur au-dessous duquel on fait entendre la médiante, avec laquelle la note sensible fait quinte superflue. Voyez ACCORD.

Il est défendu en composition de faire deux quintes justes de suite par mouvement semblable entre les mêmes parties ; cela choqueroit l'oreille, & annonceroit une double modulation.

M. Rameau prétend rendre raison de cette regle par le défaut de liaison entre les accords. Il se trompe : premierement on peut former ces deux quintes, & conserver la liaison harmonique : secondement, même avec cette liaison, les deux quintes n'en sont pas moins mauvaises : troisiemement, il faudroit, par le même principe, étendre la regle aux tierces majeures ; ce qui n'est pas & ne doit pas être, car il n'appartient point à nos hypothèses de contrarier le jugement de l'oreille, mais seulement d'en rendre raison. (S)

QUINTE-FAUSSE, en Musique, est une quinte réputée juste dans l'harmonie, mais qui, par la force de la modulation, se trouve affoiblie d'un semi-ton. Telle est celle de l'accord de septieme sur la seconde note du ton en mode mineur.

La fausse-quinte est une dissonnance qu'il faut sauver ; mais la quinte-fausse peut passer pour consonnance, & être traitée comme telle quand on compose à quatre parties. Voyez FAUSSE-QUINTE. (S)

QUINTE DE FLUTE A BEC, (Luth.) instrument dont la figure & la tablature est semblable à celles de la flûte à bec. Voyez FLUTE A BEC. Elle sonne la quarte au-dessous de la taille décrite dans l'article cité, & l'unisson des deux octaves supérieures du clavecin. Cet instrument a une 16e d'étendue, comprise depuis l'ut de la clé, ou du milieu du clavecin jusqu'au d la re tout en-haut. Voyez la table du rapport de l'étendue de tous les instrumens.

QUINTE DE FLUTE TRAVERSIERE (Luth.) est un instrument entierement semblable à la flûte traversiere, & qui sonne la quinte au-dessus. Sa tablature & sa construction est entierement semblable, ensorte que cet instrument ne differe de la flûte traversiere ordinaire qu'en ce qu'il est plus petit dans la raison de 3 à 2. Voyez FLUTE TRAVERSIERE.

QUINTE DE VIOLON, (Luth.) instrument de Musique en tout semblable au violon, voyez VIOLON, dont il ne differe que parce qu'il est plus gros, & qu'il sonne la quinte au-dessous. Voyez la table du rapport de l'étendue des instrumens de Musique. L'accord à vuide est par quintes, & les cordes rendent à vuide en commençant par la chanterelle les sons la, ré, sol, ut. Cet instrument est aussi nommé taille & haute-contre de violon.

QUINTE, (Maréchal) fantaisie qui tient du cheval rétif ; car le cheval se défend pendant quelques instans, & ne veut point avancer. Les mules sont sujettes à ce défaut.

QUINTE, parer en, terme d'escrime, voyez PARADE DE FLANCONADE.

QUINTE, au jeu de piquet, c'est une séquence de cinq cartes de même couleur, comme as, roi, dame, valet & dix ; roi, dame, valet, dix & neuf ; dame, valet, dix, neuf & huit ; valet, dix, neuf, huit & sept, la plus forte emportant la plus foible, & vaut quinze à celui qui l'a dans son jeu.


QUINTÉQUINTÉE, adj. (Comm.) on appelle un lingot d'or quinté, une barre d'argent quintée, ces métaux en barres ou lingots qui ont été essayés, pesés & marqués par les essayeurs & commis du roi d'Espagne. Voyez QUINT & QUINTER. Diction. de commerce.

QUINTE-ESSENCE, s. f. (Chymie & Méd.) c'est l'extraction de l'huile essentielle des végétaux & son mêlange avec l'alkool rectifié. Cette préparation distillée donne un esprit des plus pénétrans, & le remede le plus sûr en qualité de cordial de tous ceux que l'on connoisse.

Une goutte d'huile essentielle divisée ainsi par une quantité considérable d'esprit-de-vin, mêlée dans un verre de vin d'Espagne ou de quelque autre liqueur, fait une boisson des plus gracieuses & capable de ranimer les esprits dans la syncope, la lypothimie, les suffocations hystériques, & autres symptomes fâcheux ; mais l'usage de ces mêlanges spiritueux, nuds & dépouillés de leur véhicule devient un remede préjudiciable, attendu qu'ils produisent une acrimonie inflammatoire, pris à l'intérieur & appliqués extérieurement.

Ainsi on ne doit employer ces moyens qu'après avoir pris toutes les précautions possibles pour prévenir les funestes effets de leur usage, comme de faire prendre des adoucissans, des délayans, ou de diviser la quinte-essence dans un grand véhicule.


QUINTE-FEUILLES. f. (Hist. nat. Bot.) quinque folium, genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond. Le pistil sort du calice, qui est composé d'une seule feuille, & profondément découpé ; il devient dans la suite un fruit presque rond, dans lequel on trouve plusieurs semences rassemblées en maniere de tête, & enveloppées du calice mince. Ajoutez aux caracteres de ce genre que les feuilles sont situées à l'extrêmité du pédicule, & qu'elles surpassent le nombre de trois. C'est par ce caractere que la quinte-feuille differe du fraisier. Tournefort, inst. rei herb. Voyez PLANTE.

M. Tournefort compte 19 especes de ce genre de plante ; la grande quinque-folium majus, repens, est la plus commune.

Sa racine est longue quelquefois de la grosseur du petit doigt, fibreuse, noirâtre en dehors, rouge en dedans, d'un goût styptique ; elle donne comme le fraisier plusieurs tiges, longues d'environ un pié & demi, rondes, grêles, flexibles, velues, rougeâtres, genouillées par intervalles, & poussant de leurs noeuds des feuilles & des racines par le moyen desquelles la plante se répand au large, & se multiplie.

Ses feuilles sont oblongues, arrondies à leur extrêmité, nerveuses, dentelées en leurs bords, d'un verd obscur, rangées en main ouverte, ordinairement au nombre de cinq sur la même queue, laquelle est longue de trois pouces, & même de plus.

Ses fleurs naissent aux sommets des tiges seules à seules, composées chacune de cinq pétales jaunes, disposées en rose, un peu larges, arrondies en coeur, portées sur de longs pédicules, de peu de durée, avec vingt étamines à sommets allongés en forme de croissant.

Lorsque ces fleurs sont tombées, le pistil devient un fruit presque rond, composé de plusieurs semences pointues, ramassées en maniere de tête, enveloppées par le calice de la fleur. Cette plante croît dans les champs, aux lieux sablonneux & pierreux, au bord des eaux, dans les bois humides & ombrageux ; elle se trouve presque partout ; elle fleurit en Mai & Juin. (D.J.)

QUINTE-FEUILLE, (Mat. méd.) on se sert principalement en médecine de la racine de cette plante. On a coutume de la monder de sa premiere écorce, & d'une corde qu'elle contient dans son milieu, & de la faire sécher pour s'en servir au besoin.

La racine de quinte-feuille est un vulnéraire astringent, très-communément employé dans les tisanes, les apozemes, bouillons destinés à arrêter les hemorrhagies, les cours de ventre, la dyssenterie, &c.

La racine de quinte-feuille a été aussi regardée dans tous les tems comme un puissant fébrifuge. Ce remede étoit usité du tems d'Hippocrate. On a employé la décoction de quinte-feuille pour tisane ou boisson ordinaire, non-seulement dans le traitement des fievres intermittentes, mais encore dans celui des fievres malignes. La maniere la plus usitée de la donner dans les fievres intermittentes, c'est de faire prendre un gros de cette racine en poudre dans un verre d'eau ou de vin un peu avant l'accès.

La racine de quinte-feuille entre dans l'eau générale de la Pharmacopée de Paris, & dans la thériaque. Les feuilles entrent dans le baume vulnéraire. (b)


QUINTELAGou QUINTILAGE, s. m. terme de commerce de mer, usité en quelques endroits pour signifier ce qu'on nomme plus communément lest. Les Flamands disent quincelage. Voyez LEST.

QUINTELAGE, signifie aussi, en basse Bretagne, l'ordinaire ou le port des hardes qu'il est permis à chaque matelot qui s'embarque de porter avec soi, ce qui se régle au poids, & dont les matelots conviennent en s'engageant. On le nomme aussi matelotage. Diction. du commerce.


QUINTERv. a. (Monnoie) quinter l'or, l'argent, c'est le marquer après l'avoir essayé & pesé, & en avoir fait payer le droit de quint au roi ; ce terme est particulierement en usage dans les mines du Potosi, du Chily, & de la nouvelle Espagne, d'où il a passé en Europe parmi ceux qui font le commerce de l'or & de l'argent en matiere, & non en especes. (D.J.)


QUINTERONÉadj. (Hist. moderne) nom qu'on donne aux enfans des quarteronés. Voyez QUARTERONEE.


QUINTEUXCAPRICIEUX, FANTASQUE, BOURRU, BIZARRE, (Synonym.) toutes ces qualités, très-opposées à la bonne société, sont l'effet, & en même tems l'expression d'un goût particulier, qui s'écarte mal-à-propos de celui des autres. C'est là l'idée générale qui les a fait synonymes, & sous laquelle ils sont employés assez indifféremment dans beaucoup d'occasions, parce qu'on n'a point alors en vue les idées particulieres qui les distinguent ; mais chacun n'en a pas moins son propre caractere, que peut-être on rencontre assez heureusement en disant que, s'écarter du goût, par excès de délicatesse, ou par une recherche du mieux, faite hors de saison, c'est être fantasque ; s'en écarter par une simple singularité d'objet non concevable, c'est être bizarre ; par inconstance ou changement subit de goût, c'est être capricieux ; par une certaine révolution d'humeur ou façon de penser, c'est être quinteux ; par grossiereté de moeurs & défaut d'éducation, c'est être bourru.

Le fantasque, dit proprement quelque chose de difficile ; le bizarre, quelque chose d'extraordinaire le capricieux, quelque chose d'arbitraire ; le quinteux, quelque chose de périodique ; & le bourru, quelque chose de maussade. Girard. (D.J.)

QUINTEUX, (Maréchal.) on appelle ainsi un cheval qui a des quintes. Voyez QUINTE.

QUINTEUX, se dit en Fauconnerie, d'un oiseau qui s'écarte trop.


QUINTIANUM(Géograph. anc.) on a soupçonné que Quintianum pourroit bien être Quintiano dans le Bressan. S. Optat, dans son histoire du schisme des Donatistes, l. I. c. xxiij. nomme entre les évêques choisis par Constantin pour juger la cause de Donat & de Cécilien, Zoticus à Quintiano, Zotique de Quintianum. (D.J.)


QUINTILS. m. (Poésie françoise) on nomme ainsi une stance composée de cinq vers. Dans le quintil, il doit y avoir nécessairement trois vers d'une même rime entrecoupées par la seconde rime. Le quintil françois a été inventé par Fontaine, contemporain de Du Bellay, qui vivoit sous Henri II. (D.J.)


QUINTILEadj. (Astron.) terme d'Astronomie, qui signifie un aspect de planetes, distantes l'une de l'autre de 72 degrés, ou de la cinquieme partie du zodiaque. Voyez ASPECT. (O)


QUINTILIENSS. m. pl. (Hist. anc.) ordre des Luperques à Rome, qui étoient divisés en trois colleges ; savoir, des Fabiens, des Quintiliens, & des Juliens. Celui des Quintiliens avoit pris son nom de P. Quintilius, qui le premier fut mis à la tête de ce college dans son institution.

QUINTILIENS, s. m. pl. (Hist. ecclésiastique) secte d'anciens hérétiques qui étoient une branche des Montanistes, & qui avoient pris ce nom d'une de leurs prétendues prophétesses nommée Quintilla. Voyez MONTANISTES.

On rapporte d'eux, qu'ils admettoient les femmes à la prêtrise & à l'épiscopat, se fondant sur ce passage de S. Paul aux Galates, qu'en J. C. il n'y a point de distinction de mâles & de femelles. Ils attribuoient à Eve des avantages extraordinaires, parce qu'elle avoit mangé la premiere du fruit de l'arbre de la science du bien & du mal. Ils enseignoient aussi des choses surprenantes, mais imaginaires, de Marie, soeur de Moïse, qu'ils regardoient comme une prophétesse ; & rapportoient leur origine aux quatre filles du diacre S. Philippe, qu'on croit avoir été favorisées du don de prophétie ; c'est pour les représenter, que dans leurs assemblées ils avoient toujours de jeunes filles vêtues de blanc. Ces fanatiques ressembloient assez aux Quakres modernes. Voyez QUAKRE.


QUINTILISS. m. (Calendrier rom.) le cinquieme mois des Romains du tems de la république, parce qu'il est le cinquieme en commençant par Mars. Ce mois porta dans la suite le nom de Juillet, Julius, en l'honneur de Jules César, comme le mois d'Août qu'on nommoit Sextilis, sixieme mois, fut appellé Augustus en l'honneur d'Auguste. Les autres mois ont conservé le nom du rang qu'ils avoient quand le mois de Mars étoit le premier de l'année. Ainsi Septembre, Octobre, Novembre & Décembre ne signifioient autre chose que septieme, huitieme, neuvieme & dixieme mois de l'année.


QUINTILLES. m. (Jeu) le quintille nouveau ; ce jeu differe des anciens par quelques régles prises du quadrille, & contraires à la vieille maniere de le jouer. Les prises seront les mêmes qu'au quadrille, & l'on observera la même maniere de marquer & de payer le jeu. Après donc qu'on aura réglé la valeur de la fiche, tiré les places, & vu à qui à mêler, celui qui doit donner mettra une fiche au-devant, après quoi ayant fait couper à sa gauche, donnera à chacun huit cartes, par deux fois quatre ne pouvant les donner d'une autre maniere. Les cartes données, chacun parlera à son tour, en commençant par le premier en carte. Si quelque joueur a jeu à jouer, en appellant, il demande si l'on joue ; après qu'on lui a répondu que non, il nomme sa couleur & appelle un roi, qui doit avec lui faire cinq mains pour gagner, la perdant remise s'ils n'en font que quatre, & codille s'ils en font moins.

S'ils gagnent, on leur paye la consolation & les matadors, s'ils en ont, & s'ils perdent ils payent ce qu'ils auroient gagné. Il n'est point question du jeu, parce que chacun doit le mettre, par conséquent ceux qui gagnent le tirent du devant, de même que ceux qui gagnent par codille. La bête & tout ce qui se paye est payé moitié par l'hombre & moitié par le roi appellé ; & s'il se trouve un jetton impair, c'est à l'hombre à le payer, de même que c'est à lui à qui il appartient, quand ils ont gagné.

Ce jeu n'est pas si rigoureux que le quadrille envers celui qui fait jouer, puisqu'il ne fait jamais la bête seul, lorsqu'il joue en appellant un roi, quand il ne feroit qu'une main ; mais toujours de moitié avec celui avec lequel il joue.

Lorsque tous les cinq joueurs ont passé, celui qui a spadille est obligé de jouer en appellant un roi. Il suit en tout les lois de celui qui joue volontairement, l'on ne s'écarte en rien à l'égard de celui qui joue le sans prendre. Les quatre joueurs sont réunis contre celui qui joue le sans prendre, qui doit faire seul cinq mains pour gagner, perdant par remise s'il ne fait que quatre mains, & codille s'il en fait moins. Lorsque celui qui joue sans prendre ou qui s'est appellé lui-même perd codille, les quatre joueurs partagent ce qui est au jeu ; mais s'il se trouve des jettons impairs, comme il arrive ordinairement, celui des quatre qui a la plus forte triomphe en gagne un ; le second est gagné par celui des trois restans qui a encore la plus forte ; & le troisieme, s'il y en a un, doit être pour celui des deux joueurs qui n'en a point eu, & qui aura la meilleure triomphe, & s'ils n'en avoient ni l'un, ni l'autre, il resteroit pour le coup suivant. La premiere bête est toujours de quinze ; la seconde, de quarante-cinq, à moins que le jeu sur lequel la premiere bête a été faite, n'ait été tiré par codille ; auquel cas, la seconde seroit de trente seulement. Vous pouvez augmenter de quinze en l'un & l'autre cas, à mesure que le nombre en augmentera.

Les matadors sont payés de la même maniere qu'au quadrille, n'importe qu'ils soient dans un seul jeu des joueurs, ou qu'ils soient séparés partie dans le jeu de l'hombre, & partie dans le jeu de celui qui a le roi appellé.

La vole se paye aussi ce qu'on est convenu à ceux qui la font, qui la gagnent par part égale. On ne court aucun risque pour ceux qui ne la font point l'ayant entreprise ; il n'en est pas de même pour ceux qui, ayant fait jouer, font la dévole, ce qui arrive quelquefois. Ils sont obligés de payer en commun la vole à ceux qui l'ont faite, en observant toujours que le jetton impair, qui est au profit de l'hombre quand il gagne, doit être payé par lui lorsqu'il perd. Celui qui appelle un roi fait la bête seul, s'il ne fait point de mains, en supposant que son roi appellé en fasse ; car s'il n'en faisoit pas, ils seroient de moitié de perte.

La vole ne tire que ce qui va sur le jeu. Les cartes sont payées au moyen d'un certain nombre de jettons que chaque joueur fournit, c'est l'avantage de celui qui fait jouer de faire atout ; ainsi le roi appellé, après avoir paru, ou même avant que de paroître, doit faire atout, pour accommoder le jeu de son ami, & donner passage à ses rois, qui, sans cela, pourroient être coupés.

Le quintille ancien. On ne donne point de fiches à ce jeu ; on prend seulement vingt ou trente jettons qu'on apprécie ce qu'on veut. On tire les places, puis après avoir vû à qui fera, chacun met un jetton devant soi, & n'a que huit cartes ; c'est la donne ordinaire à ce jeu ; & ce qui fait qu'il ne reste rien à ce talon ; mais aussi on n'est point obligé de rien écarter ; la maniere de parler & de commencer sont de même qu'à l'hombre à quatre, & pour gagner, il faut lever cinq mains. Qui fait jouer sans prendre, doit nommer sa couleur, faire aussi cinq mains pour gagner, & s'il gagne il a deux jettons de chacun pour le sans-prendre, & autant pour trois matadors ; mais en eût-il aussi depuis trois jusqu'à neuf, il ne peut en espérer davantage. Quand il y auroit plusieurs bêtes au jeu, & que celui qui feroit jouer sans prendre feroit la vole, il ne tireroit que ce qui seroit au jeu, & deux jettons de chacun des joueurs. S'il gagne simplement, & qu'il fasse jouer d'abord sans prendre, de cinq jettons qu'il y a au jeu, outre le droit de sans prendre, il n'en tire que deux, reste par conséquent trois au jeu ; qui des joueurs, excepté le dernier, fait jouer après avoir demandé si l'on joue, & qu'on lui a répondu que non, il doit nommer sa couleur, puis il appelle un roi à son aide ; il ne faut pas que ce soit celui de triomphe. Cela fait, celui qui a ce roi, secourt celui qui l'a appellé, & s'ils levent cinq mains ensemble, ils ont gagné conjointement : pour lors le principal joueur tire deux jettons des trois qui restent, & l'autre un ; s'il arrive que les jettons soient pairs à un autre coup, ils partagent également. On remet la bête quand celui qui joue & le roi appellé ne font que quatre mains ; le premier met deux jettons & l'autre un ; ils perdent codille s'ils n'en font que trois ; & en ce cas les trois autres joueurs ont droit de tirer chacun un jetton. Les lois du jeu de l'hombre veulent que lorsque les quatre premiers en carte ont passé, le dernier fasse jouer, quelque mauvais jeu qu'il puisse avoir, appellant néanmoins un roi à son aide : supposé qu'on ait gagné codille, & que le nombre des jettons soit de quatre ou cinq, chacun des trois qui ont défendu la poule en tire un, reste par conséquent un ou deux au jeu ; dans le premier cas l'unique est pour celui qui a la plus forte triomphe ; & dans le second, celui qui a la plus haute triomphe des deux autres l'emporte. Qui perd la bête codille le premier coup, les trois qui défendent la poule, & qui gagnent par conséquent, tirent chacun un jetton, & cette bête alors n'est plus que de deux qui vont ensemble pour le coup suivant. S'il arrive que celui qui fait jouer avec le roi appellé fasse la vole, il tire deux jettons de chacun des joueurs, & le roi appellé profite d'un, si le nombre est impair. Il se peut quelquefois qu'il y en ait davantage à partager, à cause des bêtes qui ont été faites, alors celui qui joue & le roi appellé partagent également ces jettons ; & si le nombre est impair, hors le cas de la vole, le restant appartient de droit à celui qui a joué ; tel qui au jeu de l'hombre à cinq entreprend de faire la vole, & ne la fait pas, ne paye pour cela rien aux autres. On fait la bête d'autant de jettons qu'on en auroit tiré si l'on avoit gagné. Il faut pour que les matadors soient payés, qu'ils se trouvent tous trois dans une même main ; & le roi appellé n'y partage point quand ils sont dans la main de l'hombre auquel on doit les payer. Si au contraire c'est le roi appellé qui les a, on les lui paye. Mais si l'hombre & le roi appellé faisoient la bête, celui des deux qui a ses matadors en mains les paye aux autres, excepté à celui qui a perdu avec lui. Cette loi se doit entendre de même lorsqu'ils gagnent ensemble. Le plaisir de ce jeu est de taire le roi appellé ; d'autant que celui qui fait jouer est en peine de celui qui le sera, & donne de l'avantage aux autres joueurs, croyant en procurer à son roi. Il n'y a de peine pour celui qui donne mal, que de refaire & de recommencer la donne comme auparavant.


QUINTIN(Géog. mod.) ville de France dans la haute Bretagne, à trois lieues au sud-ouest de Saint-Brieu, dans un vallon, sur la petite riviere de Goy, avec titre de duché, érigé l'an 1692, en faveur du maréchal de Lorges, qui obtint en 1706 des lettres-patentes, par lesquelles le nom de Quintin est changé en celui de Lorges ; mais malgré les lettres-patentes, le nom de Quintin a subsisté. Le peu de commerce de cette ville consiste en toiles. Long. 14. 45. lat. 48. 27. (D.J.)


QUINTUPLEadj. en Arithmétique, se dit d'une quantité cinq fois plus grande qu'une autre. Ainsi 15 est quintuple de 3, & 3 est sous-quintuple de 15. (E)


QUINZEnom de nombre, (Gramm.) c'est dix unités, plus cinq.

QUINZE, terme de jeu de paume, qui signifie le premier coup gagné d'un jeu.

Quinze se prend aussi en général pour tous les coups de paume. Ainsi on dit gagner un quinze, perdre un quinze, recevoir un quinze d'avantage à tous jeux, &c.

QUINZE, (demi) est un terme de Paumier, qui signifie qu'un joueur donne à l'autre la moitié d'un quinze d'avantage à tous les jeux d'une partie ; mais comme on ne peut pas compter un demi-quinze, le joueur qui reçoit cet avantage compte quinze au premier jeu, & rien au second, & ainsi de suite alternativement.


QUINZIEMES. m. (Arithmétiq.) lorsqu'il s'agit de fraction ou nombre rompu, un quinzieme, trois quinziemes, cinq quinziemes, sept quinziemes, &c. s'écrivent, en chiffres, 1/15, 3/15, 5/15, 7/15. Le quinzieme de 20 sols est 1 s. 4 den. qui est une des parties aliquotes d'une livre tournois. (D.J.)

QUINZIEME, (Jurisprud.) est un ancien tribut ou impôt établi sur chaque ville, bourg, ou autre place dans toute l'étendue du royaume d'Angleterre, & qui se leve non par tête ou sur telle & telle personne, mais en général sur toute la ville ou place. Voyez TRIBUT, TAXE, &c.

On le nommoit ainsi, parce qu'il montoit à la quinzieme partie de ce que la ville avoit été estimée anciennement, ou à la quinzieme partie des meubles qui appartenoient à chaque particulier, suivant une juste estimation.

C'étoit le parlement qui l'imposoit, & chaque place du royaume savoit à quoi le quinzieme montoit pour chaque, parce qu'il étoit toujours le même ; au lieu que le subside qui se leve sur les terres & les biens de chaque particulier, varie nécessairement. Voyez SUBSIDE.

Il paroît que le quinzieme étoit une taxe qu'on levoit sur chaque ville, &c. à proportion des terres & du terrein qui en dépendoit. Cambden fait mention de plusieurs de ces quinziemes dans son Britan. viz. pag. 191. Bath geldabat pro viginti hibis, quando schira geldabat, &c. & pag. 181. Old sarum pro quinquaginta hidis geldabat, &c. Ces prix étoient fixés suivant le grand terrier d'Angleterre ; mais dans la suite on entendit par quinzieme une taxe imposée sur les biens & châteaux seulement, & non sur les terres. Cette taxe fut accordée par le dix-huitieme parlement d'Edouard I. savoir : Computus quintae decimae regi, ann. 18, per archiepiscopos, episcopos, abbates, priores, comites, barones, & omnes alios de regno, de omnibus bonis mobilibus concessae. La ville de Londres paya cette année là pour le quinzieme 2860 liv. 13 s. 8 d. & l'abbé de Saint-Edmond, 666 liv. 13 s. 4 d. pour sa part & par composition ; au moyen de quoi tous les biens temporels de son district furent déchargés du quinzieme.

Cet impôt se levoit par le moyen de deux assesseurs établis par le roi dans chaque contrée, & douze autres par chaque cent places, qui étoient envoyés pour faire l'estimation juste de tous les biens personnels de chacun sujet au quinzieme. Dictionn. de Chambers.

QUINZIEME, intervalle de musique. Voyez DOUBLE OCTAVE. (S)


QUIOCOS. m. (Hist. mod. Culte) c'est le nom que les sauvages de la Virginie donnent à leur principale idole ; cependant quelques-uns la désignent sous le nom d'Okos ou de Kiousa. Cette idole n'est qu'un assemblage de pieces de bois, que l'on pare les jours de fête, & que les prêtres ont soin de placer dans un lieu obscur au fond du quiocosan ou temple, où il n'est point permis au peuple de pénétrer ; là par le moyen de cordes ils impriment différens mouvemens à cette statue informe, dont ils se servent pour tromper la crédulité des sauvages. Ils admettent un Dieu infiniment bon, & à qui par conséquent ils jugent qu'il est inutile de rendre de culte ; leurs hommages sont uniquement réservés à un esprit malfaisant qui réside dans l'air, dans le tonnerre & dans les tempêtes ; il s'occupe sans cesse à défaire le bien que le Dieu de la bonté leur a fait ; c'est cet esprit malin que les Virginiens adorent sous le nom de Quioco ; ils lui offrent les prémices de toutes les plantes, animaux & poissons ; on les accuse même de lui sacrifier de jeunes garçons de douze ou quinze ans, que l'on a eu soin de peindre de blanc, & que l'on assomme de coups de bâtons pour plaire à l'idole, au milieu des pleurs & des gémissemens de leurs meres, qui sont présentes à ces barbares cérémonies. Les Virginiens élevent encore des pyramides de pierres qu'ils peignent de différentes couleurs, & auxquelles ils rendent une espece de culte, comme à des emblèmes de la durée & de l'immutabilité de la divinité.


QUIOSSAGES. m. terme de Tanneur, qui se dit des cuirs qui ont passé sous la quiosse. Le quiossage des cuirs ne se fait qu'après qu'ils ont été lavés & écharnés à la riviere. Les mégissiers se servent du même terme à l'égard des peaux qu'ils préparent. Savary.


QUIOSSES. f. terme de Tanneur ; c'est une maniere de pierre à aiguiser, avec laquelle on quiosse le cuir, c'est-à-dire avec laquelle on frotte le cuir, pour en faire sortir l'ordure.


QUIOSSERQUIOSSER


QUIPOSS. m. terme de relation ; noeuds de laine qui servoient, & servent encore, selon le rapport de M. Frezier, aux Indiens de l'Amérique pour tenir un compte de leurs affaires & de leurs denrées.

Pour comprendre cet usage, il faut savoir que tous les Indiens lors de la découverte de l'Amérique par les Espagnols, avoient des cordes de coton d'une certaine grosseur, auxquelles cordes ils attachoient dans l'occasion d'autres petits cordons, pour se rappeller par le nombre, par la variété des couleurs de ces cordons, & par des noeuds placés de distance en distance, les différentes choses dont ils vouloient se ressouvenir. Voilà ce qu'ils nommoient des quipos, ils leur servoient d'écritures & d'annales mémoratives.

L'ingénieuse Zilia a bien sçu tirer parti de cette idée ; voici comme elle s'exprime dans ses lettres à son cher Aza : " Au milieu de mon bouleversement, lui dit-elle, je ne sais par quel hasard j'ai conservé mes quipos. Je les possede, mon cher Aza, c'est aujourd'hui le seul trésor de mon coeur, puisqu'il servira d'interprete à ton amour comme au mien. Les mêmes noeuds qui t'apprendront mon existence, en changeant de forme entre tes mains m'instruiront de ton sort. Hélas ! par quelle voie pourrai-je les faire passer jusqu'à toi ? par quelle adresse pourront-ils m'être rendus ? je l'ignore encore ! Mais le même sentiment qui nous fit inventer leur usage, nous suggérera les moyens de tromper nos tyrans. J'emploie toujours dans cette espérance à nouer mes quipos, autant de tems que ma foiblesse me le permet. Ces noeuds qui frappent mes sens, semblent donner plus d'existence à mes discours. La sorte de ressemblance que j'imagine qu'ils ont avec les paroles, me fait une illusion qui trompe ma douleur.

Mon cher Aza, lui dit-elle dans une autre lettre, je me suis hâtée de remplir mes quipos, & de les bien nouer, pour rendre mes sentimens éternels. Que l'arbre de la vertu répande à jamais son ombre sur la famille du pieux citoyen qui a reçu sous ma fenêtre le mystérieux tissu de mes pensées, & qui l'a remis dans tes mains ! Que Pachamac, plus puissant que le soleil, prolonge ses années, en récompense de son adresse à faire passer jusqu'à moi les plaisirs divins avec ta réponse !

Les trésors de l'amour me sont ouverts ; j'y puise une joie délicieuse dont mon ame s'enivre. En dénouant les secrets de ton coeur, le mien se baigne dans une mer parfumée. Tu vis, & les chaînes qui devoient nous unir ne sont pas rompues ! Tant de bonheur étoit l'objet de mes desirs, & non celui de mes espérances ! (D.J.) "


QUIPROQUOS. m. (Gramm.) terme purement latin, mais qu'on emploie en françois pour signifier la méprise d'une personne qui a donné, pris, fait ou dit une chose pour une autre.

Ce terme se dit particulierement de la méprise d'un apothicaire qui délivre à une personne un remede préparé pour un autre, ou qui dans la composition d'un médicament, emploie une drogue pour une autre. Voyez ORDONNANCE.

On le dit aussi par extension de toutes les fautes ou méprises qui se commettent en Médecine, soit dans l'ordonnance, la préparation, ou l'application des remedes.

Un médecin du nord avoue franchement dans une these imprimée que les quiproquo sont fréquens en Médecine, & il en distingue plusieurs sortes ; les uns regardent le traitement, les autres le sujet ; d'autres la forme ou les effets. Les premiers sont ceux que fait le médecin ; ceux de la seconde espece viennent du malade, & les derniers de l'inadvertance de l'apothicaire.

Le même auteur parle aussi des quiproquo des Chirurgiens, de ceux des Cuisiniers, & de ceux des nourrices. Il remarque qu'il y a des quiproquo salutaires, qu'il y en a de dangereux, & d'autres indifférens.

On dit proverbialement, Dieu nous préserve d'un quiproquo.


QUIRLA TERRE DE (Géog. mod.) nom donné mal-à-propos par quelques géographes au pays des terres australes, découvert par Ferdinand de Quiros en 1606. Cette terre qu'il falloit du moins nommer Quiros, pour faire honneur à celui qui la découvrit, n'est autre chose que la terre australe du S. Esprit, située au 15 deg. de latit. méridionale. (D.J.)


QUIRATS. m. (poids étranger) petit poids dont on se sert au Caire & dans le reste de l'Egypte. La dragme vaut seize quirats, & le quirat quatre grains. (D.J.)


QUIRICO SAN(Géog. mod.) bourg ou plutôt village d'Italie, en Toscane dans le Siennois, entre Radico-fani & Sienne dont il est à 20 milles. On trouve dans ce village quelques ruines d'antiquités romaines. (D.J.)


QUIRIEU(Géog. mod.) petite ville de France dans le bas Dauphiné au Viennois, près du Rhône, à 7 lieues de Lyon. Long. 23. lat. 45. 46. (D.J.)


QUIRIMBA(Géog. mod.) îles d'Afrique sur la côte orientale de l'Ethiopie, au Zanguebar. Elles prennent le nom de la plus grande, appartiennent aux Portugais, & sont en général dépeuplées quoique fertiles en gras pâturages & en fruits, comme dattes, oranges, citrons, raisins, &c. Les îles quirimba s'étendent depuis le 10 deg. jusqu'au 12. l'espace de 2 deg. en latitude méridionale. (D.J.)


QUIRINACIUMQUIRINACIUM


QUIRINAL MONT(Topog. de Rome anc.) collis Quirini. Le mont Quirinal étoit à une des extrêmités de Rome du côté de la porte colline. On l'appelle aujourd'hui monte cavallo, à cause de deux chevaux de marbre qu'on y voit & qu'on dit être de Phidias & de Praxitèle. (D.J.)


QUIRINALESS. f. (Antiq. Rom.) Quirinalia ; fête instituée par Numa Pompilius en l'honneur de Romulus après son apothéose sous le nom de Quirinus. Cette fête se célébroit le treize avant les calendes de Mars. On l'appelloit la fête des foux, parce qu'en ce jour ceux qui n'avoient pas pu faire la solemnité des Fornacales, ou qui en avoient ignoré le jour, sacrifioient à Quirinus pour expier leur faute d'ignorance. (D.J.)


QUIRINUS(Antiq. rom. & Mythol.) ce nom vient de Cures capitale des Sabins ; on le donna à Romulus après le traité d'union fait entre les deux peuples, & on le lui consacra dans la suite. Numa Pompilius lui assigna sous ce nom un culte particulier, lui dédia un temple sur le mont Quirinal, institua les fêtes quirinales en son honneur, & créa un grand pontife appellé Flamen Quirinalis, lequel devoit être tiré du corps des patriciens pour présider au culte du nouveau dieu. Voici maintenant ce qui procura l'apothéose à Romulus.

Comme il voulut exercer un empire violent sur ses sujets, quelques mécontens le tuerent en plein sénat, & ce corps illustre pour éviter le soupçon qu'il avoit eu part à ce crime, mit au rang des dieux le monarque assassiné. Numa son successeur ratifia ce système politique ; il lui fit bâtir un temple dans le lieu où est aujourd'hui l'église de S. Théodore. On plaça dans ce temple une louve de bronze allaitant Remus & Romulus ; cette louve est à présent au capitole dans le palais des conservateurs. Dans la suite on bâtit à Romulus un second temple situé dans la vallée qui est au-dessous de l'église de S. Vital.

Ce second temple fut érigé l'an de Rome 460. Tite-Live & Denis d'Halycarnasse en ont fait l'histoire intéressante ; ils nous ont appris que pendant que Rome commençoit à soupçonner les patriciens d'avoir assassiné Romulus, un nommé Julius Proculus s'avança au milieu de la multitude & parla ainsi : " Romulus, fondateur de cette ville, Romains, dès le point du jour est descendu du ciel, & s'est présenté à mes yeux ; dans l'étonnement & le respect que m'a causé sa présence, je l'ai prié qu'il me fût permis de le contempler à loisir. Allez, m'a-t-il répondu, annoncez à l'univers que la volonté des dieux est que Rome soit la premiere ville du monde : que les Romains ayent soin de se distinguer dans le métier de la guerre ; qu'ils sachent de plus, & qu'ils en instruisent leur postérité, que rien ne sera capable de résister à la force de leurs armes : à ces mots il s'est élevé dans les airs ". Ce discours fit sur le peuple romain l'impression désirée ; il ne douta plus de la divinité de Romulus & du culte qu'il falloit lui rendre. (D.J.)


QUIRIS(Mythol.) Junon fut ainsi nommée par les nouvelles épouses dans le tems qu'elles se mettoient sous sa protection. On dit qu'une des cérémonies du mariage étoit de peigner la nouvelle mariée avec une espece de peigne qui s'appelloit Curis ; mais si l'origine du mot est douteuse, il ne l'est pas que Junon présidoit au mariage & qu'elle en étoit la déesse tutélaire. (D.J.)


QUIRITESS. m. (Antiq. Rom.) nom que prirent les Romains dans l'accord que passerent Romulus & Tatius, où il fut arrêté que l'un & l'autre regneroient dans Rome avec un pouvoir égal. La ville retint le nom de Romulus son fondateur, le peuple reçut le nom de Quirites, que portoient les habitans de Cures capitale de l'état sabin.

Les auteurs sont partagés sur l'étymologie du nom de Cures & de Quirites. Quiris, en langue sabine, signifie tout à la fois un javelot & une divinité guerriere armée d'un javelot. Les uns veulent que ce fut le dieu Mars, les autres un dieu particulier qui présidoit à la guerre ; soit donc que le dieu eût fait ainsi nommer le javelot, soit que le javelot eût donné son nom au dieu même, le nom Quiris fut honoré à Rome, jusqu'à-ce que Romulus ayant disparu aux yeux des Romains, reçut les honneurs divins sous le nom de Quirinus, & prit la place du dieu Quiris. Ovide, Lib. II. de fast. a lui-même touché les diverses opinions sur le mot de Cures & de Quiris.

Sive quod hasta Quiris priscis est dicta Sabinis ;

Bellicus à telo venit ad astra Deus.

Sive suo regi nomen posuere Quirites.

Seu quia Romanis junxerat ille Cures.

" Soit que les anciens Sabins ayant donné au javelot le nom de Quiris, le dieu de la guerre ait pris le sien du javelot ; soit que les Quirites ayent ainsi nommé leur roi ; soit que ce nom vienne de celui qui joignit les Quirites aux Romains. "

Au reste je trouve quiris au singulier dans Horace & dans Perse, pour désigner un citoyen romain. (D.J.)


QUISAMou QUISSAMA, (Géog. mod.) province maritime d'Afrique, le long du bord méridional de la Coanza ; elle fait partie du royaume d'Angola, appartient aux Portugais & abonde en mines de sel, cire & miel. Sa latitude prise le long de la mer commence au 9. d. 25. & finit au 10 d. 50. Les Portugais en ont fait un gouvernement sous le nom de capitainerie selon leur coutume. (D.J.)


QUISNA(Géog. mod.) riviere de la presqu'île de l'Inde en deçà du Gange, au royaume de Golconde ; elle se rend dans le golphe de Bengale au midi de Masulipatan. (D.J.)


QUITEOA(Géog. mod.) ville d'Afrique aux états du roi de Maroc, dans la province de Dras. Les habitans sont Béréberes. Il y a quantité de dattes dans les environs, & on en tire du bon indigo. Long. 12. 18. latit. 28. 7. (D.J.)


QUITO(Géog. mod.) gouvernement de l'Amérique méridionale, au Pérou. Il a 70 lieues de long sur 30 de large. Ses bornes sont le Popayan au nord, l'Audience de Lima au midi, le pays des Amazones au levant, & la mer du sud au couchant. Sa température est plus froide que chaude ; le pays est assez peuplé de bourgs & de villages, habités par des espagnols & par des indiens. Il y a dans ce gouvernement deux îles : celle de la Plata & celle de la Puna. On divise le pays en trois parties ; le Quito proprement dit, los-Quixos, & los-Paçamores. La capitale de toute la province est Quito, que les Espagnols appellent santo Francisco del Quito.

Cette ville a des fortifications, un grand nombre de communautés religieuses, avec deux colleges. Elle est située dans une vallée, dont le terroir est sec & sablonneux ; elle est habitée par un mêlange d'espagnols, de portugais & d'indiens, au nombre d'environ trente mille ames. Son évêque est suffragant de Lima. Quito est aussi le siege du président de l'audience, & il est en même tems gouverneur de la province.

Les denrées sont en abondance & à bas prix dans cette ville ; mais les marchandises qu'on y apporte d'Europe, sont d'un prix excessif. Ces marchandises viennent par la mer du sud, remontent la riviere de Guayaquil, & se transportent ensuite par chariots. Long. 229. 20'. latit. mérid. 15' 33''. (D.J.)


QUITTANCES. f. (Jurisprud.) est un acte par lequel le créancier tient son débiteur quitte de quelque chose qu'il lui devoit soit en argent ou en grains, volailles ou autres prestations que le débiteur étoit obligé de faire.

Une quittance suppose ordinairement le payement, cependant le créancier peut valablement donner quittance sans avoir reçu ; il peut, sans exprimer aucune cause, déclarer qu'il tient son débiteur quitte de ce qu'il lui devoit ; en quoi la quittance differe de l'obligation, laquelle est nulle s'il n'y a une cause exprimée.

Le terme de quittance semble annoncer que le créancier tient son débiteur entierement quitte ; il y a cependant des quittances qui ne sont qu'à compte, & d'autres qui sont finales.

Une quittance peut être donnée sous seing privé, ou pardevant notaire. Celle qui est sous seing privé, libere aussi bien que celle qui est devant notaire, si ce n'est que la quittance devant notaire est authentique, & fait plus pleinement foi, surtout lorsque le payement est fait à la vue des notaires & témoins.

Comme la quittance reste entre les mains du débiteur, & que le créancier a quelquefois intérêt de justifier le payement qui lui a été fait, soit pour empêcher une prescription ou pour quelqu'autre cause ; en ce cas, si la quittance est sous seing privé, le créancier peut se faire donner une contre-quittance, c'est-à-dire, un écrit par lequel le débiteur reconnoit qu'il a payé ; si la quittance est devant notaire, le créancier peut en faire délivrer une expédition, & s'il n'y en a pas de minutes, on la peut faire en brevet double.

Les quittances des trois dernieres années d'arrérages d'une rente emportent la libération des précédentes années, quand même on n'en rapporteroit pas de quittance.

La loi 14, au code de non numeratâ pecuniâ, ne donne au créancier que 30 jours pour se plaindre du défaut de numération du contenu en la quittance.

La novelle 100 donne dix ans pour proposer l'exception non numeratae pecuniae contre la quittance de dot donnée par le mari.

Cette exception est reçue dans les parlemens de droit écrit & dans quelques coutumes ; mais dans l'usage commun elle n'a pas lieu. Voyez DOT & EXCEPTION NON NUMERATAE PECUNIAE.

On peut pendant 30 ans obliger un adjudicataire ou ses héritiers de rapporter la quittance de consignation.

Pour qu'une quittance soit valable, il faut qu'elle soit donnée par le véritable créancier, & qui ait droit de recevoir, ou par son fondé de procuration.

Un mineur ne peut donner quittance d'un remboursement, ou du prix de la vente d'un fond, sans être assisté de son tuteur ou curateur.

Une femme mariée ne peut en pays coutumier donner quittance sans être autorisée de son mari, à moins qu'elle ne soit marchande publique, ou qu'elle ne soit séparée de biens d'avec son mari, & qu'il ne soit question que de sommes mobiliaires ; mais quand il s'agit de dettes immobiliaires, la femme, quoique séparée, ne peut donner quittance valable, sans être autorisée de son mari, ou par justice à son refus.

Toute quittance donnée en fraude d'un tiers, ou au préjudice de quelque opposition faite entre les mains du débiteur, est nulle.

Il faut que la quittance soit signée du créancier, quand il sait & peut signer ; autrement il faut qu'elle soit donnée devant notaire ; une quittance sous seing privé non signée ne feroit pas une preuve suffisante du payement, mais le débiteur seroit admis à le prouver par témoins, s'il s'agissoit d'une somme audessous de 100 liv.

L'effet d'une quittance est d'éteindre l'obligation, tellement que le créancier ne peut pas obliger le débiteur d'affirmer ; cependant s'il y avoit des faits de dol & de violence allégués de la part du créancier, il dépend de la prudence du juge d'en admettre la preuve, & d'ordonner l'affirmation. Voyez OBLIGATION, REMBOURSEMENT, INSCRIPTION DE FAUX. (A)

QUITTANCE DE FINANCE est celle que le préposé du roi donne pour les deniers qu'un particulier paie pour acquérir du roi une rente, un office, un domaine. Voyez DOMAINE, OFFICE, RENTE. (A)


QUITTANCÉadj. (Jurisprud.) se dit de quelque acte obligatoire, comme une promesse ou billet sur lequel on a donné quittance, soit au dos ou au bas du billet. Voyez BILLET, OBLIGATION, PROMESSE, QUITTANCE. (A)


QUITTANCER(Commerce) donner une quittance, un reçu, un acquit au pié ou au dos de l'acte, par lequel le débiteur étoit obligé à son créancier. On quittance des mémoires & des parties arrêtées de marchandises fournies, lorsqu'on en reçoit le payement. Les obligations & autres actes obligatoires qui ont minute, se quittancent au dos de la minute, & la grosse se rend à ceux qui les acquitent. Quand la quittance se donne séparément, & non sur l'acte qui obligeoit le débiteur, on dit simplement donner quittance. Dictionn. de commerce.


QUITTE(Commerce) celui qui ne doit rien, qui a payé tout ce qu'il doit. Je vous envoye quinze cent livres pour rester quitte avec vous. Dictionn. de Commerce, tom. III. pag. 1039.

QUITTE, (Jurisprud.) se dit de celui qui est libéré de quelque charge ou dette. Le créancier, en recevant son dû, tient le débiteur quitte. Voyez QUITTANCE.

Dans les contrats de vente le vendeur déclare ordinairement l'héritage franc & quitte du passé jusqu'à ce jour ; c'est-à-dire, qu'il n'est dû aucuns arrérages de cens, rentes ou autres charges. Voyez ARRERAGES, CENS, CHARGES, FRANC ET QUITTE.

Un homme qui se marie, ou qui s'oblige, se déclare aussi quelquefois lui-même franc & quitte : ce qui signifie qu'il ne doit rien. (A)


QUITTEMENTS. m. (Jurisprud.) signifie quelquefois décharge, quelquefois il signifie délaissement, comme le délaissement d'un héritage. Voyez DELAISSEMENT, DEGUERPISSEMENT, DESISTEMENT. (A)


QUITTERv. a. (Gram.) il se dit pour se separer de quelqu'un ou de quelque chose ; il a quitté le pays ; je l'ai quitté à moitié chemin ; il a quitté sa femme. Pour se décharger d'une dette ; ce testateur les a quittés de ce qu'ils lui devoient. Pour exempter ou rejetter ; je vous quitte de vos complimens ; je vous quitte de vos visites. Pour se désister, se départir ; j'ai quitté prise ; il a quitté ce dessein. Pour céder au jeu ; je quitte ; le pari est trop fort pour moi. Pour abandonner aux autres ; j'en quitte ma part aux chiens.

QUITTER, donner quittance, ou déclarer qu'on ne demandera rien d'une dette. Je l'ai quitté pour la moitié de ce qu'il me devoit. Dictionn. de Commerce, ibidem.

QUITTER LES ETRIERS, (Maréchal.) c'est ôter ses piés de dedans de gré ou de force ; car lorsqu'un cheval emporte le cavalier, celui-ci doit quitter les étriers, ou pour se jetter à terre, ou afin que si le cheval tombe, il n'ait pas les piés engagés dans les étriers : ce qui est fort dangereux. Le peu de fermeté du cavalier lui fait souvent quitter les étriers, lorsque son cheval trote ou galope.


QUITTUou QUICTUS, adj. est un terme de la basse latinité, qui signifie quitte. Il est usité à la chambre des comptes du roi, & vient de l'ancien usage de la chambre, du tems que l'on y faisoit les expéditions en latin ; on mettoit à la fin du dernier compte, quictus hic receptor ; on se sert encore à la chambre de ce terme quittus, pour exprimer la décharge finale que l'on donne au comptable. Aucun officier comptable n'est reçu à résigner son office, qu'il n'ait son quittus. Voyez COQUILLE sur la coutume de Nivernois, ch. xx. art. 2. (A)


QUIXOS LOS(Géog. mod.) contrée de l'Amérique méridionale, au Pérou, dans l'audience de Quito, au nord de los-Paçamores. Le lieu principal de cette province s'appelle Baeça, & le gouverneur y réside. La partie orientale de ce canton est nommée le pays de la cannelle, parce qu'il abonde en arbres de la grandeur d'un olivier, & qui produisent de petites capsules avec leurs fleurs, qui étant broyées, approchent de la cannelle pour le goût & pour l'odeur. (D.J.)


QUIZA(Géog. anc.) ville de la Mauritanie césariense. Antonin, qui en fait un municipe, la met entre Portus magnus & Arsenaria, à quarante milles pas de l'une & de l'autre. Quelques savans soupçonnent que c'est cette ville qui est nommée quidiensis dans les notices ecclésiastiques. On croit que le nom moderne est Aresgol. (D.J.)


QUIZOMAINTHIS. m. (Hist. nat.) c'est le nom que les habitans de l'île de Madagascar donnent à une espece de résine noire comme de la poix, dont ils se servent pour fixer leurs dards, & les attacher à leurs manches. Ils ont une autre résine noire appellée hingue qui est très-aromatique.


QUO-WARRANTO(Hist. d'Angleterre) pendant les troubles des regnes de Jean-sans-Terre & d'Henri III. plusieurs personnes s'étoient approprié des terres qui ne leur appartenoient pas ; la couronne même avoit souffert de ce désordre. Pour remédier à ce mal, & rendre à chacun ce qui lui étoit dû, le parlement fit un acte en 1279, sous Edouard, qui étoit très-juste en lui-même. Il portoit que ceux qui possédoient des terres contestées, seroient obligés de faire voir comment ils en avoient acquis la possession, & de produire leur titre devant les juges pour y être examiné. Ce statut reçut le nom de quo-warranto, du mot Anglois warrant, qui signifie garantie, c'est-à-dire un acte qui sert de fondement ou de garantie à la possession : ainsi le quo-warranto signifia depuis lors un ordre de produire le titre en vertu duquel on jouit de tel ou tel privilege. (D.J.)


QUOCOLOS. m. (Verrerie) c'est la même pierre que Ferrand imperatus décrit, l. XXIV. c. xvj. sous le nom de cuogolo. Les François appellent ordinairement cette pierre pierre à verre, parce qu'elle sert à faire le verre.

Le quocolo, ou pour mieux dire, cuogolo, ressemble au marbre blanc ; il a quelque transparence, la dureté du caillou, fait feu, & ne se calcine point au fourneau. Cette pierre tire sur le verd clair, comme la serpentine. On la trouve en Toscane & dans plusieurs autres lieux d'Italie ; on la ramasse au fond des rivieres & des torrens ; elle est enveloppée de talc. Jettée au feu elle perd sa transparence, devient plus blanche & plus légere ; & si l'on pousse le feu bien fort, elle se vitrifie ; c'est pour cela qu'on l'emploie dans quelques verreries. (D.J.)


QUODLIBETAIRou QUODLIBÉTIQUE QUESTION, terme usité parmi les philosophes & les théologiens scholastiques du douzieme & du treizieme siecle, pour signifier une thèse ou un problème qu'ils proposoient à discuter, plutôt par curiosité & par forme d'exercice, que pour approfondir des matieres utiles, & parvenir à l'éclaircissement de quelque vérité. Ces questions étoient ordinairement vagues, générales, conçues toutefois en termes scientifiques. On y accumuloit beaucoup d'argumens pour démontrer, ou une subtilité puérile, ou une chose d'ailleurs incontestable ; & comme il n'y avoit point de matiere, quelque stérile ou quelque légere qu'elle fût, sur laquelle à l'aide des lieux communs on ne pût discourir, on nomma ces questions quodlibétaires du mot latin quodlibet, tout ce qu'il vous plaira, parce qu'en effet il n'étoit rien qu'on ne se crût capable de traiter par cette méthode.

Quelques-uns prétendent que du latin quodlibet appliqué à ces questions impertinentes, on a fait le mot quolibet, dont on se sert encore pour signifier une plaisanterie basse & ridicule ; mais ces deux choses paroissent avoir assez peu d'analogie, puisque dans les questions quodlibétaires on traitoit à la vérité la plûpart du tems des bagatelles, mais dans un style grave & sérieux.


QUOJAQUOJA


QUOLIBETS. m. (Langage) ces sortes d'équivoques & de pointes qu'on emploie trop communément dans les conversations, me paroissent encore plus insupportables que les proverbes ; cependant on croit montrer beaucoup d'esprit, quand pour désigner une personne qui est contrefaite dans sa taille, on dit, la fortune lui a tourné le dos. Le petit P. André prêchant un jour devant un grand prince, prit pour texte omnis caro foenum, & commença son sermon par s'écrier : foin de vous, monseigneur, foin de moi, foin de tous les hommes, omnis caro faenum. Si un diseur de bons mots est méprisable, que sera-ce qu'un diseur de méchans mots, un quolibétiste ? L'honnête homme doit écarter ce jargon qui sent la lie du peuple & la mauvaise éducation. Quand il n'y auroit pas de la facilité à trouver des quolibets, rien n'est plus ridicule que leur usage. Une fadaise difficile ne laisse pas d'être une fadaise ; mais ces quolibets, ces équivoques, ces fades allusions, dont on trouve des magasins tout faits, ne servent qu'à confondre ceux qui s'y amusent avec les savetiers, qui d'ordinaire sont les rieurs de leur voisinage. (D.J.)


QUOTou QUOTE-PART, (Jurisprud.) du latin quota pars, signifie la part & portion que chacun doit supporter de quelque charge ; on dit & on écrit quote-part des dettes ; en matiere de tailles, on dit & on écrit quote simplement, ce qui vient aussi par corruption de quote-part. (A)


QUOTIDIENJOURNALIER, (Synonymes) ces deux mots ont, selon leur étymologie, la même signification, mais ils ne s'emploient pas indifféremment. On dit, une fievre quotidienne, & ce seroit mal dit, une fievre journaliere ; il semble que notre pain quotidien soit un mot consacré dans l'oraison dominicale ; notre pain de chaque jour, comme parlent quelques traducteurs du Nouveau Testament, est une phrase que l'usage n'a pas adoptée. Pain journalier ne se dit pas mieux que fievre journaliere ; mais on dit, le mouvement journalier du ciel ; la révolution journaliere du premier mobile ; & non pas le mouvement quotidien, la révolution quotidienne ; on dit encore, l'expérience journaliere : ce sont des bisarreries de l'usage. Homme journalier, & armes journalieres se disent, mais ce n'est qu'au figuré, & on ne regarde ici journalier que dans le propre.


QUOTIDIENNEFIEVRE, (Médecine) espece de fievre intermittente qui vient, cesse tous les jours, & est suivie de quelques heures d'intermission. Elle est beaucoup moins fréquente que la tierce & la quarte ; dans cette fievre la nature tâche de se délivrer elle-même du poids d'une matiere morbifique qui lui est incommode, & qui se trouve communément exister dans les premieres voies.

Ses différences d'avec d'autres fievres. Il ne faut pas confondre la fievre quotidienne intermittente avec la quotidienne continue. Dans cette derniere la chaleur, la langueur, le dégoût, la vîtesse & la foiblesse du pouls, durent jusqu'à-ce qu'elle cesse : quand elle persiste long-tems, elle épuise les forces du malade.

La fievre quotidienne intermittente, est encore différente de la fievre quotidienne catharreuse, laquelle est accompagnée de fluxion, & est plus ou moins maligne ; quand elle se trouve de ce dernier caractere, elle détruit les forces, & ne fait que diminuer au-lieu de cesser entierement.

La fievre quotidienne intermittente vraie, differe aussi des autres fievres intermittentes ; car lorsque la fievre tierce devient double de simple qu'elle étoit auparavant, l'accès revient aussi tous les jours, mais les tems de son attaque ne répondent point alternativement les uns aux autres, & comme ses causes sont différentes, les remedes doivent l'être aussi.

Si la fievre quarte revient tous les jours, on l'appelle triple, & son accès ne vient pas tous les jours à la même heure, mais tous les quatre jours, le période de son accession est le même ; comme les causes qui l'occasionnent sont différentes, on doit aussi employer différentes méthodes de traitement.

On distingue enfin la fievre quotidienne intermittente vraie, de la fievre lente, en ce que cette derniere vient d'ordinaire vers le soir après qu'on a mangé, sans aucun frisson, & qu'elle est accompagnée d'une chaleur dans les paumes de la main, & dans les plantes des piés. Elle est aussi beaucoup plus violente dans la nuit que dans le jour ; elle provoque la sueur, & diminue le matin sans cesser tout-à-fait.

Ses signes. La fievre quotidienne a les symptomes suivans. Elle commence ordinairement le matin par le froid & le frisson sans aucun tremblement. Il survient ensuite une légere chaleur ; le pouls qui étoit auparavant débile augmente ; la sueur succede, mais peu abondante ; l'accès cesse au bout d'environ huit heures, & revient le jour suivant à-peu-près à la même heure. Cette fievre est quelquefois accompagnée de dégoûts, de maux de tête, de cardialgie, de vomissemens, ou d'un flux de ventre : l'urine n'est point enflammée, mais crue & d'un jaune pâle.

On appelle fievre quotidienne bâtarde erratique ou anomale celle qui ne conserve point de période fixe, mais qui paroît dans différens tems indéterminés. Cette derniere fievre irréguliere est quelquefois épidémique, sur-tout lorsque les saisons ont été long-tems dérangées.

Ses causes. La principale cause de la fievre quotidienne vraie semble être une matiere visqueuse logée dans les premieres voies, & qui est souvent accompagnée de l'épaississement du sang dans la veine-porte ; les causes occasionnelles sont une nourriture grossiere & épaisse, une vie trop sédentaire, mélancholique, & en genéral toutes les causes de la fievre tierce ; sa cause formelle consiste dans l'affection spasmodique du système nerveux.

Les premieres voies, savoir le ventricule, le duodenum, le jejunum, sont le siége où réside la matiere viciée qui produit cette fievre ; de-là vient qu'elle est ordinairement accompagnée de vents, de dégoûts, de nausées, d'envies de vomir, & d'inquiétudes autour de la région des intestins. Sa durée est longue, quand le vice qui l'occasionne est considérable & enraciné. Elle cesse souvent d'elle-même sans le secours de la nature, au moyen des déjections, ou par l'art qui met en usage les émétiques & les purgatifs joints aux stomachiques.

Ses prognostics. La fievre quotidienne légitime, & produite par l'atonie des visceres, est de longue durée ; celle au contraire qui est erratique se guérit aisément. La même fievre qui succede à d'autres fievres intermittentes, & sur-tout à la fievre quarte, est dangereuse, suivant la remarque de Celse.

La fievre quotidienne qui laisse une intermission totale de l'accès, prend au contraire un aspect favorable. Si au commencement du paroxysme, il arrive quelque déjection par haut ou par bas, c'est bonne marque, quand les forces sont entieres. Pareillement la sueur qui survient sur le déclin de l'accès, de même qu'une décharge copieuse d'urine avec sédiment après le paroxysme, concourt à annoncer la promte fin de la maladie.

Sa méthode curative. Elle consiste, 1°. à chasser des premieres voies, par les émonctoires convenables, les humeurs nuisibles qui s'y sont amassées, après les avoir préparées ; 2°. fortifier les visceres qui sont dans l'atonie ; 3°. rétablir la circulation dans les visceres du bas-ventre, qui sont les organes destinés à l'élaboration du chyle.

On remplit la premiere intention par des remedes incisifs & détersifs, ainsi que par les sels neutres. Après avoir évacué les impuretés contenues dans les premieres voies, on fortifie le ton des visceres par des pilules balsamiques ; ensuite on emploie les élixirs amers mêlés avec des chalybés. On varie l'usage de ces remedes suivant le tempérament, l'âge, la constitution, le sexe, & les causes de la maladie. On provoque un peu la sueur qui est sur le point de paroître, par le repos, & des boissons chaudes un peu corroborantes.

Observations pratiques. Le traitement de ces fievres demande de la circonspection pour les empêcher de dégénérer en mal chronique. Il faut sur-tout s'abstenir de tout purgatif, sudorifique, & émétique violent. On doit préparer & disposer la matiere peccante à un flux salutaire, en employant de légers purgatifs ou émétiques avant le retour de l'accès. Si cette fievre est accompagnée d'enflure d'estomac, il faut raffermir cette partie par des épithèmes corroborans appliqués sur la région de l'épigastre. Dans les quotidiennes erratiques & autres, après l'emploi des remedes ci-dessus indiqués, l'électuaire de quinquina & de cascarille est d'un excellent usage. La saignée n'est indiquée que dans la pléthore occasionnée par la suppression du flux menstruel ou hémorrhoïdal, & alors on doit ouvrir la veine dans le commencement de la maladie. (D.J.)


QUOTIENTc'est, en Arithmétique, le nombre qui résulte de la division d'un nombre par un autre, & qui montre combien de fois le plus petit est contenu dans le plus grand, ou plutôt combien de fois le diviseur est contenu dans le dividende. Voyez DIVISION.

Ce mot est formé du latin quoties, combien de fois. Dans la division l'unité est au quotient, comme le diviseur est au dividende ; ainsi le quotient de 12 divisé par 3 est 4 ; voici comment on peut les disposer dans une opération.

Voyez DIVISION. Chambers. (E)


QUOTISATIONS. f. (Jurisprud.) que l'on écrit aussi quottisation, signifie l'imposition de quelqu'un pour raison d'une somme dont il doit payer sa quote-part, comme la quotisation au rôle des tailles. Voyez ROLE, TAILLES, IMPOSITION, SUBSIDES, &c.


QUOTITÉS. f. (Jurisprud.) signifie la proportion dans laquelle on doit regler quelque chose, comme à la moitié, au tiers, ou au quart d'une certaine somme ou d'une certaine quantité de grains, ou autre espece. Voyez QUOTE. (A)


QUOTTERv. n. terme d'Horlogerie, se dit en parlant d'un engrenage, lorsque la dent d'une roue rencontrant l'aîle du pignon avant la ligne des centres, celle-ci touche par sa pointe la face de la dent comme en butant, effet d'où il résulte un frottement très-considérable ; on dit alors que cette dent quotte, & comme dans un engrenage cela n'arrive quelquefois qu'à certaines dents, on dit dans ce cas qu'il y a des quottemens dans cet engrenage. Voyez DENT, ENGRENAGE, ENGRENER, &c.


QUSONFOOS. m. (Ornithol.) oiseau du royaume de Quoja, pays des Negres. Il est noir & gros à-peu-près comme un corbeau. Il fait son nid de terre & sur le haut des arbres ; on dit que quand les oeufs sont prêts à éclorre, la femelle s'arrache les plumes du ventre, afin de coucher ses petits dessus. (D.J.)